La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/02/2009 | FRANCE | N°07BX00268

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 05 février 2009, 07BX00268


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 5 février 2007 sous le n° 07BX00268, présentée pour Mme Jeanne X demeurant ..., par le cabinet d'avocats Camille et associés ;

Mme X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0102084 en date du 22 novembre 2006 du Tribunal administratif de Toulouse en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Montauban à l'indemniser d'une perte de revenu depuis le 1er avril 1994 et en tant qu'il a limité à 5.000 euros la somme que la commune a été condamnée à lui verser au titre du préj

udice moral et des troubles dans les conditions d'existence ;

2°) de condamner...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 5 février 2007 sous le n° 07BX00268, présentée pour Mme Jeanne X demeurant ..., par le cabinet d'avocats Camille et associés ;

Mme X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0102084 en date du 22 novembre 2006 du Tribunal administratif de Toulouse en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Montauban à l'indemniser d'une perte de revenu depuis le 1er avril 1994 et en tant qu'il a limité à 5.000 euros la somme que la commune a été condamnée à lui verser au titre du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence ;

2°) de condamner la commune de Montauban à lui verser la somme de 16.557,54 euros au titre du préjudice financier subi jusqu'en 2003, avec intérêts à compter du 8 février 2001 et leur capitalisation, une indemnité pour perte de droits à pension, la somme de 20.000 euros au titre des troubles dans les conditions d'existence et la somme de 10.000 euros au titre du préjudice moral ;

3°) d'ordonner à la commune de Montauban de la réintégrer immédiatement à son poste d'adjoint administratif et de reconstituer sa carrière, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard ;

4°) de condamner la commune de Montauban à lui verser la somme de 4.000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

Vu le décret n° 86-68 du 13 janvier 1986 relatif aux positions de détachement, hors cadres, de disponibilité et de congé parental des fonctionnaires territoriaux ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 janvier 2009,

- le rapport de M. Lafon, conseiller ;

- les observations de Me Beguin du Cabinet de Castelnau, avocat de la commune de Montauban ;

- et les conclusions de M. Zupan, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions indemnitaires :

Considérant que Mme X, adjoint administratif principal de 2ème classe de la commune de Montauban, a été placée en disponibilité pour convenances personnelles à compter du 1er février 1994 pour une durée d'un an ; qu'elle a demandé le 27 mars 1994 à être réintégrée dans les services de la commune à compter du 1er avril 1994 ; que sa demande a été rejetée au motif de l'absence de poste vacant dans son grade ; que Mme X a réitéré le 2 juillet 1996, le 13 mars 1999 et le 3 mai 1999 sa demande, rejetée pour le même motif ; que par deux requêtes enregistrées le 20 octobre 1999 et le 21 mai 2001, Mme X a demandé au Tribunal administratif de Toulouse de condamner la commune de Montauban à réparer les préjudices qu'elle a subis du fait de sa non-réintégration à compter du 1er avril 1994 ; que par un jugement en date du 24 juin 2002, le Tribunal administratif de Toulouse, après avoir rejeté la première demande en raison de défaut de liaison du contentieux, a admis la responsabilité de la commune pour la période du 1er janvier 1997 au 31 mai 2001 et a ordonné un supplément d'instruction aux fins d'inviter Mme X à produire tous les éléments relatifs au montant des revenus qu'elle a perçus au cours de cette même période ; que par un jugement en date du 22 novembre 2006, il a condamné la commune de Montauban à verser à Mme X une somme de 5.000 euros au titre des troubles dans les conditions d'existence ; que Mme X interjette appel de ce jugement en tant qu'il rejette le surplus de ses conclusions ; que la commune de Montauban demande, par la voie de l'appel incident, l'annulation dudit jugement en tant qu'il la condamne à verser la somme de 5.000 euros à Mme X ;

