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05/02/2013 | FRANCE | N°12BX02126

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 05 février 2013, 12BX02126


Vu le recours enregistré le 8 août 2012 par télécopie et régularisé par courrier le 13 août 2012, et le mémoire complémentaire enregistré le 5 octobre 2012 présentés par le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt ;

Le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 120831 du 13 juillet 2012 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a condamné l'Etat à verser à Mme A...Berthoumieux une provision de 4 000 euros au titre du premier versement de

l'indemnité temporaire de mobilité ;

2°) de rejeter la demande de Mme Berthoumie...

Vu le recours enregistré le 8 août 2012 par télécopie et régularisé par courrier le 13 août 2012, et le mémoire complémentaire enregistré le 5 octobre 2012 présentés par le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt ;

Le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 120831 du 13 juillet 2012 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a condamné l'Etat à verser à Mme A...Berthoumieux une provision de 4 000 euros au titre du premier versement de l'indemnité temporaire de mobilité ;

2°) de rejeter la demande de Mme Berthoumieux présentée devant le tribunal administratif de Toulouse ;

Il soutient que :

- l'ordonnance est insuffisamment motivée ;

- le juge des référés a commis une erreur de droit en estimant que la décision du préfet de la Haute-Garonne du 12 juillet 2011 créait des droits au profit de l'agent dès lors que cette décision se borne à tirer les conséquences sur le plan financier de la décision d'affectation au centre de prestations comptables mutualisées dans le cadre de la restructuration des services qui n'ouvrait pas droit à l'allocation temporaire de mobilité ;

- une décision se bornant à tirer les conséquences financières d'une décision antérieure n'est pas créatrice de droits et peut être retirée à tout moment ;

- la décision du 12 juillet 2011 pouvait être retirée par décision ministérielle du 30 décembre 2011 ;

- l'indemnité temporaire de mobilité n'est versée qu'en cas d'affectation décidée à l'initiative de l'administration dans les conditions fixées par l'article 2 du décret n° 2008-369 du 17 avril 2008 ;

- les agents du ministère de l'agriculture ne sont pas éligibles à cette indemnité mais à la prime de restructuration prévue par l'article 2 du décret n° 2008-366 du 17 avril 2008 et l'arrêté du 31 mars 2009 qui imposent une mobilité géographique de l'agent, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ;

- les emplois du ministère de l'écologie et les emplois de direction départementale interministérielle susceptibles de donner lieu à l'indemnité temporaire de mobilité ont été déterminés par le ministre de l'écologie dont ne relève pas l'intéressée ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 23 novembre 2012, présenté pour Mme Berthoumieux, par Me Briand, avocat ; Mme Berthoumieux demande à la cour :

- de rejeter le recours du ministre ;

- par la voie de l'appel incident, de majorer la provision fixée par l'ordonnance d'une somme de 2 000 euros correspondant au deuxième versement, échu à la date de l'arrêt à intervenir, de l'indemnité temporaire de mobilité ;

- de mettre à la charge de l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir que :

- le recours du ministre est tardif ;

- qu'il est également irrecevable en ce qu'il présente un caractère collectif, le ministre n'ayant régularisé son recours que postérieurement au délai d'appel ;

- l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif est suffisamment motivée ;

- la décision d'attribution du 12 juillet 2011 n'a jamais été retirée ;

- aucune disposition législative ou réglementaire ne prévoit que les agents du ministère de l'agriculture ne seraient pas éligibles à la prime de restructuration ;

- elle n'a pas bénéficié de la prime de restructuration de service et n'a donc pas cumulé différentes primes ;

- le décret n° 2008-369 ne prévoit aucun exigence de mobilité géographique mais une seule mobilité à l'initiative de l'administration ;

- les fusions de services et les centres des prestations comptables mutualisées (CPCM) ont été mis en place à l'initiative de l'administration ;

- les dates des premiers versements prévues par la décision du 12 juillet 2011, qui est définitive et créatrice de droits, sont échues ;

- la décision du 12 juillet 2011 ne pouvait être retirée au-delà d'un délai de quatre mois à compter de son édiction ;

- le refus d'exécuter la décision du 12 juillet 2011 constitue une décision de pure opportunité prise par le ministre ;

- la décision d'attribution de la prime est fondée sur l'arrêté du 5 février 2011 du ministère de l'écologie pris en application des articles 1 et 2 du décret n° 2008-369 du 17 avril 2008 applicables aux agents du ministère de l'agriculture dès lors qu'ils sont intégrés dans une direction départementale interministérielle supportée budgétairement par le ministère de l'Ecologie ;

