Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 8 février 2012, présentée pour M. Driss A demeurant ..., par Me Lemée, avocat ;
M. A demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1000142 en date du 28 décembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le préfet de la Vienne sur sa demande de délivrance de carte de résident en date du 28 octobre 2009 ;
2°) d'enjoindre au préfet de la Vienne de lui délivrer une carte de résident ;
3°) de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1.000 euros à verser à son avocat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'action sociale et des familles ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 juin 2012 :
- le rapport de Mme Catherine Girault, président ;
- et les conclusions de M. David Katz, rapporteur public ;
Considérant que M. A, de nationalité marocaine, a sollicité, le 28 octobre 2009, une carte de résident sur le fondement des dispositions de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que M. A relève appel du jugement du 28 décembre 2011 du tribunal administratif de Poitiers rejetant sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet de la Vienne lui a refusé un tel titre de séjour ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Tout étranger qui justifie d'une résidence ininterrompue d'au moins cinq années en France, conforme aux lois et règlements en vigueur, sous couvert de l'une des cartes de séjour mentionnées aux articles L. 313-6, L. 313-8 et L. 313-9, aux 1º, 2º et 3º de l'article L. 313-10, aux articles L. 313-11, L. 313-11-1 et L. 314-9, aux 2º, 3º, 4º, 5º, 6º, 7º et 9º de l'article L. 314-11 et à l'article L. 315-1 peut obtenir une carte de résident portant la mention " résident de longue durée-CE " s'il dispose d'une assurance maladie. La décision d'accorder ou de refuser cette carte est prise en tenant compte des faits qu'il peut invoquer à l'appui de son intention de s'établir durablement en France, notamment au regard des conditions de son activité professionnelle s'il en a une, et de ses moyens d'existence. / Les moyens d'existence du demandeur sont appréciés au regard de ses ressources qui doivent être stables et suffisantes pour subvenir à ses besoins. Sont prises en compte toutes les ressources propres du demandeur indépendamment des prestations familiales et des allocations prévues aux articles L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles et L. 351-9, L. 351-10 et L. 351-10-1 du code du travail. Ces ressources doivent atteindre un montant au moins égal au salaire minimum de croissance et sont appréciées au regard des conditions de logement. / Le caractère suffisant des ressources au regard des conditions de logement fait l'objet d'un avis du maire de la commune de résidence du demandeur (...) " ; que l'article R. 314-1-1 du même code dispose: " L'étranger qui sollicite la délivrance de la carte de résident portant la mention " résident de longue durée-CE " doit justifier qu'il remplit les conditions prévues à l'article L. 314-8 en présentant : (...) 3° La justification qu'il dispose de ressources propres, stables et régulières, suffisant à son entretien, indépendamment des prestations et des allocations mentionnées au deuxième alinéa de l'article L. 314-8, appréciées sur la période des cinq années précédant sa demande, par référence au montant du salaire minimum de croissance ; lorsque les ressources du demandeur ne sont pas suffisantes ou ne sont pas stables et régulières pour la période des cinq années précédant la demande, une décision favorable peut être prise, soit si le demandeur justifie être propriétaire de son logement ou en jouir à titre gratuit, soit en tenant compte de l'évolution favorable de sa situation quant à la stabilité et à la régularité de ses revenus, y compris après le dépôt de la demande (...) " ;
Considérant que M. A justifie résider régulièrement depuis plus de cinq ans sur le territoire français, où il a bénéficié de cartes de séjour en qualité d'étranger malade au titre de la grave pathologie oculaire bilatérale dont il est atteint, et où ses conditions de résidence et de soins démontrent suffisamment son intention de s'établir durablement ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'il ne perçoit, comme uniques sources de revenus, que des aides financières délivrées par la caisse d'allocations familiales de la Vienne au titre de l'allocation de logement social, de l'allocation d'adulte handicapé et du complément de ressources à cette dernière allocation, ainsi que la prestation de compensation du handicap versée par la Maison départementale des personnes handicapées au titre de l'aide à domicile ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.511-1 du code de la sécurité sociale: " Les prestations familiales comprennent : 1°) la prestation d'accueil du jeune enfant ; 2°) les allocations familiales 3°) le complément familial ; 4°) l'allocation de logement ; 5°) l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé ; 6°) l'allocation de soutien familial ; 7°) l'allocation de rentrée scolaire ; (8°) Abrogé ; 9°) l'allocation journalière de présence parentale. "
Considérant que seule l'allocation de logement perçue par M. B constitue une prestation familiale au sens de ces dispositions, insusceptible par suite d'être retenue pour l'application de l'article L.314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que dès lors, c'est à tort que le préfet a refusé de prendre en compte la prestation de compensation du handicap, d'un montant de 578,50 euros, qui était perçue par l'intéressé dès 2009 ; qu'ajoutée à l'allocation d'adulte handicapé de 681,63 euros et son complément de ressources de 179,31 euros dont le préfet ne conteste pas la prise en considération, cette prestation permet à l'intéressé de bénéficier de ressources stables, compte tenu de l'absence de perspective d'amélioration sensible de son état de santé, d'un montant total de 1389,44 euros ; que ce montant est supérieur au SMIC mensuel qui était, ainsi que l'a rappelé le préfet en première instance, de 1047,44 euros lors de l'instruction de la demande ; qu'il suit de là que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a refusé d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de la Vienne lui a refusé une carte de résident ;
Considérant que le présent arrêt implique nécessairement, eu égard à ses motifs, que le préfet délivre à M. A la carte de résident qu'il sollicite ; qu'il y a lieu de lui enjoindre d'y procéder dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;
Considérant que par décision du 19 mars 2012, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux a accordé l'aide juridictionnelle totale à M. A ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Lemée d'une somme de 1.500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à sa mission d'aide juridictionnelle ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 28 décembre 2011 et la décision implicite du préfet de la Vienne refusant une carte de résident à M. A sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Vienne de délivrer à M. A une carte de résident dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera une somme de 1.500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 à Me Lemée, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à sa mission d'aide juridictionnelle.
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No 12BX00299