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19/12/2023 | FRANCE | N°23BX01548

France | France, Cour administrative d'appel, 5ème chambre, 19 décembre 2023, 23BX01548


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 19 janvier 2023 par lequel le préfet de la Vienne l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée de deux ans.



Par un jugement n°2301169 du 5 mai 2023, le magistrat désigné du tribunal administratif de Pau a annulé l'arrêté du 19 janvier 2023.


> Procédure devant la cour :



Par une requête enregistrée le 7 juin 2023, le préfet de la Vienne dem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 19 janvier 2023 par lequel le préfet de la Vienne l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée de deux ans.

Par un jugement n°2301169 du 5 mai 2023, le magistrat désigné du tribunal administratif de Pau a annulé l'arrêté du 19 janvier 2023.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 juin 2023, le préfet de la Vienne demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 5 mai 2023.

Il soutient que :

- les pièces versées au débat par M. A... ne permettent pas de démontrer qu'il contribue effectivement à l'éducation de son fils depuis la naissance ou depuis au moins deux ans ;

- l'arrêté attaqué n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant à sa situation personnelle au regard de l'insuffisance de son insertion dans la société française ;

- son comportement représente une menace à l'ordre public.

Par ordonnance du 17 octobre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 7 novembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Edwige Michaud.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant camerounais né le 25 juin 2001, est entré irrégulièrement en France en 2017. Il a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance et a déposé le 21 octobre 2019 une demande en qualité de " travailleur temporaire - mineur confié à l'aide sociale à l'enfance entre 16 et 18 ans ". Par un arrêté du 17 juillet 2020, le préfet de la Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a pris à son encontre une obligation de quitter le territoire avec délai de départ volontaire et a fixé le pays de destination. Par un arrêté du 28 mai 2021, le préfet de la Vienne a pris à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. Par un arrêté du même jour, M. A... a ensuite été assigné à résidence pour une durée de 180 jours. Puis, par un nouvel arrêté du 19 janvier 2023, le préfet de la Vienne a pris à l'encontre de l'intéressé une mesure d'obligation de quitter le territoire sans délai de départ volontaire, fixant le pays de destination et lui interdisant de retourner sur le territoire français pendant une durée de deux ans. Par jugement du 5 mai 2023, le magistrat désigné du tribunal administratif de Pau, saisi par M. A..., a annulé l'arrêté préfectoral du 19 janvier 2023. Le préfet de la Vienne fait appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du motif d'annulation retenu par le tribunal :

2. Pour annuler l'arrêté du préfet de la Vienne du 19 janvier 2023, le magistrat désigné du tribunal administratif de Pau a jugé que la situation de M. A... entrait dans le champ des dispositions du 5° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que ce texte faisait obstacle à ce qu'une décision lui faisant obligation de quitter le territoire français soit prise à son encontre.

3. Aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) ; 5° L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ; (...). ". Aux termes de l'article 371-2 du code civil : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant. / (...).".

4. Il ressort de l'extrait d'acte de naissance produit par M. A... que ce dernier est le père d'un petit garçon né en France le 29 septembre 2021 et de nationalité française, qu'il a reconnu par anticipation le 29 juin 2021. Il ressort des pièces du dossier que M. A... qui réside à Poitiers, ne vit pas au domicile de la mère de nationalité française et de leur fils, situé à Migné-Auxance. L'attestation de la mère de l'enfant en date du 14 décembre 2022 produite par le requérant n'est pas suffisamment circonstanciée sur les conditions dans lesquelles M. A... aurait contribué à l'entretien et l'éducation de leur fils depuis sa naissance. Si le requérant verse une attestation du service de protection maternelle et infantile du 6 décembre 2022 qui précise que le requérant est présent aux consultations de son fils au sein de ce service depuis sa naissance, ce document ne constate la présence du père que sur une période de 7 mois de la naissance au mois d'avril 2021 puis de façon isolée, le 6 décembre 2022. Par ailleurs, si M. A... produit une attestation d'une structure d'accueil datée du 5 octobre 2021 qui mentionne que l'intéressé sera accueilli dans cette résidence à raison de trois demi-journées par semaine pour passer un temps avec son fils et la mère de celui-ci, il ne fournit aucune pièce permettant de considérer que ces visites ont eu lieu. Il ne produit aucun autre élément permettant de retenir la réalité de liens affectifs entre l'enfant et lui. Enfin, le requérant n'établit pas contribuer à l'entretien de son fils depuis sa naissance en versant au dossier une facture de crèche d'un montant de 40,92 euros au nom de la mère de l'enfant, quatre tickets de caisse d'un supermarché et des factures illisibles. M. A... n'établit donc contribuer ni à l'entretien ni à l'éducation de son fils depuis sa naissance. Il s'ensuit que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur le motif tiré de la méconnaissance du 5° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour annuler l'obligation de quitter le territoire français et par voie de conséquence, les décisions par lesquelles le préfet de la Vienne a refusé d'accorder à M. A... un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée de deux ans.

5. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le tribunal administratif de Pau.

Sur les autres moyens soulevés par M. A... devant le tribunal :

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée. (...). ". Aux termes de l'article L.611-1 du même code : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) ; 5° Le comportement de l'étranger qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois constitue une menace pour l'ordre public ; (...) ".

7. L'arrêté préfectoral attaqué mentionne que, d'une part, M. A... est en situation irrégulière sur le territoire national au sens du 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile puisqu'il ne démontre pas être entré régulièrement sur le territoire français, n'est en possession d'aucun document d'identité ou de voyage, d'aucun titre l'autorisant à séjourner en France, s'est soustrait à une mesure d'éloignement et n'a pas respecté son assignation à résidence et d'autre part, que le comportement de M. A... constitue une menace pour l'ordre public au sens du 5° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile puisqu'il est défavorablement connu des services de police et de justice notamment pour des faits de vol aggravé, usage de stupéfiants et menaces de mort, qu'il se présente régulièrement en préfecture sans rendez-vous en insultant et menaçant les agents présents et qu'une plainte a été déposée auprès du commissariat de police de Poitiers le 15 décembre 2022 pour des faits de menace de crime ou délit contre les personnes ou les biens à l'encontre d'un dépositaire de l'autorité publique. L'obligation de quitter le territoire français prise à l'encontre de M. A... est donc suffisamment motivée.

8. En deuxième lieu, le préfet de la Vienne verse au dossier un extrait du fichier de traitement des antécédents judiciaires de M. A... duquel il ressort que l'intéressé est défavorablement connu des services de police pour des faits d'usage illicite de stupéfiants en date des 2 janvier 2018 et 1er mars 2018, d'offre ou cession non autorisée de stupéfiants en date du 1er mars 2018, de non-respect de l'assignation à résidence par un étranger et d'une reconduite à la frontière en date du 31 août 2018, de vol à la tire en date du 23 décembre 2019, de vol à l'étalage en date du 28 avril 2020, et de vols simples en date des 31 août 2020 et 11 janvier 2022. En outre, le préfet de la Vienne établit que le directeur de la citoyenneté et de la légalité de la préfecture de la Vienne a porté plainte le 22 décembre 2022 à l'encontre du requérant, pour des propos menaçants et insultants commis le 15 décembre 2022 devant l'agent d'accueil de la préfecture, à savoir des propos racistes et des menaces de viol de jeunes femmes. M. A... ne conteste pas être l'auteur des faits reprochés. En outre, il ressort de l'extrait du bulletin n°2 du casier judiciaire de l'intéressé qu'il a été condamné par le tribunal correctionnel de Paris le 10 juin 2021 à trois mois d'emprisonnement avec sursis pour des faits de recel de bien et d'escroquerie et par le tribunal correctionnel de Bordeaux le 7 juin 2022 à deux mois d'emprisonnement pour un refus de se soumettre aux modalités de transport ou aux obligations sanitaires nécessaires à l'exécution d'office d'une décision d'éloignement. Enfin, il ressort des pièces du dossier que M. A... s'est volontairement soustrait à plusieurs mesures d'éloignement. Dans ces conditions, eu égard à la réitération de faits pénalement répréhensibles et à la gravité de certains de ces faits, il ressort des pièces du dossier que son comportement constitue une menace pour l'ordre public.

9. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

10. Il résulte de ce qui a été dit au point 4 que M. A... n'établit pas contribuer à l'éducation et l'entretien de son fils depuis sa naissance et n'a pas de vie maritale en France. En outre, si M. A... produit un certificat de scolarité indiquant qu'il a suivi lors de l'année scolaire 2018-2019 une formation d'accompagnement dans le cadre d'une mission de lutte contre le décrochage scolaire dans un collège situé à Saint-Benoît et qu'il a obtenu en 2018 une attestation de sécurité routière de niveau 2, ces éléments sont insuffisants pour traduire une insertion notable dans la société française à la date de l'arrêté préfectoral attaqué, l'intéressé s'étant par ailleurs rendu coupable de faits pénalement repréhensibles et s'étant volontairement soustrait à plusieurs mesures d'éloignement. Par ailleurs, si les deux parents du requérant sont décédés, il ressort des pièces du dossier que ses frères et sœurs résident toujours au Cameroun. Par suite, et eu égard au comportement de l'intéressé exposé ci-dessus au point 8, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de M. A... garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

11. En quatrième lieu, aux termes de de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ".

12. Il résulte de ce qui a été dit au point 4 que M. A... n'établit pas contribuer à l'éducation et l'entretien de son fils ni entretenir des liens affectifs avec lui. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.

