Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 21 juillet 2006, présentée pour la COMMUNE DE LONDIGNY, représentée par son maire, par Me Neau ;
La COMMUNE DE LONDIGNY demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 24 mai 2006 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a annulé l'arrêté du maire de la commune du 14 mars 2005 ;
2°) de rejeter la demande présentée par le préfet de la Charente devant le tribunal administratif de Poitiers ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la directive 2001/18/CEE du Parlement Européen et du Conseil du 12 mars 2001 relative à la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés dans l'environnement et abrogeant la directive 90/220/CEE du Conseil ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le décret n° 93-1177 du 18 octobre 1993 ;
Vu l'arrêté du 21 septembre 1994 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 avril 2007 :
- le rapport de Mme Aubert ;
- les observations de Me Neau, avocat de la COMMUNE DE LONDIGNY ;
- et les conclusions de M. Valeins, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la COMMUNE DE LONDIGNY demande l'annulation du jugement du 24 mai 2006 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a annulé, à la demande du préfet de la Charente, l'arrêté du 14 mars 2005 par lequel le maire de Londigny a interdit pour un an la culture en plein champ des variétés de maïs BT 176 et MON 810 sur le territoire de la commune ;
Sur la légalité de l'arrêté du 14 mars 2005 :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 533-2 du code de l'environnement : « Au sens du présent chapitre, on entend par dissémination volontaire toute introduction intentionnelle dans l'environnement, à des fins de recherche ou de développement ou à toute autre fin que la mise sur le marché, d'un organisme génétiquement modifié ou d'une combinaison d'organismes génétiquement modifiés » ; qu'aux termes de l'article L. 533-3 du même code codifiant l'article 11 de la loi n° 92-654 du 13 juillet 1992 transposant la directive n° 90/220/CEE du 23 avril 1990 : « Toute dissémination volontaire, ou tout programme coordonné de telles disséminations, est subordonné à une autorisation préalable. Cette autorisation est délivrée par l'autorité administrative après examen des risques que présente la dissémination pour la santé publique ou pour l'environnement. Elle peut être assortie de prescriptions. Elle ne vaut que pour l'opération pour laquelle elle a été sollicitée » ; qu'aux termes de l'article L. 535-2 du même code : « I. Dans tous les cas où une nouvelle évaluation des risques que la présence d'organismes génétiquement modifiés fait courir à la santé publique ou à l'environnement le justifie, l'autorité administrative peut, aux frais du titulaire de l'autorisation ou des détenteurs des organismes génétiquement modifiés : 1°) suspendre l'autorisation dans l'attente d'informations complémentaires et, s'il y a lieu, ordonner le retrait des produits de la vente ou en interdire l'utilisation ; 2°) imposer des modifications aux conditions de la dissémination volontaire ; 3°) retirer l'autorisation ; 4°) ordonner la destruction des organismes génétiquement modifiés et, en cas de carence du titulaire de l'autorisation ou du détenteur, y faire procéder d'office. II. Sauf en cas d'urgence, ces mesures ne peuvent intervenir que si le titulaire a été mis à même de présenter ses observations » ; qu'aux termes de l'article 1er du décret n° 93-1377 du 18 octobre 1993 susvisé : « L'autorisation prévue par l'article 11 de la loi du 13 juillet 1992 susvisée est, s'agissant de plantes, semences ou plants génétiquement modifiés, délivrée par le ministre chargé de l'agriculture après accord du ministre de l'environnement » ; qu'aux termes de l'article 9 du même décret : « Dans tous les cas où une nouvelle évaluation des risques que la présence d'organismes génétiquement modifiés fait courir à la santé publique ou l'environnement le justifie, le ministre chargé de l'agriculture peut, aux frais du titulaire de l'autorisation : a) suspendre l'autorisation dans l'attente d'informations complémentaires ; b) modifier les prescriptions spéciales ; c) retirer l'autorisation si ces risques sont tels qu'aucune mesure ne puisse les faire disparaître ; d) ordonner la destruction des organismes génétiquement modifiés et, en cas de carence du titulaire de l'autorisation, y faire procéder d'office. Sauf en cas d'urgence, ces mesures ne peuvent intervenir que si le titulaire de l'autorisation a été mis à même de présenter ses observations » ; que l'article 1er de l'arrêté du 21 septembre 1994 prévoit que le dossier technique transmis au ministre de l'agriculture comprend des informations concernant le site de dissémination, la proximité de biotopes officiellement reconnus ou de zones protégées susceptibles d'être affectées, des informations concernant la dissémination, notamment l'objectif de la dissémination, la date et la durée prévues de l'opération, la méthode de dissémination envisagée, la préparation et la gestion du site avant, pendant et après la dissémination, y compris les pratiques culturales et les méthodes de récolte ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : « La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : … 5°) le soin de prévenir, par des prescriptions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, … les pollutions de toute nature, … de pourvoir d'urgence à toutes les mesures d'assistance et de secours et, s'il y a lieu, de provoquer l'intervention de l'administration supérieure… » ; qu'aux termes de l'article L. 2212-4 du même code : « En cas de danger grave ou imminent, tels que les accidents naturels prévus au 5° de l'article L. 2212-2, le maire prescrit l'exécution des mesures de sûreté exigées par les circonstances… » ;
Considérant que s'il appartient au maire, en vertu des pouvoirs de police qu'il tient des articles L. 2212-1 et suivants du code général des collectivités territoriales, de prendre les mesures de police générale nécessaires au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques, le régime d'autorisation administrative de la dissémination volontaire d'un organisme génétiquement modifié institué dans un but de police par l'article L. 533-3 du code de l'environnement relève de la compétence exclusive du ministre de l'agriculture ; que, dès lors, le maire ne peut, en l'absence de danger grave ou imminent, s'immiscer dans l'exercice des pouvoirs de police spéciale relevant des attributions des services de l'Etat ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, pour décider, par son arrêté du 14 mars 2005, d'interdire pour un an la culture en plein champ des variétés de maïs BT 176 et MON 810 sur le territoire de la commune, le maire de Londigny s'est fondé sur le risque que la culture de ces variétés de maïs présenterait pour l'agriculture biologique ; qu'un tel risque ne constitue pas un danger grave ou imminent au sens de l'article L. 2214-4 du code général des collectivités territoriales ; qu'en l'absence d'un tel danger, le maire ne pouvait faire usage du pouvoir de police générale qu'il tient des articles L. 2212-1 et suivants du code général des collectivités territoriales et dont le principe de précaution, rappelé à l'article L. 110-1 du code de l'environnement dans sa rédaction alors en vigueur, ne constitue qu'une simple modalité d'application ; que, dans ces conditions, le maire de la commune de Londigny n'a pu légalement interdire la culture en plein champ des variétés de maïs BT 176 et MON 810 ; qu'en édictant une telle interdiction, il a excédé les pouvoirs de police qu'il tient du code général des collectivités territoriales et du code de la santé publique ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête, que la COMMUNE DE LONDIGNY n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a fait droit au déféré du préfet de la Charente ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à la COMMUNE DE LONDIGNY la somme qu'elle demande sur le fondement de ces dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la COMMUNE DE LONDIGNY est rejetée.
2
No 06BX01555