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21/12/2023 | FRANCE | N°22PA02103

France | France, Cour administrative d'appel, 6ème chambre, 21 décembre 2023, 22PA02103


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 25 juin 2020 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office à l'expiration de ce délai.



Par un jugement n° 2006362 du 7 avril 2022, le tribunal administratif de Melun a rejeté cette demande.<

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Procédure devant la Cour :



Par une requête, enregistrée le 6 mai 2022, M. A..., représen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 25 juin 2020 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 2006362 du 7 avril 2022, le tribunal administratif de Melun a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 6 mai 2022, M. A..., représenté par Me Emmanuelli, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre à la préfète du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour lui permettant d'exercer une activité professionnelle ou, à défaut, de réexaminer sa situation, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision portant refus de titre de séjour a été signée par une autorité incompétente ;

- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors que seules les stipulations du paragraphe 42 de l'article 4 et l'annexe IV de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006 modifié lui étaient applicables, et non les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et qu'il remplissait l'ensemble des conditions requises par cet accord pour la délivrance d'un titre de séjour, notamment pour l'exercice d'un métier d'" intervenant auprès d'enfant " au sens de cette annexe IV ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale à raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle a été signée par une autorité incompétente ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée à la préfète du Val-de-Marne qui n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention du 1er août 1995 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal sur la circulation et le séjour des personnes ;

- l'accord du 23 septembre 2006 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal relatif à la gestion concertée des flux migratoires et l'avenant à cet accord signé le 25 février 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. d'Haëm, président-rapporteur.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant sénégalais, né le 31 janvier 1979 et entré en France le 13 septembre 2015 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa Schengen de court séjour, a sollicité, le 7 mars 2019, son admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 25 juin 2020, le préfet du Val-de-Marne a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... fait appel du jugement du 7 avril 2022 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, si M. A... reprend en appel ses moyens de première instance tirés de l'incompétence du signataire des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français, il ne développe, toutefois, au soutien de ces moyens aucun argument de droit ou de fait complémentaire et pertinent de nature à remettre en cause l'analyse et la motivation retenues par le tribunal administratif. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges aux points 2 et 3 de leur jugement.

3. En deuxième lieu, les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers et aux conditions de délivrance de ces titres s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 110-1 de ce code, sous réserve des conventions internationales. En ce qui concerne les ressortissants sénégalais, s'appliquent les stipulations de la convention du 1er août 1995 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal relative à la circulation et au séjour des personnes ainsi que celles de l'accord du 23 septembre 2006 relatif à la gestion concertée des flux migratoires, modifiées par un avenant signé le 25 février 2008. Aux termes du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord du 23 septembre 2006 modifié : " Un ressortissant sénégalais en situation irrégulière en France peut bénéficier, en application de la législation française, d'une admission exceptionnelle au séjour se traduisant par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant : / - soit la mention "salarié" s'il exerce l'un des métiers mentionnés dans la liste figurant en annexe IV de l'Accord et dispose d'une proposition de contrat de travail ; / - soit la mention "vie privée et familiale" s'il justifie de motifs humanitaires ou exceptionnels ". L'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, inséré au sein d'une septième sous-section intitulée " L'admission exceptionnelle au séjour " de la deuxième section du chapitre III du titre Ier du livre III de la partie législative de ce code, dispose, en son premier alinéa, que : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 ". Les stipulations du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord du 23 septembre 2006, dans sa rédaction issue de l'avenant signé le 25 février 2008, renvoyant à la législation française en matière d'admission exceptionnelle au séjour des ressortissants sénégalais en situation irrégulière rendent applicables à ces ressortissants les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le préfet, saisi d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour par un ressortissant sénégalais en situation irrégulière, est conduit, par l'effet de l'accord du 23 septembre 2006 modifié, à faire application des dispositions de l'article L. 313-14 du code.

4. D'une part, il résulte de ce qui précède qu'en examinant la demande d'admission exceptionnelle au séjour de M. A..., notamment au titre du travail, au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Val-de-Marne n'a commis aucune erreur de droit, alors même que l'arrêté contesté ne vise pas expressément les stipulations du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord du 23 septembre 2006.

5. D'autre part, à l'appui de sa demande d'admission au séjour, M. A... s'est prévalu de la durée de son séjour en France depuis le mois de septembre 2015, de la présence sur le territoire de plusieurs membres de sa famille ainsi que de ses compétences sportives et pédagogiques et d'une promesse d'embauche assortie d'une demande d'autorisation de travail en date du 17 janvier 2019 de l'association " AFC 17e Ternes-Champerret " à Paris pour un emploi de " moniteur de tennis " auprès d'enfants et d'adultes, à temps partiel, sous contrat à durée déterminée. Toutefois, la durée de son séjour en France, soit près de cinq ans à la date de la décision attaquée, de surcroît dans des conditions irrégulières, ne constitue pas, à elle seule, un motif exceptionnel de régularisation de sa situation au regard du séjour. En outre, si le requérant se prévaut de la présence de plusieurs membres de sa famille en France, M. A..., qui est célibataire et sans charge de famille sur le territoire, n'établit, ni n'allègue sérieusement, aucune circonstance particulière de nature à faire obstacle à ce qu'il poursuive normalement sa vie privée et familiale à l'étranger et, en particulier, au Sénégal où, ainsi que l'a relevé le préfet dans l'arrêté attaqué sans être contesté sur ce point, résident ses parents et ses autres frères et sœurs et où lui-même a vécu jusque l'âge de trente-six ans, de sorte qu'il y dispose d'attaches personnelles et familiales au moins aussi fortes qu'en France. Il n'allègue pas davantage qu'il serait dans l'impossibilité de se réinsérer dans son pays d'origine alors qu'il ressort de son curriculum vitae qu'il y a travaillé, notamment en tant que moniteur de tennis entre 2007 et 2015. Par ailleurs, en admettant même que le métier de " moniteur de tennis " auquel a postulé l'intéressé auprès de l'association " AFC 17e Ternes-Champerret ", pour un public d'enfants et d'adultes, puisse être considéré comme relevant du métier d'" intervenant auprès d'enfant " mentionné à l'annexe IV de l'accord du 23 septembre 2006, M. A..., qui se borne à établir, par la production de différentes attestations de membres d'associations ou de proches, avoir travaillé bénévolement et de manière ponctuelle auprès de ces associations, notamment l'association " AFC 17e Ternes-Champerret " depuis la rentrée 2017, ne justifie pas d'une activité professionnelle stable et ancienne en France, ni d'une qualification ou de caractéristiques de l'emploi auquel il postule telles qu'elles constitueraient des motifs exceptionnels d'admission au séjour. Dans ces conditions, en refusant de régulariser sa situation au regard du séjour, au titre de sa vie privée et familiale ou au titre du travail, le préfet du Val-de-Marne n'a commis aucune erreur manifeste dans son appréciation de la situation de l'intéressé au regard des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que la décision portant refus de titre de séjour aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

6. En troisième lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour, doit être écarté.

7. Enfin, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 5, il y a lieu d'écarter les moyens tirés de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 14 décembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. d'Haëm, président,

- Mme d'Argenlieu, première conseillère,

- Mme Saint-Macary, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 décembre 2023.

Le président-rapporteur,

R. d'HAËML'assesseure la plus ancienne,

L. d'ARGENLIEULa greffière,

E. TORDO

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA02103


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA02103
Date de la décision : 21/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. D’HAEM
Rapporteur ?: M. Rudolph D’HAEM
Rapporteur public ?: Mme JAYER
Avocat(s) : SCP SERRE - ODIN - EMMANUELLI

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-21;22pa02103 ?
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