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21/12/2023 | FRANCE | N°21BX03503

France | France, Cour administrative d'appel, 4ème chambre, 21 décembre 2023, 21BX03503


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge, en droits, pénalités et majorations, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2013, pour un montant total de 269 035 euros.

Par un jugement n° 1901393 du 15 juin 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 26 août 2021, M. A..., représenté par Me Mattei, demande à la cour :



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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge, en droits, pénalités et majorations, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2013, pour un montant total de 269 035 euros.

Par un jugement n° 1901393 du 15 juin 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 août 2021, M. A..., représenté par Me Mattei, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1901393 du tribunal administratif de Bordeaux du 15 juin 2021 ;

2°) de prononcer la décharge ou, à titre subsidiaire, la réduction en droits, pénalités et majorations, des rappels de TVA qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2013 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

- le tribunal a entaché sa décision d'erreurs de droit en ce qui concerne l'impossibilité de le taxer au regard de sa qualité de salarié, l'absence de présentation d'éléments réels de l'exploitation, la méconnaissance des obligations et garanties résultant de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, l'impossibilité de taxer une somme qui n'a pas effectivement été encaissée et en inversant la charge de la preuve ;

- le jugement est entaché de dénaturation des faits et pièces du dossier et de contradictions de motifs ;

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

- en méconnaissance des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, ni la lettre du 23 mars 2015 de la société HLM Ciliopée Habitat, ni les comptes " caisse " et " banque " ainsi que la balance du fournisseur de la société Belotti, pas plus que les notes prises par le vérificateur à l'occasion de la vérification de comptabilité de cette société, ne lui ont été communiqués par le service ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

- l'administration ne démontre nullement qu'il aurait eu un établissement stable ainsi que son foyer fiscal en France au titre des années 2009 à 2013 ;

- il n'a jamais exercé une activité professionnelle indépendante en France mais uniquement en tant que salarié de la société Belotti, avec qui il existe un lien de subordination ; dès lors, il ne dispose pas de la qualité d'assujetti et ne pouvait être taxé à la TVA ;

- la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires est radicalement viciée dès lors que la prise en compte des sommes prétendument réglées par la société Belotti résulte uniquement de l'analyse des éléments comptables de cette société, qui ne lui ont jamais été communiqués ; de même, les relevés des comptes bancaires qu'il détient en Pologne n'ont pas été communiqués ;

- les déclarations de chiffre d'affaires qu'il a déposées en Pologne au titre des années litigieuses constituent des éléments réels d'exploitation dont le vérificateur aurait dû tenir compte lors de la reconstitution du chiffre d'affaires ;

- la somme de 8 000 euros inscrite en crédit sur son relevé bancaire d'un compte détenu auprès de la CRCAM d'Aquitaine correspond à un chèque qui a été rejeté le 18 juin 2012 et n'a jamais été effectivement encaissé ;

- il convient d'appliquer une méthode alternative de reconstitution du chiffre d'affaires consistant à ne prendre en compte que les sommes inscrites au crédit de ses comptes bancaires détenus auprès de la CRCAM d'Aquitaine ;

En ce qui concerne le bien-fondé des majorations :

- eu égard aux irrégularités entachant la procédure d'imposition, il est fondé à demander, en application des dispositions de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales, la décharge des majorations qui lui ont été appliquées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 mars 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête en faisant valoir que les moyens soulevés par le requérant sont inopérants ou non fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Michaël Kauffmann,

- et les conclusions de Mme Nathalie Gay, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. L'entreprise individuelle de M. A..., immatriculée en Pologne, qui exerce une activité de travaux de finition dans le domaine du bâtiment, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité de son établissement situé en France au titre de la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2013. A l'issue des opérations de contrôle, par proposition de rectification du 18 septembre 2015, des rappels de TVA lui ont notamment été notifiés au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2013, pour un montant total de 269 035 euros. M. A... relève appel du jugement du 15 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits, pénalités et majorations, de ces rappels de TVA.

Sur la régularité du jugement :

2. Hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée, dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. M. A... ne peut donc utilement soutenir que le tribunal a entaché sa décision d'erreurs de droit en ce qui concerne l'impossibilité de le taxer au regard de sa qualité de salarié non assujetti, l'absence de présentation d'éléments réels de l'exploitation, la méconnaissance des obligations et garanties résultant de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, l'impossibilité de taxer une somme qui n'a pas effectivement été encaissée et en inversant la charge de la preuve. Il en va de même des moyens tirés de la dénaturation des faits et pièces du dossier ou de la contradiction de motifs ayant entaché le jugement entrepris.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. ". Il résulte de ces dispositions qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des documents et renseignements obtenus auprès de tiers, qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour mettre à même l'intéressé d'y avoir accès avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. La méconnaissance, par l'administration, de l'obligation de communication prévue par ces dispositions affecte les impositions pour lesquelles elle a utilisé les renseignements et documents en cause, que ce soit pour conduire la procédure d'imposition ou pour déterminer le montant de l'impôt.

