Vu, enregistrée au greffe de la Cour le 9 janvier 2006 sous le n° 06BX00035 la requête présentée par le PREFET DE LA GIRONDE qui demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 22 décembre 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté du 14 décembre 2005 par lequel il a décidé de reconduire M. Badreddine X à la frontière et lui a enjoint de délivrer à celui-ci un certificat de résidence d'un an portant la mention « vie privée et familiale » ;
2°) de rejeter la demande d'annulation présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Bordeaux ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de procédure pénale ;
Vu le code relatif à l'entrée et au séjour des étrangers et au droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 juin 2006 :
- le rapport de M. Etienvre,
- les observations de Me Sebban, avocat de M. X ;
- et les conclusions de M. Chemin, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par arrêté du 14 décembre 2005, le PREFET DE LA GIRONDE a décidé de reconduire M. Badreddine X à la frontière ; que, par jugement du 22 décembre 2005, le conseiller délégué par le président du Tribunal administratif de Bordeaux a annulé cet arrêté ; que le PREFET DE LA GIRONDE interjette appel de ce jugement ;
Considérant que, pour annuler l'arrêté du 14 décembre 2005, le premier juge a considéré que cette mesure avait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que M. X s'étant marié le 21 septembre 2005 avec une ressortissante française, celui-ci avait droit à la délivrance d'un certificat de résidence en vertu du 2° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; que, toutefois, la légalité d'une décision s'apprécie à la date de son édiction ; que le conseiller délégué ne pouvait, en conséquence, pas se fonder sur la circonstance que l'intéressé s'était marié le 21 septembre 2005 soit postérieurement à l'arrêté litigieux ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient, à la Cour, saisie, par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par arrêté du 25 octobre 2005, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture, le PREFET DE LA GIRONDE a donné délégation à M. Cagnault à l'effet de signer les arrêtés de reconduite à la frontière en l'absence de tout membre du corps préfectoral habilité ; que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué doit être écarté comme manquant en fait ;
Considérant que l'arrêté attaqué comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait pour lesquelles la mesure d'éloignement a été prise ; que le moyen tiré de ce que l'arrêté du 14 décembre 2005 est insuffisamment motivé doit être, dès lors, écarté ;
Considérant que si M. X se prévaut de ce qu'il était, à la date de l'arrêté attaqué, sur le point de se marier avec une ressortissante française, Mlle Y, avec laquelle il entretenait depuis un an une relation sérieuse et dont il envisageait de reconnaître la fille, que celle-ci est désormais enceinte, qu'il n'a plus de contact avec sa famille en Algérie, que ses deux frères vivent en France et travaillent dans une entreprise où il pourra être embauché et qu'il a toujours respecté les lois en vigueur depuis son entrée en France, il ne ressort cependant pas des pièces du dossier qu'eu égard au caractère récent de l'entrée en France de M. X et aux conditions dans lesquelles il a séjourné sur le territoire national ainsi qu'au caractère récent de sa relation avec Mlle Y, le PREFET DE LA GIRONDE ait porté au droit de M. X, qui n'est pas dépourvu de toute attache familiale en Algérie, de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée ni entaché l'appréciation qu'il a portée sur les conséquences de la mesure sur la situation personnelle de M. X d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Considérant que le moyen tiré de ce que l'arrêté de reconduite à la frontière aurait été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
Considérant que la circonstance qu'une autorisation provisoire de séjour a été délivrée à M. X afin de régulariser sa situation jusqu'à ce qu'il soit, à nouveau, statué sur son cas est sans incidence sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que c'est à l'occasion du dépôt d'un dossier en vue du mariage de M. X avec Mlle Y, ressortissante française, que le maire de la commune de Lormont a constaté l'irrégularité du séjour en France de l'intéressé et en a informé, conformément aux dispositions de l'article 40 du code de procédure pénale, le procureur de la République ; qu'en prenant le 14 décembre suivant un arrêté de reconduite à la frontière à l'encontre de M. X, qui n'a pas été placé en rétention administrative, le PREFET DE LA GIRONDE a seulement voulu mettre fin à la présence irrégulière de ce dernier sur le territoire et non contrecarrer le mariage de M. X prévu initialement le 21 janvier 2006 ; que la mesure de reconduite à la frontière concernant M. X n'est, par suite, pas entachée de détournement de pouvoir ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA GIRONDE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du Tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté du 14 décembre 1995 par lequel il a décidé de reconduire M. X à la frontière ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par M. X au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du 22 décembre 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté du 14 décembre 2005 par lequel le PREFET DE LA GIRONDE a décidé de reconduire M. X à la frontière est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Bordeaux est rejetée.
Article 3 : Les conclusions présentées par M. X tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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No 06BX00035