Considérant qu'aux termes de l'article 72 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, dans sa rédaction applicable au 1er avril 1994 : « La disponibilité est la position du fonctionnaire qui, placé hors de son administration ou service d'origine, cesse de bénéficier, dans cette position, de ses droits à l'avancement et à la retraite. La disponibilité est prononcée, soit à la demande de l'intéressé, soit d'office à l'expiration des congés prévus aux 2°, 3° et 4° de l'article 57. Le fonctionnaire mis en disponibilité qui refuse successivement trois postes qui lui sont proposés dans le ressort territorial de son cadre d'emploi, emploi ou corps en vue de la réintégration peut être licencié après avis de la commission administrative paritaire. Le fonctionnaire mis en disponibilité, soit d'office à l'expiration des congés institués par les 2°, 3° et 4° de l'article 57 de la présente loi, soit de droit, sur demande, pour raisons familiales, est réintégré à l'expiration de sa période de disponibilité dans les conditions prévues aux premier, deuxième et troisième alinéas de l'article 67 de la présente loi. » ; que l'article 35 de la loi n° 94-1134 du 27 décembre 1994 modifiant certaines dispositions relatives à la fonction publique territoriale a ajouté au troisième alinéa de l'article 72 de la loi du 26 janvier 1984 les dispositions suivantes : « Dans les autres cas, si la durée de la disponibilité n'a pas excédé trois années, une des trois premières vacances dans la collectivité ou l'établissement d'origine doit être proposée au fonctionnaire » ; qu'aux termes de l'article 26 du décret n° 86-68 du 13 janvier 1986 : « Sauf dans le cas où la période de mise en disponibilité n'excède pas trois mois, le fonctionnaire mis en disponibilité sur sa demande doit solliciter sa réintégration deux mois au moins avant l'expiration de la période de disponibilité en cours. (...) Le fonctionnaire qui a formulé avant l'expiration de la période de mise en disponibilité une demande de réintégration est maintenu en disponibilité jusqu'à ce qu'un poste lui soit proposé dans les conditions prévues à l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984 précitée. (...) » ;

Considérant qu'en prévoyant que les agents intéressés sont maintenus en disponibilité « jusqu'à ce qu'un emploi leur soit proposé dans les conditions prévues à l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984 », les auteurs du décret du 13 janvier 1986 ont seulement entendu se référer aux conditions dans lesquelles des emplois sont proposés aux agents par leur collectivité ou établissement d'origine ainsi que par le centre national de la fonction publique territoriale ou par le centre de gestion, à l'exclusion des règles relatives au maintien en surnombre et à la prise en charge par le centre national de la fonction publique territoriale ou par le centre de gestion ; qu'il s'ensuit, notamment, que le fonctionnaire sollicitant sa réintégration ne peut demander à « être maintenu en surnombre » et ne peut se prévaloir de la règle selon laquelle « tout emploi créé ou vacant correspondant à son grade dans la collectivité ou l'établissement lui est proposé en priorité » ;

Considérant que le fonctionnaire territorial mis en disponibilité sur sa demande, qui n'a pas rompu le lien qui l'unit à son corps, a le droit, sous réserve de la vacance d'un emploi correspondant à son grade, d'obtenir sa réintégration avant le terme de la période de disponibilité ;

