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04/03/2014 | FRANCE | N°13BX02394

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 04 mars 2014, 13BX02394


Vu la requête, enregistrée le 19 août 2013 sous forme de télécopie et régularisée le 23 août 2013, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par Me E... ;

M. A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1303144 du 11 juillet 2013 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse en tant que, après avoir annulé l'interdiction de retour sur le territoire français contenue dans l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 9 juillet 2013, il a rejeté le surplus de ses conclusions qui tendaient à l'annulation de l'obligation de

quitter le territoire sans délai et de la décision fixant le pays de renvoi contenu...

Vu la requête, enregistrée le 19 août 2013 sous forme de télécopie et régularisée le 23 août 2013, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par Me E... ;

M. A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1303144 du 11 juillet 2013 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse en tant que, après avoir annulé l'interdiction de retour sur le territoire français contenue dans l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 9 juillet 2013, il a rejeté le surplus de ses conclusions qui tendaient à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire sans délai et de la décision fixant le pays de renvoi contenues dans cet arrêté ainsi qu'à l'annulation de la décision du 9 juillet 2013 par laquelle le préfet de la Haute-Garonne l'a placé en rétention administrative ;

2°) d'annuler l'obligation de quitter le territoire sans délai et la décision fixant le pays de renvoi contenues dans l'arrêté du 9 juillet 2013 ainsi que la décision du même jour le plaçant en rétention administrative ;

3°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et de mettre à la charge de l'Etat, au visa des dispositions combinées des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et L 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 600 euros au profit de Me E...sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la part contributive de l'Etat prévue en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 février 2014 :

- le rapport de M. Bertrand Riou, président assesseur ;

- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public ;

1. Considérant que, par un arrêté du 18 octobre 2011, le préfet de la Haute-Garonne a rejeté la demande de titre de séjour présentée par M. B...A..., ressortissant mauritanien, et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français ; que, par un arrêt du 16 avril 2013, la présente cour a annulé le jugement du 21 septembre 2012 du tribunal administratif de Toulouse en tant qu'il avait annulé la décision de refuser le séjour à M.A..., l'obligation faite à ce dernier de quitter sans délai le territoire français et la fixation du pays de renvoi contenues dans cet arrêté du 18 octobre 2011 ; que, par un arrêté du 9 juillet 2013, le préfet de la Haute-Garonne a obligé M. A...à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant trois ans ; que, par une décision du même jour, le préfet a décidé son placement en rétention administrative ; que, par un jugement en date du 11 juillet 2013, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 9 juillet 2013 en tant qu'il prononce à l'encontre de l'intéressé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans et a rejeté le surplus de la demande ; que, par la présente requête, M. A...demande à la cour d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le moyen invoqué à l'encontre de toutes les décisions contestées :

2. Considérant que selon la jurisprudence de la Cour de justice de 1'Union européenne [C-383/13 PPU du 10 septembre 2013] une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle une décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision ; que le requérant ne précise pas quels éléments il aurait eu à faire valoir qui auraient conduit le préfet à prendre des décisions différentes de celles qu'il a prises ; que, par suite, doit être écarté le moyen tiré de ce qu'en prenant à son encontre les décisions contestées sans le mettre en mesure de présenter ses observations, le préfet aurait porté atteinte au principe général du droit de l'Union européenne garantissant à toute personne le droit d'être entendue préalablement à l'adoption d'une mesure individuelle l'affectant défavorablement ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

3. Considérant que l'arrêté contesté rappelle les considérations de droit qui constituent le fondement de l'obligation de quitter le territoire français et mentionne les circonstances de fait propres à la situation de M.A..., notamment sa date d'entrée en France, les conditions de son séjour et sa situation privée et familiale ; qu'ainsi, cette décision est suffisamment motivée en droit et en fait au regard des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 susvisée ; que le moyen tiré de son insuffisance de motivation ne peut, dès lors, qu'être écarté ; qu'en outre, cette motivation révèle que, contrairement à ce que soutient le requérant, le préfet s'est livré à un examen de sa situation particulière ;

