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11/03/2014 | FRANCE | N°12BX02453

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 11 mars 2014, 12BX02453


Vu la requête, enregistrée le 7 septembre 2012, présentée pour M. B...C..., demeurant..., par MeA... ;

M. C...demande à la cour :

1) de réformer le jugement n° 1002203 du 3 juillet 2012 du tribunal administratif de Bordeaux en tant qu'il a limité à 5 000 euros le montant des indemnités que le centre hospitalier universitaire de Bordeaux a été condamné à lui verser en réparation des préjudices subis lors de son hospitalisation du 16 janvier au 19 mars 2001 ;

2°) de porter le montant de l'indemnité à lui verser à la somme de 710 500 euros assortie des i

ntérêts au taux en vigueur à compter de l'introduction de la présente instance et de ...

Vu la requête, enregistrée le 7 septembre 2012, présentée pour M. B...C..., demeurant..., par MeA... ;

M. C...demande à la cour :

1) de réformer le jugement n° 1002203 du 3 juillet 2012 du tribunal administratif de Bordeaux en tant qu'il a limité à 5 000 euros le montant des indemnités que le centre hospitalier universitaire de Bordeaux a été condamné à lui verser en réparation des préjudices subis lors de son hospitalisation du 16 janvier au 19 mars 2001 ;

2°) de porter le montant de l'indemnité à lui verser à la somme de 710 500 euros assortie des intérêts au taux en vigueur à compter de l'introduction de la présente instance et de lui allouer une provision qui ne saurait être inférieure à 50 000 euros ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Bordeaux la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens de la présente procédure, de la procédure de première instance et de l'instance engagée en référé expertise ;

4°) d'ordonner l'exécution provisoire de l'arrêt à intervenir ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, modifiée par la loi n° 2002-1577 du 30 décembre 2002 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 février 2014 :

- le rapport de Mme Florence Madelaigue, premier conseiller ;

- les conclusions de M. David Katz, rapporteur public ;

1. Considérant que le 17 janvier 2001, M. C...a subi une intervention de phalloplastie au centre hospitalier universitaire de Bordeaux, dans le cadre d'une transformation morphologique de type trans-sexualisme engagée en 1996 ; qu'à l'occasion d'une opération de reprise microchirurgicale décidée le 26 janvier 2001, un hématome volumineux dans la région des vaisseaux artériels et veineux qui sont thrombosés, est mis en évidence ; qu'après une tentative de désobstruction des vaisseaux du greffon qui n'aboutit pas, l'ablation du néo phallus nécrosé est réalisée le 29 janvier à la suite de laquelle apparaissent des complications hémorragiques et itératives, ayant pour origine des fuites de l'artère fémorale, survenant dans l'urgence, et nécessitant plusieurs interventions de sauvetage au cours du mois de février ainsi que la mise en place en urgence d'un pontage de l'artère fémorale gauche le 24 février puis un pontage ilio-fémoral superficiel le 26 mars au centre hospitalier universitaire de Toulouse à la suite d'une nouvelle manifestation hémorragique ; que le suivi bactériologique de M. C...a fait apparaître la présence d'un staphylocoque doré multi-résistant lors de plusieurs prélèvements bactériologiques effectués entre février et avril 2001 ;

2. Considérant que, par requête enregistrée le 17 juin 2010, M. C...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux la condamnation du centre hospitalier universitaire de Bordeaux à réparer les préjudices qu'il estime liés à cette infection ; que, par jugement du 3 juillet 2012, le tribunal administratif a reconnu le centre hospitalier intégralement responsable des conséquences dommageables d'une faute dans l'organisation et le fonctionnement du service du fait que l'infection contractée ait pu se produire à la suite de l'introduction accidentelle d'un germe dans l'organisme du patient lors de l'une des interventions pratiquées, l'a condamné à verser à ce dernier la somme de 5 000 euros en réparation des préjudices subis et a rejeté la demande de la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde en l'absence de toute justification ; que M. C...relève appel du jugement du 3 juillet 2012 en tant qu'il limite le montant de l'indemnité que le centre hospitalier universitaire de Bordeaux a été condamné à lui verser à 5 000 euros ; que le centre hospitalier, qui ne conteste pas l'engagement de sa responsabilité, conclut au rejet de la requête ;

Sur les préjudices :

