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16/10/2012 | FRANCE | N°11BX00241

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 16 octobre 2012, 11BX00241


Vu la requête enregistrée le 25 janvier 2011 présentée pour M. et Mme Jean-Louis X, demeurant ... par la SELARL Debray ;

M. et Mme X demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°0700912 en date du 16 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté leur demande tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales qui ont été mis à leur charge au titre des années 1999, 2000 et 2001 ainsi que des intérêts et pénalités y afférents ;

2°) de leur accorder la décharge des impositions e

t pénalités contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme d...

Vu la requête enregistrée le 25 janvier 2011 présentée pour M. et Mme Jean-Louis X, demeurant ... par la SELARL Debray ;

M. et Mme X demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°0700912 en date du 16 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté leur demande tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales qui ont été mis à leur charge au titre des années 1999, 2000 et 2001 ainsi que des intérêts et pénalités y afférents ;

2°) de leur accorder la décharge des impositions et pénalités contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 septembre 2012 :

- le rapport de M. Philippe Cristille, premier-conseiller ;

- et les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public ;

Considérant que M. et Mme X ont fait l'objet à partir du mois de janvier 2002 d'un examen de situation fiscale personnelle portant sur les années 1999 et 2000 ; que, parallèlement, les sociétés Carbet Caraïbes, Village de l'Anse Azerot (VAA), Carenantilles et Société Hôtelière et Touristique de l'Est (SHTE), dont M. X était le gérant, ont fait l'objet de vérifications de comptabilité qui ont porté, respectivement, sur les exercices 1998 à 2000, 1998 à 2001, 1999 à 2001 et 2000 à 2001 ; qu'à l'issue de ces contrôles, l'administration a rehaussé les revenus déclarés par M. et Mme X, notamment dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, des revenus de capitaux mobiliers et des revenus fonciers ; qu'elle a également taxé d'office, au titre des années 1999 et 2000, des sommes dont elle a estimé qu'elles étaient constitutives de revenus d'origine indéterminée ; que M et Mme X font appel du jugement du 16 décembre 2010 du tribunal administratif de Fort-de-France en tant qu'il a rejeté leurs conclusions relatives à la taxation d'office de revenus d'origine indéterminée et celles tendant à la décharge des pénalités pour mauvaise foi ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. (...) / (...) / Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'administration, lorsqu'elle entend comparer les crédits figurant sur les comptes bancaires ou les comptes courants d'un contribuable au montant brut de ses revenus déclarés en vue d'établir l'existence d'indices de revenus dissimulés, n'est en droit d'user de cette procédure de demande de justifications à l'égard de ce contribuable qu'à la condition que les sommes ainsi portées au crédit de ses comptes équivalent au moins au double de ses revenus connus ;

Considérant que la différence entre les sommes portées au crédit des comptes bancaires ouverts au nom du contribuable et les revenus bruts par lui déclarés dont l'importance doit justifier la mise en oeuvre de la procédure de demande de justifications, s'entend de celle que l'administration constate avant tout examen critique préalable à cette mise en oeuvre des crédits qu'elle a recensés ; qu'il résulte de l'instruction que la somme des crédits recensés par le vérificateur sur les comptes bancaires de M. et de Mme X s'élevait à 2 259 439,62 F pour l'année 1999 et à 1 443 491,65 F pour l'année 2000 alors qu'ils avaient déclaré des revenus s'élevant respectivement pour ces années à 456 621 F et à 500 000 F ; que les écarts ainsi constatés autorisaient l'administration à user de la procédure de demande de justifications prévue par l'article L. 16 du livre des procédures fiscales ; qu'à cet égard, M. et Mme X ne peuvent utilement faire valoir qu'ils ont souscrit des déclarations rectificatives qui portent leurs revenus fonciers de 456 621 F à 1 032 000 F pour l'année 1999 et de 500 000 F à 1 045 212 F pour l'année 2000 dès lors que lesdites déclarations ont été déposées le 14 octobre 2002, soit plusieurs mois après l'envoi de l'avis d'examen contradictoire notifié le 25 janvier 2002 et postérieurement au premier entretien avec le vérificateur le 19 mars 2002 et à la demande de justifications adressée le 30 août 2002 ; que le paragraphe 44 de la documentation administrative de base 13 L-1511, qui se borne à indiquer que les déclarations rectificatives peuvent donner lieu à l'établissement de droits complémentaires, ne contient aucune interprétation de la loi fiscale dont les contribuables pourraient se prévaloir utilement sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ; que ces derniers ne sauraient davantage utilement se prévaloir de la procédure de régularisation spontanée prévue à l'article L.62 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004, qui n'était applicable qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité et non, comme en l'espèce, en cours d'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle du contribuable ;

