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06/01/2014 | FRANCE | N°12BX02250

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 06 janvier 2014, 12BX02250


Vu la requête enregistrée par courriel le 21 août 2012, et régularisée par courrier le 31 août suivant, présentée pour M. A...D..., demeurant..., par Me C...;

M. D...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101954 du 28 juin 2012 du tribunal administratif de Limoges qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 14 octobre 2011 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a annulé la décision du 21 juin 2011 de l'inspecteur du travail de la 1ère section du département de l'Indre et autorisé son licenciement ;
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3°) de mettre à la charge de l'Et...

Vu la requête enregistrée par courriel le 21 août 2012, et régularisée par courrier le 31 août suivant, présentée pour M. A...D..., demeurant..., par Me C...;

M. D...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101954 du 28 juin 2012 du tribunal administratif de Limoges qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 14 octobre 2011 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a annulé la décision du 21 juin 2011 de l'inspecteur du travail de la 1ère section du département de l'Indre et autorisé son licenciement ;

2°) d'annuler la décision du 14 octobre 2011 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens comprenant le timbre fiscal de 35 euros ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 décembre 2013 :

- le rapport de M. Joecklé, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Bentolila, rapporteur public ;

1. Considérant que M. D...fait appel du jugement du 28 juin 2012 du tribunal administratif de Limoges qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 14 octobre 2011 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a annulé la décision du 21 juin 2011 de l'inspecteur du travail de la 1ère section du département de l'Indre et autorisé son licenciement ;

2. Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives, qui bénéficient d'une protection exceptionnelle dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande d'autorisation de licenciement présentée par l'employeur est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié ; qu'à ce titre, lorsque la demande est fondée sur la cessation d'activité de l'entreprise, celle-ci n'a pas à être justifiée par l'existence de mutations technologiques, de difficultés économiques ou de menaces pesant sur la compétitivité de l'entreprise ; qu'il appartient alors à l'autorité administrative de contrôler, outre le respect des exigences procédurales légales et des garanties conventionnelles, que la cessation d'activité de l'entreprise est totale et définitive, que l'employeur a satisfait, le cas échéant, à l'obligation de reclassement prévue par le code du travail et que la demande ne présente pas de caractère discriminatoire ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2421-3 du code du travail : " Le licenciement envisagé par l'employeur d'un délégué du personnel ou d'un membre élu du comité d'entreprise titulaire ou suppléant, d'un représentant syndical au comité d'entreprise ou d'un représentant des salariés au comité d'hygiène de sécurité et des conditions de travail est soumis au comité d'entreprise, qui donne un avis sur le projet de licenciement. Lorsqu'il n'existe pas de comité d'entreprise dans l'établissement, l'inspecteur du travail est saisi directement. La demande d'autorisation de licenciement est adressée à l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement dans lequel le salarié est employé. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 2421-8 du même code : " L'entretien préalable au licenciement a lieu avant la consultation du comité d'entreprise faite en application de l'article L. 2421-3. A défaut de comité d'entreprise, cet entretien a lieu avant la présentation de la demande d'autorisation de licenciement à l'inspecteur du travail. " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que MeB..., mandataire judiciaire de la société Simade, placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Châteauroux le 31 mars 2010, a engagé une procédure de licenciement des salariés protégés de l'entreprise et notamment de M.D..., membre titulaire de la délégation unique du personnel et conseiller prud'hommal ; que l'entretien préalable entre l'employeur et M. D...s'est déroulé le 2 décembre 2010 ; que, le 6 décembre 2010, Me B..., liquidateur judiciaire de cette société, a saisi l'inspection du travail d'une demande d'autorisation de licenciement de l'intéressé ; que, le 8 février 2011, l'inspecteur du travail de la 1ère section du département de l'Indre a refusé l'autorisation de licencier l'intéressé au motif, notamment, de l'irrégularité de la procédure préalable à sa saisine ; que le liquidateur judiciaire a alors engagé une seconde procédure de licenciement en saisissant l'inspecteur du travail le 19 avril 2011 ; que l'autorisation de licenciement lui a été à nouveau refusée par une décision du 21 juin 2011 de l'inspecteur du travail de l'Indre ; que, saisi le 18 août 2011 d'un recours hiérarchique formé par MeB..., le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a, par la décision du 14 octobre 2011, annulé la décision de l'inspecteur du travail et autorisé le licenciement de M. D...;

5. Considérant qu'à l'appui de son moyen tiré de ce que l'absence d'un second entretien préalable l'a privé d'une garantie de nature, selon lui, à entacher la procédure de licenciement d'une irrégularité substantielle, M. D...soutient tout d'abord qu'un délai de presque quatre mois s'est écoulé entre le 6 décembre 2010, date de la première demande d'autorisation de le licencier, et le 19 avril 2011, date de la seconde demande ; que, toutefois, la demande d'autorisation de procéder au licenciement de ce salarié protégé du 19 avril 2011 était fondée sur le même motif, lié à la cessation d'activité de la société Simade à la suite de sa mise en liquidation judiciaire, que celui indiqué par l'employeur dans sa demande initiale du 6 décembre 2010 ; que si M. D...soutient ensuite que le délai de presque quatre mois qui s'est écoulé entre les deux demandes adressées à l'inspecteur du travail ne pouvait être regardé par les premiers juges comme étant bref, il ressort cependant des pièces du dossier et notamment des termes des lettres recommandées des 9 et 25 mars 2011 qui lui ont été adressées par le liquidateur judiciaire ainsi que de la sommation d'assister à une réunion du 8 avril 2011 en vue de fixer l'ordre du jour du comité d'entreprise délivrée par exploit d'huissier du 7 avril 2011, que le comportement de l'intéressé n'est pas totalement étranger au retard pris dans la convocation de la réunion du comité d'entreprise prévue le 14 avril 2011 ; qu'ainsi, et alors même que le liquidateur judiciaire invoquait, lors de sa demande du 19 avril 2011, une modification de la situation économique de la société Simade dans le cadre des opérations liquidatives dès lors que les baux avaient été résiliés, l'ensemble du matériel avait fait l'objet d'une vente aux enchères publiques et qu'à l'exception des salariés protégés, l'ensemble des autres salariés avaient déjà été tous licenciés, l'employeur n'était pas tenu de convoquer ce salarié à un nouvel entretien ; que, dès lors, le moyen invoqué par le requérant doit être écarté ;