3. Considérant, en premier lieu, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif a évalué à 5000 euros le montant de l'indemnité que le centre hospitalier universitaire de Bordeaux a été condamné à verser à M. C...en réparation des troubles de toute nature dans les conditions d'existence, incluant le préjudice esthétique et les souffrances endurées ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que M. C..., dont l'état de santé a été déclaré consolidé le 5 mai 2003, a subi deux périodes d'incapacité temporaire totale, du 16 janvier 2001 au 21 mai 2001, et du 9 au 24 novembre 2001 ; qu'après avoir rappelé que le rôle de l'infection nosocomiale comme facteur aggravant ne pouvait être déterminé, l'expert a proposé de considérer que l'incapacité temporaire totale soit déclarée identique avec ou sans survenance de l'infection contractée, alors que la période retenue pour une phalloplastie sans complication hémorragique ou infectieuse est fixée à deux mois et que M. C...reste atteint d'une incapacité permanente partielle de 5 %, tenant compte de la présence d'un pontage sous cutané, extra-anatomique et de ses contraintes dans la fonction des membres inférieurs, ainsi que des gestes associés pouvant être à l'origine de quelques troubles de la mobilité de la cuisse gauche, même s'il note également qu'à l'examen clinique, les membres inférieurs du requérant ne présentent pas d'anomalie ; que l'expert qui a relevé qu'aucun impact psychologique du fait de l'infection nosocomiale ne pouvait cependant être retenu, a ensuite évalué les souffrances endurées par M. C...du fait du " contexte dramatique des interventions " à 4 sur une échelle de 1 à 7, et celles liées aux injections d'antibiotiques pendant 8 jours à 1,5 sur une échelle de 1 à 7 ; qu'il résulte également de l'instruction que M. C...demeure porteur d'un staphylocoque multi-résistant dans le site opératoire susceptible à l'avenir d'être à l'origine d'infection récurrente notamment dans la région inguinale, alors même que ce germe est sensible à deux antibiotiques ; qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, en accordant à M. C...la somme globale de 5 000 euros en réparation des troubles de toute nature dans les conditions d'existence et des souffrances endurées, les premiers juges se sont livrés à une estimation insuffisante de ceux-ci ; qu'il en sera fait une juste appréciation en portant à la somme de 8 000 euros le montant de l'indemnité destinée à les réparer ;

5. Considérant, en second lieu, que M. C...demande que lui soit allouée une somme de 100 000 euros au titre de son préjudice moral ainsi qu'une somme de 50 000 euros au titre de son préjudice sexuel ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que les préjudices invoqués soient en lien direct et certain avec l'infection contractée, dès lors que l'échec de la phalloplastie réalisée le 17 janvier 2001 est antérieur à la survenance de l'infection nosocomiale incriminée ; que par suite c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté les conclusions présentées par M. C...tendant à l'indemnisation des préjudices moral et sexuel qu'il aurait subis ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a limité à 5 000 euros le montant de l'indemnité que le centre hospitalier universitaire de Bordeaux a été condamné à lui verser ; qu'il y a lieu de porter à 8 000 euros cette indemnité et de réformer le jugement dans cette mesure ; que le présent arrêt rend sans objet les conclusions de M. C...tendant à lui allouer une provision qui ne saurait être inférieure à 50 000 euros ;

Sur les intérêts :

7. Considérant que lorsqu'ils ont été demandés, et quelle que soit la date de cette demande, les intérêts moratoires dus en application de l'article 1153 du code civil courent à compter du jour où la demande de paiement du principal est parvenue au débiteur ou, en l'absence d'une telle demande préalablement à la saisine du juge, à compter du jour de cette saisine ; qu'en l'espèce, M. C...a droit aux intérêts au taux légal sur la somme de 8 000 euros, calculés à compter du 7 septembre 2012, date d'enregistrement de sa demande d'intérêts, présentée pour la première fois devant la cour administrative d'appel ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge du centre hospitalier de Bordeaux la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. C...et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : L'indemnité que le centre hospitalier universitaire de Bordeaux a été condamné à verser à M. C...est portée de 5 000 euros à 8 000 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 7 septembre 2012.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 3 juillet 2012 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le centre hospitalier universitaire de Bordeaux versera à M. C...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C...est rejeté.

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No 12BX02453


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 12BX02453
Date de la décision : 11/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-01 Responsabilité de la puissance publique. Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité.


Composition du Tribunal
Président : M. PEANO
Rapporteur ?: Mme Florence MADELAIGUE
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-03-11;12bx02453 ?
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