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06/11/2012 | FRANCE | N°12BX00806

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 06 novembre 2012, 12BX00806


Vu la requête enregistrée le 29 mars 2012 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 4 avril 2012 présentée par le préfet de la Vienne ;

Le préfet de la Vienne demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002535 du 1er février 2012 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a annulé, à la demande de M. Mohamed X, son arrêté du 20 juillet 2010 prononçant sa réadmission vers l'Espagne ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Bordeaux;

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Vu les autres pièces ...

Vu la requête enregistrée le 29 mars 2012 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 4 avril 2012 présentée par le préfet de la Vienne ;

Le préfet de la Vienne demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002535 du 1er février 2012 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a annulé, à la demande de M. Mohamed X, son arrêté du 20 juillet 2010 prononçant sa réadmission vers l'Espagne ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Bordeaux;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 octobre 2012 :

- le rapport de M. Jean-Pierre Valeins, président-assesseur ;

- les conclusions de M. David Katz, rapporteur public ;

1. Considérant que M. X, de nationalité guinéenne, après avoir séjourné en Espagne, est entré en France selon ses dires le 28 septembre 2009 ; que le 16 octobre 2009 il a présenté une demande d'admission au séjour au titre de l'asile ; que par arrêté en date du 4 janvier 2010 le préfet de la Vienne , en vertu notamment des dispositions du règlement n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 susvisé, a refusé son admission au séjour pour le motif que l'intéressé étant connu au fichier Eurodac dès lors que ses empreintes digitales avaient été saisies par les autorités espagnoles, la France n'était pas compétente pour traiter sa demande d'asile ; que, par jugement du 1er février 2012, le tribunal administratif de Poitiers a annulé cet arrêté pour avoir été pris au terme d'une procédure n'ayant pas respecté les dispositions du 4 de l'article 3 du règlement n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 et a enjoint au préfet de la Vienne de prendre une nouvelle décision; que par un arrêt de ce jour, la cour a confirmé l'annulation du refus d'admission au séjour prononcée par le tribunal administratif ; que, par ailleurs, à la suite d'une décision du ministre de l'intérieur de l'Espagne, en date du 22 février 2010, reconnaissant la compétence de l'Espagne pour traiter la demande d'asile présentée par M. X, le préfet de la Vienne , par arrêté du 20 juillet 2010, a décidé de réadmettre M. X en Espagne ; que, par un jugement du 1er février 2012, le tribunal administratif de Poitiers a annulé l'arrêté préfectoral du 20 juillet 2010 pour avoir méconnu les dispositions du 4 de l'article 3 du règlement susvisé du 18 février 2003 ; que le préfet de la Vienne interjette appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les services de la préfecture de la Vienne ont reçu notification du jugement attaqué le 2 février 2012 ; que la requête du préfet de la Vienne a été enregistrée au greffe de la cour le 29 mars 2012 dans le délai du recours contentieux prévu à l'article R. 811-2 du code de justice administrative, sous forme de télécopie ; que cette télécopie a été confirmée par courrier le 4 avril 2012 ; que la fin de non recevoir opposée par M. X, tirée de la tardiveté de la requête doit donc être écartée ;

3. Considérant qu'aux termes des dispositions du 4 de l'article 3 du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 : " Le demandeur d'asile est informé par écrit, dans une langue dont on peut raisonnablement penser qu'il la comprend, au sujet de l'application du présent règlement, des délais qu'il prévoit et de ses effets " ; qu'aux termes de l'article 20 du même règlement : " 1. La reprise en charge d'un demandeur d'asile (...) s'effectue selon les conditions suivantes : / (...) e) l'Etat membre requérant notifie au demandeur d'asile la décision relative à sa reprise en charge par l'Etat membre responsable. Cette décision est motivée. Elle est assortie des indications de délai relatives à la mise en oeuvre du transfert (...) / 2. Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, la responsabilité incombe à l'Etat membre auprès duquel la demande d'asile a été introduite (...) " ;

