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18/10/2012 | FRANCE | N°12BX00580

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 18 octobre 2012, 12BX00580


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 5 mars 2012, présentée pour Mme Sandrine X demeurant chez M. Thierry Y ..., par Me David Esposito, avocat ;

Mme X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103017 du 9 février 2012 du tribunal administratif de Toulouse rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 8 juin 2011 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le Gabon comme pays de renvoi ;

2°) d'a

nnuler ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivr...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 5 mars 2012, présentée pour Mme Sandrine X demeurant chez M. Thierry Y ..., par Me David Esposito, avocat ;

Mme X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103017 du 9 février 2012 du tribunal administratif de Toulouse rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 8 juin 2011 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le Gabon comme pays de renvoi ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser à son avocat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu la convention internationale des droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 septembre 2012 ;

- le rapport de Mme Sabrina Ladoire, conseiller ;

- et les conclusions de Mme Christine Mège, rapporteur public ;

Considérant que Mme X, de nationalité gabonaise, est entrée régulièrement en France le 10 décembre 2007 ; qu'elle relève appel du jugement n° 1103017 du 9 février 2012 du tribunal administratif de Toulouse rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 juin 2011 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le Gabon comme pays de renvoi ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que le tribunal administratif de Toulouse, dans le jugement contesté, a indiqué que l'arrêté attaqué mentionne les considérations de droit et de fait sur lesquelles sont fondées les trois décisions qu'il comporte ; qu'ainsi, il a répondu au moyen tiré du défaut de motivation de la décision fixant le Gabon comme pays de renvoi ; que par suite le jugement n'est pas entaché d'irrégularité sur ce point ;

Considérant qu'à supposer qu'en se plaignant de ce que le tribunal aurait refusé de rabattre la clôture pour communiquer au préfet les nouvelles pièces produites le 15 novembre 2011 pour Mme X en réplique au mémoire du préfet communiqué huit jours avant la clôture, la requérante ait entendu soulever une irrégularité de la procédure, il ne résulte pas de l'instruction que lesdites pièces aient été de nature à remettre en cause l'appréciation que le tribunal a portée sur l'atteinte à la vie privée et familiale de Mme X ; que par suite le tribunal n'a pas manqué au principe du caractère contradictoire de l'instruction en s'abstenant de rouvrir l'instruction ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation des décisions du 8 juin 2011 :

S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :

Considérant en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / - restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;

Considérant d'une part, que l'arrêté de refus de séjour vise les textes dont il fait application, notamment les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la convention du 2 décembre 1992 et l'accord du 5 juillet 2007 passés entre la France et le Gabon, ainsi que les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que d'autre part, cet arrêté énonce des éléments relatifs à la situation personnelle et familiale de Mme X ; qu'il précise en effet la date de son entrée sur le territoire national, relève l'existence de ses deux frères français et la présence de sa soeur en situation régulière et indique enfin que l'intéressée ne démontre pas la réalité d'une relation de concubinage suffisamment ancienne, stable, et durable ; que, ce faisant, le préfet de la Haute-Garonne a suffisamment motivé en droit et en fait sa décision au regard des dispositions précitées de la loi du 11 juillet 1979 ;

Considérant en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable au jour de la décision attaquée : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) ; 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République." ;

Considérant que Mme X soutient qu'elle partage depuis plusieurs années une communauté de vie avec M. Y, un ressortissant congolais titulaire d'une carte de résident, qu'elle n'a plus de famille au Gabon, que ses frères ont la nationalité française et que sa demi-soeur séjourne régulièrement en France ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme X, même si elle a été scolarisée en France, est repartie au Gabon en 1996 et n'est revenue en France qu'en 2007, à l'âge de 31 ans, qu'elle est célibataire et sans enfant ; que la production d'une déclaration de vie commune en 2010 et d'attestations peu circonstanciées émanant principalement de parents et d'amis de l'intéressée ne sauraient suffire à établir l'ancienneté de sa vie maritale alléguée avec M. Y ; qu'il n'est pas davantage établi que la requérante serait dépourvue de toute attache familiale au Gabon ; que, dans ces conditions, la décision contestée n'a pas porté au droit de Mme X au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ; que la requérante n'est pas davantage fondée à soutenir que l'arrêté litigieux serait entaché d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale ;

