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03/02/2014 | FRANCE | N°13BX02041

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 03 février 2014, 13BX02041


Vu la requête enregistrée le 19 juillet 2013, présentée pour M. A...B..., demeurant..., par la Selarl Aty avocats ;

M. B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1203841 du 21 février 2013 du tribunal administratif de Toulouse qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 mai 2012 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer d'un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays de renvoi ;

2°) d'enjoindre au préfet de lu

i délivrer un titre de séjour mention " CE-Toutes activités professionnelles ", sous a...

Vu la requête enregistrée le 19 juillet 2013, présentée pour M. A...B..., demeurant..., par la Selarl Aty avocats ;

M. B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1203841 du 21 février 2013 du tribunal administratif de Toulouse qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 mai 2012 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer d'un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays de renvoi ;

2°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour mention " CE-Toutes activités professionnelles ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter d'un mois après la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle du 20 juin 2013 constatant la caducité de la demande d'aide juridictionnelle présentée par M.B... ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

L'affaire ayant été dispensée de conclusions du rapporteur public en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 janvier 2014 le rapport de Mme Rey-Gabriac, premier conseiller ;

1. Considérant que M.B..., ressortissant camerounais, né en 1984, est entré régulièrement en France le 25 août 2002 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de long séjour ; qu'il a alors bénéficié d'une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant ", régulièrement renouvelée jusqu'en 2011 ; que le 28 février 2012, il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour en se prévalant d'une vie familiale avec sa compagne et avec ses proches parents, à savoir sa tutrice légale et ses nièces ; que par un arrêté du 22 mai 2012, le préfet de la Haute-Garonne a opposé un refus à cette demande, a assorti ce refus d'une obligation à M. B...de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays de renvoi ; que M. B... fait appel du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 21 février 2013, qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que M. B...a, le 28 février 2012, effectué sa demande de titre de séjour sur un imprimé intitulé " Admission exceptionnelle au séjour ", en se prévalant exclusivement des circonstances propres à sa vie privée et familiale ; que le tribunal administratif a pu dès lors à bon droit, contrairement à ce qu'a indiqué le préfet de la Haute-Garonne dans son arrêté, regarder une telle demande comme présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors même qu'elle ne mentionnait pas ces dispositions ; que, par suite, en estimant que le préfet de la Haute-Garonne, qui s'est fondé sur les dispositions de l'article L. 313-14 pour refuser la demande de titre de séjour, n'avait pas examiné d'office si l'intéressé pouvait bénéficier de l'application de ces dispositions, les premiers juges, qui n'étaient pas liés par la qualification de la demande faite par l'autorité administrative, n'ont pas méconnu leur office, et n'ont donc pas entaché leur jugement d'irrégularité ;

Au fond :

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus d'admission au séjour :

3. Considérant, en premier lieu, qu'ainsi que l'a relevé le tribunal administratif, M. B..., a déposé sa demande d'admission exceptionnelle au séjour alors que sa carte de séjour temporaire était expirée depuis plus de deux mois ; que la circonstance que sa demande de titre mentionne qu'un rendez-vous lui a été fixé en préfecture le 31 janvier 2012 ne suffit pas à établir qu'il aurait saisi le préfet d'une demande de titre avant l'expiration de son titre de séjour et qu'il devrait alors être regardé comme ayant sollicité le renouvellement de son droit au séjour par le biais d'un changement de statut ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'ainsi qu'il a été dit au point 2 ci-dessus, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas examiné d'office si M. B...pouvait bénéficier de l'application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mais a statué sur sa demande qui devait être regardée comme fondée sur ces dispositions ; que, dans ces conditions, M.B..., ainsi que l'a relevé à bon droit le tribunal administratif, ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, lesquelles sont inopérantes lorsqu'il est répondu à une demande ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; " ;