4. Considérant, d'une part, que par un document daté du 18 juin 2010, rédigé en français, remis à M. X le même jour, intitulé " convocation ", le préfet de la Vienne a informé l'intéressé des conditions de la mise en oeuvre de son transfert en Espagne, notamment du délai dans lequel devait se faire le transfert et de la date du transfert ; qu'il rappelle en effet que l'intéressé a fait une demande d'asile en France, qu'en application du règlement du 18 février 2003, le préfet de la Vienne a demandé aux autorités espagnoles de prendre en charge sa demande d'asile, que l'Espagne a accepté cette prise charge le 22 février 2010, qu'il sera transféré vers ce pays dans un délai de 6 mois à compter de la date de cet accord, que la mesure peut être exécutée d'office et qu'il dispose de 5 jours à compter de la réception de ce document pour présenter d'éventuelles observations ; que, d'autre part, si M. X a déclaré dans sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile que sa langue d'origine est le malinké, il est originaire de la République de Guinée dont la langue officielle est le français, et il ressort des pièces du dossier qu'il n'a jamais, lors de la procédure, notamment lors de la remise de la convocation, affirmé qu'il ne comprenait pas le français ; que le préfet de la Vienne pouvait donc raisonnablement supposer que M. X comprenait le français lorsqu'il lui a notifié la convocation du 18 juin 2010 ; que M. X a d'ailleurs présenté par lettre du 21 juin 2010 adressée au préfet de la Vienne des observations très détaillées, en français, relatives à sa réadmission en Espagne, ce qui établit qu'il a nécessairement pris connaissance et compris les informations figurant dans la convocation du 18 juin 2010 à laquelle il répondait ; que, de plus, il ressort du procès-verbal de police établi par l'officier qui a notifié l'arrêté préfectoral de réadmission que l'intéressé comprend le français ; que, dans ces conditions, la convocation du 18 juin 2010 répondait aux exigences des dispositions précitées du 4 de l'article 3 du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur la méconnaissance par le préfet de la Vienne des dispositions du 4 de l'article 3 du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 pour annuler son arrêté du 22 février 2010 ;

6. Considérant toutefois qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par M. X devant le tribunal administratif ;

7. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 19 du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 : " 1. Lorsque l'Etat membre requis accepte la prise en charge d'un demandeur, l'Etat membre dans lequel la demande d'asile a été introduite notifie au demandeur la décision de ne pas examiner la demande, ainsi que l'obligation de le transférer vers l'Etat membre responsable. / 2. La décision visée au paragraphe 1 est motivée. Elle est assortie des indications de délai relatives à la mise en oeuvre du transfert et comporte, si nécessaire, les informations relatives au lieu et à la date auxquels le demandeur doit se présenter s'il se rend par ses propres moyens dans l'Etat membre responsable (...) " ;

8. Considérant que, si l'arrêté attaqué de réadmission de M. X en Espagne, ainsi que le soutient M. X, ne précise pas le délai relatif à la mise en oeuvre du transfert, il rappelle toutefois dans l'un de ses considérants que l'intéressé s'est vu notifier, le 18 juin 2010, une convocation dans laquelle ce délai était indiqué ; que cette convocation précisait que M. X serait transféré vers l'Espagne dans un délai de 6 mois à compter du 22 février 2010, date à laquelle l'Espagne s'était reconnue responsable de l'examen de sa demande d'asile ; que, dans ces conditions, l'arrêté attaqué doit être regardé comme comportant la mention du délai relatif à la mise en oeuvre du transfert exigée par les dispositions précitées du 2 de l'article 19 du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Vienne est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé son arrêté du 20 juillet 2010 ;

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande M. X à ce titre au bénéfice de son avocat ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement n° 1002535 du tribunal administratif de Poitiers en date du 1er février 2012 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Poitiers est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de M. X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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No 12BX00806


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 12BX00806
Date de la décision : 06/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MARRACO
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre VALEINS
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : ARTUR

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-11-06;12bx00806 ?
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