Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 23 décembre 2010 en télécopie, régularisée en original le 24 janvier 2011, par la SELARL ATY Avocats, domiciliée 26 rue Matabiau à Toulouse (31000), pour M. Kisa A élisant domicile chez son conseil ;
M. A demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1000433 du 30 juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne en date du 8 octobre 2009 portant refus de lui renouveler son titre de séjour mention étudiant , obligation de quitter le territoire français et décision fixant un pays de renvoi ;
2°) d'annuler l'arrêté contesté ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour vie privée et familiale , ou, à titre subsidiaire, de le munir d'une autorisation provisoire de séjour et de procéder au réexamen de sa situation, dans le mois suivant l'arrêt à intervenir puis sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de condamner l'Etat à verser à son conseil la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 septembre 2011 :
- le rapport de M. A. de Malafosse, président de chambre ;
- et les conclusions de Mme M-P. Dupuy, rapporteur public ;
Considérant que M. A, ressortissant rwandais, entré régulièrement en France le 15 septembre 2004 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de long séjour, s'est vu délivrer un titre de séjour d'un an portant la mention étudiant qui a été renouvelé plusieurs fois ; que, par un arrêté du 8 octobre 2009, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de faire droit à sa demande de renouvellement de ce titre et a pris à son encontre une obligation de quitter le territoire français en fixant le Gabon, ou tout pays dans lequel il établirait être légalement admissible, comme pays de destination ; que M. A fait appel du jugement du 30 juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté et à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation après l'avoir muni d'une autorisation provisoire de séjour ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne le refus de renouvellement du titre de séjour :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : I. La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention étudiant (...) ; que, pour l'application de ces dispositions, il appartient à l'administration, saisie d'une demande de renouvellement d'un titre de séjour étudiant, d'apprécier, à partir de l'ensemble du dossier et sous le contrôle du juge, la réalité et le sérieux des études poursuivies ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date du refus de titre de séjour litigieux, M. A était inscrit pour la cinquième fois consécutive en licence langues étrangères appliquées et n'avait toujours pas obtenu ce diplôme ; qu'il n'a, durant les trois années universitaires qui ont précédé ce refus, validé qu'un semestre de la deuxième année de licence ; que l'intéressé ne peut utilement invoquer le rejet opposé à sa demande de renouvellement de titre de séjour pour expliquer ses échecs successifs, alors que ce refus est intervenu postérieurement à ceux-ci ; que les difficultés financières et les mouvements de grève universitaire dont il fait état ne suffisent pas à expliquer son absence de progression dans ses études ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le refus en litige a été pris en méconnaissance de l'article L. 313-7 précité doit être écarté ;
Considérant, en deuxième lieu, que si, en vertu de l'article 26 de la convention de Genève du 28 juillet 1951, tout Etat partie à la convention accorde aux réfugiés se trouvant régulièrement sur son territoire le droit d'y choisir le lieu de résidence et d'y circuler librement, ces stipulations n'impliquent pas que tout réfugié ait le droit de séjourner dans n'importe lequel des Etats parties à ladite convention ; que, par suite, le fait que M. A a obtenu au Gabon, en 2002, le statut de réfugié ne lui confère pas, par lui-même, le droit au séjour en France ;
Considérant, en troisième lieu et dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...). ; que le fait que le requérant bénéficie de la reconnaissance par l'Etat gabonais du statut de réfugié n'est pas, à lui seul, de nature à le faire entrer dans le champ d'application de ces dispositions ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi :
Considérant qu'aux termes de l'article 33-1 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés : Aucun des États contractants n'expulsera ou ne refoulera, de quelque manière que ce soit, un réfugié sur les frontières des territoires où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques , et qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ;
S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :
Considérant que le moyen tiré de la violation des stipulations précitées est inopérant à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français, qui, par elle-même, ne fixe pas le pays de renvoi ;
S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :
Considérant que l'arrêté litigieux précise que le requérant pourra être reconduit à destination du pays où il bénéficie de la protection des autorités ou de tout pays pour lequel il établit être légalement admissible ;
Considérant que la circonstance que le requérant ne serait pas admissible au Gabon est, par elle-même, sans incidence sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi au regard des stipulations précitées de la convention de Genève et de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant, en revanche, que les stipulations précitées de l'article 33-1 de la convention de Genève font obstacle à ce que M. A, compte tenu de sa qualité de réfugié, puisse être renvoyé au Rwanda ; que, dans ces conditions, en tant qu'elle n'exclut pas le Rwanda comme pays à destination duquel l'intéressé pourra être reconduit, la décision fixant le pays de renvoi est contraire à ces stipulations et doit donc, dans cette mesure, être annulée ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant que le présent arrêt ne procède qu'à l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi, et dans la mesure seulement où elle inclut le Rwanda ; qu'une telle annulation ne nécessite pas de mesure d'exécution ;
Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :
Considérant que les dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991, font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas pour l'essentiel la partie perdante, le versement au conseil de M. A de quelque somme que ce soit au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La décision fixant le pays de renvoi contenue dans l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne en date du 8 octobre 2009 est annulée en tant qu'elle inclut le Rwanda comme pays de renvoi.
Article 2 : Le jugement n° 1000433 du tribunal administratif de Toulouse, en date du 30 juin 2010, est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
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Nos 10BX03153