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12/06/2014 | FRANCE | N°13BX03427

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 12 juin 2014, 13BX03427


Vu la requête, enregistrée le 16 décembre 2013, présentée pour Mme D...A...épouseB..., demeurant..., par Me Préguimbeau, avocat ;

Mme B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301056 du 31 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande d'annulation des décisions du préfet de la Haute-Vienne du 25 avril 2013 portant refus de renouvellement de son titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) d'

enjoindre au préfet de la Haute-Vienne de lui délivrer, à titre principal, un titre de séj...

Vu la requête, enregistrée le 16 décembre 2013, présentée pour Mme D...A...épouseB..., demeurant..., par Me Préguimbeau, avocat ;

Mme B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301056 du 31 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande d'annulation des décisions du préfet de la Haute-Vienne du 25 avril 2013 portant refus de renouvellement de son titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Vienne de lui délivrer, à titre principal, un titre de séjour " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa demande, sous la même astreinte ;

4°) de surseoir à statuer dans l'attente de la réponse de la Cour de justice de l'Union européenne aux questions préjudicielles posées le tribunal administratif de Melun dans son jugement n° 1301686 du 8 mars 2013 ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat les sommes de 2 000 euros à verser à son avocat en application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, et de 13 euros correspondant au droit de plaidoirie ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles et ses avenants ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

L'affaire ayant été dispensée de conclusions sur proposition du rapporteur public en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 mai 2014 :

- le rapport de Mme Catherine Girault, président ;

1. Considérant que MmeB..., née en Algérie en 1979, est entrée en France, avec son époux et leurs deux enfants, en juillet 2010 via l'Espagne en possession d'un visa de court séjour valable trente jours délivré par les autorités consulaires espagnoles à Oran ; que le préfet de la Haute-Vienne a rejeté par un arrêté du 23 février 2011, devenu définitif, sa demande de titre de séjour formulée sur le fondement du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; qu'elle a néanmoins bénéficié d'un certificat de résidence au titre de son état de santé valable de juillet 2011 à janvier 2012 ; qu'elle relève appel du jugement n° 1301056 du 31 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande d'annulation des décisions du préfet de la Haute-Vienne du 25 avril 2013 portant refus de renouvellement de son titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays de renvoi ;

Sur les moyens de légalité externe de l'arrêté pris dans son ensemble :

2. Considérant qu'au soutien des moyens tirés de l'insuffisance de motivation des décisions contestées et de l'irrégularité de la procédure affectant l'obligation de quitter le territoire dès lors que son droit d'être entendue avant l'édiction d'une mesure défavorable à son encontre, protégé notamment par l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, aurait été méconnu, Mme B...ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal administratif ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges ;

Sur la légalité de la décision portant refus de renouvellement du certificat de résidence :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7°) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. Le certificat de résidence délivré au titre du présent article donne droit à l'exercice d'une activité professionnelle " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui est applicable aux demandes de titre de séjour présentées par les ressortissants algériens : " (...) le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. L'avis (...) est émis au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. " ; qu'en vertu de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application des dispositions précitées, en vigueur à la date de l'arrêté contesté et qui a abrogé l'arrêté du 8 février 1999, le médecin de l'agence régionale de santé chargé d'émettre un avis doit préciser si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale, si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, s'il existe, dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale, quelle est la durée prévisible du traitement et, le cas échéant, si son état de santé lui permet de voyager sans risque vers le pays de renvoi ;

4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui en fait la demande au titre des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22 précité, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ; que si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...souffre de troubles fonctionnels intestinaux dont l'origine n'a pu être déterminée ; que, dans son avis du 16 mars 2012, le médecin inspecteur de l'agence régionale de santé du Limousin a notamment indiqué que le défaut de la prise en charge médicale nécessitée par l'état de santé de Mme B...ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'un traitement approprié était disponible en Algérie ; que cependant, à la demande du médecin inspecteur, qui a demandé en vain au praticien assurant le suivi médical de Mme B...des éléments complémentaires sur son état de santé, le préfet de la Haute-Vienne a sollicité de MmeB..., par une lettre du 9 octobre 2012 demeurée sans réponse, la production d'un rapport médical circonstancié émanant d'un praticien hospitalier précisant la pathologie, les soins nécessaires et leur durée prévisible ; qu'ainsi, le préfet a pu à bon droit, par la décision du 25 avril 2013, soit plus de quatre mois après la demande de renseignements, refuser à Mme B...un certificat de résidence pour raison médicale au motif de l'absence de rapport médical établi par un médecin agréé ou un praticien hospitalier ; que le moyen tiré de ce que la commission médicale régionale aurait dû être saisie du cas de Mme B...doit être écarté, dès lors que la convocation du demandeur pour une consultation médicale devant cette commission est une simple possibilité offerte au médecin de l'agence régionale de santé lorsqu'il est confronté à une pathologie complexe ; qu'enfin, l'avis du médecin de l'agence régionale de santé mentionne que l'état de santé de Mme B...lui permet de voyager sans risque vers son pays d'origine, et l'intéressée n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause l'ensemble des appréciations de ce médecin, ni à caractériser la gravité de son état ; qu'elle a au demeurant saisi le préfet d'une nouvelle demande en invoquant seulement sa situation familiale ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l' enfant doit être une considération primordiale " ;

7. Considérant que MmeB..., qui est entrée en France en juillet 2010, fait valoir que son époux vit en France où sont nés leurs deux derniers enfants, et que les deux aînés sont scolarisés depuis 2010 dans deux établissements de Limoges où ils ont obtenu d'excellents résultats ; que toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que MmeB..., qui vivait en France depuis moins de trois ans à la date de la décision en litige, ne pourrait poursuivre sa vie privée et familiale avec son époux, qui fait également l'objet d'une décision de refus de titre de séjour, ailleurs qu'en France ; qu'il n'est pas davantage établi que les deux enfants ne pourraient poursuivre leur scolarité en Algérie, pays d'origine de MmeB..., où elle a vécu plus de trente ans et ne soutient pas être dépourvue d'attaches familiales ; qu'ainsi, eu égard à la durée et aux conditions de son séjour en France, le préfet n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale et n'a méconnu ni les stipulations de l'article 6 5° de l'accord franco-algérien ni celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; que le préfet de la Haute-Vienne n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire et de la décision fixant le pays de renvoi :

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation, qui reprennent ce qui a été précédemment développé à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour, ainsi que celui tiré de l'exception d'illégalité de cette décision, ne peuvent qu'être écartés pour les mêmes motifs ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 25 avril 2013 ; que, par suite, ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret n°95-161 du 15 février 1995 relatif aux droits de plaidoirie et à la contribution équivalente : " Le droit de plaidoirie est dû à l'avocat pour chaque plaidoirie faite aux audiences dont la liste est fixée par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice. /A défaut de plaidoirie, est considéré comme ayant plaidé l'avocat représentant la partie à l'audience... " ; que Mme B...n'ayant pas été représentée à l'audience, le droit de plaidoirie n'est pas dû ; que ses conclusions tendant au remboursement d'un tel droit ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

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No 13BX03427


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13BX03427
Date de la décision : 12/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Catherine GIRAULT
Rapporteur public ?: Mme MEGE
Avocat(s) : SELARL PREGUIMBEAU - GREZE : AEGIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-06-12;13bx03427 ?
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