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17/12/2008 | FRANCE | N°07BX01363

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 17 décembre 2008, 07BX01363


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 29 juin 2007, présentée pour M. Jean-Marc X, demeurant ..., Mme Hélène Y épouse X, demeurant ..., Mme Marie Z, demeurant ..., M. Alain A, demeurant ... ;

M. X et autres demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 3 mai 2007 en tant qu'il a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Dordogne du 4 février 2003 déclarant d'utilité publique les travaux d'aménagement de la voie de la vallée de la Dordogne entre Bergerac et Couze Saint-Front ;



2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 29 juin 2007, présentée pour M. Jean-Marc X, demeurant ..., Mme Hélène Y épouse X, demeurant ..., Mme Marie Z, demeurant ..., M. Alain A, demeurant ... ;

M. X et autres demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 3 mai 2007 en tant qu'il a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Dordogne du 4 février 2003 déclarant d'utilité publique les travaux d'aménagement de la voie de la vallée de la Dordogne entre Bergerac et Couze Saint-Front ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 ;

Vu le décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977 modifié ;

Vu le décret n° 84-617 du 17 juillet 1984 ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 novembre 2008 :

- le rapport de Mme Aubert, premier conseiller ;

- les observations de Me Berrada de la SCP Delavallade-Gelibert-Delavoye, avocat du département de la Dordogne ;

