Vu l'ordonnance du président de la section du contentieux du Conseil d'Etat du 11 juin 2013 attribuant à la cour administrative d'appel de Bordeaux le jugement de la requête, enregistrée le 21 mars 2013, présentée pour Mme A...B..., demeurant..., par Me Béguin, avocat ;
Mme B...demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1001647 du 23 janvier 2013, par lequel le tribunal administratif de Poitiers n'a que partiellement annulé la décision implicite du président de la région Poitou-Charentes en tant qu'elle refuse de l'admettre au bénéfice de l'assurance chômage pour la période du 1er février au 3 février 2010 ;
2°) d'annuler l'intégralité de la décision implicite du président de la région Poitou-Charentes et d'enjoindre au président de la région Poitou-Charentes de lui verser les allocations de chômage pour la période du 1er février au 31 août 2010, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
3°) de condamner la région Poitou-Charentes à lui verser la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires, ensemble la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
Vu le décret n° 86-68 du 13 janvier 1986 modifié relatif aux positions de détachement, hors cadres, de disponibilité, de congé parental des fonctionnaires territoriaux et à l'intégration ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 février 2014 :
- le rapport de M. C...;
- les conclusions de M. Katz, rapporteur public ;
- et les observations de MmeB... ;
1. Considérant que MmeB..., ingénieur territorial de la région Poitou-Charentes, a été mise en disponibilité pour convenances personnelles, pour une durée de deux ans et six mois à compter du 1er août 2007 ; qu'elle a demandé, par lettre du 6 octobre 2009, sa réintégration à compter du 1er février 2010 à l'issue de la période de sa disponibilité ; que, n'ayant pas été réintégrée dans son emploi mais ayant été maintenue d'office en disponibilité jusqu'au 31 août 2010, elle a demandé le bénéfice des allocations de chômage pour la période correspondant à ce maintien en disponibilité ; que du silence gardé sur cette demande est née une décision implicite de rejet dont M. B...a demandé l'annulation au tribunal administratif de Poitiers ; que par jugement du 23 janvier 2013, le tribunal administratif de Poitiers a partiellement annulé la décision implicite du président de la région Poitou-Charentes en tant qu'elle refuse d'admettre Mme B...au bénéfice de l'assurance chômage pour la période du 1er février au 3 février 2010 ; que Mme B...relève appel de ce jugement et demande à la cour d'annuler l'intégralité de la décision implicite du président de la région Poitou-Charentes et d'enjoindre audit président de lui verser les allocations de chômage pour la période du 1er février au 31 août 2010, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
2. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 72 de la loi susvisée du 26 janvier 1984, un fonctionnaire territorial a droit, lorsqu'il demande sa réintégration et lorsque la durée de sa période de disponibilité pour convenances personnelles n'a pas excédé trois années, qu'une des trois premières vacances dans la collectivité d'origine lui soit proposée ; qu'aux termes de l'article 26 du décret susvisé du 13 janvier1986 : " Sauf dans le cas où la période de mise en disponibilité n'excède pas trois mois, le fonctionnaire mis en disponibilité sur sa demande fait connaître à son administration d'origine sa décision de solliciter le renouvellement de la disponibilité ou de réintégrer son cadre d'emplois d'origine trois mois au moins avant l'expiration de la disponibilité (...) Le fonctionnaire qui a formulé avant l'expiration de la période de mise en disponibilité une demande de réintégration est maintenu en disponibilité jusqu'à ce qu'un poste lui soit proposé dans les conditions prévues à l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984 précitée (...) " ; que, dans le cas où la collectivité ou l'établissement public dont relève l'agent ne peut lui proposer un emploi correspondant à son grade, il doit saisir le centre national de la fonction publique territoriale ou le centre de gestion locale afin qu'il lui propose tout emploi vacant correspondant à son grade ; que jusqu'à son reclassement ou, le cas échéant, son licenciement, l'agent ne bénéficie de la part du centre d'aucune rémunération ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 5421-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable à la période litigieuse : " En complément des mesures tendant à faciliter leur reclassement ou leur conversion, les travailleurs involontairement privés d'emploi (...), aptes au travail et recherchant un emploi, ont droit à un revenu de remplacement dans les conditions fixées au présent titre. " ; qu'aux termes de l'article L. 5422-2 du même code : " L'allocation d'assurance est accordée pour des durées limitées qui tiennent compte de l'âge des intéressés et de leurs conditions d'activité professionnelle antérieure. Ces durées ne peuvent être inférieures aux durées déterminées par décret en Conseil d'Etat (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 5422-3 de ce code : " L'allocation d'assurance est calculée soit en fonction de la rémunération antérieurement perçue dans la limite d'un plafond, soit en fonction de la rémunération ayant servi au calcul des contributions mentionnées aux articles L. 5422-9 et L. 5422-11. / Elle ne peut excéder le montant net de la rémunération antérieurement perçue. / Elle peut comporter un taux dégressif en fonction de l'âge des intéressés et de la durée de l'indemnisation. " ; qu'aux termes de l'article L. 5424-1 : " Ont droit à une allocation d'assurance dans les conditions prévues aux articles L. 5422-2 et L. 5422-3 : 1° Les agents fonctionnaires et non fonctionnaires de l'Etat et de ses établissements publics administratifs, les agents titulaires des collectivités territoriales (...) " ;
4. Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions qu'un agent visé au 1° de l'article L. 5424-1 du code du travail a droit aux allocations d'assurance chômage dès lors qu'étant apte au travail, il peut être regardé comme ayant été involontairement privé d'emploi et poursuivant la recherche d'un emploi ;
