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28/07/2014 | FRANCE | N°13BX03044

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 28 juillet 2014, 13BX03044


Vu la requête enregistrée le 13 novembre 2013, présentée pour M.D..., demeurant..., par Me A...;

M. D...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301581 du 10 octobre 2013 du tribunal administratif de Toulouse qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 mars 2013 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un t

itre de séjour permettant l'exercice d'une activité salariée dans le délai d'un mois, le cas éch...

Vu la requête enregistrée le 13 novembre 2013, présentée pour M.D..., demeurant..., par Me A...;

M. D...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301581 du 10 octobre 2013 du tribunal administratif de Toulouse qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 mars 2013 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour permettant l'exercice d'une activité salariée dans le délai d'un mois, le cas échéant, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et à tout le moins de procéder au réexamen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance fixant la clôture de l'instruction au 23 mai 2014 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc du 9 octobre 1987 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

Vu le code de justice administrative ;

L'affaire ayant été dispensée de conclusions du rapporteur public en application de l'article L. 732-2 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 juin 2014 :

- le rapport de M. Chemin, président-rapporteur ;

- les conclusions de M. Bentolila, rapporteur public ;

1. Considérant que M.D..., de nationalité marocaine, est entré en France le 2 mars 2005, selon ses dires ; que le 5 mai 2012, il a sollicité un titre de séjour en qualité d'étranger malade sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'à la suite de l'avis rendu le 7 décembre 2012 par le médecin de l'agence régionale de santé, le préfet de la Haute-Garonne a, par un arrêté du 5 mars 2013, refusé de délivrer à M. D...un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixé le pays de renvoi ; que M. D... fait appel du jugement du 10 octobre 2013 du tribunal administratif de Toulouse qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. Considérant que la décision litigieuse, qui n'avait pas à relater toutes les données de la situation personnelle de M.D..., énonce de manière suffisante les éléments de fait comme de droit sur lesquels elle se fonde ; qu'une telle motivation, qui n'est pas stéréotypée, ne révèle pas que le préfet se serait abstenu de procéder à un examen particulier de la situation de M. D...;

3. Considérant qu'en vertu de l'article 9 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 en matière de séjour et d'emploi, " les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...). " ; que l'article R. 313-22 du même code dispose : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) / Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...). " ; que selon l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 pris pour l'application de ces dernières dispositions : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; - la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / Cet avis est transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'agence régionale de santé. Celui-ci, s'il estime, sur la base des informations dont il dispose, qu'il y a lieu de prendre en compte des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, transmet au préfet un avis complémentaire motivé. / Par ailleurs, dès lors que l'intéressé porterait à la connaissance du préfet des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, le préfet saisit pour avis le directeur général de l'agence régionale de santé, qui lui communique son avis motivé dans un délai d'un mois. " ;

4. Considérant que la circonstance que l'avis émis le 7 décembre 2012 par le médecin de l'agence régionale de santé n'a pas été communiqué à M. D...est sans influence sur la légalité de la décision contestée, aucune disposition législative ou réglementaire n'imposant au préfet une telle obligation ;

5. Considérant que si le requérant soutient que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé de Midi-Pyrénées n'a pas été adressé au préfet de la Haute-Garonne sous le couvert du directeur de l'agence régionale de santé en méconnaissance des dispositions précitées de l'arrêté du 9 novembre 2011, il ne ressort pas des pièces du dossier, à supposer que l'omission d'une telle formalité ait pu priver l'intéressé d'une garantie, qu'un tel vice dans le déroulement de la procédure consultative ait pu exercer une influence quelconque sur le sens de la décision prise par le préfet ; que, par suite, le vice de procédure invoqué ne peut être accueilli ;

6. Considérant qu'il ne ressort ni des pièces du dossier ni des termes de l'arrêté attaqué que le préfet de la Haute-Garonne se soit estimé lié par l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé ; que le moyen tiré de ce que le préfet aurait ainsi commis une erreur de droit doit, dès lors, être écarté ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le médecin de l'agence régionale de santé de Midi-Pyrénées, consulté par le préfet de la Haute-Garonne sur la demande de titre de séjour de M.D..., a précisé, dans son avis du 7 décembre 2012, que l'état de santé de celui-ci nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'il existe une offre de soins dans son pays d'origine pour sa prise en charge médicale en précisant que les soins nécessités par l'état de santé de M. D...doivent, en l'état actuel, être poursuivis pendant une période indéterminée ; que pour contester cet avis, M. D...soutient qu'il ne pourra bénéficier d'un traitement approprié au Maroc et produit à ce titre deux certificats médicaux établis par le DrB..., psychiatre, les 14 octobre 2011 et 30 août 2013, attestant du suivi médico-psychologique de l'intéressé en raison de la persistance de troubles psychologiques ainsi que de prescriptions médicamenteuses ; que, toutefois, ces certificats, dont le dernier est au demeurant postérieur à la décision contestée, n'indiquent pas que les traitements dont M. D...a besoin ne seraient pas disponibles au Maroc et ne contredisent pas l'appréciation du médecin de l'agence régionale de santé selon laquelle il existe une offre de soins dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle du requérant ;

8. Considérant que M. D...soutient qu'il vit en France depuis plus de sept ans, qu'il dispose d'une résidence stable chez sa soeur, titulaire d'une carte de résident, et à qui il a apporte un soutien important dans l'éducation de sa fille, et qu'il est en mesure de s'intégrer durablement étant bénéficiaire d'une promesse d'embauche en contrat à durée indéterminée, ; que, toutefois, il est constant que le requérant, qui est entré irrégulièrement en France et s'est maintenu en situation irrégulière, est célibataire et sans enfant ; qu'il n'établit pas, ni même n'allègue, être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine ; qu'ainsi, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation de l'intéressé ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

9. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que la décision portant refus de séjour n'est pas entachée d'illégalité ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale doit être écarté ;

10. Considérant que le moyen tiré de ce que la décision litigieuse aurait été prise en méconnaissance des droits de la défense et des droits fondamentaux de l'Union européenne n'est assorti d'aucune précision pour permettre d'en apprécier le bien-fondé ;

11. Considérant que M.D..., dont la demande de titre de séjour a été refusée, entrait dans le champ d'application du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permettant au préfet d'assortir son refus de séjour d'une mesure d'éloignement ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français aurait été prise en méconnaissance de ces dispositions doit être écarté ;

12. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l 'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l' objet d'une obligation de quitter le territoire français: (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé ; (...). " ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant se serait prévalu devant le préfet de circonstances humanitaires exceptionnelles au sens de ces dispositions qui auraient dû être appréciées par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé ; que, dans ces conditions, et pour les mêmes raisons que celles mentionnées plus haut au point 7, le préfet de la Haute-Garonne a pu, sans méconnaître les dispositions précitées du 10° de l'article L. 511 4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assortir sa décision de refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ;

13. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 8 ci-dessus, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision sur la situation personnelle de l'intéressé doit également être écarté ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

14. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'illégalité ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination serait dépourvue de base légale doit être écarté ;

15. Considérant qu'aux termes de l'article L. 512-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " ; que selon l'article 3 de cette convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. " ;

16. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 7 ci-dessus M. D...n'établit pas qu'il ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine ; que, par suite, et en tout état de cause, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi méconnaîtrait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;

17. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

18. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. D...n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

19. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le requérant demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

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No 13BX03044


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX03044
Date de la décision : 28/07/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. CHEMIN
Rapporteur ?: M. Bernard CHEMIN
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : DIALEKTIK AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-07-28;13bx03044 ?
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