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29/04/2014 | FRANCE | N°13BX02100

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 29 avril 2014, 13BX02100


Vu la décision n° 361797 du 12 juillet 2013, enregistrée au greffe de la cour sous le n° 13BX02100, par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux, d'une part, a annulé l'arrêt n° 11BX00854 du 26 juin 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté le recours du ministre de l'économie et des finances tendant à l'annulation du jugement n° 0900492 du 30 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Pau a accordé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles Mme A... C...a été assujet

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Vu la décision n° 361797 du 12 juillet 2013, enregistrée au greffe de la cour sous le n° 13BX02100, par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux, d'une part, a annulé l'arrêt n° 11BX00854 du 26 juin 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté le recours du ministre de l'économie et des finances tendant à l'annulation du jugement n° 0900492 du 30 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Pau a accordé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles Mme A... C...a été assujettie au titre de l'année 2004 et au rétablissement au rôle de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales, d'autre part, a renvoyé l'affaire devant la cour ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 août 2013, présenté par le ministre de l'économie et des finances, qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900492 du 30 décembre 2010, par lequel le tribunal administratif de Pau a accordé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles Mme A...C...a été assujettie au titre de l'année 2004 ;

2°) de rétablir Mme C...au rôle de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales dont le tribunal a ordonné la décharge ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 mars 2014 :

- le rapport de Mme Béatrice Duvert, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public ;

1. Considérant que, par délibération du 8 janvier 2001, l'assemblée générale de la Banque des règlements internationaux (BRI), dont le siège est à Bâle (Suisse), a décidé de procéder au rachat de ses propres titres détenus par des actionnaires privés ; que M. et Mme C..., actionnaires, ont perçu en 2001 le produit de ce rachat et, en 2004, un complément de prix arrêté le 19 septembre 2003 par sentence de la Cour permanente d'arbitrage de la Haye ; qu'à l'issue d'un contrôle sur pièces des revenus déclarés au titre de l'année 2001, l'administration fiscale, estimant que cette somme, qui n'avait pas été déclarée, ne constituait pas une indemnité, mais qu'elle était imposable à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 2004, a adressé, le 20 juillet 2005, aux époux C...une proposition de rectification, selon la procédure contradictoire ; que, saisi par MmeC..., dont l'époux est décédé en 2006, le tribunal administratif de Pau a, par jugement du 30 décembre 2010, accordé à l'intéressée la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contribution sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2004 ; que la présente cour a rejeté le recours formé contre ce jugement par le ministre de l'économie et des finances, par arrêt du 26 juin 2012 ; que, toutefois, par une décision du 12 juillet 2013, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé l'arrêt précité du 26 juin 2012 et renvoyé l'affaire devant la cour ;

Sur le bien-fondé des impositions :

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et en particulier de la proposition de rectification datée du 20 juillet 2005, que pour procéder au redressement en litige, l'administration fiscale a regardé le complément de prix perçu en 2004 par M. et Mme C...au titre du rachat des actions qu'ils détenaient dans le capital de la BRI comme des revenus distribués imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, en tant que revenus de valeurs mobilières en application de l'article 120 du code général des impôts (CGI) ; que si l'administration a entendu faire application de la réponse ministérielle faite le 18 juin 2001 à Mme B...en imposant la somme en cause, " compte tenu du caractère exceptionnel " de l'opération, non au taux progressif de droit commun, mais au taux proportionnel de 16 % prévu pour l'application de l'article 150-0 A du code général des impôts relatif au plus-values de cession à titre onéreux de valeurs mobilières, pour un montant de 29 793 euros, elle a toutefois estimé que la mesure de tempérament ainsi mise en oeuvre ne conférait pas à l'opération de rachat en cause le caractère d'une cession à titre onéreux et, partant, ne permettait d'imputer aucune moins-value, sur le fondement de l'article 150-0 D du code général des impôts ;

3. Considérant que pour accorder à Mme C...la décharge des compléments d'imposition auxquelles elle a ainsi été assujettie au titre de l'année 2004, le tribunal administratif de Pau a estimé que la somme versée en 2004 à M. et Mme C...par la BRI représentait " le solde du prix de rachat de leurs titres ", que ce solde constituait, non " un revenu distribué ou un dividende ", mais un versement effectué " dans le cadre d'une transmission à titre onéreux de valeurs mobilières ", comme tel " imposable à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des plus-values réalisées par les particuliers " et, en conséquence, que l'administration fiscale avait à tort imposé ladite somme comme un revenu relevant de la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 120 du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : " Sont considérés comme revenus au sens du présent article : / 1° Les dividendes, intérêts, arrérages et tous autres produits des actions de toute nature et des parts de fondateur des sociétés, compagnies ou entreprises financières, industrielles, commerciales, civiles et généralement quelconques dont le siège social est situé à l'étranger quelle que soit l'époque de leur création ; / (...) 3° Les répartitions faites aux associés, aux actionnaires et aux porteurs de parts de fondateur des mêmes sociétés, à un titre autre que celui de remboursement d'apports ou de primes d'émission. Une répartition n'est réputée présenter le caractère d'un remboursement d'apport ou de prime que si tous les bénéfices ou réserves ont été auparavant répartis. (...) " ;