- le décret n° 2008-369 ne conditionne pas l'éligibilité des agents à la prime à une décision prise exclusivement par leur ministère de rattachement ;

- le versement de la seconde partie de l'indemnité est échue à la date de l'arrêt, ce qui justifie la majoration de la provision à hauteur de 2 000 euros ;

Vu l'ordonnance en date du 20 novembre 2012 fixant la clôture de l'instruction le 4 décembre 2012 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;

Vu la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 modifiée ;

Vu le décret n° 2008-366 du 17 avril 2008 ;

Vu le décret n° 2008-369 du 17 avril 2008 ;

Vu l'arrêté du 5 avril 2011 déterminant les emplois du ministère de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement et les emplois de direction départementale interministérielle supportés budgétairement par le ministère de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement susceptibles de donner lieu à l'attribution de l'indemnité temporaire de mobilité instituée par le décret n° 2008-369 du 17 avril 2008 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 janvier 2013 :

- le rapport de M. Bernard Chemin, président de chambre ;

- les conclusions de M. Pierre Bentolila, rapporteur public,

- et les observations de Me Briand, avocat de Mme Berthoumieux ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie " ;

2. Considérant que Mme Berthoumieux, secrétaire administratif de classe exceptionnelle des services du ministère de l'agriculture, a été affectée le 1er décembre 2010 au centre de prestations comptables mutualisées (CPCM) créé entre ce ministère et le ministère de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, intégré au sein de la direction régionale de l'environnement de l'aménagement et du logement (DREAL) de Midi-Pyrénées ; que par une décision du 12 juillet 2011, le préfet de la région Midi-Pyrénées, préfet de la Haute-Garonne, lui a attribué une indemnité temporaire de mobilité d'un montant de 10 000 euros, une première fraction d'un montant de 4 000 euros devant être versée dès la prise de fonctions effective de l'agent le 1er décembre 2010 ; que Mme Berthoumieux a sollicité, par courrier du 16 novembre 2011 adressé au directeur régional de l'environnement, de l'aménagement, du logement de Midi-Pyrénées, l'exécution de la décision du 12 juillet 2011 ; que par une décision du 30 décembre 2011, ce dernier a refusé de faire droit à cette demande, au motif que le ministre de l'agriculture ne souhaitait pas que cette indemnité lui soit versée, par souci d'égalité de traitement avec les autres agents du ministère de l'agriculture ; que le ministre de l'agriculture de l'agro-alimentaire et de la forêt relève appel de l'ordonnance en date du 13 juillet 2012 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a condamné l'Etat à verser à Mme Berthoumieux une provision de 4 000 euros, au titre du premier versement de l'indemnité temporaire de mobilité ; que par la voie de l'appel incident, Mme Berthoumieux demande que la provision de 4 000 euros soit majorée d'une somme de 2 000 euros correspondant à la deuxième fraction de l'indemnité devant être versée le 1er juin 2012 au terme d'un an et six mois de service ;

Sur la régularité de l'ordonnance :

3. Considérant que pour accorder la provision sollicitée, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse, a précisé que la décision du 12 juillet 2011, qui accordait un avantage financier à l'intéressée, était créatrice de droits à son profit, et que n'ayant été ni rapportée ni annulée ni déclarée illégale, l'Etat était tenu d'en faire exécution au profit du fonctionnaire qui en faisait la demande ; qu'il a ainsi suffisamment motivé son ordonnance ; que, par suite, le ministre n'est pas fondé à soutenir que cette ordonnance serait irrégulière;

Sur la provision :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 1 du décret du 17 avril 2008 portant créant d'une indemnité temporaire de mobilité : " Dans les administrations de l'Etat (...) une indemnité temporaire de mobilité peut être accordée, dans le cadre d'une mobilité fonctionnelle ou géographique, aux fonctionnaires et aux agents non titulaires de droit public recrutés pour une durée indéterminée et régis par le décret du 17 janvier 1986 susvisé. " ; que l'article 2 du même décret dispose que : " L'indemnité est attribuée à la double condition de l'exercice réel d'une mobilité décidée à la demande de l'administration et de l'existence d'une difficulté particulière à pourvoir un emploi. Le ou les emplois susceptibles de donner lieu à l'attribution d'une indemnité temporaire de mobilité sont déterminés par arrêté du ministre intéressé. Cet arrêté fixe également la période de référence pour le versement de l'indemnité dans la limite de six années, sans que cette période puisse être inférieure à trois ans. " ; qu'aux termes de l'article 1 de l'arrêté ministériel du 5 avril 2011 pris pour l'application des dispositions précitées : " Les fonctionnaires et agents non titulaires de droit public recrutés pour une durée indéterminée (...) peuvent bénéficier de l'indemnité temporaire de mobilité instituée par le décret du 17 avril 2008 susvisé dès lors qu'ils sont affectés dans les services du ministère chargé du développement durable ou sur des emplois en direction départementale interministérielle supportés budgétairement par ce ministère. La liste de ces emplois est fixée dans les annexes 1 et 2 au présent arrêté. " ; que l'annexe 1 de cet arrêté, fixe au nombre des emplois ouvrant droit à l'indemnité temporaire de mobilité pour des affectations effectives au plus tard le 30 juin 2011, tous les emplois des pôles supports intégrés (unité gestion administrative/paye) et des centres comptables mutualisés (CPCM) ;

