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09/04/2013 | FRANCE | N°11BX02769

France | France, Cour administrative d'appel de, 5ème chambre (formation à 3), 09 avril 2013, 11BX02769


Vu le recours, enregistré le 6 octobre 2011, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat ;

Le ministre demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 1000310 du tribunal administratif de Poitiers, en date du 23 juin 2011, en tant qu'il a accordé à M. D...C...la décharge partielle des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 et 2006 ;

2°) de remettre à la charge de M. C...les cotisations d'impôt sur le revenu dont la décharge a été accordée par l

e tribunal ;

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Vu le recours, enregistré le 6 octobre 2011, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat ;

Le ministre demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 1000310 du tribunal administratif de Poitiers, en date du 23 juin 2011, en tant qu'il a accordé à M. D...C...la décharge partielle des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 et 2006 ;

2°) de remettre à la charge de M. C...les cotisations d'impôt sur le revenu dont la décharge a été accordée par le tribunal ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu à l'audience publique du 12 mars 2013 :

- le rapport de Mme Demurger, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Gosselin, rapporteur public ;

- et les observations de M.B..., représentant le ministre de l'économie et des finances ;

1. Considérant que, par acte du 20 octobre 2005, M. C...a acquis de la société Ymo-Développement un lot de copropriété dans un immeuble dénommé " Hôtel Allard ", sis 1, place du Général Mellinet à Nantes, dont les façades et la toiture sont inscrites à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques ; qu'en 2005 et 2006, l'association syndicale libre constituée entre les nouveaux propriétaires a fait exécuter les travaux de restauration de l'immeuble et M. C...lui a versé à ce titre les sommes respectives de 65 000 euros et 65 573 euros ; que ces dépenses ont entraîné la constatation de déficits fonciers de même montant que M. C...a imputés sur son revenu global, en application des dispositions de l'article 156-I-3° du code général des impôts ; que l'administration a estimé que seuls les travaux extérieurs ayant eu pour objet la préservation des parties classées avaient pu générer des déficits fonciers imputables sur le revenu global, pour des montants de 20 735 euros au titre de 2005 et de 20 918 euros au titre de 2006 ; qu'elle a rejeté la déduction des autres dépenses, au motif qu'elles ne concernaient pas des travaux d'amélioration ou d'entretien mais avaient abouti à un accroissement de la surface habitable ; que, par jugement du 23 juin 2011, le tribunal administratif de Poitiers a partiellement fait droit à la demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à la charge de M.C..., en fixant les charges déductibles du revenu foncier aux montants de 56 395 euros au titre de 2005 et à 56 893 euros au titre de 2006 ; que, par le présent recours, le ministre demande l'annulation des articles 1 et 2 dudit jugement ; que, par la voie du recours incident, M. C...demande la réformation du jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions en décharge ;

Sur le bien-fondé des impositions contestées :

En ce qui concerne le caractère déductible des travaux pour la détermination du revenu foncier :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 31 du code général des impôts, relatif aux revenus fonciers : " I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : / 1° Pour les propriétés urbaines : / a. Les dépenses de réparation et d'entretien (...) effectivement supportées par le propriétaire ; / (...) b. Les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement ; (...) " ; que doivent être regardés comme des travaux de construction ou de reconstruction, au sens des dispositions précitées, les travaux comportant la création de nouveaux locaux d'habitation, notamment dans des locaux auparavant affectés à un autre usage, ainsi que les travaux ayant pour effet d'apporter une modification importante au gros oeuvre de locaux existants ou les travaux d'aménagement interne qui, par leur importance, équivalent à une reconstruction ; que doivent être regardés comme des travaux d'agrandissement, au sens des mêmes dispositions, les travaux ayant pour effet d'accroître le volume ou la surface habitable de locaux existants ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, lors de l'acquisition de l'hôtel Allard par la société Ymo-Développement, le 16 décembre 2004, l'acte de vente précisait que l'immeuble comportait, au rez-de-chaussée, un appartement composé de deux pièces principales et un autre de trois pièces, au premier étage, un appartement unique de six pièces, et au second étage, un appartement d'une pièce principale et un autre de deux pièces, soit au total cinq appartements, le surplus des espaces intérieurs étant décrit comme divisé en remises, caves et greniers ; que la société Ymo-Développement a procédé en 2005 à des modifications de l'état descriptif et du règlement de copropriété, l'immeuble étant refondu en une entité provisoire unique puis re-divisé en neuf lots, correspondant à neuf futurs appartements, ceux-ci intégrant désormais la totalité des caves, remises et greniers précédemment répertoriés ; qu'il résulte de l'instruction que les travaux réalisés sur l'immeuble n'ont apporté que des modifications très limitées au gros-oeuvre, notamment dans un bâtiment annexe, au rez-de-jardin et au deuxième étage ; que si le cloisonnement a été modifié afin d'aménager neuf appartements sur les quatre niveaux, il n'y a pas eu démolition et reconstruction des structures intérieures ; que ces travaux ont eu pour objet de moderniser l'immeuble afin d'en assurer une meilleure utilisation ; qu'ils ne peuvent être qualifiés de reconstruction au sens des dispositions précitées ; que, si la surface habitable, mesurée selon les critères définis par la " loi Carrez ", c'est-à-dire en n'incluant ni les parties communes, ni les surfaces présentant une hauteur sous plafond inférieure à 1,80 m, a augmenté à l'occasion des travaux entrepris, cette augmentation résulte d'une réorganisation de l'espace grâce à l'utilisation de surfaces qui constituaient auparavant soit des parties communes, soit des dépendances immédiates de l'habitation principale, et dont le caractère de surface habitable, au sens du code de l'habitation, ne saurait être contesté ; que, dans ces conditions, le ministre du budget des comptes publics et de la réforme de l'Etat ne peut valablement soutenir que l'opération immobilière entreprise aurait la nature de travaux d'agrandissement au sens des dispositions précitées ;

