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17/03/2014 | FRANCE | N°13BX02322

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 17 mars 2014, 13BX02322


Vu I°), sous le n° 13BX02322, la requête enregistrée par télécopie le 9 août 2013, et régularisée par courrier le 14 août suivant, présentée par le préfet des Pyrénées-Atlantiques ;

Le préfet des Pyrénées-Atlantiques demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301102 du 4 juillet 2013 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau a annulé, à la demande de M. B...C..., la décision du 30 juin 2013 ordonnant son placement en rétention administrative et a mis à la charge de l'État la somme de 1 000 euros au titre

de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande pré...

Vu I°), sous le n° 13BX02322, la requête enregistrée par télécopie le 9 août 2013, et régularisée par courrier le 14 août suivant, présentée par le préfet des Pyrénées-Atlantiques ;

Le préfet des Pyrénées-Atlantiques demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301102 du 4 juillet 2013 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau a annulé, à la demande de M. B...C..., la décision du 30 juin 2013 ordonnant son placement en rétention administrative et a mis à la charge de l'État la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. C...devant le tribunal administratif de Pau ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 11 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 février 2014 :

- le rapport de M. Chemin, président-rapporteur ;

- les conclusions de M. Bentolila, rapporteur public ;

1. Considérant que M.C..., ressortissant marocain, est entré en France en juin 2005 selon ses dires ; qu'il a été rejoint, en juin 2006, par MmeA..., de nationalité marocaine, dont il est divorcé ; que le 30 juin 2013, M. C...et MmeA..., qui venaient d'Espagne, ont fait l'objet d'une interpellation lors d'un contrôle à la frontière, à la suite de laquelle le préfet des Pyrénées-Atlantiques a pris à l'encontre de M. C...une obligation de quitter le territoire français sans délai, désignant le Maroc comme pays de renvoi ; que par une décision du même jour, le préfet a ordonné le placement en rétention administrative de M. C...dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ; que par un jugement n° 1301101 du 4 juillet 2013, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau a rejeté les conclusions de M. C...tendant à l'annulation de l'obligation de quitter sans délai le territoire français et de la décision fixant le pays de renvoi ; que par un jugement du même jour, rendu sous le n° 1301102, ce magistrat a annulé, à la demande de M.C..., la décision du 30 juin 2013 ordonnant son placement en rétention administrative ; que par la requête n° 13BX02322, le préfet des Pyrénées-Atlantiques fait appel de ce dernier jugement et, par requête n° 13BX02425, demande qu'il soit sursis à son exécution ; qu'il y a lieu de joindre ces deux requêtes pour statuer par un même arrêt ; que dans son mémoire en défense enregistré le 10 janvier 2014, M. C...présente des conclusions dirigées contre le jugement n° 1301101 du 4 juillet 2013 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation du l'arrêté du 30 juin 2013 portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et fixation du pays de renvoi ;

Sur la requête n° 13BX02322 à fin d'annulation présentée par le préfet des Pyrénées-Atlantiques :

2. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger (...) 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire français est expiré ou n'a pas été accordé (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 561-2 du même code : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1 l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation (...) " ; qu'en vertu du II de son article L. 511-1 : " Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; b) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2. (...) " ;

3. Considérant que pour annuler la décision du préfet des Pyrénées-Atlantiques du 30 juin 2013 plaçant M. C...en rétention administrative, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau, après avoir relevé que l'intéressé disposait d'un passeport en cours de validité, qu'il ne s'était pas soustrait à une précédente mesure d'éloignement, et qu'il disposait d'un logement en région parisienne depuis 2008, a estimé que le préfet ne justifiait pas que M. C...n'aurait pas présenté de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de fuite ; qu'il ressort cependant des pièces du dossier que M.C..., qui est entré irrégulièrement en France et s'y est maintenu sans avoir sollicité de titre de séjour et a fait l'objet pour ce motif d'une obligation de quitter le territoire français le 30 juin 2013, entrait dans les prévisions des dispositions précitées du a) et du b) de l'article L. 511-1 permettant de présumer, sauf circonstances particulières, l'existence d'un risque de fuite ; que s'il a indiqué lors de son audition par les services de police qu'il disposait d'un logement, il ressort des pièces des dossier qu'il était seulement hébergé par un compatriote ; qu'il a en outre déclaré se maintenir irrégulièrement sur le territoire français depuis 2005 et qu'il n'entendait pas retourner dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, en estimant que M.C..., qui était en situation irrégulière depuis plusieurs années et qui n'a jamais sollicité la régularisation de sa situation, ne pouvait être regardé, alors même qu'il disposait d'un passeport en cours de validité, comme présentant des garanties de représentation suffisantes, le préfet des Pyrénées-Atlantiques n'a pas entaché sa décision de placement en rétention administrative d'erreur d'appréciation ; que, par suite, il est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau a annulé sa décision du 30 juin 2013 ;

