Vu la requête, enregistrée le 15 mars 2011, présentée pour la SARL Le Boléro, société à responsabilité limitée dont le siège social est situé 2, avenue des Elysées à Valras-Plage (34350) et représentée par son gérant en exercice, par Me Condat, avocat ;
La SARL Le Boléro demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0602892 du 4 janvier 2011 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du préfet de l'Ariège du 26 janvier 2006 portant refus de dérogation de fermeture tardive de la discothèque " le Big Boy " exploitée dans la station de ski Les Monts d'Olmes sur le territoire de la commune de Montferrier (Ariège), d'autre part, à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 100 000 euros en réparation des préjudices subis du fait de cette décision ;
2°) d'annuler la décision contestée du 26 janvier 2006 et de condamner l'Etat à lui verser, en réparation des préjudices subis du fait de ce refus, une indemnité de 75 378,63 euros ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code pénal et le code de procédure pénale ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;
Vu l'arrêté du 13 décembre 2000 du préfet de l'Ariège relatif à la police générale des débits de boissons dans le département ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 février 2013 :
- le rapport de M. Jean-Louis Joecklé, président-assesseur ;
- les conclusions de M. Guillaume de la Taille Lolainville, rapporteur public ;
1. Considérant que, par un arrêté du 13 décembre 2000, le préfet de l'Ariège a fixé les heures d'ouverture et de fermeture des débits de boissons et discothèques ; que, s'agissant des discothèques, dont l'horaire de fermeture est fixée à trois heures, ledit arrêté a prévu en son article 5 que des dérogations pouvaient être obtenues, soit permanentes (ouverture toute la nuit) pour notamment les nuits de Noël et de la saint Sylvestre et les fêtes locales, soit exceptionnelles et temporaires (banquets et mariages) accordées par le maire pour les débits de boissons et par le préfet ou les sous-préfets du département de l'Ariège pour les discothèques ; que la SARL Le Boléro, qui exploite depuis 2001, durant le premier semestre de chaque année, une discothèque dénommée " Le Big Boy " dans la station de ski " Les Monts d'Olmes " située sur le territoire de la commune de Montferrier (Ariège), a bénéficié d'une dérogation à cette réglementation locale pour la période de janvier à juin 2005 ; que, le 1er septembre 2005, le gérant de cette discothèque a demandé la prorogation de cette dérogation jusqu'au 31 décembre 2005 ; que, par une décision du 11 octobre 2005, le préfet de l'Ariège a refusé cette dérogation horaire au motif que cet établissement faisait régulièrement l'objet de troubles à l'ordre public, tout en précisant qu'une nouvelle demande pourrait être faite pour l'année 2006 dans l'hypothèse où aucun incident n'aura été signalé ; que, saisi d'une nouvelle demande de dérogation horaire pour le premier semestre 2006, le préfet de l'Ariège a, par la décision contestée du 26 janvier 2006, refusé d'accorder à la SARL Le Boléro cette dérogation de fermeture tardive ; que la SARL Le Boléro relève appel du jugement n° 0602892 du 4 janvier 2011 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de cette décision du préfet de l'Ariège, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé le 24 mars 2006 et, d'autre part, à la condamnation de l'Etat à réparer les préjudices qu'elle a subis de ce fait ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet de l'Ariège :
2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le jugement attaqué a été notifié au gérant de la SARL Le Boléro le 14 janvier 2011 et que la requête d'appel a été enregistrée au greffe de la cour le 15 mars 2011, soit dans le délai d'appel de deux mois prévu à l'article R. 811-2 du code de justice administrative ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par le préfet de l'Ariège et tirée de la tardiveté de la requête doit être écartée ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
3. Considérant que pour refuser d'accorder la dérogation sollicitée pour le premier semestre 2006, le préfet de l'Ariège s'est fondé principalement sur le motif que " des troubles à l'ordre public persistent : une bagarre a eu lieu dans la nuit du 30 au 31 décembre 2005 " ; qu'il est constant que les faits ainsi relevés, qui sont contestés par la société requérante notamment en raison de la fermeture de son établissement durant la nuit en cause, n'ont pas donné lieu à un dépôt de plainte ni à l'établissement d'un procès-verbal ; que ces éléments ne sauraient suffire à eux seuls, compte tenu de leur imprécision sur leur origine même et sur leur imputabilité à l'exploitant de cet établissement, à établir l'existence de ceux-ci ; que si le préfet de l'Ariège se prévaut, dans ses écritures en défense, d'un " procès-verbal de gendarmerie n°115/2006 ", selon lequel " bien que la brigade n'ait pas été sollicitée, dans la nuit du 30 au 31 décembre 2005, une bagarre a éclaté entre les responsables (gérants et videurs) et des clients. Renseignements confirmés sur place par les habitants de la station cette semaine (...) ", un tel document, qui de surcroît ne précise pas l'identité desdits habitants, n'est pas revêtu de la présomption légale d'authenticité telle qu'elle est conférée en matière de contravention par les dispositions de l'article 537 du code de procédure pénale ; qu'ainsi, la réalité des faits qui ont justifié le refus d'accorder la dérogation sollicitée par la SARL Le Boléro n'est pas établie ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que le préfet de l'Ariège, qui a de manière déterminante motivé sa décision sur la bagarre qui a eu lieu dans la nuit du 30 au 31 décembre 2005, aurait pris la même décision s'il n'avait retenu que la persistance de troubles à l'ordre public depuis 2004 alors qu'il est constant qu'une dérogation à la réglementation locale a été accordée à la SARL Le Boléro pour la saison 2004-2005, tout comme d'ailleurs pour les saisons 2006-2007 et 2007-2008 ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que la SARL Le Boléro est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de la décision contestée ;
Sur les conclusions à fin indemnitaire :
5. Considérant que l'illégalité dont est entaché le refus du préfet de l'Ariège du 26 janvier 2006 est constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; que, toutefois, si la requérante soutient qu'une clientèle substantielle reste attachée à cette discothèque pour la partie de la nuit compris entre 3 heures et 7 heures du matin, il ne résulte pas de l'instruction que la fermeture totale de cet établissement, décidée librement par ses dirigeants durant la saison 2005-2006 afin de préserver, selon eux, l'exploitation 2007, soit la conséquence directe et nécessaire du refus illégal d'accorder à cette société une dérogation pour fermeture tardive et ait engendré un préjudice financier de 38 127,68 euros au titre de la saison 2005-2006 et de 2 250,95 euros au titre de la saison 2006-2007 ; que le préjudice moral allégué par la requérante, résultant selon elle de l'impossibilité d'exercer son activité et de l'atteinte portée à sa réputation, n'est pas davantage établi ; que, dès lors, la SARL Le Boléro n'est pas fondée à se plaindre du rejet, par le jugement attaqué, de ses conclusions indemnitaires ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;
7. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros que demande la SARL Le Boléro au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La décision susvisée du 26 janvier 2006 du préfet de l'Ariège est annulée.
Article 2 : Le jugement n°0602892 du 4 janvier 2011 du tribunal administratif de Toulouse est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à la SARL Le Boléro la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL Le Boléro est rejeté.
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N° 11BX00684