4. Considérant que si M. A...soutient qu'il réside en France depuis quinze ans, il n'apporte pas de justifications à l'appui de cette allégation ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'il est célibataire et sans enfant ; qu'il ne fait pas état d'attaches d'ordre familial ou privé qu'il aurait constitué en France ; qu'il n'est pas établi qu'il ne dispose plus d'attaches familiales dans son pays d'origine, la Mauritanie, où il a vécu jusqu'à l'âge de vint-et-un ans ; que, dès lors, l'obligation de quitter le territoire français en litige n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; que le préfet n'a donc, en édictant cette obligation, méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ait commis une erreur manifeste d'appréciation quant à l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;

En ce qui concerne le refus de départ volontaire :

5. Considérant que Mme D...C..., attachée principale, chef du service de l'immigration et de l'intégration, a reçu, par arrêté préfectoral du 1er juillet 2013, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de l'Etat dans le département de la Haute-Garonne, délégation de signature du préfet, en cas d'absence du directeur de la réglementation et des libertés publiques, pour signer " les décisions... en ce qui concerne les matières relevant du ministère de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration " ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le signataire de l'arrêté était incompétent pour refuser au requérant un délai de départ volontaire ne peut être accueilli ;

6. Considérant qu'il ne ressort ni de la motivation de l'arrêté contesté, ni d'aucune autre pièce du dossier, que le préfet de la Haute-Garonne se serait cru lié par les critères posés par le II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour refuser à M. A...un délai de départ volontaire ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article 7 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 : " 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. (...) 4. S'il existe un risque de fuite, ou si une demande de séjour régulier a été rejetée comme étant manifestement non fondée ou frauduleuse, ou si la personne concernée constitue un danger pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale, les Etats membres peuvent s'abstenir d'accorder un délai de départ volontaire ou peuvent accorder un délai inférieur à sept jours. " ; qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (... ) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) " ;

8. Considérant que les dispositions précitées de l'article 7 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ne font pas obstacle à ce que les Etats membres prévoient seulement, en cas notamment de risque de fuite d'un étranger faisant l'objet d'une décision de retour, la suppression du délai de départ volontaire ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions précitées du II de l'article L. 511-1 seraient incompatibles avec celles de l'article 7 de la directive en ce qu'elles ne prévoient pas, notamment en cas de risque de fuite, un délai de départ volontaire inférieur à sept jours doit être écarté ;

9. Considérant qu'il est constant que M. A...s'est soustrait à l'exécution d'une mesure de reconduite à la frontière prononcée à son encontre le 28 février 2000 ; que si le tribunal administratif a accueilli son recours formé à l'encontre de la mesure d'éloignement prise à son encontre le 18 octobre 2011, le jugement a été annulé en tant qu'il a prononcé cette annulation, ainsi qu'il a été rappelé au point 1 ci-dessus, par un arrêt de la cour du 16 avril 2013, devenu définitif ; que, par suite, sa situation entrait dans le champ d'application des dispositions précitées du 3° d) du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet a pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, estimer, compte tenu notamment du maintien de l'intéressé sur le territoire malgré les mesures d'éloignement prises à son encontre et de son absence d'attaches en France, que M. A...n'était pas dans une situation particulière permettant d'écarter le risque de fuite ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

10. Considérant que l'arrêté litigieux, qui vise l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale et précise que l'intéressé n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine, est suffisamment motivé en tant qu'il fixe le pays de renvoi ;

11. Considérant, enfin, que les moyens tirés de ce que le préfet s'est estimé lié par la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et la Cour nationale du droit d'asile et que la décision fixant le pays de renvoi méconnaîtrait les dispositions de l'article L 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés par adoption des motifs retenus par les premiers juges ; que si, dans le dernier état de ses écritures, le requérant soutient que sa nationalité mauritanienne serait contestée du fait de son appartenance à la minorité peule, les documents qu'il produit, aux contenus au demeurant contradictoires, ne permettent pas, en tout état de cause, de l'établir ;

En ce qui concerne la décision de placement en rétention administrative :

12. Considérant qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, d'écarter les moyens tirés du défaut de motivation et de l'erreur d'appréciation dont serait entachée la décision attaquée ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 11 juillet 2013, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse n'a fait droit à sa demande qu'en tant qu'elle concernait l'interdiction de retour sur le territoire français ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

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N° 13BX02394


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX02394
Date de la décision : 04/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Bertrand RIOU
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : DE BOYER MONTEGUT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-03-04;13bx02394 ?
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