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08/01/2013 | FRANCE | N°12BX00984

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 08 janvier 2013, 12BX00984


Vu la requête, enregistrée le 17 avril 2012, présentée par le préfet de la Vienne, domicilié... ;

Le préfet de la Vienne demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1102289 du 7 mars 2012 par lequel le tribunal administratif de Poitiers, d'une part, a annulé l'arrêté en date du 31 août 2011 par lequel il a refusé de délivrer à M. C...A...un titre de séjour, et, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à M. A...une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 8 jours à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour

de retard et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en applicati...

Vu la requête, enregistrée le 17 avril 2012, présentée par le préfet de la Vienne, domicilié... ;

Le préfet de la Vienne demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1102289 du 7 mars 2012 par lequel le tribunal administratif de Poitiers, d'une part, a annulé l'arrêté en date du 31 août 2011 par lequel il a refusé de délivrer à M. C...A...un titre de séjour, et, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à M. A...une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 8 jours à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Le préfet de la Vienne soutient :

- que la requête du requérant était devenue sans objet ;

- que, l'intéressé a fait une fausse déclaration concernant sa date d'entrée en France ; que l'intéressé n'a ni démontré ni même soutenu auprès de ses services que la détérioration de ses empreintes serait liée à son ancien travail ;

- que les premiers juges ont commis une erreur d'appréciation en lui enjoignant de délivrer au requérant un document provisoire de séjour dès lors que l'intéressé réside à Paris ;

- que la mise à la charge de l'Etat d'une somme de 1200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est manifestement excessive d'autant que l'intéressé bénéficie de l'aide juridictionnelle et ne justifie d'aucun frais dans la première instance ;

- qu'il entend reprendre en appel les moyens développés en première instance en référé et au fond ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 août 2012, présenté pour M. A...par Me Malabre qui conclut au rejet de la requête et demande à la cour de condamner l'Etat à verser à son conseil la somme de 2392 euros sur le fondement des articles 35 et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que ce dernier s'engage à renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

Il fait valoir :

- que la requête d'appel est irrecevable dès lors qu'elle ne comporte pas le jugement de première instance ;

- que le préfet n'établit pas que les empreintes n'ont pu être exploitées ;

- que l'arrêté méconnaît les dispositions de l'article L. 741-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le préfet ne démontre pas la fraude délibérée ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Bordeaux en date du 15 juin 2012 maintenant de plein droit à M. A...le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier;

Vu l'ordonnance fixant en dernier lieu la clôture de l'instruction au 17 août 2012 ;

Vu le règlement (CE) n° 2725/2000 du Conseil du 11 décembre 2000 concernant la création du système " Eurodac " pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l'application efficace de la convention de Dublin ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée sur l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 décembre 2012 :

- le rapport de Mme Mireille Marraco, président ;

- les conclusions de M. David Katz, rapporteur public ;

- les observations de MeB..., substituant Me Malabre, avocat de M.A... ;

Vu, enregistrée le 5 décembre 2012, la note en délibéré présentée pour M. A...;

1. Considérant que M.A..., ressortissant soudanais, a sollicité le 5 juillet 2011 auprès du préfet de la Vienne son admission au séjour au titre de l'asile ; que, par un arrêté du 31 août 2011, sa demande a été rejetée ; que par un jugement du 7 mars 2012 le tribunal administratif de Poitiers, d'une part, a annulé cet arrêté, d'autre part, a enjoint au préfet de délivrer à l'intéressé une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 8 jours à compter de la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1200 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 ; que le préfet de la Vienne interjette appel de ce jugement ;

Sur le non-lieu à statuer :

2. Considérant que l'autorisation provisoire de séjour délivrée au requérant le 15 novembre 2011, qui a eu seulement pour effet de régulariser la situation de l'intéressé jusqu'à ce que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides statue à nouveau sur son cas, ne rendait pas sans objet la requête devant les premiers juges ; que par suite, c'est à bon droit que le tribunal a estimé qu'il y avait lieu à statuer ;

Sur la fin de non recevoir opposée par M.A... tirée du défaut de production de la copie du jugement attaqué :

3. Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles R. 412-1, R. 411-3 et R. 811-13 du code de justice administrative, les requêtes d'appel doivent, à peine d'irrecevabilité, être accompagnées d'une copie du jugement attaqué, ainsi que de copies en nombre égal à celui des autres parties en cause, augmenté de deux ; qu'en vertu des dispositions combinées des articles R. 222-1 et R. 612-1 du même code, les présidents de cours administratives d'appel peuvent, par ordonnance, rejeter les requêtes pour défaut de production du jugement attaqué, sans avoir à en demander la régularisation préalable, lorsque l'obligation de cette formalité a été mentionnée dans la notification du jugement, conformément à l'article R. 751-5 du même code ;