4. De première part, M. A... soutient que la lettre du 23 mars 2015 que la société HLM Ciliopée Habitat a envoyé au service en réponse à une demande d'information non contraignante qui lui a été adressée le 16 février 2015 ne lui a pas été communiquée. Il résulte toutefois de l'instruction et notamment des termes de la proposition de rectification du 18 septembre 2015 que, pour constater que l'entreprise de M. A... dispose en France d'une installation matérielle permanente et autonome puis établir l'imposition contestée, l'administration ne s'est pas fondée sur les renseignements succincts fournis par la société Ciliopée Habitat dans son courrier du 23 mars 2015, dont il n'a d'ailleurs jamais été fait mention au cours de la procédure de contrôle, mais, notamment, sur la réponse de cette société du 6 mai 2015 à un droit de communication du 8 avril 2015 qui, à la demande du requérant, lui a été communiquée en annexe à la réponse aux observations du contribuable du 19 novembre 2015. Par suite, les renseignements en cause n'ayant pas effectivement été utilisés pour conduire la procédure d'imposition ou pour déterminer le principe ou le montant de l'impôt, le moyen doit être écarté.

5. De seconde part, l'obligation qui est faite à l'administration de tenir à la disposition du contribuable qui les demande ou de lui communiquer, avant la mise en recouvrement des impositions, les documents ou copies de documents contenant les renseignements qu'elle a utilisés pour procéder aux redressements ne peut porter que sur les documents effectivement détenus par les services fiscaux. Dans l'hypothèse où les documents que le contribuable demande à examiner sont détenus non par l'administration fiscale, qui les a seulement consultés à l'occasion d'une vérification de comptabilité concernant une autre société, mais par cette dernière, il appartient à l'administration fiscale, d'une part, d'en informer l'intéressé afin de le mettre en mesure d'en demander communication à ce tiers et, d'autre part, de porter à sa connaissance l'ensemble des renseignements fondant l'imposition recueillis à l'occasion de la vérification de comptabilité de cette autre société.

6. Dans la proposition de rectification du 18 septembre 2015, l'administration a indiqué que, pour évaluer le montant des règlements versés par la société Belotti à M. A..., le vérificateur s'est fondé sur son analyse des comptes " caisse " et " banque " ainsi que de la balance du fournisseur de la société, consultés à l'occasion de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet en 2012 et dont le détail a été repris dans la proposition de rectification. Dans ses observations en réponse, M. A... a demandé à l'administration fiscale de lui communiquer les éléments issus de la vérification de comptabilité de la société Belotti sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition litigieuse. Dans la réponse aux observations du contribuable du 19 novembre 2015, l'administration a indiqué qu'aucune copie de ces documents comptables n'avait été conservée et que les éléments mentionnés dans la proposition de rectification résultent de notes prises par le vérificateur à l'occasion du contrôle opéré à l'endroit de la société Belotti. Par suite, quand bien même l'administration n'a pas expressément renvoyé M. A... vers la société Belotti et n'a pas repris, dans sa réponse, le détail des éléments comptables d'ores et déjà mentionné dans la proposition de rectification, la garantie prévue par les dispositions précitées de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales tenant à la communication des documents et renseignements obtenus de tiers doit être regardée, en l'espèce, comme ayant été respectée. Par ailleurs, les notes prises par le vérificateur à l'occasion de la vérification de comptabilité de la société Belotti ne constituant pas par elles-mêmes des documents obtenus de tiers au sens de ces dispositions, un défaut de communication de ces notes n'entraine aucune irrégularité.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne le principe d'imposition :

7. En premier lieu, pour contester le principe même de son imposition en France et l'application de la loi fiscale nationale, M. A... reprend en appel le moyen tiré de ce que l'administration ne démontre pas qu'au cours de la période vérifiée, son entreprise aurait disposé d'un établissement stable sur le territoire et que lui-même aurait fixé son foyer fiscal en France. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

8. En second lieu, aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. - Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. (...) ". Aux termes de l'article 256 A du même code : " Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent de manière indépendante une des activités économiques mentionnées au cinquième alinéa, quels que soient le statut juridique de ces personnes, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention. (...) ".

