Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 4 septembre 2006 sous le n° 06BX01891, présentée pour la S.A.R.L «RE LA BLANCHE» dont le siège social est à La Sabourauderie à Iteuil (86240), par la S.C.P. d'avocats Pielberg - Butruille ; la S.A.R.L «RE LA BLANCHE» demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 6 juillet 2006 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Saint-Martin de Ré à lui payer une somme de 419.783,67 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité du permis de construire qui lui a été accordé le 27 janvier 2000 pour la réalisation d'un ensemble de dix maisons d'habitation aux n°s 10, 12 et 14 de la rue Guy de Thouars ainsi qu'à l'annulation de la décision rejetant implicitement sa demande préalable d'indemnisation ;
2°) de condamner la commune de Saint-Martin de Ré à lui payer une indemnité de 419.783,67 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 25 mai 2004 et de la capitalisation des intérêts échus ainsi que d'annuler la décision rejetant implicitement sa demande préalable d'indemnisation ;
3°) de condamner la commune de Saint-Martin de Ré à lui verser une somme de 2.000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 avril 2008,
- le rapport de M. Etienvre, premier conseiller ;
- les observations de Me Kolenc de la SCP Pielberg-Butruille, avocat de la S.A.R.L «RE LA BLANCHE» ;
- et les conclusions de Mme Balzamo, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par jugement en date du 21 décembre 2000, le Tribunal administratif de Poitiers a annulé l'arrêté en date du 27 janvier 2000 par lequel le maire de la commune de Saint-Martin de Ré a accordé à la S.A.R.L «RE LA BLANCHE» un permis de construire pour la réalisation d'un ensemble immobilier de dix maisons d'habitation sur des terrains situés 10, 12 et 14 rue Guy de Thouars à Saint-Martin de Ré au motif que ledit permis avait été délivré en méconnaissance des dispositions de l'article UB 12 du plan d'occupation des sols de la commune ; que de nouvelles autorisations ont été délivrées à la S.A.R.L. « RE LA BLANCHE » le 10 juillet 2001 puis le 8 novembre 2001 ; que toutefois la société a demandé l'indemnisation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de l'illégalité de l'arrêté du 27 janvier 2000 ; que, par jugement dont la société fait appel, le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté cette demande d'indemnisation ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'en fondant son jugement sur l'absence d'un lien de causalité directe entre les préjudices invoqués par la S.A.R.L «RE LA BLANCHE» et l'illégalité du permis de construire qui avait été accordé à cette société, le Tribunal administratif de Poitiers n'a pas soulevé d'office un moyen, mais a seulement relevé, pour rejeter la demande, que ladite société ne remplissait pas cette condition nécessaire à la mise en oeuvre de la responsabilité de la puissance publique ; que la S.A.R.L «RE LA BLANCHE» n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que le tribunal administratif aurait méconnu l'article R. 611-7 du code de justice administrative en omettant de communiquer aux parties un moyen relevé d'office ;
Sur la responsabilité :
Considérant que l'illégalité commise par la commune de Saint-Martin de Ré lors de la délivrance à la S.A.R.L «RE LA BLANCHE» du permis de construire accordé le 27 janvier 2000 est constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de la commune ;
Sur le préjudice :
Considérant que lorsqu'un permis de construire irrégulièrement délivré est annulé, le bénéficiaire dudit permis a droit à l'indemnisation des sommes exposées inutilement pour la réalisation des travaux autorisés par celui-ci entre la date de délivrance du permis en cause et la date du jugement prononçant son annulation, ainsi qu'à celle des sommes exposées postérieurement au jugement et qui peuvent être regardées comme la conséquence directe de cette annulation ;
Considérant que la S.A.R.L «RE LA BLANCHE» demande d'abord l'indemnisation des frais supplémentaires qu'aurait générés l'interruption du chantier à partir du mois de juillet 2000 jusqu'au mois d'avril 2002 ; que toutefois le permis délivré le 27 janvier 2000 n'a été annulé que le 21 décembre 2000 et une nouvelle autorisation a été délivrée dès le mois de juillet 2001 ; qu'ainsi la société requérante n'établit pas l'existence d'un lien de causalité directe entre l'interruption du chantier qu'elle invoque, sans d'ailleurs apporter la preuve de sa réalité, et l'illégalité fautive du permis délivré le 27 janvier 2000 ; qu'en outre le montant des frais supplémentaires qu'aurait entraînés cette interruption prétendue du chantier n'est pas justifié par la seule production d'une attestation de l'architecte faisant état d'un surcoût de huit à dix pour cent ;
Considérant que la société soutient ensuite avoir subi un manque à gagner en raison de l'abandon de la construction du lot n° 5 et de l'extension d'une construction sur le lot A ainsi que de l'impossibilité de répercuter la hausse du coût de la construction, liée au retard dans le démarrage des travaux, sur le prix des immeubles ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que l'opération initiale prévoyait la construction de dix habitations et que l'autorisation délivrée le 8 novembre 2001, à la suite de l'annulation prononcée le 21 décembre 2000, porte également sur dix constructions ; qu'ainsi le lien de causalité directe entre l'illégalité fautive du permis du 27 janvier 2000 et l'abandon de la réalisation d'une construction et de l'extension d'une autre n'est pas établi ; qu'il n'est pas plus justifié de l'impossibilité de répercuter la hausse du coût de la construction sur le prix de vente des constructions dont quatre seulement sur les dix projetées avaient été vendues en l'état futur d'achèvement en mai et juin 2000 ;
Considérant que la société n'établit pas plus que les frais financiers, frais bancaires et frais de caution, dont elle demande l'indemnisation, seraient la conséquence de l'annulation de l'autorisation initiale ;
Considérant, enfin, que les frais supportés pour le dépôt d'un nouveau projet immobilier, autorisé comme il a été dit précédemment le 8 novembre 2001, ont eu pour objet la mise au point d'un projet conforme à la réglementation d'urbanisme applicable et n'ont donc pas été exposés inutilement ; qu'ils ne constituent en conséquence pas un préjudice indemnisable lié à l'illégalité de l'autorisation initiale ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la S.A.R.L «RE LA BLANCHE» n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande ;
Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Martin de Ré, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée pour la S.A.R.L «RE LA BLANCHE» au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche de condamner la S.A.R.L «RE LA BLANCHE» à verser une somme de 1.300 euros à la commune de Saint-Martin de Ré sur le fondement des mêmes dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la S.A.R.L «RE LA BLANCHE» est rejetée.
Article 2 : La S.A.R.L «RE LA BLANCHE» versera une somme de 1.300 euros à la commune de Saint-Martin de Ré au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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No 06BX01891