4. Considérant, par ailleurs, qu'il résulte de l'instruction que les travaux concernant le lot acquis par M. C...peuvent être identifiés et individualisés par rapport aux travaux réalisés dans les autres parties de l'immeuble ; que, par suite, les sommes de 65 000 euros et 65 573 euros versées par le contribuable au titre des années 2005 et 2006 doivent être regardées comme des charges déductibles des revenus fonciers, en application des dispositions précitées de l'article 31 du code général des impôts ;

En ce qui concerne l'imputation des déficits fonciers sur le revenu global :

5. Considérant qu'aux termes de l'article 156 du code général des impôts : " L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé (...) sous déduction : I. Du déficit constaté pour une année pour une catégorie de revenus ; si le revenu global n'est pas suffisant pour que l'imputation puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté successivement sur le revenu global des années suivantes jusqu'à la sixième année inclusivement. Toutefois, n'est pas autorisée l'imputation (...) 3° des déficits fonciers, lesquels s'imputent exclusivement sur les revenus fonciers des dix années suivantes ; cette disposition n'est pas applicable aux propriétaires de monuments classés monuments historiques, inscrits à l'inventaire supplémentaire ... " ;

6. Considérant que, par sa réponse à M.A..., député, en date du 17 mars 1997, le ministre délégué au budget a admis que les règles selon lesquelles les déficits fonciers correspondant aux immeubles classés ou inscrits sont imputables sans limitation de montant sur le revenu global " s'appliquent dans les mêmes conditions lorsque le classement ou l'inscription à l'inventaire supplémentaire ne concerne pas la totalité de l'immeuble, à condition toutefois que ce classement ne soit pas limité à des éléments isolés ou dissociables de l'ensemble immobilier, tels un escalier, des plafonds ou certaines salles, mais vise la protection de l'ensemble architectural " ;

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les façades et la toiture de l'hôtel Allard sont inscrites à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques depuis 1991 ; que cette inscription doit être regardée comme visant la protection de l'ensemble architectural au sens de la réponse ministérielle précitée ; que, par suite, M. C...est fondé à s'en prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales et à demander sur ce fondement l'imputation sur son revenu global des déficits fonciers qu'il a enregistrés au titre des années 2005 et 2006 ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a fixé le montant des charges déductibles du revenu foncier de M.C..., imputables sur son revenu global, aux sommes de 56 395 euros au titre de 2005 et de 56 893 euros au titre de 2006 ; qu'en revanche, M. C...est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal ne lui a que partiellement accordé la décharge des impositions litigieuses ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. C...d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le recours du ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat est rejeté.

Article 2 : Les déficits fonciers imputables sur le revenu global de M. C...seront déterminés sous déduction de charges de la propriété s'élevant aux sommes respectives de 65 000 euros et 65 573 euros au titre des années 2005 et 2006, en ce qui concerne l'hôtel Allard à Nantes.

Article 3 : M. C...est déchargé, en droits et pénalités, de la différence entre l'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre des années 2005 et 2006 et celui qui résulte de l'article 2 ci-dessus.

Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers est annulé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : L'Etat versera à M. C...une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Article 6 : Le surplus des conclusions de M. C...est rejeté.

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N° 11BX02769


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 11BX02769
Date de la décision : 09/04/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Analyses

19-04-02-02-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus fonciers.


Composition du Tribunal
Président : M. DRONNEAU
Rapporteur ?: Mme Florence DEMURGER
Rapporteur public ?: M. GOSSELIN
Avocat(s) : BOUCLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.de;arret;2013-04-09;11bx02769 ?
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