- et les conclusions de M. Margelidon, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X et autres demandent l'annulation du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 3 mai 2007 en tant qu'il a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Dordogne du 4 février 2003 déclarant d'utilité publique les travaux d'aménagement de la voie de la vallée de la Dordogne entre Bergerac et Couze Saint-Front ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que le tribunal administratif a omis de statuer sur le moyen invoqué par les requérants à l'encontre de l'arrêté en litige et qui n'était pas inopérant, tiré de la violation des articles R. 414-19 et suivants du code de l'environnement (anciens articles R. 214-34 et suivants du code rural) relatifs à l'évaluation des incidences d'un projet au regard des objectifs de conservation des sites Natura 2000 ; que ce jugement doit, dès lors, être annulé en tant qu'il a statué sur la demande de M. X et autres ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par les requérants devant le tribunal administratif de Bordeaux ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme : « Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en oeuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs, de lutter contre l'insalubrité, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels ... » ; que le projet de réalisation d'une déviation de la section de la RD 660 comprise entre Bergerac et Couze Saint-Front, qui ne constitue ni une action ni une opération d'aménagement au sens des dispositions précitées du code de l'urbanisme, n'avait pas à être soumis à la procédure de concertation prévue à l'article L. 300-2 de ce code ; que si les requérants soutiennent que l'administration a néanmoins engagé cette procédure et se trouvait ainsi tenue de la mettre en oeuvre régulièrement, il ressort des pièces du dossier que le département s'est borné à organiser des réunions d'information du public sans y associer les conseils municipaux des communes concernées par le projet de déviation ; que, dans ces conditions, il ne peut être regardé comme ayant engagé la procédure de concertation prévue par les dispositions de l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme ; que le moyen tiré de la violation de ces dispositions doit, dès lors, être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : « L'expropriant adresse au préfet pour être soumis à l'enquête un dossier qui comprend obligatoirement : I - Lorsque la déclaration d'utilité publique est demandée en vue de la réalisation de travaux ou d'ouvrages : ...7° : l'évaluation mentionnée à l'article 5 du décret n° 84-617 du 17 juillet 1984 pris pour l'application de l'article 14 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs, lorsque les travaux constituent un grand projet d'infrastructure tel que défini à l'article 3 du même décret ... » ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 14 de la loi du 30 décembre 1982 : « Les grands projets d'infrastructures et les grands choix technologiques sont évalués sur la base de critères homogènes incluant les impacts des effets externes des transports relatifs notamment à l'environnement, à la sécurité et à la santé et permettant de procéder à des comparaisons à l'intérieur d'un même mode de transport et entre différents modes ou combinaisons de modes. Ces évaluations sont rendues publiques avant l'adoption définitive des projets concernés ... » ; qu'aux termes de l'article 2 du décret du 17 juillet 1984 pris pour l'application de l'article 14 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 : « Sont considérés comme grands projets d'infrastructure de transports : ... 3. Les projets d'infrastructures de transports dont le coût est égal ou supérieur à 545 millions de francs (83,08 millions d'euros) » et qu'aux termes de l'article 3 du même décret : « Lorsqu'un projet est susceptible d'être réalisé par tranches successives, les conditions prévues à l'article 2 s'apprécient au regard de la totalité dudit projet et non de chacune de ses tranches ; l'évaluation ... doit être préalable à la réalisation de la première tranche » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la section de la déviation de la RD 660 entre Bergerac et Couze Saint-Front, dont la réalisation a été déclarée d'utilité publique par l'arrêté en litige, peut être construite et exploitée indépendamment des autres sections de la voie dite de la vallée de la Dordogne qui, à terme, doit relier Bergerac à Souillac en passant par Sarlat, et a une utilité propre ; qu'ainsi, elle n'entre pas dans le champ d'application des dispositions précitées relatives à l'évaluation des grands projets d'infrastructures ; que si les requérants soutiennent que la section de la déviation de la RD 660 entre Bergerac et Couze Saint-Front constitue, pour le moins, l'un des deux tronçons de la déviation allant de Bergerac à Buisson de Cadouin en passant par Couze Saint-Front, ainsi que l'atteste l'étude d'impact commune dont ces deux tronçons ont fait l'objet, il ne ressort pas des pièces du dossier que le coût total de la section Bergerac Le Buisson de Cadouin, d'une longueur de 34 kms soit égal ou supérieur à 83,03 millions d'euros (545 millions de francs), le coût de la section Bergerac Couze Saint-Front, d'une longueur de 14, 4 kms étant par ailleurs de 28 millions d'euros ; que le moyen tiré de la violation de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique doit, dès lors, être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 2 du décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977 alors en vigueur : « Le contenu de l'étude d'impact doit être en relation avec l'importance des travaux et aménagements projetés et avec leurs incidences prévisibles sur l'environnement. L'étude d'impact présente successivement : ... 2° Une analyse des effets directs et indirects, temporaires et permanents du projet sur l'environnement, et en particulier sur la faune et la flore, les sites et les paysages, le sol, l'eau, l'air, le climat, les milieux naturels et les équilibres biologiques, sur la protection des biens et du patrimoine culturel et, le cas échéant, sur la commodité du voisinage ... ou sur l'hygiène, la sécurité et la salubrité publique ; 3° Les raisons pour lesquelles, notamment du point de vue des préoccupations d'environnement, parmi les partis envisagés, le projet présenté a été retenu ; 4° Les mesures envisagées par le maître de l'ouvrage ... pour supprimer, réduire et si possible compenser les conséquences dommageables du projet sur l'environnement, ainsi que l'estimation des dépenses correspondantes » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis à enquête publique, que l'étude des sols que comporte l'étude d'impact, qui reprend les conclusions d'une étude microgravimétrique des cavités souterraines résultant de l'exploitation d'anciennes carrières de pierre et mentionne, notamment, la nécessité de réaliser des sondages complémentaires et des travaux confortatifs lors de la réalisation de la nouvelle voie, est suffisante ; que l'éboulement qui s'est produit en janvier 2006, à proximité de la Dordogne, à la suite d'une rupture accidentelle d'une vanne du barrage des Tuilières, ne remet pas en cause la pertinence de cette étude des sols ; que l'étude d'impact fait état de la faune et de la flore caractérisant le site Natura 2000 que constitue la vallée de la Dordogne et pouvait, dans le souci de la préserver, ne pas mentionner le nom de l'espèce végétale rare de la station botanique de Varennes dont elle relève l'existence et pour laquelle elle a prévu la réalisation d'une étude floristique complémentaire visant à la protéger, dans toute la mesure du possible, lors de la réalisation des travaux ; que si les requérants soutiennent que le tracé retenu traverse le périmètre de protection de six bâtiments historiques à Couze Saint-Front et que l'administration n'a pas tenu compte des réserves que l'architecte des bâtiments de France a formulées au sujet de la visibilité du projet à partir du canal de Lalinde et de son insertion dans le site à son arrivée à Couze Saint-Front, l'étude d'impact après avoir longuement étudié les variantes du projet en tenant compte des réserves ainsi émises, retient la variante la plus respectueuse du canal de Lalinde et du patrimoine historique de Couze Saint-Front et précise les nombreuses mesures compensatoires prévues pour en limiter l'impact ; qu'elle contient une analyse suffisante des effets du projet sur l'environnement, notamment en ce qui concerne les nuisances sonores et la pollution de l'air, dont le coût collectif est chiffré, et des mesures prévues pour y remédier ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la protection du site Natura 2000 que constitue la vallée de la Dordogne, que le projet ne longe que sur une distance de 500 mètres environ et sur lequel il n'a pas d'emprise, nécessite des mesures de protection plus importantes que celles prévues par l'étude d'impact ; que le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact doit, dès lors, être écarté ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 414-4 du code de l'environnement : « Les programmes ou projets de travaux, d'ouvrage ou d'aménagement soumis à un régime d'autorisation ou d'approbation administrative, et dont la réalisation est de nature à affecter de façon notable un site Natura 2000, font l'objet d'une évaluation de leurs incidences au regard des objectifs de conservation du site ... II. - L'autorité compétente ne peut autoriser ou approuver un programme ou projet mentionné au premier alinéa du I s'il résulte de l'évaluation que sa réalisation porte atteinte à l'état de conservation du site. III. - Toutefois, lorsqu'il n'existe pas d'autre solution que la réalisation d'un programme ou projet qui est de nature à porter atteinte à l'état de conservation du site, l'autorité compétente peut donner son accord pour des raisons impératives d'intérêt public. Dans ce cas, elle s'assure que des mesures compensatoires sont prises pour maintenir la cohérence globale du réseau Nature 2000 ... La Commission européenne en est tenue informée ... » ; que l'étude d'impact analyse précisément l'incidence du projet sur le site Natura 2000 que constitue la vallée de la Dordogne ; qu'il en résulte que le projet n'aura pas d'incidences significatives sur les habitats et les espèces remarquables de cette zone ; que, dans ces conditions, le préfet n'avait pas à prévoir les mesures compensatoires spécifiques dont la Commission européenne doit être tenue informée ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 414-19 du code de l'environnement : « Les programmes ou projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagements mentionnés à l'article L. 414-19 du présent code font l'objet d'une évaluation de leurs incidences éventuelles au regard des objectifs de conservation des sites Natura 2000 qu'ils sont susceptibles d'affecter de façon notable, dans les cas et selon les modalités suivantes : 1° S'agissant des programmes ou projets situés à l'intérieur du périmètre d'un site Natura 2000 : ... c) S'ils relèvent d'un autre régime d'autorisation ou d'approbation administrative et doivent faire l'objet d'une étude ou d'une notice d'impact au titre des articles L. 122-1 à L. 122-3 et des articles R. 122-1 à R. 122-16 ... » ; qu'aux termes de l'article R. 414-22 du même code : « Le document d'incidences et l'étude d'impact ou la notice d'impact mentionnés respectivement aux a et c du 1° de l'article R. 414-19 tiennent lieu du dossier d'évaluation s'ils satisfont aux prescriptions de la présente sous-section » ; que l'étude d'impact analyse de manière suffisante l'incidence au demeurant limitée du projet sur le site Natura 2000 que constitue la vallée de la Dordogne ; que, dans ces conditions, elle peut tenir lieu, ainsi qu'elle le précise, de document d'évaluation des incidences du projet sur ce site, au sens de l'article R. 414-19 du code de l'environnement ;