4. Considérant toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés tant devant le tribunal administratif que devant la cour par M. C...à l'encontre de la décision du 30 juin 2013 le plaçant en rétention administrative ;

5. Considérant que la décision litigieuse a été signée par M. Benoist Delage, secrétaire général de la préfecture des Pyrénées-Atlantiques, qui disposait d'une délégation consentie par un arrêté du préfet des Pyrénées-Atlantiques du 15 novembre 2012 régulièrement publié au recueil des administratifs de la préfecture ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte manque en fait ;

6. Considérant que la décision contestée, qui n'avait pas à détailler toutes les données propres à la situation personnelle de M.C..., énonce de manière suffisante les considérations de fait et de droit sur lesquelles elle se fonde ; qu'elle est, par suite, suffisamment motivée ;

7. Considérant que selon la jurisprudence de la Cour de justice de 1'Union européenne [C-383/13 PPU du 10 septembre 2013] une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle une décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision ; qu'il ressort des pièces du dossier, notamment du procès-verbal d'audition signé par l'intéressé, que M. C...a été entendu par les services de police le 30 juin 2013, en particulier en ce qui concerne son âge, sa nationalité, sa situation de famille, ses attaches dans son pays d'origine, ses conditions d'entrée en France ainsi que ses conditions d'hébergement ; que le requérant a eu ainsi la possibilité, au cours de cet entretien, de faire connaître des observations utiles et pertinentes de nature à influer sur la décision de placement en rétention prise à son encontre ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il disposait d'informations pertinentes tenant à sa situation personnelle qu'il a été empêché de porter à la connaissance de l'administration avant que ne soit prise à son encontre la mesure qu'il conteste et qui, si elles avaient pu être communiquées à temps, auraient été de nature à faire obstacle à cette décision ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée méconnaîtrait le principe général des droits de la défense qui est au nombre des principes fondamentaux du droit de l'Union européenne, ne peut en tout état de cause qu'être écarté ;

8. Considérant que M.C..., qui a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français le 30 juin 2013, entrait dans le champ d'application de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet des Pyrénées-Atlantiques est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau a annulé la décision du 30 juin 2013 plaçant M. C... en rétention administrative et a mis à la charge de l'État la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Sur les conclusions incidentes présentées par M.C... :

10. Considérant que les conclusions présentées par M. C...sont dirigées contre le jugement n° 1301101 du 4 juillet 2013 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation du l'arrêté du 30 juin 2013 portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et fixation du pays de renvoi ; qu'elles portent ainsi sur un litige distinct de celui faisant l'objet de l'appel principal du préfet des Pyrénées-Atlantiques dirigé contre le jugement n° 1301102 du même jour relatif à la décision de placement en rétention du 30 juin 2013 ; que, ces conclusions ne sont, par suite, pas recevables ; qu'elles doivent, dès lors, être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction présentées par M.C... ;

Sur la requête n° 13BX02425 à fin de sursis à exécution :

11. Considérant que le présent arrêt, qui statue sur la requête du préfet des Pyrénées-Atlantiques à fin d'annulation du jugement attaqué, rend sans objet ses conclusions à fin de sursis à exécution de ce jugement ;

Sur les conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme dont M. C...demande le versement à son conseil, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 13BX02425 du préfet des Pyrénées-Atlantiques.

Article 2 : Les articles 2 et 4 du jugement n° 1301102 du 4 juillet 2013 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau sont annulés.

Article 3 : La demande présentée par M. C...devant le tribunal administratif de Pau et ses conclusions présentées devant la cour sont rejetées.

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No 13BX02322, 13BX02425


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX02322
Date de la décision : 17/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. CHEMIN
Rapporteur ?: M. Bernard CHEMIN
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : OUDIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-03-17;13bx02322 ?
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