En ce qui concerne la décision portant refus de délai de départ volontaire :

13. En premier lieu, aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : 1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public (...) ; 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet.". Aux termes de l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : 1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) ; 4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ; 5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) ; 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5. ".

14. La décision portant refus de délai de départ volontaire vise les 1° et 3° de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les 1°, 4°, 5° et 8° de l'article L. 612-3 du même code et mentionne que M. A... ne justifie d'aucune circonstance particulière pour s'être maintenu irrégulièrement sur le territoire français, s'est soustrait à de précédentes mesures d'éloignement, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour depuis son précédent refus en 2020, a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français et ne présente pas de garanties de représentation suffisantes dans la mesure où il ne peut présenter un document de voyage ou d'identité en cours de validité. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision portant refus de délai de départ volontaire doit être écarté.

15. En deuxième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté compte tenu des circonstances exposées au point 10.

16. En troisième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté compte tenu des circonstances exposées au point 12.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

17. En premier lieu, aux termes de l'article L .612-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français mentionne le pays, fixé en application de l'article L. 721-3, à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office ".

18. La décision fixant le pays de destination vise l'article L. 612-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et mentionne que l'intéressé est de nationalité camerounaise et qu'il est obligé de quitter le territoire français sans délai pour rejoindre le pays dont il possède la nationalité à savoir le Cameroun ou tout autre pays dans lequel il est légalement admissible (à l'exception d'un État membre de l'Union européenne, de l'Islande, du Liechtenstein, de la Norvège ou de la Suisse). Enfin, l'arrêté précise que l'intéressé n'établit pas être exposé, en cas de retour dans son pays d'origine, à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision fixant le pays de destination doit être écarté.

19. En deuxième lieu, M. A... ne saurait utilement se prévaloir de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à l'encontre de la décision fixant le pays de destination laquelle n'a, par elle-même, ni pour objet ni pour effet de l'éloigner du territoire français.

20. En troisième lieu, M. A... ne saurait utilement se prévaloir de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant à l'encontre de la décision fixant le pays de destination laquelle n'a, par elle-même, ni pour objet ni pour effet de l'éloigner du territoire français.

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans :

21. En premier lieu, aux termes de l'article L.612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour.

Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. ". Aux termes de l'article L.612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...)".

22. La décision attaquée vise les articles L. 612-6 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et mentionne qu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à M. A..., qu'il ne justifie d'aucune circonstance humanitaire particulière, que l'examen d'ensemble de la situation de l'intéressé a été effectué, relativement à la durée de l'interdiction de retour, que son comportement constitue, du point de vue de l'ordre public et de la sécurité publique, une menace réelle, qu'il réside irrégulièrement sur le territoire français depuis le mois de novembre 2017 et s'y maintient irrégulièrement depuis cette date sans justification particulière, qu'il s'est soustrait à une précédente mesure d'éloignement, qu'il ne démontre pas de liens personnels et familiaux en France suffisamment anciens, intenses et stables et ne démontre pas contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de son enfant français. Par suite, l'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans prise à l'encontre de M. A... est suffisamment motivée.

23. En deuxième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté compte tenu des circonstances exposées au point 10.

24. En troisième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté compte tenu des circonstances exposées au point 12.

25. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Vienne est fondé à soutenir que c'est à tort que le premier juge a annulé l'arrêté du 19 janvier 2023 et que la demande de première instance de M. A... doit être rejetée y compris ses conclusions en injonction.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Pau du 5 mai 2023 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Pau est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Vienne.

Délibéré après l'audience du 28 novembre 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

M. Sébastien Ellie, premier conseiller,

Mme Edwige Michaud, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 décembre 2023.

La rapporteure,

Edwige MichaudLa présidente,

Elisabeth Jayat

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 23BX01548


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX01548
Date de la décision : 19/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Edwige MICHAUD
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : LEPLAT JULIEN

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-19;23bx01548 ?
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