La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/11/2008 | FRANCE | N°08BX00475

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 13 novembre 2008, 08BX00475


Vu 1°) la requête, enregistrée au greffe de la cour le 18 février 2008 sous le n° 08BX00476, présentée par le PREFET DE LA VIENNE ;

Le PREFET DE LA VIENNE demande à la cour :

- d'annuler les articles 1 et 2 du jugement en date du 6 février 2008 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a annulé son arrêté en date du 4 octobre 2007, refusant la délivrance d'un titre de séjour à Mlle X et portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi ;

- de rejeter la demande de Mlle X ;

.....................................

.....................................................................

Vu 2°) la requêt...

Vu 1°) la requête, enregistrée au greffe de la cour le 18 février 2008 sous le n° 08BX00476, présentée par le PREFET DE LA VIENNE ;

Le PREFET DE LA VIENNE demande à la cour :

- d'annuler les articles 1 et 2 du jugement en date du 6 février 2008 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a annulé son arrêté en date du 4 octobre 2007, refusant la délivrance d'un titre de séjour à Mlle X et portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi ;

- de rejeter la demande de Mlle X ;

..........................................................................................................

Vu 2°) la requête, enregistrée au greffe de la cour le 11 février 2008 sous le n° 08BX00475, présentée par le PREFET DE LA VIENNE ;

Le PREFET DE LA VIENNE demande à la cour de prononcer le sursis à exécution du jugement du 6 février 2008 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a annulé son arrêté en date du 4 octobre 2007, refusant la délivrance d'un titre de séjour à Mlle X et portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 octobre 2008,

- le rapport de Mme Balzamo, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Zupan, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées du PREFET DE LA VIENNE sont dirigées contre un même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt ;

Sur la requête n° 08BX00476 :

Considérant que, par arrêté du 4 octobre 2007, le PREFET DE LA VIENNE a refusé la délivrance d'un titre de séjour à Mlle X, de nationalité camerounaise, lui a enjoint de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que par jugement en date du 6 février 2008, le Tribunal administratif de Poitiers a annulé cet arrêté au motif que son signataire ne disposait pas, à la date de la décision attaquée, d'une délégation lui permettant de signer celle-ci aux lieu et place du préfet ; que le PREFET DE LA VIENNE relève appel de ce jugement ;

Considérant que l'arrêté attaqué a été signé pour le PREFET DE LA VIENNE par M. Frédéric Benet-Chabellan, secrétaire général de la préfecture de la Vienne ; qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 9 juillet 2007 du PREFET DE LA VIENNE, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de la Vienne du 11 juillet 2007 : « délégation de signature est donnée à M. Frédéric Benet-Chambellan, sous-préfet hors classe, secrétaire général de la préfecture de la Vienne, à l'effet de signer tous actes, arrêtés, décisions, documents et correspondances administratives relevant des attributions de l'Etat dans le département de la Vienne, à l'exception : - des mesures générales concernant la défense nationale, la défense intérieure et le maintien de l'ordre, - des matières qui font l'objet d'une délégation à un chef de service de l'Etat dans le département. » ; qu'aux termes de l'article 3 de ce même arrêté : « s'agissant de l'application des dispositions du CESEDA (Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) et notamment des articles L. 552-1, L. 552-7, L. 552-8 et L. 552-9, délégation de signature est donnée au secrétaire général, à l'effet de saisir le président du tribunal de grande instance ou un magistrat du siège délégué par lui et le premier président de la cour d'appel ou un magistrat du siège délégué par lui. » ;

Considérant que les actes relevant des attributions de l'Etat dans le département susmentionnées comprennent, sauf s'il en est disposé autrement par l'arrêté portant délégation de signature, les décisions préfectorales en matière de police des étrangers ; qu'il résulte de la rédaction de l'article 1er de l'arrêté précité du 9 juillet 2007 que le secrétaire général de la préfecture de la Vienne est compétent pour signer tous les actes relevant des attributions de l'Etat dans le département à l'exception des deux catégories d'actes explicitement visés ; que l'article 3 de cet arrêté n'a pas eu pour objet d'établir une nouvelle exception concernant les décisions en matière de police des étrangers ; qu'il se borne à ajouter un domaine supplémentaire à la délégation de signature consentie au secrétaire général de la préfecture de la Vienne en ce qui concerne la saisine des autorités judiciaires ; que les dispositions précitées de l'article 1er donnaient dès lors compétence à M. Frédéric Benet-Chambellan pour signer l'arrêté du 4 octobre 2007 refusant l'admission au séjour de Mlle X, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA VIENNE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Poitiers s'est fondé, pour annuler l'arrêté attaqué, sur ce qu'il aurait été pris par une autorité incompétente ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel de l'ensemble du litige, de statuer sur les autres moyens soulevés par Mlle X devant le Tribunal administratif de Poitiers ;

