Vu la requête, enregistrée le 12 septembre 2005, présentée pour M. Jean-Michel X, demeurant ... ;
M. X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 7 juillet 2005 qui a rejeté sa demande tendant à ce que la commune de La Jarrie soit condamnée à lui verser une indemnité de 28 861,85 euros en réparation du préjudice subi en raison du retrait illégal du permis de construire tacite qu'il avait obtenu le 8 juin 1999 ;
2°) de condamner la commune de La Jarrie à lui verser une indemnité de 26 513,18 euros ;
3°) de condamner la commune à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 portant amélioration des relations des usagers avec les administrations et le décret n° 2001-492 du 6 juin 2001 pris pour l'application de ladite loi ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 février 2008 :
- le rapport de Mme Rey-Gabriac, premier conseiller ;
- les observations de Me Kolenc, collaborateur de Me Pielberg, avocat de la commune de La Jarrie ;
- et les conclusions de M. Pouzoulet, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par une décision du 30 août 1999, le maire de la commune de La Jarrie a refusé de délivrer à M. X l'autorisation de construire qu'il sollicitait pour la surélévation de sa maison et la construction d'un abri de jardin ; que, par un jugement en date du 5 avril 2001, devenu définitif, le tribunal administratif de Poitiers a annulé cette décision au motif qu'elle avait illégalement retiré le permis de construire tacite dont M. X était titulaire depuis le 8 juin 1999 ; qu'un permis de construire a été explicitement délivré à ce dernier par le maire de la commune de La Jarrie le 11 juin 2002 ; que M. X a demandé à la commune la réparation du préjudice causé par la décision illégale du 30 août 1999 ; qu'il fait appel du jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 7 juillet 2005 qui a rejeté sa demande d'indemnisation au motif qu'il ne justifiait pas de la réalité du préjudice invoqué ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de La Jarrie :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-2 du code de justice administrative : « Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, le silence gardé pendant plus de deux mois sur une réclamation par l'autorité compétente vaut décision de rejet. Les intéressés disposent, pour se pourvoir contre cette décision implicite, d'un délai de deux mois à compter du jour de l'expiration de la période mentionnée au premier alinéa. (…) » ; qu'aux termes de l'article R. 421-3 de ce même code : « Toutefois, l'intéressé n'est forclos qu'après un délai de deux mois à compter du jour de la notification d'une décision expresse de rejet : 1° En matière de plein contentieux ; (…) » ;
Considérant que la réclamation adressée le 15 avril 2003 par M. X au maire de la commune de La Jarrie tendait à l'indemnisation du préjudice qu'il estimait avoir subi du fait de l'illégalité du retrait de permis de construire tacite qui lui avait été opposé le 30 août 1999 ; qu'en l'absence de décision expresse prise sur cette réclamation, l'intéressé était recevable à saisir sans délai la juridiction administrative du litige de plein contentieux né du refus implicite de la commune de faire droit à cette demande d'indemnisation ; que, par suite, la fin de non-recevoir soulevée par la commune de La Jarrie et tirée de la tardiveté de la demande de première instance ne peut qu'être écartée ;
Au fond :
Considérant que l'illégalité de la décision du 30 août 1999 constitue une faute susceptible d'engager la responsabilité de la commune de La Jarrie ; que, contrairement à ce que soutient la commune, l'annulation de cette décision n'a pas été prononcée pour un motif de légalité externe puisqu'il résulte des motifs du jugement du tribunal administratif de Poitiers du 5 avril 2001, qui constituent le soutien nécessaire de son dispositif, que cette annulation a été prononcée en raison du motif erroné en droit sur lequel s'était fondé le maire pour justifier sa décision ;
Considérant que M. X a droit à la réparation des seuls préjudices qui ont un caractère certain et qui sont directement imputables à la décision illégale du 30 août 1999 ; que le permis tacite dont il était titulaire ayant été rétabli à compter de la date de lecture du jugement qui a prononcé l'annulation de son retrait, soit le 5 avril 2001, la période au titre de laquelle la responsabilité de la commune est engagée court du 30 août 1999 au 5 avril 2001 et non, comme le soutient le requérant, jusqu'au 11 juin 2002, date à laquelle le maire lui a délivré un permis explicite ;
Considérant que M. X soutient qu'en raison du retrait illégal du permis tacite, il n'a pu amortir son prêt qu'à compter de juillet 2001, et non de juin 1999, ce qui l'a conduit à payer des intérêts intercalaires supplémentaires pour la somme de 4 913,18 euros ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a contracté, en juillet 1998, auprès de La Poste, deux prêts « compte-épargne logement » de 14 190 F et 20 120 F et un prêt principal, dit « prêt Habitat modulable », d'un montant de 335 690 F en vue de financer, dans l'immédiat, l'acquisition de sa maison d'habitation et ultérieurement, des travaux de rénovation après l'obtention du permis de construire et la production des factures correspondant auxdits travaux ; que, par acte notarié du 18 août 1998, M. X a acquis la maison, pour un montant total de 293 926 F ; qu'aussitôt, La Poste a débloqué la totalité des deux prêts compte-épargne logement ainsi qu'une somme de 263 460 F sur le prêt « Habitat modulable » ; que le reliquat de ce dernier prêt, destiné à financer les travaux, n'ayant jamais été versé du fait du retard pris dans l'exécution de ceux-ci, un avenant a été conclu le 22 novembre 2001, réduisant ce prêt à la somme de 263 460 F ; que, s'il est vrai que ce prêt n'a commencé à être amorti qu'à compter de juillet 2001, seuls des versements d'intérêts ayant eu lieu jusqu'à cette date, il ne résulte pas de l'instruction que ce différé d'amortissement serait lié au retard pris dans la réalisation des travaux prévus ; que, dans ces conditions, le requérant ne justifie pas avoir versé des intérêts supplémentaires du fait du retrait illégal de son permis de construire ; qu'en outre, et ainsi qu'il a été précédemment rappelé, rien ne faisait obstacle à ce qu'il engageât les travaux dès l'intervention du jugement du 5 avril 2001 ;
Considérant que si M. X affirme qu'il a dû remplacer des matériaux qui avaient été endommagés en raison du retard dans l'exécution des travaux, il n'établit cependant pas la réalité du préjudice ainsi invoqué en se bornant à produire des factures de matériaux ;
Considérant, en revanche, que le requérant est fondé à soutenir qu'en faisant obstacle à ce qu'il poursuive les travaux envisagés sur sa maison, laquelle était une maison ancienne dans un état d'entretien médiocre, la décision du 30 août 1999 est à l'origine de troubles dans ses conditions d'existence dont il sera fait, dans les circonstances de l'espèce, une juste appréciation en fixant à 5 000 euros l'indemnité destinée à les réparer ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est seulement fondé à demander la condamnation de la commune de La Jarrie à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité de la décision prise par le maire le 30 août 1999 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. X, qui n'est pas la partie perdante, verse à la commune de La Jarrie la somme qu'elle demande au titre de ces dispositions ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de La Jarrie le versement de la somme de 1 300 euros à M. X au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 7 juillet 2005 est annulé.
Article 2 : La commune de La Jarrie est condamnée à verser à M. X une indemnité de 5 000 euros.
Article 3 : La commune de La Jarrie versera à M. X la somme de 1 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.
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No 05BX01869