Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 27 juillet 2007, présentée pour M. Kanku X, élisant domicile dans les locaux du C.A.I.O., 6 rue du Noviciat à Bordeaux, par Me Cesso ;
M. X demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement n° 0701623, en date du 21 juin 2007, par lequel le Tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Gironde du 5 mars 2007 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui assignant l'obligation de quitter le territoire français, et désignant le pays à destination duquel, faute de satisfaire à cette obligation dans le délai d'un mois, il pourrait être éloigné ;
2° d'annuler ledit arrêté en toutes ses dispositions ;
3° d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour ;
4° de condamner l'Etat à verser à son conseil la somme de 2000 € en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 février 2008 :
- le rapport de M. Zupan, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Vié, commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. X, ressortissant congolais (République Démocratique du Congo) relève appel du jugement, en date du 21 juin 2007, par lequel le Tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Gironde du 5 mars 2007 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui assignant l'obligation de quitter le territoire français, et désignant le pays à destination duquel, faute de satisfaire à cette obligation dans le délai d'un mois, il pourrait être éloigné ;
Sur la légalité de l'arrêté contesté, en tant qu'il porte refus de séjour :
Considérant, en premier lieu, que si l'arrêté contesté fait référence, dans sa motivation, à l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, il en ressort par ailleurs clairement que le préfet de la Gironde, qui ne s'est pas mépris sur la nationalité de M. X, n'a pas entendu lui opposer, en réalité, les clauses de cet accord bilatéral, dont la mention résulte d'une simple erreur de plume dépourvue d'incidence sur la légalité dudit arrêté ;
Considérant, en second lieu, que M. X soutient que la décision contestée ne pouvait légalement intervenir avant que la commission des recours des réfugiés n'ait statué sur son recours dirigé contre la décision du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 15 février 2007 rejetant sa demande d'asile, et se prévaut à cet effet de l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, aux termes duquel, dans sa rédaction alors applicable : « Lorsqu'il est admis à séjourner en France en application des dispositions du chapitre Ier du présent titre, l'étranger qui demande à bénéficier de l'asile se voit remettre un document provisoire de séjour lui permettant de déposer une demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (…) Après le dépôt de sa demande d'asile, le demandeur se voit délivrer un nouveau document provisoire de séjour. Ce document est renouvelé jusqu'à ce que l'office statue et, si un recours est formé devant la commission des recours, jusqu'à ce que la commission statue » ; que, toutefois, aux termes de l'article L. 741-4 du même code : « Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si (…) 4º La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente (…) » ; que l'article L. 742-6 dudit code dispose : « L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2º à 4º de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet » ; qu'il résulte de ces dispositions que l'étranger dont la demande d'asile doit être regardée comme constituant un recours abusif aux procédures d'asile ou comme présentée en vue de faire échec à une mesure d'éloignement imminente ne saurait se prévaloir d'un droit à la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour, ni même d'un droit à se maintenir sur le territoire français au delà de la date à laquelle il reçoit notification de la décision du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides rejetant cette demande ; qu'il est en l'espèce constant que la demande d'asile présentée par M. X le 7 février 2007, qui faisait suite à une décision de la commission des recours des réfugiés du 3 octobre 2006 lui ayant déjà refusé la reconnaissance du statut de réfugié, n'a donné lieu à aucune décision d'admission au séjour, et a été traitée suivant la procédure prioritaire prévue, lorsqu'il est fait application du 4° précité de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, par l'article L. 723-1 du même code ; que si M. X conteste, par voie d'exception, la mise en oeuvre de ces dispositions, il n'apporte aucun élément de nature à établir que le préfet de la Gironde, auquel, contrairement à ce qu'il soutient, il appartenait bien d'apprécier le sérieux et la sincérité de ladite demande, conditionnant une éventuelle admission provisoire au séjour, aurait fait, à cet égard, une inexacte application des dispositions précitées ; que, notamment, le document dont il se prévaut pour invoquer l'existence d'éléments nouveaux justifiant le réexamen de