Considérant que si les requérants soutiennent que la chambre d'agriculture de la Dordogne et l'INAO n'ont pas été saisis pour avis alors que le projet traverse des zones viticoles protégées et des zones agricoles, il ressort des pièces du dossier que ces autorités administratives ont respectivement émis des avis favorables au projet le 25 juillet 2000 et le 23 mai 2002 ;

Considérant qu'une opération ne peut être légalement déclarée d'utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d'ordre social ou l'atteinte à l'environnement et à d'autres intérêts publics qu'elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente ; qu'il ressort des pièces du dossier que le projet d'aménagement d'une déviation de la RD 660 entre Bergerac et Couze Saint-Front vise à diminuer le trafic de cette route départementale qui traverse quatre villages et présente un taux d'accident élevé ; que la déviation projetée, qui a vocation à accueillir 40 % de la circulation de la route départementale, est plus éloignée que cette route du site Natura 2000 que constitue la vallée de la Dordogne et a fait l'objet de mesures compensatoires destinées, notamment, à préserver le patrimoine historique de la commune de Couze Saint-Front ; qu'eu égard tant à l'intérêt de l'opération pour la sécurité publique qu'aux précautions prises pour la préservation de l'environnement et la protection du site, les inconvénients qu'elle présente, notamment en ce qui concerne le bruit pour quelques habitations riveraines et la démolition de l'immeuble dans lequel M. et Mme X exploitent une pharmacie, ne sont pas de nature à lui retirer son caractère d'utilité publique ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X et autres ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêté du préfet de la Dordogne du 4 février 2003 déclarant d'utilité publique les travaux d'aménagement de la voie de la vallée de la Dordogne entre Bergerac et Couze Saint-Front ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser aux requérants la somme qu'ils demandent sur le fondement de ces dispositions ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de condamner les requérants à verser au département de la Dordogne la somme qu'il demande sur le même fondement ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 3 mai 2007 est annulé en tant qu'il a statué sur la demande présentée par M. X et autres.

Article 2 : La demande présentée par M. X et autres devant le tribunal administratif de Bordeaux est rejetée.

Article 3 : Les conclusions des requérants et du département de la Dordogne tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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No 07BX01363


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 07BX01363
Date de la décision : 17/12/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Sylvie AUBERT
Rapporteur public ?: M. MARGELIDON
Avocat(s) : SCP BOUYSSOU et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2008-12-17;07bx01363 ?
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