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19/12/2023 | FRANCE | N°23LY02019

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 19 décembre 2023, 23LY02019


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure



M. B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 13 septembre 2022 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui accorder le bénéfice de la protection temporaire, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.



Par un jugement n° 2301518 du 9 mai 2023, le tribunal administratif a rejeté sa demande.



Procédure devant

la cour



Par une requête enregistrée le 9 juin 2023, M. B..., représenté par Me Lachenaud, demande à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 13 septembre 2022 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui accorder le bénéfice de la protection temporaire, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.

Par un jugement n° 2301518 du 9 mai 2023, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 9 juin 2023, M. B..., représenté par Me Lachenaud, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 9 mai 2023 ;

2°) d'annuler les décisions du 13 septembre 2022 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui accorder le bénéfice de la protection temporaire, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.

3°) d'enjoindre à la préfète du Rhône, à titre principal, de lui délivrer une autorisation provisoire portant la mention " protection temporaire ", et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans un délai de sept jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- il est marié à une ressortissante ukrainienne qui bénéficie de la protection temporaire en France ;

- la décision contestée méconnaît l'article 2 de la décision d'exécution (UE) 2022/382 du Conseil du 4 mars 2022.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 22 août 2023 et le 21 novembre 2023, et un mémoire enregistré le 22 novembre 2023 et non communiqué, la préfète du Rhône conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 octobre 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales ;

- la directive 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001 ;

- la décision d'exécution (UE) 2022/382 du Conseil du 4 mars 2022 constatant l'existence d'un afflux massif de personnes déplacées en provenance d'Ukraine, au sens de l'article 5 de la directive 2001/55/CE, et ayant pour effet d'introduire une protection temporaire ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mauclair, première conseillère ;

- et les observations de Me Lachenaud, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., né le 9 février 1986 à Bipmemia (Arménie) et de nationalité arménienne, est entré sur le territoire français, sous couvert de son passeport arménien à une date déclarée du 15 mars 2022, en provenance d'Ukraine et après avoir transité par la Pologne. Le 6 avril 2022, il a sollicité la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour au titre de la protection temporaire. M. B... relève appel du jugement du 9 mai 2023 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 13 septembre 2022 par laquelle le préfet du Rhône a refusé de lui accorder le bénéfice de la protection temporaire et de lui renouveler son autorisation provisoire de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.

2. Aux termes de l'article 5 de la directive 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001 : " 1. L'existence d'un afflux massif de personnes déplacées est constatée par une décision du Conseil adoptée à la majorité qualifiée sur proposition de la Commission (...) / 3. La décision du Conseil a pour effet d'entraîner, à l'égard des personnes déplacées qu'elle vise, la mise en œuvre dans tous les États membres de la protection temporaire conformément aux dispositions de la présente directive (...) ". Aux termes du paragraphe 2 de l'article 2 de la décision d'exécution (UE) 2022/382 du Conseil du 4 mars 2022 : " Les États membres appliquent la présente décision ou une protection adéquate en vertu de leur droit national à l'égard des apatrides, et des ressortissants de pays tiers autres que l'Ukraine, qui peuvent établir qu'ils étaient en séjour régulier en Ukraine avant le 24 février 2022 sur la base d'un titre de séjour permanent en cours de validité délivré conformément au droit ukrainien, et qui ne sont pas en mesure de rentrer dans leur pays ou leur région d'origine dans des conditions sûres et durables. ".

3. Aux termes de l'article L. 581-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le bénéfice du régime de la protection temporaire est ouvert aux étrangers selon les modalités déterminées par la décision du Conseil de l'Union européenne mentionnée à l'article 5 de la directive 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001, définissant les groupes spécifiques de personnes auxquelles s'applique la protection temporaire, fixant la date à laquelle la protection temporaire entrera en vigueur et contenant notamment les informations communiquées par les Etats membres de l'Union européenne concernant leurs capacités d'accueil. ". Aux termes de son article L. 581-3 : " L'étranger appartenant à un groupe spécifique de personnes visé par la décision du Conseil mentionnée à l'article L. 581-2 bénéficie de la protection temporaire à compter de la date mentionnée par cette décision. Il est mis en possession d'un document provisoire de séjour assorti, le cas échéant, d'une autorisation provisoire de travail. Ce document provisoire de séjour est renouvelé tant qu'il n'est pas mis fin à la protection temporaire. / Le bénéfice de la protection temporaire est accordé pour une période d'un an renouvelable dans la limite maximale de trois années. Il peut être mis fin à tout moment à cette protection par décision du Conseil. ".

4. Il résulte de ces dispositions que, pour déterminer si un ressortissant d'un pays tiers qui était en séjour régulier en Ukraine avant le 24 février 2022 sur la base d'un titre de séjour permanent en cours de validité délivré conformément au droit ukrainien peut bénéficier de la protection temporaire prévue aux articles L. 581-2 et L. 581-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précités, il appartient à l'autorité administrative de vérifier qu'un retour dans son pays ou sa région d'origine peut être envisagé dans des conditions à la fois sûres et durables. La portée de cette condition a été précisée par la communication de la Commission publiée au Journal officiel de l'Union européenne du 21 mars 2022, relative aux lignes directrices opérationnelles pour la mise en œuvre de la décision d'exécution 2022/382 du Conseil susvisée.

5. Si, pour refuser à M. B... le bénéfice de la protection temporaire et le renouvellement de son autorisation provisoire au séjour, le préfet du Rhône a relevé qu'il n'établit pas être membre de la famille d'un ressortissant ukrainien, ni être dans l'impossibilité de rejoindre son pays d'origine dans des conditions sûres et durables, il ressort toutefois des pièces du dossier que M. B..., qui a un titre de séjour permanent délivré par les autorités ukrainiennes et valable du 20 mai 2019 au 17 mai 2029, justifie avoir divorcé de son épouse russe puis s'être remarié le 17 juin 2021, ainsi que l'atteste le certificat de mariage produit, avec une ressortissante ukrainienne, titulaire d'une autorisation provisoire de séjour en qualité de bénéficiaire de la protection temporaire. En revanche, il ne justifie pas, en se bornant à alléguer que toute sa famille est en France et bénéficie de la protection temporaire, ne pouvoir retourner en Arménie, qui est son pays d'origine et de nationalité, dans des conditions sûres et durables. Il ressort enfin des pièces du dossier que le préfet du Rhône aurait pris la même décision s'il avait entendu se fonder sur ce seul motif tiré de ce que M. B... ne justifie pas de l'impossibilité de rejoindre son pays d'origine dans des conditions sûres et durables.

6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Sa requête doit donc, dans l'ensemble de ses conclusions, être rejetée.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie sera adressée à la préfète du Rhône.

Délibéré après l'audience du 5 décembre 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,

Mme Anne-Gaëlle Mauclair, première conseillère,

Mme Claire Burnichon, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 décembre 2023.

La rapporteure,

A.-G. MauclairLa présidente,

M. C...

La greffière,

F. Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

N° 23LY02019 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23LY02019
Date de la décision : 19/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEHL-SCHOUDER
Rapporteur ?: Mme Anne-Gaëlle MAUCLAIR
Rapporteur public ?: Mme CONESA-TERRADE
Avocat(s) : LACHENAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-19;23ly02019 ?
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