Considérant en troisième lieu, que si l'arrêté attaqué mentionne, de manière erronée, que la mère de la requérante réside au Gabon alors qu'elle séjourne en République du Congo, cette erreur de fait est restée sans conséquence sur l'appréciation portée par le préfet sur la situation personnelle et familiale de Mme X ;

Considérant en quatrième lieu, que la décision portant refus de titre de séjour, qui ne comporte par elle-même aucune mesure d'éloignement, n'aura pas pour effet de séparer l'enfant Sergine Sophiane Z de la requérante, dont le lien de parenté avec l'enfant ne ressort pas des pièces du dossier ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3- 1 de la convention internationale des droits de l'enfant ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté ;

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant en premier lieu, que la motivation de l'obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus ou du retrait de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus ou ce retrait est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, de mention spécifique pour respecter les exigences de motivation des actes administratifs ; que l'arrêté en litige, qui comporte une décision motivée de refus de titre de séjour, mentionne également le visa de l'article L. 511-1 I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui fonde l'obligation de quitter le territoire français ; qu'ainsi, le moyen tiré du défaut de motivation de l'obligation de quitter le territoire doit être écarté ;

Considérant en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales (...) " ; qu'il ressort toutefois des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français ; que dès lors, l'article 24 précité de la loi du 12 avril 2000, qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, ne saurait être utilement invoqué à l'encontre d'une décision portant obligation de quitter le territoire français ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de ce que l'autorité administrative aurait méconnu cette disposition en s'abstenant de susciter les observations de Mme X doit être écarté comme inopérant ;

Considérant en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il ressort des pièces du dossier que la garde de l'enfant Sergine Sophiane Z, née en 1999, n'a pas été confiée à la requérante, ainsi que cette dernière le soutient, mais à son oncle, en vertu d'un jugement du tribunal de Libreville dont le tribunal de grande instance de Toulouse a prononcé l'exequatur le 9 mai 2011 ; qu'en outre, Mme X n'établit ni que sa prétendue demi-soeur aurait résidé avec elle durant plusieurs années, alors que son concubin a précisé dans sa demande d'exequatur que l'enfant vivait avec lui depuis son plus jeune âge et que la demande de titre de séjour de Mme X ne fait aucune mention de la jeune Sergine, ni qu'elle contribuerait activement à son éducation et à son entretien ; que, dans ces conditions, Mme X n'est pas fondée à soutenir qu'en lui faisant obligation de quitter le territoire français, le Préfet de la Haute-Garonne aurait méconnu l'intérêt supérieur de cette enfant et par suite les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Considérant en quatrième lieu, qu'ainsi qu'il a été dit plus haut, Mme X n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour prise à son encontre ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale ne peut être qu'écarté ;

Considérant en cinquième et dernier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et celui tiré de l'erreur manifeste d'appréciation, lesquels reprennent ce qui a été développé à l'appui des conclusions de l'intéressée tendant à l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour, doivent être écartés pour les mêmes motifs que précédemment ;

S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

Considérant que l'arrêté litigieux indique que Mme X n'a jamais sollicité l'asile et qu'elle n'établit pas qu'elle serait exposée, en cas de retour au Gabon, à des traitements personnels contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, dans ces conditions, la décision fixant le pays de renvoi est suffisamment motivée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté attaqué du 8 juin 2011, n'appelle aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions de Mme X tendant à ce que le préfet de la Haute-Garonne lui délivre un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de quelque somme que ce soit au profit de l'avocat de Mme X, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme X est rejetée.

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N°12BX00580


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12BX00580
Date de la décision : 18/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Sabrina LADOIRE
Rapporteur public ?: Mme MEGE
Avocat(s) : DAVID ESPOSITO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-10-18;12bx00580 ?
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