Considérant qu'une somme inscrite au crédit d'un compte bancaire ou d'un compte courant d'un contribuable en exécution d'un virement opéré depuis un autre compte bancaire ou compte courant retenu par l'administration pour sa comparaison ne peut constituer un indice de revenu dissimulé ; que, par suite, si les dispositions précitées de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, qui permettent à l'administration de comparer les crédits figurant sur les comptes bancaires ou les comptes courants d'un contribuable au montant brut de ses revenus déclarés pour établir l'existence d'indices de revenus dissimulés l'autorisant à demander à l'intéressé des justifications, ne l'obligent pas à procéder à un examen critique préalable de ces crédits, ni, quand elle l'a fait, à se référer comme terme de comparaison aux seuls crédits dont l'origine n'est pas justifiée après le premier examen, elles ne la dispensent pas de neutraliser, afin de déterminer le montant total des crédits à prendre en compte pour procéder à cette comparaison, les virements de compte à compte de l'intéressé ;

Considérant que M. et Mme X soutiennent que l'administration aurait dû, avant de procéder à la comparaison entre les crédits figurant sur leurs comptes bancaires et le montant brut de leurs revenus déclarés, neutraliser la somme de 77 012 F au titre de l'année 1999 et la somme de 46 862,21 F au titre de l'année 2000, qui correspondraient à des débits opérés sur les comptes courants que M. X détenait dans la SA Carenantilles et dans la SARL Société Hôtelière et Touristique de l'Est dont il est respectivement président et gérant ; que, toutefois, la seule transmission d'une liste récapitulant, pour les retraits en cause, le nom de la banque et le montant du chèque par société sans la production de la copie de ces chèques où figureraient l'émetteur et la date de l'encaissement ne permet pas d'établir une corrélation entre les montants encaissés sur les comptes des contribuables et les explications qu'ils fournissent ; qu'ainsi, c'est à bon droit que le service vérificateur n'a pas pris ces sommes en compte pour comparer les crédits figurant sur les comptes bancaires de M. et Mme X et le montant brut de leurs revenus déclarés ;

Considérant que, lorsque le contribuable a déclaré des revenus fonciers issus de la location directe d'immeubles, l'administration doit comparer les crédits des comptes bancaires et comptes courants avec les revenus fonciers bruts pour vérifier si elle peut mettre en oeuvre la procédure prévue à l'article L. 16 du livre des procédures fiscales ; que si, ainsi qu'elle l'admet d'ailleurs, l'administration a retenu les revenus fonciers déclarés pour leur montant net de 456 621 F au titre de l'année 1999 et de 500 000 F au titre de l'année 2000, l'erreur de l'administration est sans incidence dès lors qu'en retenant les revenus fonciers bruts, l'écart demeurait suffisant pour constituer un élément établissant que les contribuables avaient pu disposer de revenus plus importants que ceux qu'ils avaient déclarés et pour mettre en oeuvre les dispositions de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, dont les conditions d'application étaient ainsi remplies à la date de l'engagement de cette procédure ;

Considérant qu'aux termes de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, rendue opposable à l'administration par l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, dans sa version applicable aux opérations de contrôle menées à l'endroit de M. et Mme X : " Dans le cadre de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle (ESFP), le dialogue joue un rôle très important tout au long de la procédure. Il vous permet de présenter vos explications sur les discordances relevées par le vérificateur à partir des informations dont il dispose " ; que M. et Mme X font valoir qu'il n'ont pu bénéficier d'un dialogue avec le vérificateur avant l'envoi des demandes d'éclaircissements ou de justifications du 30 août 2002 portant sur les années 1999 et 2000 ; que, toutefois, ni les dispositions précitées, ni aucune autre disposition de la charte, n'imposent au vérificateur d'engager avant l'envoi de la demande d'éclaircissements ou de justifications un dialogue portant sur les discordances qu'il a relevées ; qu'au surplus et en tout état de cause, il résulte de l'instruction qu'avant l'envoi de cette demande, deux entretiens ont eu lieu le 19 mars 2002 et le 28 août 2002 entre le vérificateur et les contribuables dans les bureaux de leur conseil ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'en méconnaissance de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, l'administration n'a engagé aucun dialogue avec M. et Mme X avant l'envoi de la demande de justifications ne peut qu'être écarté ;