Considérant que si les textes applicables avant l'intervention de la loi n° 94-1134 du 27 décembre 1994 n'imposaient pas à l'autorité dont relève le fonctionnaire de délai pour procéder à cette réintégration, celle-ci devait intervenir, en fonction des vacances d'emploi qui se produisent, dans un délai raisonnable ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'entre la date de la première demande de Mme X et l'entrée en vigueur de la loi précitée, une seule vacance d'emploi s'est produite dans les services de la commune ; qu'en tout état de cause, le délai raisonnable pour procéder à la réintégration de l'intéressée n'était, à la date de l'entrée en vigueur de la loi précitée, pas expiré ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées du troisième alinéa de l'article 72 de la loi du 26 janvier 1984, dans sa rédaction applicable à la situation de Mme X après l'entrée en vigueur de la loi n° 94-1134 du 27 décembre 1994, que Mme X n'avait droit à être réintégrée qu'à l'une des trois premières vacances ayant suivi sa demande de réintégration et non dès la première vacance ; que la responsabilité de la commune de Montauban ne peut dès lors être engagée, pour n'avoir pas réintégré Mme X, qu'à l'issue de la troisième vacance de poste ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des états du personnel annexés au budget de la commune de Montauban, que figurait un poste non pourvu d'adjoint administratif principal de 2ème classe au 31 décembre 1994, au 31 décembre 1996 au 31 décembre 1997 et au 31 décembre 1998 ; que, par suite, c'est à bon droit que le Tribunal administratif de Toulouse n'a pas admis la responsabilité de la commune de Montauban avant la date du 1er janvier 1997 ;

Considérant que Mme X a droit, en réparation du préjudice subi par elle du fait du refus illégal de réintégration, à une indemnité compensant la perte de revenus résultant de celui-ci ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des écritures de la requérante, que cette dernière a retiré de l'activité privée qu'elle a exercée du 1er janvier 1997 au 31 décembre 2003 des gains dont le total est supérieur au montant des traitements qu'elle aurait perçus si elle était demeurée en fonctions ; qu'elle n'a donc subi de ce chef aucun préjudice ;

Considérant que si Mme X sollicite la condamnation de la commune de Montauban au titre de la perte des droits à pension, elle ne met pas la cour en mesure de se prononcer sur les erreurs que le tribunal administratif aurait pu commettre en rejetant ces conclusions ; qu'en tout état de cause, ces dernières ne sont assorties d'aucune précision permettant d'apprécier l'existence de ce préjudice dès lors que Mme X a exercé, au cours de la période litigieuse, une activité privée susceptible de lui avoir ouvert des droits à l'assurance vieillesse ;

Considérant que Mme X a droit, en réparation du préjudice subi par elle du fait du refus de réintégration, à une indemnité compensant les troubles de toute nature qui ont pu lui être causés par ce refus illégal ;

Considérant que si Mme X invoque le préjudice lié à son état dépressif et le préjudice psychologique que lui a causé, en raison des horaires inhérents à son activité privée, le placement en pension de son fils adopté, elle n'apporte aucune preuve du lien de causalité existant entre le refus de réintégration et lesdits préjudices ;

Considérant qu'en revanche, le refus de réintégration a causé à Mme X des troubles dans les conditions d'existence en la contraignant à exercer une activité aux conditions précaires et à effectuer des démarches administratives et judiciaires ; que c'est à bon droit que le tribunal administratif a évalué l'indemnisation de ce préjudice à la somme de 5.000 euros ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Toulouse a limité à 5.000 euros la somme que la commune de Montauban a été condamnée à lui verser ; que la commune de Montauban n'est pas plus fondée à soutenir, par la voie de l'appel incident, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le Tribunal administratif de Toulouse l'a condamnée à verser à Mme X la somme de 5.000 euros ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. » ;

Considérant qu'à défaut de conclusions tendant à l'annulation du refus de réintégration de Mme X, la reconnaissance de l'illégalité de ce refus dans le cadre d'un contentieux indemnitaire n'implique pas nécessairement cette réintégration ; que, par suite, les conclusions de Mme X tendant à ce qu'il soit enjoint à la commune de Montauban de la réintégrer immédiatement à son poste d'adjoint administratif et de reconstituer sa carrière doivent être rejetées ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a lieu d'accorder ni à Mme X ni à la commune de Montauban le bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme Jeanne X et les conclusions incidentes de la commune de Montauban sont rejetées.

2

No 07BX00268


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07BX00268
Date de la décision : 05/02/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LEDUCQ
Rapporteur ?: M. Nicolas LAFON
Rapporteur public ?: M. ZUPAN
Avocat(s) : CAMILLE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2009-02-05;07bx00268 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award