Vu la requête, enregistrée le 12 janvier 2004, présentée pour Mme Micheline X, élisant domicile ... par Me Raoux ; Mme X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 021820 du 20 novembre 2003 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 73 129,29 euros ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser ladite somme, ainsi que les intérêts au taux légal à compter du 22 septembre 2000, et une somme de 7 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 octobre 2004 :
- le rapport de M. Pouzoulet, rapporteur ;
- et les conclusions de M. Chemin, commissaire du gouvernement ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre :
Considérant que, comme le font apparaître les visas du jugement attaqué, Mme X, dans sa demande introductive d'instance, a seulement présenté des conclusions à fin d'indemnité à la suite du rejet opposé par le trésorier-payeur général le 3 octobre 2002 à sa demande préalable du 23 septembre 2002 ; qu'ainsi, la fin de non-recevoir opposée par le ministre et tirée de ce que la requérante ne pouvait présenter simultanément des conclusions d'annulation et aux fins d'indemnité ne peut qu'être rejetée ;
Sur les conclusions à fin d'indemnité :
En ce qui concerne la responsabilité :
Considérant que, par un arrêt du 23 mars 1999, la Cour a annulé la décision du trésorier-payeur général de la Charente en date du 23 mars 1993 refusant à Mme X le bénéfice de la décharge de responsabilité pour le paiement des cotisations d'impôt sur le revenu établies au nom de M. X au titre des années 1980 et 1981 et de M. et Mme X au titre des années 1982 et 1983 ; que les motifs de cet arrêt, qui constituent le soutien nécessaire de son dispositif, précisent que l'intéressée pouvait se prévaloir de l'instruction n° 83-103-A1 de la direction de la comptabilité publique du 31 mai 1983 et qu'en l'absence de circonstances particulières justifiant qu'en l'espèce il fût dérogé aux critères définis dans cette directive, Mme X, qui « (avait) été victime du comportement irresponsable de son mari et n'(avait) en rien été complice de ses fraudes, répond(ait) aux conditions prévues par l'instruction précitée pour qu'un conjoint puisse bénéficier de la décharge gracieuse de responsabilité pour le paiement de l'impôt sur le revenu dû par les époux » ;
Considérant qu'il suit de là que l'administration, qui se trouvait à nouveau saisie de la demande présentée par Mme X, était tenue, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, de lui accorder la décharge demandée ; qu'elle ne pouvait, sans méconnaître l'autorité de la chose jugée dont était revêtu l'arrêt de la Cour, lui opposer un nouveau rejet, fondé sur le refus de Mme X de communiquer des pièces supplémentaires permettant de déterminer si cette dernière était solvable, cette condition n'ayant pas été retenue par ledit arrêt ; que ce rejet, comme la décision initiale du 23 mars 1993, est illégal ; que les deux illégalités ainsi commises constituent une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ;
En ce qui concerne le préjudice indemnisable :
Considérant que le préjudice dont Mme X est fondée à demander réparation résulte des conséquences dommageables des actes de poursuite engagés à son encontre par l'administration ; que si la requérante fait état des sommes prélevées par avis à tiers détenteur du 22 septembre 2000 sur les comptes ouverts à son nom au Crédit Lyonnais, d'un montant de 190 748,38 F (29 079,40 euros), et au Crédit Agricole, d'un montant de 256 150,51 F (39 049,89 euros), l'administration soutient sans être contredite que seules ont été recouvrées la somme de 39 049 euros et, à la suite d'un nouvel avis adressé au Crédit Agricole, la somme de 4 962,15 euros, soit un total de 44 011,15 euros ; qu'ainsi, il sera fait une exacte appréciation du préjudice subi par Mme X en l'évaluant à la somme 44 011,15 euros ;
Considérant, en revanche, que la demande de dommages-intérêts « pour procédure abusive » n'est assortie d'aucune précision permettant d'apprécier la réalité de ce préjudice ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande d'indemnisation et à demander à la Cour de condamner l'Etat au paiement d'une somme de 44 011,15 euros, laquelle portera intérêt au taux légal à compter du 24 septembre 2002, jour de réception de la demande préalable ;
Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à payer à Mme X une somme de 1 300 euros au titre des frais exposés par elle et non compris les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 021820 du 20 novembre 2003 du Tribunal administratif de Poitiers est annulé.
Article 2 : L'Etat versera à Mme X une somme de 44 011,15 euros, laquelle portera intérêt au taux légal à compter du 24 septembre 2002, et une somme de 1 300 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X est rejeté.
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N° 04BX00064