5. Considérant que les premiers juges ont estimé que, comme le soutenait la région Poitou-Charentes, Mme B...ne pouvait prétendre au bénéfice des allocations d'assurance chômage après la date du 3 février 2010, à laquelle une liste de cinq emplois vacants et susceptibles de lui convenir avait été transmise à la requérante qui n'avait donné aucune suite à cette communication ; que Mme B...soutient que cette communication ne saurait être regardée comme la proposition d'emplois exigée par les dispositions de la loi du 26 janvier 1984 et du décret du 13 janvier 1986, que les emplois figurant sur cette liste ne correspondaient ni à son grade ni à ses qualifications et qu'en tout état de cause, elle avait droit aux allocations d'assurance chômage du seul fait qu'elle avait été maintenue d'office en disponibilité ;
6. Considérant qu'en application des dispositions précitées, un fonctionnaire territorial à qui aucun emploi susceptible de lui convenir et ouvert au titre des trois premières vacances de poste n'a pu être proposé à la suite de sa demande de réintégration à l'issue de sa période de mobilité est maintenu d'office en position de disponibilité et a droit au bénéfice des allocations d'assurance chômage ; qu'un fonctionnaire qui aurait refusé trois emplois compatibles avec son statut est susceptible de faire l'objet d'un licenciement à la suite duquel il peut bénéficier des allocations d'assurance chômage ; que si l'administration choisit de ne pas licencier un tel fonctionnaire mais le maintient d'office en disponibilité, l'intéressé se trouve placé dans une situation lui ouvrant droit au bénéfice de ces allocations ; que, dans ces conditions, il est indifférent que des emplois lui convenant aient été ou non proposés à MmeB... ;
7. Considérant qu'il est constant qu'à la suite de sa demande de réintégration, présentée plus de trois mois avant l'expiration de la disponibilité pour convenances personnelles qui lui avait été accordée et qui a duré moins de trois années, Mme B...n'a pas été réintégrée dans un emploi de la région Poitou-Charentes, qui ne l'a pas licenciée au motif qu'elle aurait refusé un emploi correspondant à sa situation statutaire, qui lui aurait été proposé et qui n'a pas saisi le centre national de la fonction publique territoriale, mais a été maintenue d'office en disponibilité, en application des dispositions précitées de l'article 26 du décret susvisé du 13 janvier 1986, par une décision dont la région relève elle-même qu'elle est devenue définitive ; que, dans ces conditions, la circonstance que Mme B...avait été maintenue en disponibilité en dépit de ses demandes de réintégration suffisait à établir non seulement qu'elle était involontairement privée d'emploi, mais aussi qu'elle était à la recherche d'un emploi au sens de l'article L. 5421-1 du code du travail pendant toute la période allant de l'expiration de sa période de mise en disponibilité à sa réintégration ;
8. Considérant que la circonstance, invoquée par la région Poitou-Charentes, que Mme B...a demandé à être placée à nouveau en disponibilité immédiatement après avoir été réintégrée dans un emploi de la région le 1er septembre 2010 ne suffit pas à caractériser un comportement frauduleux, par lequel l'intéressée, qui ainsi qu'il vient d'être rappelé s'exposerait à un licenciement en refusant d'occuper un emploi correspondant à son statut, ne viserait qu'à obtenir abusivement le bénéfice des allocations d'assurance chômage, de nature à justifier qu'elle soit écartée du bénéfice de ces allocations ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'elle ne pouvait bénéficier des allocations d'assurance chômage que pour les journées du 1er et du 2 février 2010, au motif que la région lui avait adressé, le 3 février 2010, une liste d'emplois auxquels elle pouvait prétendre ; qu'elle est, dès lors et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, fondée à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il n'annule que partiellement le refus implicite opposé à sa demande de bénéfice des allocations d'assurance chômage ; que, par suite, Mme B...est fondée à demander l'annulation de la décision implicite du président de la région Poitou-Charentes refusant de l'admettre au bénéfice des allocations d'assurance chômage pour la période du 1er février au 31 août 2010 ;
10. Considérant qu'en raison du motif qui la fonde, l'annulation de la décision implicite du président de la région Poitou-Charentes refusant d'admettre Mme B...au bénéfice des allocations d'assurance chômage pour la période du 1er février au 31 août 2010 implique nécessairement, compte tenu de l'absence de changements de circonstances de droit ou de fait y faisant obstacle, que ces allocations soient versées à l'intéressée ; qu'il y a lieu d'enjoindre au président de la région Poitou-Charentes de verser à MmeB..., dans un délai d'un mois à compter de la date de la notification du présent arrêt, les allocations d'assurance chômage auxquelles elle a droit, pour la période du 1er février au 31 août 2010, en application des dispositions du code du travail citées au point 3 ; qu'il n'y a pas lieu, en revanche, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que MmeB..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à la région Poitou-Charentes la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner, en application de ces dispositions, la région Poitou-Charentes à verser à MmeB..., une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE
Article 1er : Le jugement du 23 janvier 2013 du tribunal administratif de Poitiers est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de Mme B...tendant à l'annulation de l'intégralité de la décision implicite du président de la région Poitou-Charentes refusant de l'admettre au bénéfice des allocations de chômage pour la période du 1er février au 31 août 2010.
Article 2 : La décision implicite du président de la région Poitou-Charentes refusant d'admettre Mme B...au bénéfice des allocations de chômage pour la période du 1er février au 31 août 2010 est annulée.
Article 3 : Il est enjoint au président de la région Poitou-Charentes de verser à MmeB..., dans un délai d'un mois à compter de la date de la notification du présent arrêt, les allocations d'assurance chômage auxquelles elle a droit, pour la période du 1er février au 31 août 2010, en application des dispositions du code du travail citées au point 3 des motifs du présent arrêt.
Article 4 : La région Poitou-Charentes versera à Mme B...la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Les conclusions de la région Poitou-Charentes tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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No 13BX01652