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23/06/2014 | FRANCE | N°13BX03528

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 23 juin 2014, 13BX03528


Vu la requête enregistrée le 24 décembre 2013 présentée pour M. B...C...élisant domicile..., par Me A...;

M. C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1304925 du 8 novembre 2013 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions contenues dans l'arrêté du 5 novembre 2013 du préfet de la Haute-Garonne portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfe

t de la Haute-Garonne de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoir...

Vu la requête enregistrée le 24 décembre 2013 présentée pour M. B...C...élisant domicile..., par Me A...;

M. C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1304925 du 8 novembre 2013 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions contenues dans l'arrêté du 5 novembre 2013 du préfet de la Haute-Garonne portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 mai 2014 :

- le rapport de M. Chemin, président-rapporteur ;

- les conclusions de M. Bentolila, rapporteur public ;

1. Considérant que M.C..., de nationalité marocaine, né le 31 janvier 1970, est entré en France le 16 octobre 2002 sous couvert d'un visa de court séjour ; qu'il a épousé une ressortissante française le 10 juillet 2003 ; que par une décision du 15 juin 2006, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de renouveler son titre de séjour au motif que la communauté de vie entre les époux avait cessé ; que M. C... a sollicité en 2008 son admission exceptionnelle au séjour, demande qui a été rejetée par un arrêté du 16 juin 2008 portant obligation de quitter le territoire français ; que le 14 décembre 2009, il a fait l'objet d'un nouvel arrêté du préfet de la Haute-Garonne portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français ; qu'interpellé par les services de police le 12 mars 2010, il a été placé le même jour en rétention administrative ; que par un jugement du 16 mars 2010, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé la mesure d'éloignement prise le 14 décembre 2009 et la décision de placement en rétention administrative ; que toutefois, le recours de l'intéressé formé contre la décision de refus de séjour prise le 14 décembre 2009 a été rejeté par un jugement du 17 juin 2010 du tribunal administratif de Toulouse, confirmé par la cour administrative d'appel de Bordeaux par un arrêt du 3 novembre 2011 ; que M. C...a de nouveau été interpellé par les services de police le 4 mai 2012 et a alors présenté le 22 mai 2012 une nouvelle demande d'admission exceptionnelle au séjour qui a été rejetée par un arrêté du 28 août 2012 du préfet de la Haute-Garonne portant également obligation de quitter le territoire français ; que par un jugement du 30 novembre 2012, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé cette nouvelle mesure d'éloignement ; que, cependant, le tribunal administratif de Toulouse statuant en formation collégiale a rejeté la demande de l'intéressé dirigée contre la décision de refus de séjour contenue dans le même arrêté du 28 août 2012 par un jugement du 23 avril 2013, confirmé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 17 décembre 2013 ; qu'à la suite de ce dernier jugement, le préfet de la Haute-Garonne a pris, le 5 novembre 2013, à l'encontre de M. C...un nouvel arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire ainsi qu'une décision de placement en rétention ; que par un jugement du 8 novembre 2013, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé la décision refusant d'octroyer à l'intéressé un délai de départ volontaire et la décision du même jour plaçant M. C...en rétention administrative, et a rejeté les conclusions de l'intéressé tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi contenues dans l'arrêté du 5 novembre 2013 ; que M. C...fait appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. C...réside sur le territoire national depuis un peu plus de onze ans à la date de la décision contestée, qu'il a toutes ses attaches familiales en France où vivent ses parents qui sont titulaires d'une carte de résident, sa soeur et ses quatre frères qui sont tous de nationalité française à l'exception de l'un de ses frères qui est lui même titulaire d'une carte de résident ; que s'il s'est maintenu en situation irrégulière malgré les décisions de refus de séjour et les mesures d'éloignement dont il a fait l'objet, il a néanmoins travaillé lorsqu'il a disposé d'un titre de séjour à la suite de son mariage avec une ressortissante française, a suivi une session de formation civique, conclu un contrat d'accueil et d'intégration, obtenu l'attestation ministérielle de compétence linguistique et dispose d'une promesse d'embauche ; que, dans ces conditions, alors même que M. C...n'est entré en France qu'à l'âge de trente-deux ans, qu'il est célibataire et sans enfant, étant divorcé de son épouse de nationalité française dont il est séparé depuis 2005, compte tenu de l'ancienneté de son séjour en France et de la présence de sa famille qui est établie en France, la mesure d'éloignement contestée a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle méconnaît ainsi les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et doit, par suite être annulée ; que, par voie de conséquence, la décision fixant le pays de renvoi contenue dans l'arrêté du 5 novembre 2013 est elle-même entachée d'illégalité ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. C...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 novembre 2013 du préfet de la Haute-Garonne en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. " ;

6. Considérant qu'en application des dispositions précitées, l'annulation, par le présent arrêt, de la décision portant obligation de quitter le territoire français implique nécessairement que l'autorité administrative délivre à M. C...une autorisation provisoire de séjour et se prononce à nouveau sur le droit au séjour de l'intéressé compte tenu des circonstances de droit et de fait existant à la date de sa décision ; qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne, sans qu'il soit nécessaire de prononcer l'astreinte demandée, de délivrer au requérant une autorisation provisoire de séjour et de lui prescrire de se prononcer sur la situation de M. C... dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement à M. C...d'une somme 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : L'article 2 du jugement n° 1304925 du 8 novembre 2013 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse et l'arrêté du 5 novembre 2013 du préfet de la Haute-Garonne en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Haute-Garonne de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. C...et de se prononcer sur sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'État versera à M. C...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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No 13BX03528


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX03528
Date de la décision : 23/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. CHEMIN
Rapporteur ?: M. Bernard CHEMIN
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : DIALEKTIK AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-06-23;13bx03528 ?
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