6. Considérant que le requérant fait valoir qu'à la date de l'arrêté contesté il vivait régulièrement en France depuis plus de neuf ans avec sa soeur qui avait été nommée sa tutrice au décès de sa mère, que depuis son arrivée il a poursuivi ses études avec succès et depuis un an, il partage sa vie avec une ressortissante française avec laquelle il a déposé un pacte civil de solidarité le 24 avril 2012 ; qu'il ressort cependant des pièces du dossier que l'intéressé est entré sur le territoire français à l'âge de dix-huit ans pour y accomplir ses études, ce qui ne lui donnait pas vocation à rester sur le territoire français une fois celle-ci achevée ; que s'il a vécu chez sa soeur désigné comme tutrice par déclaration alors qu'il avait vingt-et-un ans, il est aujourd'hui âgé de vingt-huit ans et n'établit pas la nécessité de sa présence auprès de sa soeur, alors qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où réside son père et où il a vécu la majeure partie de sa vie ; qu'il n'établit pas davantage la réalité de la vie commune avec la ressortissante française avec laquelle il a conclu un pacte civil de solidarité qui n'a été enregistré que postérieurement à l'arrêté attaqué ; qu'en outre, s'il soutient avoir créé avec cette dernière une entreprise le 5 mars 2012 répertoriée au Sirene, il n'apporte aucune justification ou précision à l'appui de cette allégation ; que, dans ces conditions, le refus de séjour attaqué n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. B...une atteinte disproportionnée au regard des motifs qui lui ont été opposés et n'a méconnu ni les dispositions de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le préfet n'a pas non plus entaché sa décision d'une d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la vie personnelle de l'intéressé ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français avec délai de départ volontaire et la décision fixant le pays de renvoi :

7. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que la décision portant refus de séjour n'est pas entachée d'illégalité ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français avec délai de départ volontaire et la décision fixant le pays de renvoi seraient dépourvues de base légale doit être écarté ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article R. 311-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " En cas de refus de délivrance de tout titre de séjour, l'étranger est tenu de quitter le territoire français " ; que M.B..., qui avait la possibilité, pendant l'instruction de sa demande, de faire connaître, de manière utile et effective, les éléments justifiant son admission au séjour, ne pouvait ignorer qu'en cas de rejet de sa demande de titre de séjour, il pourrait faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; que selon la jurisprudence de la Cour de justice de 1'Union européenne [C-383/13 PPU du 10 septembre 2013] une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle une décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant aurait eu de nouveaux éléments à faire valoir qui auraient conduit le préfet à prendre une décision différente ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'en prenant à son encontre une mesure d'éloignement sans le mettre en mesure de présenter ses observations, le préfet aurait porté atteinte au principe général du droit de l'Union européenne garantissant à toute personne le droit d'être entendue préalablement à l'adoption d'une mesure individuelle l'affectant défavorablement et également méconnu les dispositions de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ne peut en tout état de cause qu'être écarté ;

9. Considérant qu'en vertu des dispositions du I du L. 511 1 du code de l'entrée du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée mais n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour lorsque, notamment, un refus de délivrance d'un titre de séjour a été opposé à l'étranger ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'obligation de quitter le territoire contestée doit être écarté dès lors que l'arrêté litigieux indique précisément les raisons de droit et de fait pour lesquelles le préfet a refusé de délivrer à l'intéressé un titre de séjour ;

10. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. (...) " ; ces dispositions n'imposent pas au préfet de motiver spécifiquement l'octroi du délai de départ volontaire quand celui-ci correspond à la durée légale fixée à trente jours et que l'étranger n'a présenté aucune demande afin d'obtenir un délai supérieur ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision fixant le délai de départ volontaire doit être écarté ; que M. B...ne peut à cet égard utilement invoquer, à l'encontre de cette décision, les dispositions de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats-membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, dès lors qu'à la date de l'arrêté attaqué, cette directive avait été transposée en droit interne par la loi du 16 juin 2011 dans les dispositions précitées du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 mai 2012 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

12. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M.B..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

18.Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. B...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

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No 13BX02041


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX02041
Date de la décision : 03/02/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CHEMIN
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : CABINET ATY AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-02-03;13bx02041 ?
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