Sur le refus de titre de séjour :

Considérant en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 : « Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent (...) » ; qu'aux termes de l'article 3 de cette même loi : « La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision » ; que la décision attaquée vise les textes dont il est fait application et mentionne les faits relatifs à la vie privée et familiale de l'intéressée qui la fondent ; que le PREFET DE VIENNE a ainsi suffisamment motivé en droit et en fait sa décision au regard des dispositions précitées de la loi du 11 juillet 1979 ;

Considérant en deuxième lieu, que le préfet ne s'est pas fondé, pour prendre la décision en litige, sur le seul motif tiré des fausses déclarations de Mlle X lors de sa demande de visa mais également sur le fait qu'elle ne détenait pas le visa de long séjour prévu par l'article L. 314-11-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il s'est, en outre, livré à l'appréciation des conséquences de sa décision sur le droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressée ; que le moyen tiré de ce qu'il se serait cru lié à tort par le seul motif tiré des fausses déclarations de Mlle X pour rejeter la demande de titre de séjour n'est donc pas fondé ;

Considérant en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. » ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique de pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle X, qui est célibataire et sans enfant, est entrée en France le 3 juillet 2003 sous couvert de faux documents ; qu'elle n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales au Cameroun ; qu'ainsi, compte tenu notamment de la durée et des conditions de son séjour en France, la décision du 4 octobre 2007 lui refusant un titre de séjour n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a donc méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant en premier lieu, que l'obligation de quitter le territoire français est une mesure de police qui doit, comme telle, être motivée en application des règles de forme édictées, pour l'ensemble des décisions administratives, par l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ; que, toutefois, la motivation de cette mesure se confond avec celle du refus ou du retrait de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus ou ce retrait est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, de mention spécifique pour respecter les exigences de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ; que l'arrêté faisant obligation à Mlle X de quitter le territoire français, qui fait suite à une décision motivée de rejet de sa demande de délivrance de titre de séjour, comporte le visa des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui fonde cette obligation ; que cet arrêté doit, par suite, être regardé comme suffisamment motivé au regard des exigences de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ;

Considérant en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 : « Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1 et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales... » ;

Considérant qu'il ressort de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français ; que, dès lors, l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration, qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979 ne saurait être utilement invoqué à l'encontre d'une décision portant obligation de quitter le territoire français quel que soit le type de décision dont cette obligation de quitter le territoire français découle ;

Considérant enfin qu'il résulte de ce qui a été dit plus haut que le moyen tiré de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour doit être écarté ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

Considérant que Mlle X n'invoque aucun moyen à l'encontre de la décision fixant le pays de destination ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA VIENNE est fondé à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Poitiers a annulé l'arrêté en date du 4 octobre 2007 par lequel il a refusé à Mlle X la délivrance d'un titre de séjour, lui a enjoint de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

Sur la requête n° 08BX00475 :

Considérant que le présent arrêt statuant sur l'appel présenté contre le jugement du 6 février 2008 du Tribunal administratif de Poitiers, les conclusions de la requête n° 08BX00475 tendant à ce qu'il soit sursis à son exécution deviennent sans objet ; qu'il n'y a pas lieu d'y statuer ;

DECIDE :

Article 1er : Les articles 1 et 2 du jugement du Tribunal administratif de Poitiers en date du 6 février 2008 sont annulés.

Article 2 : La demande présentée par Mlle X devant le Tribunal administratif de Poitiers est rejetée.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du PREFET DE LA VIENNE à fin de sursis à exécution du jugement en date du 6 février 2008.

5

Nos 08BX00475-08BX00476


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. LEDUCQ
Rapporteur ?: Mme Evelyne BALZAMO
Rapporteur public ?: M. ZUPAN

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Date de la décision : 13/11/2008
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 08BX00475
Numéro NOR : CETATEXT000019771365 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2008-11-13;08bx00475 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award