4. Considérant qu'il ressort du dossier que la requête présentée devant la cour par le préfet de la Vienne n'était pas accompagnée d'une copie du jugement attaqué rendu par le tribunal administratif de Poitiers le 7 mars 2012, alors que la notification de ce jugement mentionnait cette obligation ; qu'il n'est pas non plus établi que cette copie aurait été jointe à l'un au moins des doubles de la requête d'appel, ultérieurement transmis à la cour ; qu'ainsi, le préfet de la Vienne, faute de s'être acquitté de l'obligation impartie par les dispositions sus-analysées, s'est exposée à voir sa requête immédiatement rejetée comme irrecevable ;

5. Considérant toutefois, qu'à l'initiative du greffe de la cour, le dossier de première instance, incluant une copie du jugement attaqué, avait été demandé au tribunal administratif puis joint par ce greffe au dossier de la requête d'appel, avant que ne soit rendue une ordonnance de rejet; que dans ces conditions, la fin de non recevoir opposée par l'intimé et tirée du défaut de production de la copie du jugement attaqué doit être écartée ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 18-1 du règlement (CE) n° 2725/2000 du 11 décembre 2000 concernant la création du système " Eurodac " pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l'application efficace de la convention de Dublin, " Toute personne visée par le présent règlement est informée par l'État membre d'origine ... d) dans le cas des personnes visées à l'article 4 ou à l'article 8, de l'obligation d'accepter que ses empreintes digitales soient relevées " ; qu'aux termes de l'article 4 : " Collecte, transmission et comparaison des empreintes digitales. 1. Chaque État membre relève sans tarder l'empreinte digitale de tous les doigts de chaque demandeur d'asile âgé de 14 ans au moins et transmet rapidement à l'unité centrale les données visées à l'article 5, paragraphe 1, points a) à f). La procédure de relevé des empreintes digitales est déterminée conformément à la pratique nationale de l'État membre concerné et dans le respect des dispositions de sauvegarde établies dans la convention européenne des droits de l'homme et dans la convention des Nations unies relative aux droits de l'enfant " ; que, d'autre part, selon l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande de bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (...) 4° La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente. (...) " ;

7. Considérant que M. A...soutient que le caractère inexploitable de ses empreintes n'est pas dû à une lésion volontaire ; qu'à l'appui de ses allégations, il a produit devant les premiers juges un certificat médical du 14 octobre 2011 à l'en- tête du comité médical pour les exilés qui indique que l'examen clinique des mains de M. A...montre une sécheresse diffuse ainsi que des lésions de kératoses localisées notamment à la racine des doigts, incompatibles avec une lésion volontaire mais compatibles avec le fait que l'intéressé a manipulé des produits chimiques pendant deux ans et demi en Libye dans le cadre de constructions de bâtiments et de routes ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a été informé de l'obligation de relevé d'empreinte et n'a à aucun moment fait état des circonstances particulières pouvant expliquer le caractère inexploitable de ses empreintes alors même qu'il a fait l'objet de deux premiers relevés infructueux et d'un troisième plusieurs semaines après ; que, dans ces conditions, le requérant ne peut être regardé comme établissant que les résultats infructueux des relevés de ses empreintes s'expliquent par les blessures qu'il aurait subies en Lybie ; qu'ainsi, c'est à tort que le tribunal s'est fondé, pour annuler l'arrêté du préfet de la Vienne en date du 31 août 2011, sur la méconnaissance des dispositions du 4° de l'article L. 741-4 du code précité ;

8. Considérant qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés en première instance par M.A... ;

9. Considérant que l'arrêté attaqué vise les dispositions de droit dont il fait application et mentionne les circonstances de fait propres à la situation de M. A...et notamment que l'intéressé a manifestement cherché à se soustraire à l'obligation fixée par le règlement (CE) n° 2725/2000 du 11 décembre 2000 (...) en rendant volontairement impossible l'identification de ses empreintes; qu' il est par suite suffisamment motivé ;

10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...n'a pas présenté d'autres moyens à l'encontre de l'arrêté contesté ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de la Vienne est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a annulé sa décision en date du 31 août 2011 par laquelle il a refusé à M. A...son admission au séjour ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article .761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, une somme au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement n° 1102289 du tribunal administratif de Poitiers en date du 7 mars 2012 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Poitiers est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de M. A...présentées au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4: Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, et à M. C... A....

Une copie en sera adressée au préfet de la Vienne.

Délibéré après l'audience du 4 décembre 2012 à laquelle siégeaient :

Mme Mireille Marraco, président,

M. Jean-Pierre Valeins, président-assesseur,

Mme Déborah De Paz, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 8 janvier 2013.

Le président assesseur,

Jean-Pierre VALEINSLe président-rapporteur,

Mireille MARRACO

Le greffier,

Hélène de LASTELLE du PRE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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No 12BX00984


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 12BX00984
Date de la décision : 08/01/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme MARRACO
Rapporteur ?: Mme Mireille MARRACO
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : MALABRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2013-01-08;12bx00984 ?
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