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06/07/2006 | FRANCE | N°03BX01040

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4eme chambre (formation a 3), 06 juillet 2006, 03BX01040


Vu la requête, enregistrée le 22 mai 2003, présentée pour la CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE DES PAYS DE L'ADOUR, dont le siège est avenue de la Gare à Dax (40101), par Me Y... ; la CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE DES PAYS DE L'ADOUR demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 00/759, 00/1125, 00/1140 et 00/2434 du 18 mars 2003 par lequel le Tribunal administratif de Pau a rejeté ses réclamations, soumises d'office, tendant à la décharge du complément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre des années 1992, 1993 et 1994 et des pénalit

és qui l'ont assorti ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de co...

Vu la requête, enregistrée le 22 mai 2003, présentée pour la CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE DES PAYS DE L'ADOUR, dont le siège est avenue de la Gare à Dax (40101), par Me Y... ; la CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE DES PAYS DE L'ADOUR demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 00/759, 00/1125, 00/1140 et 00/2434 du 18 mars 2003 par lequel le Tribunal administratif de Pau a rejeté ses réclamations, soumises d'office, tendant à la décharge du complément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre des années 1992, 1993 et 1994 et des pénalités qui l'ont assorti ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative ;

…………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 juin 2006 :

- le rapport de M. Vié, rapporteur ;

- les observations de Mme Z... de Saint-Aignan, représentant le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

- et les conclusions de M. Pouzoulet, commissaire du gouvernement ;

Sur la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, que l'erreur matérielle du vérificateur ayant consisté à cocher, sur la page relative aux redressements envisagés, une catégorie d'impôt erronée en plus de la catégorie adéquate est, compte tenu des mentions claires et précises figurant dans le corps de la notification concernée, sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : « L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. … » ;

Considérant que la notification de redressement adressée à la CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE DES PAYS DE L'ADOUR, faisant suite à la vérification de la comptabilité du groupement d'intérêt économique Sorefi TGV Bail III, comporte l'énoncé détaillé des considérations de droit et de fait qui fondent les redressements, permettant au contribuable, comme il l'a fait, de présenter ses observations ; que la notification adressée à la société requérante, résultant des vérifications de la comptabilité des groupements d'intérêt économique Sorefi TGV Bail I et II, se réfère aux notifications adressées à ces groupements, elles-mêmes suffisamment motivées et dont une copie était jointe ; qu'enfin, la notification de redressement également adressée à la Caisse, faisant suite à la vérification du groupement d'intérêt économique Olivia bail, si elle ne fait que brièvement état du contrôle diligenté à l'encontre de ce groupement et n'indique que succinctement le montant du redressement, comporte également la référence précise de la notification de redressement adressée audit groupement, qui est suffisamment motivée ; qu'ainsi, les indications mentionnées dans la notification adressée à la CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE DES PAYS DE L'ADOUR permettaient à cette dernière de se référer à la notification adressée au groupement d'intérêt économique Olivia X..., au besoin en sollicitant sa communication, et de formuler utilement ses observations ; qu'ainsi, le moyen tiré de la motivation insuffisante de ces notifications au regard de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales doit être écarté ; qu'à cet égard, la Caisse requérante ne saurait utilement invoquer une instruction administrative relative à la procédure d'imposition sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales : « Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses : | … b) qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus ; c) ou qui permettent d'éviter, en totalité ou en partie, le paiement des taxes sur le chiffre d'affaires correspondant aux opérations effectuées en exécution d'un contrat ou d'une convention. / L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. En cas de désaccord sur les redressements notifiés sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité dont les avis rendus feront l'objet d'un rapport annuel. Si l'administration ne s'est pas conformée à l'avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé du redressement » ;