6. Considérant que, comme l'ont relevé à juste titre les premiers juges, la circonstance que l'ordre du jour de la convocation de la réunion du comité d'entreprise devant se prononcer sur les licenciements des salariés protégés ne mentionnait ni leur identité, ni leur mandat, n'a privé les membres dudit comité d'aucune information, ni privé les salariés d'aucune garantie dès lors qu'il ressort des mentions figurant sur le procès-verbal de la réunion du comité d'entreprise que les membres de ce comité ont été informés de l'ensemble des mandats dont bénéficiaient les salariés protégés concernés ; que, par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la convocation du comité d'entreprise doit être écarté ;

7. Considérant que les premiers juges ont relevé qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier que la société Simade, placée en liquidation judiciaire, ait fait l'objet d'une offre de reprise d'activités ni, en tout état de cause, que la création concomitamment à la mise en liquidation de la société d'une entreprise présentée comme exerçant une activité similaire ait constitué une perspective de reprise de nature à ôter son caractère économique au licenciement de M. D... ; qu'ils ont également considéré que, contrairement à ce que soutenait l'intéressé, l'administration n'avait pas à faire porter son contrôle de la réalité de la suppression du poste de l'intéressé sur les raisons pour lesquelles aucune offre de reprise n'a pu être formulée ; qu'il y a lieu, par adoption de ces motifs retenus à juste titre par les premiers juges, d'écarter ces moyens repris de manière identique devant la cour ;

8. Considérant qu'eu égard à la cessation totale d'activité de la société Simade, à l'absence de toute perspective de reprise de celle-ci, et au licenciement subséquent de l'ensemble des salariés de cette entreprise, il ne ressort pas des pièces du dossier que la demande de licenciement de M. D...présenterait un caractère discriminatoire ; que, dès lors, la circonstance que la décision contestée se borne à constater, sans la motiver, l'absence de lien de l'autorisation de licenciement avec le mandat syndical détenu par l'intéressé est, dans les circonstances de l'espèce, sans incidence sur la légalité de la décision contestée ;

9. Considérant qu'aux de l'article L. 1233-4 du code du travail : " (...) Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent ou, à défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, sur un emploi d'une catégorie inférieure ne peut être réalisé dans le cadre de l'entreprise ou, le cas échéant, dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient. Les offres de reclassement proposées au salarié doivent êtres écrites et précises. " ; que l'article 28 de l'accord national du 12 juin 1987 sur les problèmes généraux de l'emploi dans la métallurgie fait obligation aux entreprises de ce secteur qui sont conduites à réduire ou cesser leur activité de rechercher toutes les solutions permettant d'assurer le reclassement des salariés, notamment à l'extérieur de l'entreprise, en particulier dans le cadre des industries des métaux, en faisant appel à la commission territoriale de l'emploi et en informant cette dernière conformément à l'article 2 de cet accord ; que ces dispositions étendent ainsi le périmètre de reclassement et prévoient une procédure destinée à favoriser un reclassement des salariés à l'extérieur de l'entreprise avant tout licenciement collectif pour motif économique ;

10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société Simade, qui relevait des dispositions conventionnelles applicables dans la métallurgie, a, préalablement à l'engagement de la première procédure de licenciement, par un courrier du 25 novembre 2010, informé l'union des industries et des métiers de la métallurgie de l'Indre (UIMM) de ce qu'elle envisageait de cesser toute activité et en conséquence de procéder au licenciement collectif des salariés ; que ce faisant, et ainsi d'ailleurs que l'a estimé l'UIMM qui l'a informée, le 26 novembre 2010, que ce courrier valait saisine de la commission territoriale de l'emploi, la société Simade devait être regardée comme ayant satisfait à cette obligation sans qu'il ait été nécessaire pour elle de réitérer cette saisine préalablement à la seconde saisine de l'inspecteur du travail eu égard au délai séparant les deux procédures d'autorisation de licenciement et au fait que ces deux demandes portaient sur des faits identiques ; qu'au demeurant, il ressort des pièces du dossier que le liquidateur judiciaire a entrepris de nombreuses démarches auprès d'entreprises du département de l'Indre en vue du reclassement externe des salariés concernés par cette cessation d'activité ;

11. Considérant qu'il n'appartient pas à l'autorité administrative de rechercher si une cessation d'activité est due à la faute ou à la légèreté blâmable de l'employeur, sans que sa décision fasse obstacle à ce que le salarié, s'il s'y estime fondé, mette en cause devant les juridictions compétentes la responsabilité de l'employeur en demandant réparation des préjudices que lui auraient causé cette faute ou légèreté blâmable dans l'exécution du contrat de travail ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 14 octobre 2011 du ministre du travail, de l'emploi et de la santé ;

13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font en tout état de cause obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. D...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat la contribution pour l'aide juridique d'un montant de 35 euros que le requérant a acquittée ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

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N° 12BX02250


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 12BX02250
Date de la décision : 06/01/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

66-07-01 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés.


Composition du Tribunal
Président : M. CHEMIN
Rapporteur ?: M. Jean-Louis JOECKLÉ
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : BISIAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-01-06;12bx02250 ?
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