5. Considérant qu'il résulte des dispositions précités du décret du 17 avril 2008 que la décision affectant Mme Berthoumieux au centre des prestations comptables mutualisées (CPCM) de Midi-Pyrénées rendait seulement cet agent susceptible d'obtenir l'indemnité temporaire de mobilité ; qu'ainsi, la décision du 12 juillet 2011 attribuant cette indemnité à Mme Berthoumieux ne constituait pas la simple liquidation d'une créance découlant de la mesure d'affectation de cet agent, mais présentait le caractère d'une décision explicite accordant un avantage financier, créatrice de droits au profit de l'intéressée, ainsi que l'a estimé à juste titre le premier juge ; que cette décision n'a jamais été rapportée par le ministre de l'agriculture, qui s'est borné à informer les services de la DREAL de Midi-Pyrénées qu'il ne souhaitait pas que l'indemnité soit versée à la requérante " par souci d'égalité de traitement avec les autres agents du ministère ", et il est constant qu'elle n'a pas davantage été annulée ni fait l'objet d'une déclaration d'illégalité par une décision juridictionnelle ; que le ministre ne saurait dès lors, et en tout état de cause, utilement se prévaloir d'une éventuelle illégalité de la décision du 12 juillet 2011 ; que, dans ces conditions, l'obligation de l'Etat d'assurer l'exécution de cette décision et de verser à Mme Berthoumieux, qui avait pris ses fonctions au CPCM de Midi-Pyrénées le 1er décembre 2010, la 1ère fraction de l'indemnité temporaire de mobilité venant à échéance à cette date, ne présente pas un caractère sérieusement contestable ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non recevoir opposées en défense par Mme Berthoumieux, que le ministre de l'agriculture de l'agro-alimentaire et de la forêt n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a condamné l'Etat à verser à l'intéressée une provision de 4 000 euros correspondant au premier versement de l'indemnité temporaire de mobilité prévu par la décision du 12 juillet 2011 ;

Sur l'appel incident :

7. Considérant que les conclusions d'appel incident présentées par Mme Berthoumieux, tendant à ce que la provision accordée par le premier juge soit majorée de la somme de 2 000 euros correspondant au versement de la deuxième fraction de l'indemnité temporaire de mobilité, échue le 1er juin 2012, constitue, alors même que l'intéressée ayant accompli un an et six mois de service serait en droit d'y prétendre, une demande qui, présentée pour la première fois en appel, n'est pas recevable ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme Berthoumieux d'une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE

Article 1er : Le recours du ministre de l'agriculture de l'agro-alimentaire et de la forêt est rejeté.

Article 2 : Les conclusions d'appel incident de Mme Berthoumieux sont rejetées.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 500 euros à Mme Berthoumieux au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'agriculture de l'agro-alimentaire et de la forêt, au ministre de l'écologie du développement durable et de l'énergie, et à Mme A... Berthoumieux.

Copie pour information en sera adressée au préfet de la région Midi-Pyrénées, préfet de la Haute-Garonne et au directeur régional de l'équipement de l'aménagement et du logement de Midi-Pyrénées.

Délibéré après l'audience du 8 janvier 2013 à laquelle siégeaient :

M. Bernard Chemin, président,

M. Jean-Emmanuel Richard, premier conseiller,

Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller ;

Lu en audience publique, le 5 février 2013.

Le premier-assesseur,

Jean-Emmanuel Richard

Le président,

Bernard Chemin

Le greffier,

André Gauchon

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

André Gauchon

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No 12BX02126


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 12BX02126
Date de la décision : 05/02/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. CHEMIN
Rapporteur ?: M. Bernard CHEMIN
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : BRIAND

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2013-02-05;12bx02126 ?
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