9. M. A..., qui s'est déclaré depuis le 20 avril 2009 comme exerçant une activité professionnelle sous la forme d'une entreprise individuelle, immatriculée en Pologne, soutient qu'il n'a jamais exercé une activité professionnelle indépendante en France mais uniquement en tant que salarié contremaître de la société Belotti, avec qui il existe un lien de subordination. Toutefois, l'intéressé ne produit aucun justificatif de nature à établir qu'il aurait été un salarié de la société Belotti, tels un contrat de travail, des fiches de paie ou des justificatifs de son affiliation obligatoire aux assurances sociales. Par ailleurs, il résulte de la réponse du 13 mars 2015 apportée au service par l'Office public de l'habitat de Lot-et-Garonne Habitalys que la société Belotti lui a fourni, dans le cadre d'une opération de construction, un acte de sous-traitance comportant en annexe une note indiquant les moyens en personnel et en matériel de l'entreprise de M. A..., signée par ce dernier, et que la société Belotti, titulaire du marché, a demandé le paiement direct de son sous-traitant. De même, la société HLM Ciliopée Habitat a fourni au vérificateur, le 6 mai 2015, des états de paiement direct à l'entreprise A... pour des prestations effectuées en 2011 et en 2012 en qualité de sous-traitant de la société Belotti. Enfin, il résulte du procès-verbal de l'entretien réalisé avec le vérificateur dans le cadre du débat oral et contradictoire le 30 mars 2015 que M. A... a admis qu'il disposait de tout le matériel nécessaire à la réalisation des travaux confiés par la société Belotti, qu'il recrutait ses employés en Pologne, assurant par ses propres moyens leur transport en France, et qu'il les rémunérait. L'ensemble de ces éléments, qui ne sont pas sérieusement contestés par M. A..., démontre que ce dernier n'agissait pas en qualité de salarié de la société Belotti mais en qualité d'entreprise sous-traitante, sans qu'aient d'incidence les circonstances, notamment, qu'il aurait œuvré exclusivement pour cette société et qu'il ait été astreint à des contraintes de calendrier ou à des processus de travaux déterminés. Dès lors, contrairement à ce qui est soutenu, l'administration établit que les recettes perçues par M. A... entre les années 2009 et 2013, en sa qualité d'assujetti, pouvaient être taxées à la TVA.

En ce qui concerne le montant de l'imposition :

S'agissant de la charge de la preuve :

10. Aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : " Sont taxés d'office : / (...) / 3° aux taxes sur le chiffre d'affaires, les personnes qui n'ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'elles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevables des taxes ; (...) ". Aux termes de l'article L. 193 du même livre : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. ".

11. Il est constant que M. A... n'a pas déposé de déclaration mensuelle de TVA au titre de l'ensemble de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2013. L'administration a procédé, par suite, en application des dispositions précitées du 3° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, à la taxation d'office à la TVA du chiffre d'affaires réalisé par son entreprise. Par suite, en application de l'article L. 193 du même livre, la preuve de l'exagération des bases d'imposition retenues par le service incombe à M. A....

S'agissant de la pertinence de la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires :

12. M. A... n'a pas été en mesure, au cours des opérations de contrôle, de présenter la comptabilité ainsi que les factures d'achats et de ventes, relatives à son activité. Un procès-verbal d'absence de présentation de comptabilité, contresigné par le requérant, a été dressé le 26 janvier 2015. Pour procéder à la reconstitution du chiffre d'affaires de l'entreprise, le vérificateur a pris en compte les sommes créditées sur ses comptes bancaires, à partir des relevés de ces comptes fournis par la banque Caisse régionale de crédit agricole mutuel (CRCAM) d'Aquitaine, les sommes réglées par la société Belotti et non retracées sur les comptes bancaires français de M. A... et les sommes directement virées par l'Office public de l'habitat de Lot-et-Garonne Habitalys et la société HLM Ciliopée Habitat sur les comptes bancaires détenus par le contribuable en Pologne.

13. En premier lieu, M. A... soutient que cette méthode de reconstitution est radicalement viciée ou, à tout le moins, excessivement sommaire dès lors que la prise en compte des sommes prétendument réglées par la société Belotti résulte uniquement de l'analyse des éléments comptables, qui ne lui ont jamais été communiqués, effectuée par l'administration au cours de la vérification de comptabilité de cette société. Toutefois, ainsi qu'il a été rappelé au point 6, l'administration a restitué le détail de chaque versement ainsi pris en compte après analyse des comptes " caisse " et " banque " de la société Belotti et a indiqué au contribuable qu'aucune copie de ces documents comptables n'avait été conservée. M. A..., qui n'a fourni au vérificateur aucun élément propre à son entreprise et à qui incombe la charge de la preuve, a ainsi été mis en mesure de discuter, somme par somme, le montant du chiffre d'affaires reconstitué de son entreprise à partir, notamment, des règlements effectués par la société Belotti, au besoin en se rapprochant de cette dernière. Par suite, le requérant n'est pas fondé à critiquer, pour ce motif, la pertinence de la méthode mise en œuvre par le vérificateur.

14. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient le requérant, il résulte de l'instruction et notamment des pièces annexées à la réponse aux observations du contribuable du 19 novembre 2015 que l'administration n'est pas en possession des relevés des comptes bancaires détenus par M. A... en Pologne mais a constaté, à la réception des documents et certificats de paiement communiqués par l'Office public de l'habitat de Lot-et-Garonne Habitalys et la société HLM Ciliopée Habitat, qui ont été transmis au contribuable, que des règlements de prestations de services réalisées par l'entreprise de M. A... ont été effectués au bénéfice de ce dernier sur des comptes bancaires ouverts à son nom et portant un identifiant international polonais. Par suite, l'appelant n'est pas fondé à soutenir que, dès lors que les relevés de ses comptes bancaires détenus en Pologne ne lui ont pas été communiqués, la méthode de reconstitution mise en œuvre par le vérificateur est radicalement viciée ou excessivement sommaire.

15. En dernier lieu, les seules déclarations de chiffre d'affaires que M. A... aurait déposées en Pologne au titre des années litigieuses, qui au demeurant ne sont pas versées au dossier, ne constituent pas en elles-mêmes des documents comptables qui peuvent, en outre, être rattachés à l'activité professionnelle du contribuable en France et justifier du montant de son chiffre d'affaires. Par suite, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que ces documents constituent des éléments réels d'exploitation dont le vérificateur aurait dû tenir compte lors de la reconstitution du chiffre d'affaires de l'entreprise.

S'agissant du montant du chiffre d'affaires :

16. M. A... soutient que le vérificateur a, à tort, intégré au chiffre d'affaires taxable la somme de 8 000 euros inscrite le 8 juin 2012 au crédit de son relevé bancaire d'un compte ouvert auprès de la CRCAM d'Aquitaine alors qu'elle correspond à un chèque qui, en définitive, a été rejeté le 18 juin 2012 et n'a jamais été effectivement encaissé. Toutefois, si cette somme est effectivement portée au débit du même relevé bancaire à cette date avec la mention " IMP CHQ N5808803 ", le requérant ne fournit, d'une part, aucune explication précise quant à l'intitulé de cette mention, d'autre part, alors que la charge de la preuve lui incombe, aucun justificatif de nature à établir qu'il n'aurait pas, en définitive, encaissé, sous une autre forme, la recette de 8 000 euros initialement enregistrée sur son compte bancaire. Par suite, le moyen doit être écarté.

S'agissant de la méthode de reconstitution proposée par le contribuable :

17. M A... se borne à proposer une méthode alternative de reconstitution du chiffre d'affaires réalisé par son entreprise consistant à ne prendre en compte que les sommes inscrites au crédit de ses comptes bancaires détenus auprès de la CRCAM d'Aquitaine. Toutefois, ainsi qu'il a été exposé aux points 12 à 14, l'administration a, à juste titre, également tenu compte des sommes réglées par la société Belotti et non retracées sur les comptes bancaires français de M. A... ainsi que les sommes directement virées par l'Office public de l'habitat de Lot-et-Garonne Habitalys et la société HLM Ciliopée Habitat sur les comptes bancaires détenus par le contribuable en Pologne. Par suite, la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires proposée par le contribuable est dénuée de toute pertinence et doit être écartée.

Sur le bien-fondé des majorations :

18. Aux termes de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales : " La juridiction saisie peut, lorsqu'une erreur non substantielle a été commise dans la procédure d'imposition, prononcer, sur ce seul motif, la décharge des majorations et amendes, à l'exclusion des droits dus en principal et des intérêts de retard. / Elle prononce la décharge de l'ensemble lorsque l'erreur a eu pour effet de porter atteinte aux droits de la défense ou lorsqu'elle est de celles pour lesquelles la nullité est expressément prévue par la loi ou par les engagements internationaux conclus par la France. ". Il résulte de ce qui a été exposé ci-avant que la procédure d'imposition n'est entachée d'aucune erreur, au sens de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales. Par suite, M. A... n'est pas fondé à demander, à titre subsidiaire, sur le fondement de ces dispositions, la décharge des majorations qui lui ont été appliquées.

19. Il résulte de tout ce qui précède M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées par voie de conséquence.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 5 décembre 2023 à laquelle siégeaient :

M. Luc Derepas, président de la cour,

Mme Evelyne Balzamo, présidente de chambre,

M. Michaël Kauffmann, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 décembre 2023.

Le rapporteur,

Michaël Kauffmann Le président,

Luc Derepas

Le greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 21BX03503

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX03503
Date de la décision : 21/12/2023
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. DEREPAS
Rapporteur ?: M. Michaël KAUFFMANN
Rapporteur public ?: Mme GAY
Avocat(s) : SELARL CABINET MATTEI

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-21;21bx03503 ?
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