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27/12/2012 | FRANCE | N°12BX00379

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 27 décembre 2012, 12BX00379


Vu la requête enregistrée le 16 février 2012 sous forme de télécopie, et régularisée le 20 février 2012, présentée pour Mme Leila Y demeurant ..., par Me Chambaret avocat ;

Mme Y demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103051 du 12 janvier 2012 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 juin 2011 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler

l'arrêté préfectoral du 8 juin 2011 ;

3°) de condamner l'Etat à verser à son conseil ...

Vu la requête enregistrée le 16 février 2012 sous forme de télécopie, et régularisée le 20 février 2012, présentée pour Mme Leila Y demeurant ..., par Me Chambaret avocat ;

Mme Y demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103051 du 12 janvier 2012 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 juin 2011 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 8 juin 2011 ;

3°) de condamner l'Etat à verser à son conseil la somme de 1 300 euros au titre de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive n° 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;

Vu le code de l'entrée du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 décembre 2012 :

- le rapport de Mme Evelyne Balzamo, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Bentolila rapporteur public ;

1. Considérant que Mme Y, de nationalité algérienne, est entrée en France le 18 novembre 2009 munie d'un visa " famille de français " pour y rejoindre son époux de nationalité française ; qu'elle s'est vue délivrer en 2010, un certificat de résidence mention " vie privée et familiale " valable un an ; que par arrêté du 8 juin 2011, le préfet de la Haute-Garonne a pris à son encontre un arrêté refusant le renouvellement de son titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ; que Mme Y relève appel du jugement en date du 12 janvier 2012 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation dudit arrêté ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'il ressort des termes du jugement attaqué que le tribunal administratif de Toulouse a omis de répondre au moyen tiré du défaut d'examen par le préfet de sa situation particulière ; que, par suite, le jugement est irrégulier et doit être annulé ;

3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de Mme Y ;

Sur le refus de séjour :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; que la décision attaquée vise les textes dont il est fait application, en particulier l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et rappelle les éléments de fait relatifs à la situation personnelle de la requérante, notamment l'absence de communauté de vie avec son époux français, qu'elle a déposé des plaintes en janvier et mars 2010 à l'encontre de ce dernier, qu'elle est arrivée en France à l'âge de 25 ans et conserve des attaches familiales dans son pays d'origine ; que le préfet de la Haute-Garonne a ainsi suffisamment motivé en droit et en fait sa décision, au regard des dispositions précitées de la loi du 11 juillet 1979 ;

5. Considérant qu'il ressort de la motivation de l'arrêté en litige que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de Mme Y ;

6. Considérant que Mme Y qui a présenté une demande de renouvellement de son certificat de résidence en qualité de conjoint de français ne peut utilement soutenir que l'administration a entaché la procédure d'irrégularité en ne l'invitant pas à produire le contrat de travail visé par les services du ministère de l'emploi et le certificat de contrôle médical ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 2. Au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française, et lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) Le premier renouvellement du certificat de résidence délivré au titre du 2 ci-dessus est subordonné à une communauté de vie effective entre les époux. " ; qu'aux termes du quatrième alinéa de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour (...) a) au ressortissant algérien marié depuis au moins un an avec un ressortissant de nationalité française, dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article 6.2) et au dernier alinéa de ce même article. " ;

8. Considérant que l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France ainsi que les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés et leur durée de validité ; qu'il suit de là que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui sont relatives aux différents titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers en général et aux conditions de leur délivrance, ne sont, à l'exception de certaines dispositions de procédure qui s'appliquent à tous les étrangers qui n'ont pas été écartées par une disposition contraire expresse contenue dans ledit accord, pas applicables aux ressortissants algériens, lesquels relèvent des règles fixées par ledit accord ; que Mme Y ne peut utilement, pour contester la légalité de l'arrêté de refus de titre de séjour, invoquer les dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoyant que lorsque la communauté de vie a été rompue à l'initiative de l'étranger en raison des violences conjugales qu'elle a subies de la part de son conjoint, le préfet peut accorder le renouvellement du titre de séjour ; que, toutefois, il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressée, notamment eu égard à l'examen des violences conjugales alléguées, l'opportunité d'une mesure de régularisation ;

9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la communauté de vie entre Mme Y et son époux avait cessé quelques mois après son arrivée en France ; qu'ainsi, à la date de la demande de renouvellement de son titre de séjour en qualité de conjoint de ressortissant français, elle ne remplissait plus la condition de communauté de vie effective à laquelle est subordonné le renouvellement du certificat de résidence ; que Mme Y soutient avoir dû quitter le domicile conjugal en raison des violences subies de la part de son époux et avoir déposé deux plaintes à son encontre, et fait également valoir sa bonne insertion en France où elle dispose d'un contrat de travail à durée déterminée ; que, toutefois, eu égard notamment au caractère récent de son séjour en France, au fait qu'elle est séparée de son époux et sans charges de familles et qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales en Algérie où résident les membres de sa famille et où elle a vécu jusqu'à l'âge de 25 ans, de telles circonstances ne suffisent pas à établir qu'en refusant de lui renouveler son titre de séjour, le préfet de la Haute-Garonne aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ce refus sur sa situation personnelle ;

10. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la commission du titre de séjour " est saisie par le préfet lorsque celui-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 " ; que, Mme Y n'étant pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou de dispositions similaires telles les stipulations de l'article 6.5 de l'accord franco-algérien, le préfet n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande de titre de séjour ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

11. Considérant qu'aux termes de l'article 12 de la directive n° 2008/115/CE du 16 décembre 2008, relative au "départ volontaire": " Les décisions de retour (...) sont rendues par écrit, indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours disponibles " ; que ces dispositions qui sont inconditionnelles et suffisamment précises, sont susceptibles d'être invoquées par un justiciable à l'appui d'un recours dirigé contre un acte administratif non réglementaire ; qu'aux termes de l'article L. 511-1 I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I.-L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation. ( ...) " ;

12. Considérant que les dispositions précitées ne font pas obstacle à ce qu'une obligation de quitter le territoire français soit prise conformément aux exigences de forme et de fond prévues par les dispositions des articles 7 et 12 de la directive du 16 novembre 2008 ; que, si la motivation de l'obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus ou du retrait de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus ou ce retrait est lui-même motivé, de mention spécifique pour respecter les exigences de l'article 12 de la directive, celles-ci imposent que soient rappelées dans la décision les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ; que l'arrêté du 8 juin 2011 énonce globalement les considérations de fait et de droit qui le fondent ; qu'il est, par suite, suffisamment motivé ; que l'arrêté vise également le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont son article L. 511-1 ; que, par suite, la décision portant obligation de quitter le territoire doit être regardée comme satisfaisant à l'obligation de motivation au regard de la directive du 16 décembre 2008 ;

13. Considérant qu'il ressort de la motivation de la décision litigieuse que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de Mme Y ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme Y n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 8 juin 2011 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a pris à son encontre un arrêté refusant le renouvellement de son titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme Y demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 12 juin 2012 est annulé.

Article 2 : La demande de Mme Y devant le tribunal et le surplus de ses conclusions sont rejetés.

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No 12BX00379


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 12BX00379
Date de la décision : 27/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-01 Étrangers. Reconduite à la frontière. Légalité externe.


Composition du Tribunal
Président : M. JACQ
Rapporteur ?: Mme Evelyne BALZAMO
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : CHAMBARET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-12-27;12bx00379 ?
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