Vu la requête, enregistrée le 15 juillet 2013, présentée pour Mme B...A..., demeurant..., par Me C... ;
Mme A... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1301107 du 18 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Gironde du 11 mars 2013 refusant de lui délivrer un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire dans le délai de trente jours en fixant le pays de destination ;
2°) d'annuler l'arrêté contesté ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 modifié ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 mars 2014 :
- le rapport de M. Bertrand Riou, président-assesseur ;
- les conclusions de M. D...de la Taille-Lollainville, rapporteur public ;
- les observations de Me Grenier, avocat de MmeA... ;
1. Considérant que MmeA..., ressortissante tunisienne, a sollicité en juillet 2012 la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ; que, par un arrêté du 11 mars 2013, le préfet de la Gironde a refusé de faire droit à sa demande et l'a obligée à quitter le territoire dans le délai de trente jours ; que Mme A...relève appel du jugement en date du 18 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur les conclusions à fin d'annulation et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et des libertés d'autrui. " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable au jour de la décision attaquée : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République." ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A...a rencontré en Tunisie, en 2009, un ressortissant français exerçant une activité de cadre dans une entreprise de transports ; qu'elle l'a rejoint en octobre 2010 en France au bénéfice d'un visa d'une validité de quatre-vingt-dix jours ; qu'un bail d'habitation a alors été conclu au nom du couple ; qu'étant repartie en Tunisie à l'expiration de ce visa, elle a obtenu un nouveau visa et est revenue en France en juillet 2011 ; que, depuis lors, ainsi qu'il ressort des documents versés au dossier, notamment des attestations circonstanciées qui ont été produites, elle vit maritalement avec ce ressortissant français qui l'a désignée comme bénéficiaire de son contrat d'assurance-vie et avec lequel elle a signé une déclaration de concubinage ; que, dès qu'elle a été en possession d'un récépissé de titre de séjour l'autorisant à travailler, l'intéressée a occupé des emplois en qualité d'intérimaire ; qu'elle produit un promesse d'embauche liée à la régularisation de sa situation ; que, compte tenu de la continuité et de la stabilité de la relation entre Mme A...et son compagnon et des efforts d'intégration de l'intéressée, et même si ses parents et sa fratrie résident en Tunisie, le refus de lui délivrer un titre de séjour doit, dans les circonstances de l'espèce, être regardé comme portant à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs de ce refus et comme méconnaissant ainsi les dispositions et stipulations précitées ; que ce refus doit, dès lors, être annulé ainsi que, par voie de conséquence, l'obligation de quitter le territoire français dont il a été assorti ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ; et qu'aux termes de l'article L. 911-3 du même code : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d' une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet " ;
6. Considérant que le présent arrêt, qui annule l'arrêté du 11 mars 2013 du préfet de la Gironde, implique nécessairement, eu égard au motif sur lequel il se fonde, que le préfet délivre le titre sollicité à la requérante dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'à la date de la présente décision, des éléments de droit ou de fait nouveaux feraient obstacle à une telle délivrance ; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Gironde de délivrer à Mme A... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les frais irrépétibles :
7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme A...et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 18 juin 2013 et l'arrêté du 11 mars 2013 du préfet de la Gironde sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Gironde de délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " à Mme A...dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Mme A...la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N°13BX01955