sa situation par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, et consistant en la copie d'un avis de recherche établi par les autorités congolaises au nom de son père, ne présente aucune garantie d'authenticité et a d'ailleurs été écarté comme tel par le directeur de cet office, en sa décision susmentionnée du 15 février 2007 ; qu'ainsi, et comme l'énonce à bon droit le jugement attaqué, le moyen ne saurait en tout état de cause être accueilli ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors applicable : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention «vie privée et familiale» est délivrée de plein droit : (…) 7° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (…) » ; que si M. X indique avoir en France une « amie », il a lui même déclaré, au soutien de ses demandes d'asile, sans que le « certificat de célibataire » versé aux débats, établi par le bourgmestre de sa commune de naissance, soit de nature à établir le contraire, avoir une compagne et un enfant en bas âge restés en Angola, pays dans lequel il a vécu avant d'accéder, en septembre 2005, au territoire national ; qu'eu égard à ses attaches familiales situées hors de France et au caractère récent de son séjour, la décision contestée ne saurait être regardée comme portant au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que le préfet de la Gironde n'a ainsi méconnu ni les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant enfin que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet quant aux conséquences de ladite décision sur la situation personnelle de M. X n'est assorti d'aucune précision permettant d'en mesurer la portée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté contesté, en tant qu'il lui refuse la délivrance d'un titre de séjour ;
Sur la légalité de l'arrêté contesté, en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français et en tant qu'il désigne le pays de destination de M. X, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « I. L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. / (…) L'étranger dispose, pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, d'un délai d'un mois à compter de sa notification. Passé ce délai, cette obligation peut être exécutée d'office par l'administration (…) » ;
Considérant que l'obligation de quitter le territoire français constitue une mesure individuelle de police qui doit, comme telle, être motivée en application de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ; que si la motivation de cette mesure, se confondant avec celle du refus ou du retrait de titre de séjour dont elle découle nécessairement, n'appelle pas d'autre mention spécifique pour respecter les exigences fixées par cette disposition, c'est toutefois à la condition que le préfet ait dûment visé, dans sa décision, l'article L. 511-1 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers, qui l'habilite à assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ; qu'en se bornant à viser de manière générale l'ensemble de ce code, le préfet de la Gironde a en l'espèce méconnu cette exigence de motivation en droit, et ainsi entaché d'illégalité la décision contestée ;
Considérant que l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français emporte, par voie de conséquence, celle de la décision subséquente par laquelle le préfet désigne le pays à destination duquel l'étranger doit être éloigné, à défaut pour lui de satisfaire, dans le délai qui lui est imparti, à cette obligation ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il statue sur la légalité des décisions, contenues dans l'arrêté contesté du 5 mars 2007, lui prescrivant l'obligation de quitter le territoire français et désignant son pays de destination en cas d'éloignement forcé, ensemble l'annulation, dans cette mesure, dudit arrêté ;
Sur les conclusions en injonction :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (…) prenne une mesure dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution » ;
Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de M. X en tant qu'elle concerne le refus de titre de séjour que lui a opposé le préfet de la Gironde, n'implique pas, alors même qu'il prononce par ailleurs l'annulation des autres décisions figurant dans l'arrêté contesté du 5 mars 2007, que la Cour ordonne à ce préfet de délivrer à l'intéressé un titre de séjour ; que les conclusions présentées à cette fin ne peuvent dès lors qu'être rejetées ;
Sur l'application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Bordeaux n° 0701623 du 21 juin 2007, en tant qu'il rejette la demande de M. X tendant à l'annulation des décisions, contenues dans l'arrêté du préfet de la Gironde du 5 mars 2007, lui prescrivant l'obligation de quitter le territoire français et désignant son pays de destination, ainsi que, dans cette mesure, ledit arrêté, sont annulés.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.
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N° 07BX1615