5. Considérant qu'il résulte de ces dispositions législatives qu'en cas de rachat par une société étrangère émettrice de ses propres actions, la partie du prix de rachat correspondant au montant des apports réels ou assimilés compris dans chaque titre, ne constitue pas un revenu distribué ; qu'en revanche, la partie de ce prix excédant le montant de ces apports est constitutive d'une répartition aux actionnaires, imposable en tant que revenu de capitaux mobiliers ;

6. Considérant qu'en l'espèce, il n'est pas sérieusement contesté que la somme en litige, versée en 2004, excède le montant des apports de M. et MmeC..., c'est-à-dire la valeur nominale de leurs titres ; qu'elle est donc constitutive d'une répartition imposable entre leurs mains en tant que revenu de capitaux mobiliers ; que, ni la circonstance que leurs actions de la BRI, dépourvues de droit de vote, ont donné lieu, à la suite d'une assemblée générale extraordinaire du 8 janvier 2001, à un " rachat forcé ", ainsi que la Cour permanente d'arbitrage de la Haye le mentionne dans sa sentence définitive du 19 septembre 2003, afin que soient évincés les actionnaires privés de cette banque et que la détention de son capital soit réservé aux banques centrales, ni le fait que le prix de ce rachat ait été calculé, aux termes de ladite sentence, en fonction de la valeur par action de " l'actif net réévalué " de la banque majoré de la valeur par action de ses biens immobiliers, avec application d'une décote de 30 %, ne lui enlève ce caractère de revenu mobilier ; que c'est donc à tort que le tribunal s'est fondé, pour ordonner la décharge des droits contestés, sur ce que la somme en litige représentait au regard de la loi fiscale un gain net de cessions de valeurs mobilières relevant de l'article 150-0 A du code général des impôts ;

7. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par MmeC..., tant devant le tribunal administratif de Pau que devant la cour ;

8. Considérant que si Mme C...soutient que la décision du 31 décembre 2008 par laquelle le directeur des services fiscaux a rejeté sa réclamation, est insuffisamment motivée, un tel moyen est, en tout état de cause, sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration./ Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales. " ;

10. Considérant qu'aux termes de la réponse ministérielle n° 57656 du 18 juin 2001 à Mme B...: " La reprise par la Banque des règlements internationaux de ses actions détenues par des actionnaires privés s'analyse, au plan du droit, comme une transmission à titre onéreux de valeurs mobilières se traduisant par le transfert de la propriété des actions de la Banque des règlements internationaux et la remise en contrepartie de liquidités à ses actionnaires. Dans ces conditions, et eu égard au statut particulier de cette banque ainsi qu'à la spécificité de la procédure de reprise d'actions, les actionnaires personnes physiques résidents de France de la Banque des règlements internationaux ont effectivement été informés que les gains nets réalisés à cette occasion sont imposables à l'impôt sur le revenu au taux proportionnel de 16 % (hors prélèvements sociaux) prévu pour l'application de l'article 150-0 A du code général des impôts. Il n'est pas envisagé de revenir sur cette décision " ;

11. Considérant qu'il résulte des énonciations de la réponse ministérielle à MmeB..., qui ont été formulées eu égard aux circonstances et conditions de la reprise de ses actions par la BRI, qu'elles n'ont ni pour objet ni pour effet de soumettre les sommes perçues en contrepartie de ce rachat au régime des plus-values de cession de valeurs mobilières, mais qu'elles se bornent à prévoir leur taxation au taux forfaitaire de 16 % prévu pour l'application de l'article 150-0 A du code général des impôts, lequel se trouve ainsi substitué au barème progressif de l'impôt sur le revenu ; que l'imposition de la somme en litige ayant été établie en fonction de cette doctrine, ladite somme ne peut être regardée comme relevant du régime des plus-value de cession de valeurs mobilières ; qu'il en résulte que Mme C...n'est pas fondée à se prévaloir des dispositions de l'article 150-0 D du code général des impôts, qui prévoient l'imputation des moins-values réalisées lors de la cession de valeurs mobilières subies au cours d'une année sur les plus-values de même nature réalisées au cours de la même année ou des dix années suivantes, pour demander l'imputation d'une moins-value déclarée au titre de l'année 2003 sur la somme en litige, de nature différente, imposée au titre de l'année 2004 ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie et des finances est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a accordé à Mme C...la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenus et de contribution sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2004 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que Mme C...demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Pau n° 0900492 du 30 décembre 2010 est annulé.

Article 2 : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles Mme C...avait été assujettie au titre de l'année 2004 sont remises à sa charge.

Article 3 : Les conclusions présentées par Mme C...tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 13BX02100


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX02100
Date de la décision : 29/04/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Analyses

19-04-02-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables.


Composition du Tribunal
Président : M. LALAUZE
Rapporteur ?: Mme Béatrice DUVERT
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : GRENIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-04-29;13bx02100 ?
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