Vu la décision en date du 6 mai 2011, enregistrée le 17 mai 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Bordeaux, par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé l'arrêt n° 06BX01319 en date du 30 juin 2008 de la Cour et lui a renvoyé le recours présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;
Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 26 juin 2006, présentée par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;
Le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°0303054 du 14 février 2006 du Tribunal administratif de Bordeaux en tant qu'il a déchargé la société Imprim'art des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle de 10 % auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1996 et en 1998, en ce que ces impositions procèdent de la réintégration dans ses résultats des versements effectués en exécution d'un contrat de location d'une presse ainsi que des intérêts de retard y afférents ;
2°) de rétablir ces impositions et intérêts ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 janvier 2012 :
- le rapport de M. Lerner, premier conseiller,
- les conclusions de M. Vié, rapporteur public ;
- les observations de Me Daunis pour la société Imprim'art ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Imprim'art, qui exerce une activité d'imprimerie spécialisée dans les travaux offset à plat, a conclu le 15 juin 1996 avec la société Bail Expansion un contrat dit de location financière d'une durée de deux ans portant sur une presse rotative d'une valeur hors taxes de 4 968 301 francs ; que ce contrat prévoyait le versement de la somme de 3 400 000 francs hors taxes dès le 15 juin 1996 puis le versement de 23 mensualités de 68 187 francs ; qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité de la société Imprim'art, l'administration fiscale a réintégré dans le résultat imposable de cette société, au titre des exercices clos en 1996 et 1998, les sommes qu'elle a versées mensuellement en exécution du contrat du 15 juin 1996 et qu'elle a portées dans ses charges en tant que loyers, au motif que ces sommes devaient être considérées comme payées pour l'acquisition d'un élément d'actif en exécution d'un contrat de vente à tempérament avec clause de réserve de propriété et que, de ce fait, elles ne constituaient pas, des charges déductibles ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE interjette appel du jugement du 14 février 2006 du Tribunal administratif de Bordeaux accordant à la société Imprim'art la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle de 10 % à cet impôt auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1996 et 1998 en ce qui concerne les impositions procédant de la réintégration dans ses résultats des versements effectués en exécution du contrat analysé ci-dessus ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses : (...) / b) (...) qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus ; (...) / L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. En cas de désaccord sur les redressements notifiés sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit (...) ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pour justifier les réintégrations en litige, l'administration fiscale a fait valoir, non que le contrat en cause avait été conclu de manière fictive ou dans le seul but d'éluder l'impôt, mais que sa qualification de contrat de vente à tempérament avec clause de réserve de propriété ressortait de ce que la période de location, fixée à deux ans, était brève, que le premier loyer représentait une part très importante du coût de la presse, que la société Imprim'art avait pris en charge les frais de réparation des nombreuses pannes de cette machine qui incombent normalement au propriétaire, qu'elle n'avait plus payé de loyer à partir du mois de mai 1998 mais n'avait finalement procédé à l'acquisition de la presse que le 9 décembre 1998 pour le prix hors taxes de seulement 49 000 francs ; qu'en se bornant ainsi à requalifier le contrat du 15 juin 1996 en tenant compte de la commune intention des parties, révélée lors de son exécution, l'administration fiscale ne s'est pas placée sur le terrain de l'abus de droit ; que, dès lors, en jugeant que le redressement en litige était fondé sur la dissimulation par la société de la portée véritable du contrat, pour en déduire que l'administration fiscale invoquait implicitement mais nécessairement les dispositions de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales et conclure à l'irrégularité de la procédure d'imposition, le Tribunal administratif de Bordeaux a inexactement qualifié la procédure engagée à l'encontre de la société intimée et entaché sa décision d'une erreur de droit ; que, par suite, le ministre est fondé à demander l'annulation du jugement du 14 février 2006 en tant qu'il décharge la société Imprim'art des impositions et des intérêts de retard résultant de la réintégration dans ses résultats des versements effectués en exécution du contrat en cause ;
Considérant, toutefois, qu'il convient d'examiner, en vertu de l'effet dévolutif de l'appel, les autres moyens soulevés, tant en première instance qu'en défense au recours d'appel du ministre, par la société Imprim'art à l'appui de sa demande en décharge des impositions litigieuses ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors applicable : Lorsque le désaccord persiste sur les redressements notifiés, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis (...) de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires (....) ; que l'article L. 59 A du même livre dans sa rédaction alors applicable dispose en outre que : La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient : 1° Lorsque le désaccord porte soit sur le montant du bénéfice industriel et commercial, du bénéfice non commercial, du bénéfice agricole ou du chiffre d'affaires, déterminé selon un mode réel d'imposition, soit sur la valeur vénale des immeubles, des fonds de commerce, des parts d'intérêts, des actions ou des parts de sociétés immobilières servant de base à la taxe sur la valeur ajoutée ( ...) ; que le désaccord relatif au refus de déduction des loyers acquittés par la société dépendait de la qualification à donner au contrat de location financière souscrit par la société et posait, dès lors, une question de droit n'entrant pas dans le champ de compétence de la commission ; qu'ainsi l'absence de saisine de la commission départementale sur ce différend n'entache pas d'irrégularité la procédure d'imposition ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'ainsi qu'il vient d'être dit, le contrat de location financière conclu par la société Imprim'art auprès de la société Bail Expansion prévoyait que le premier loyer, versé dès la signature du contrat, représentait une part d'environ 70 % du total des échéances, que la période de location était fixée à deux ans alors que la durée de vie du matériel était d'environ sept ans, que la société Imprim'art avait pris en charge les frais de réparation des nombreuses pannes de cette machine, qui incombent normalement au propriétaire, qu'elle n'avait plus payé de loyer à partir du mois de mai 1998 mais n'avait pourtant acquis la presse auprès de la société Bail Expansion que le 9 décembre 1998 pour le prix hors taxes de 49 000 Francs alors qu'elle l'avait cédée à la société Ofmi Garamont dès le mois d'octobre 1998 en contrepartie d'une autre presse ; qu'au regard de l'ensemble de ces éléments, l'administration pouvait à bon droit requalifier en opération de vente à tempérament l'opération inexactement qualifiée, par les parties au contrat, de location financière de la presse et réintégrer dans les résultats imposables de la société Imprim'art les versements effectués par la société, après prise en compte d'une quote-part de frais financiers ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a accordé à la société Imprim'art la décharge, au titre des exercices clos en 1996 et 1998, des impositions supplémentaires résultant de la réintégration dans ses résultats des versements effectués en exécution du contrat passé avec la société Bail Expansion ainsi que des intérêts de retard y afférents ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal Administratif de Bordeaux en date du 14 février 2006 est annulé en tant qu'il décharge la société Imprim'art, au titre des exercices clos en 1996 et 1998, des impositions supplémentaires résultant de la réintégration dans ses résultats des versements effectués en exécution du contrat passé avec la société Bail Expansion ainsi que des intérêts de retard y afférents .
Article 2 : La société Imprim'art est rétablie au rôle de l'impôt sur les sociétés et de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés à concurrence des sommes relatives aux droits et intérêts de retard dont le Tribunal administratif de Bordeaux l'a déchargée par le jugement susmentionné.
Article 3 : La demande de décharge, au titre des exercices clos en 1996 et 1998, des impositions supplémentaires résultant de la réintégration dans ses résultats des versements effectués en exécution du contrat passé avec la société Bail Expansion ainsi que des intérêts de retard y afférents, présentée par la société Imprim'art devant le Tribunal administratif de Bordeaux est rejetée.
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N°11BX01206