Sur les pénalités infligées pour mauvaise foi :

Considérant que l'administration a appliqué aux droits supplémentaires procédant des rehaussements en matière de revenus fonciers, de la taxation des revenus d'origine indéterminée et des rectifications des revenus distribués provenant des sociétés VAA, Carenantilles et SHTE au titre des années 1999 et 2000, la majoration de 40 % que l'article 1729 du code général des impôts prévoit en cas de mauvaise foi ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les notifications de redressements des 19 décembre 2002 et 6 mars 2003 indiquent, de manière suffisante, les éléments de fait et de droit sur lesquels l'administration s'est fondée pour assortir de pénalités les rappels de droits en cause;

Considérant que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'administration a répondu devant les premiers juges de manière circonstanciée aux critiques des requérants à l'encontre du bien-fondé des pénalités de mauvaise foi qui leur étaient infligées ; que le tribunal administratif de Fort-de-France n'a pas soulevé d'office un moyen qui n'était pas invoqué par le ministre en défense ; que le grief adressé au jugement sur ce point doit donc être écarté ;

Considérant que, s'agissant de la majoration pour mauvaise foi appliquée aux droits se rapportant aux revenus d'origine indéterminée identifiés à concurrence de 236 812 F. au titre de l'année 1999 et de 149 167 F. au titre de l'année 2000, compte tenu de l'importance des revenus demeurés injustifiés, du caractère délibéré de l'insuffisance de déclaration et de l'absence de toute justification sérieuse sur l'origine et la nature des revenus litigieux restés inexpliqués, l'administration doit être regardée comme ayant justifié l'intention délibérée des requérants d'éluder l'impôt et, dès lors, la mauvaise foi de ces derniers ;

Considérant que, pour ce qui est de la majoration pour mauvaise foi appliquée au rehaussement en matière de revenus fonciers, en se fondant sur l'importance des revenus fonciers non déclarés par rapport au montant porté sur les déclarations de revenus des contribuables soit une différence de l'ordre de 56 % au titre de l'année 1999 et de 52% au titre de l'année 2000, et sur le fait que les contribuables ne pouvaient ignorer l'importance des minorations de recettes déclarées, tirées de la location de biens immobiliers, l'administration établit la mauvaise foi des contribuables pour chacune des deux années concernées ; qu'en se bornant à faire valoir qu'ils ont déposé une déclaration rectificative le 14 octobre 2002, alors que les opérations de contrôle ont débuté le 18 février 2002 et que la demande d'éclaircissement et de justification leur a été adressée le 30 août 2002, les requérants ne contestent pas utilement le bien-fondé desdites pénalités ;

Considérant que, s'agissant des revenus de capitaux mobiliers, le comportement de M. X qui ne pouvait ignorer en sa qualité de gérant l'existence des dépenses à caractère privé prises en charge par les sociétés VAA, Carenantilles et SHTE et qui correspondaient à des frais de déplacements personnels révèle également une volonté d'éluder l'impôt ; que l'administration établit dès lors la mauvaise foi du contribuable ; qu'ainsi, c'est à bon droit que l'administration a assorti les droits rappelés au titre des revenus distribués de la majoration de 40 % prévue, en cas de mauvaise foi ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme X ne sont fondés à demander ni l'annulation du jugement dont ils font appel, ni la décharge des droits et pénalités restant en litige ; que, par voie de conséquence, ne peuvent être accueillies leurs conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE

Article 1er : La requête de M. et Mme X est rejetée.

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N° 11BX00241


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 11BX00241
Date de la décision : 16/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Philippe CRISTILLE
Rapporteur public ?: test
Avocat(s) : DEBRAY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-10-16;11bx00241 ?
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