Considérant que l'administration a estimé que la location, sous forme de crédit-bail, des rames de train à grande vitesse en cause constituait une prestation continue devant donner lieu à la prise en compte des produits correspondants au fur et à mesure de l'exécution en vertu de l'article 38-2 du code général des impôts ; qu'elle en a déduit que les loyers ne pouvaient faire l'objet que d'un étalement linéaire et non de l'application du coefficient de progressivité prévu en l'espèce ; que, ce faisant, le service n'a ni opposé le caractère fictif de l'opération, ni soutenu que celle-ci n'aurait été inspirée par aucun motif autre que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que la caisse concernée, si elle n'avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées eu égard à sa situation et à ses activités réelles ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que la CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE DES PAYS DE L'ADOUR n'aurait pas bénéficié des garanties qui s'attachent à la procédure prévue par l'article L. 64 précité du livre des procédures fiscales est inopérant ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : « 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant … notamment : … 2° … les amortissements réellement effectués par l'entreprise, dans la limite de ceux qui sont généralement admis d'après les usages de chaque nature d'industrie, de commerce ou d'exploitation et compte tenu des dispositions de l'article 39 A, sous réserve des dispositions de l'article 39 B » ; que selon l'article 39 C du même code : « L'amortissement des biens donnés en location ou mis à disposition sous toute autre forme est réparti sur la durée normale d'utilisation suivant des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat » ; qu'en vertu de l'article 30 de l'annexe II du même code : « Les biens donnés en location sont amortis sur leur durée normale d'utilisation, quelle que soit la durée de la location » ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, depuis l'origine, les rames de trains à grande vitesse ont été amorties sur vingt ans, durée d'ailleurs proche de celle retenue pour l'amortissement de la plupart des rames utilisées par la Société nationale des chemins de fer français ; que cette pratique doit être regardée comme un usage au sens des dispositions précitées du 2° du 1 de l'article 39 du code général des impôts, auquel il convient de se référer, malgré les innovations techniques que comportent les rames du train à grande vitesse Atlantique et qui ne suffisent pas à en faire des biens d'une nature différente des rames des précédents trains à grande vitesse ; que ni les conditions d'exploitation des rames du train à grande vitesse Atlantique, ni les innovations techniques mentionnées ci-dessus ne constituent des circonstances particulières qui justifieraient de déroger à la durée d'amortissement de vingt ans correspondant à l'usage susmentionné ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes du 2 bis de l'article 38 du code général des impôts : « … les produits correspondant à des créances sur la clientèle ou à des versements reçus à l'avance en paiement du prix sont rattachés à l'exercice au cours duquel intervient la livraison des biens pour les ventes ou opérations assimilées et l'achèvement des prestations pour les fournitures de services. / Toutefois, ces produits doivent être pris en compte : a) Pour les prestations continues rémunérées notamment par des intérêts ou des loyers … au fur et à mesure de l'exécution » ; que la circonstance qu'une prestation fournie est continue n'implique pas, par elle-même, qu'elle soit effectuée avec une intensité constante pendant toute la durée de son exécution et que sa rémunération doive par suite être rattachée de manière linéaire et prorata temporis aux exercices durant lesquels cette exécution se poursuit ; que lorsque les loyers stipulés dans un contrat de location sont inégaux de période en période, il y a lieu en principe d'estimer que cette inégalité des loyers stipulés correspond à une inégalité dans la valeur de la prestation fournie ; qu'il en va cependant autrement s'il résulte de l'instruction que la répartition contractuelle des loyers ne rend pas correctement compte de la valeur de la prestation, laquelle est fonction de l'obligation qui pèse sur le prestataire et de l'avantage économique retiré par le preneur ;

Considérant que le contrat conclu entre les groupements d'intérêt économique Sorefi TGV Bail I, Sorefi TGV Bail II, Sorefi TGV Bail III et Olivia X... avec la Société nationale des chemins de fer français stipule que les loyers payés par celle-ci augmentent de 3 % l'an environ ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que cette progression ne rend pas correctement compte de l'évolution de la valeur de la prestation compte tenu notamment de l'évolution de l'utilisation des matériels et des recettes qu'en tire l'exploitant ; qu'ainsi, l'administration ne pouvait régulièrement procéder au rattachement linéaire à chaque exercice des loyers dus pour l'ensemble de la période contractuelle ; qu'il convient, en conséquence, de prononcer la décharge des droits correspondant à ce rappel ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE DES PAYS DE L'ADOUR est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande en tant que celle-ci concerne les modalités d'imposition des loyers de crédit-bail ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à payer à la CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE DES PAYS DE L'ADOUR la somme de 1 300 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE DES PAYS DE L'ADOUR est déchargée de l'impôt sur les sociétés, en droits et pénalités, correspondant aux redressements consécutifs à la vérification de la comptabilité des groupements d'intérêt économiques Sorefi TGV Bail I, Sorefi TGV Bail II, Sorefi TGV Bail III et Olivia X... et portant sur les modalités d'imposition des loyers de crédit-bail.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Pau du 18 mars 2003 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à la CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE DES PAYS DE L'ADOUR la somme de 1 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE DES PAYS DE L'ADOUR est rejeté.

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N° 03BX01040


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4eme chambre (formation a 3)
Numéro d'arrêt : 03BX01040
Date de la décision : 06/07/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Composition du Tribunal
Président : ERSTEIN
Rapporteur ?: M. Jean-Marc VIE
Rapporteur public ?: M. POUZOULET
Avocat(s) : GROB

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2006-07-06;03bx01040 ?
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