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12/12/2023 | FRANCE | N°22BX00030

France | France, Cour administrative d'appel, 6ème chambre, 12 décembre 2023, 22BX00030


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. D... A... a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler la décision implicite par laquelle le maire du Tampon a rejeté sa demande tendant à l'attribution de la prime de service et de rendement (PSR) et de l'indemnité spécifique de service (ISS).



Par un jugement n° 2001117 du 8 octobre 2021, le tribunal administratif de La Réunion a fait droit à sa demande d'annulation et a enjoint à la commune du Tampon de réexaminer la situation de M.

A... à l'égard des versements de PSR et d'ISS auxquels il peut prétendre à compter du 1er janvier...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler la décision implicite par laquelle le maire du Tampon a rejeté sa demande tendant à l'attribution de la prime de service et de rendement (PSR) et de l'indemnité spécifique de service (ISS).

Par un jugement n° 2001117 du 8 octobre 2021, le tribunal administratif de La Réunion a fait droit à sa demande d'annulation et a enjoint à la commune du Tampon de réexaminer la situation de M. A... à l'égard des versements de PSR et d'ISS auxquels il peut prétendre à compter du 1er janvier 2016.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 5 janvier 2022, la commune du Tampon, représentée la SELARL Boissy avocats, agissant par Me Boissy, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de La Réunion du 8 octobre 2021 précité ;

2°) de rejeter la demande de M. A... ;

3°) de mettre à la charge de M. A... une somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, les responsabilités exercées par M. A... et ses évaluations professionnelles ne sont pas suffisamment satisfaisantes au titre des années 2016 et 2019 notamment, pour lui ouvrir droit au bénéfice de la PSR et de l'ISS ;

- M. A... ne peut se prévaloir pour la période postérieure au 1er janvier 2017 de la délibération du conseil municipal du 27 décembre 2010 ayant institué la PSR et l'ISS dans la mesure où ces primes et indemnités ont été remplacées par le RIFSEEP et n'ont pas été maintenues dans l'attente de l'application de ce nouveau régime indemnitaire au sein de la commune du Tampon.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 juillet 2022, M. D... A..., représenté par la SELARL Grimaldi et associés, agissant par Me Grimaldi, conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint à la commune du Tampon de lui attribuer l'ISS et la PSR à compter du 1er janvier 2016 dans le délai de dix jours suivant l'arrêt à intervenir sous astreinte de 200 euros par jour de retard, et en outre, à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la commune du Tampon sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 10 mai 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 11 juillet 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 91-875 du 6 septembre 1991 ;

- le décret n° 2003-799 du 25 août 2003 ;

- le décret n° 2009-1558 du 15 décembre 2009 ;

- le décret n° 2010-1357 du 9 novembre 2010 ;

- le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Au cours de l'audience publique, ont été entendus :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de M. Duplan, rapporteur public,

- et les observations de Me Dubois, substituant Me Boissy, pour la commune du Tampon.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... A..., agent de la commune du Tampon depuis 2009, a été titularisé en qualité de technicien principal de 2ème classe en mars 2012. Le 13 juillet 2020, il a demandé le bénéfice de la prime de service et de rendement (PSR) et de l'indemnité spécifique de service (ISS) au titre des années 2016 à 2019. M. A... a demandé au tribunal administratif de La Réunion l'annulation de la décision du maire du Tampon rejetant implicitement sa demande. Par un jugement du 8 octobre 2021, le tribunal a fait droit à sa demande d'annulation et a enjoint à la commune du Tampon de réexaminer la situation de M. A... à l'égard du bénéfice de la PSR et de l'ISS auxquelles il peut prétendre à compter du 1er janvier 2016. La commune du Tampon relève appel de ce jugement dont elle demande l'annulation. M. A... conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit enjoint à la commune du Tampon de lui accorder l'ISS et la PSR à compter du 1er janvier 2016.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les organes délibérants des collectivités territoriales et de leurs établissements publics fixent les régimes indemnitaires, dans la limite de ceux dont bénéficient les différents services de l'Etat. (...) ". Aux termes de l'article 2 du décret du 6 septembre 1991 pris pour l'application du premier alinéa de l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984 : " L'assemblée délibérante de la collectivité ou le conseil d'administration de l'établissement fixe (...) la nature, les conditions d'attribution et le taux moyen des indemnités applicables aux fonctionnaires de ces collectivités ou établissements. (...) "

3. Par une délibération du 27 décembre 2010 prise sur le fondement de l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984, le conseil municipal du Tampon a rendu applicable dans la commune la prime de service et de rendement (PSR) et l'indemnité spécifique de service (ISS) instituées par les décrets n°s 2009-1558 du 15 décembre 2009 et 2003-799 du 25 août 2003 en précisant, selon le tableau annexé à la délibération, qu'étaient éligibles à leur bénéfice les fonctionnaires de la filière technique relevant des grades suivants, s'agissant des agents relevant de la catégorie B, " technicien supérieur chef ; technicien supérieur principal ; technicien supérieur ; contrôleur en chef ; contrôleur principal ; contrôleur ".

4. Aux termes de l'article 1er du décret du 25 août 2003 relatif à l'indemnité spécifique de service allouée aux ingénieurs des ponts, des eaux et des forêts et aux fonctionnaires des corps techniques de l'équipement : " Les ingénieurs des ponts, des eaux et des forêts et les fonctionnaires des corps techniques de l'équipement, ingénieurs des travaux publics de l'Etat, techniciens supérieurs du développement durable (...) bénéficient, dans la limite des crédits ouverts à cet effet, d'une indemnité spécifique de service (...) ". Aux termes de l'article 1er du décret du 15 décembre 2009 relatif à la prime de service et de rendement allouée à certains fonctionnaires relevant du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, dans sa version alors en vigueur : " I. - Il est institué, au profit des membres de certains corps relevant du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, une prime de service et de rendement, dans les conditions prévues par le présent décret et dans la limite des crédits disponibles. / II. - La prime de service et de rendement est attribuée aux fonctionnaires titulaires appartenant aux corps ci-après énumérés : / - ingénieurs des ponts, des eaux et des forêts relevant du ministère chargé du développement durable ; / - ingénieurs des travaux publics de l'Etat ; / - techniciens supérieurs du développement durable (...) ".

5. En premier lieu, si le décret du 20 mai 2014, portant création d'un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique de l'Etat (RIFSEEP), a vocation à se substituer aux dispositifs indemnitaires existants, parmi lesquels figure l'ISS et la PSR, il est constant qu'à la date de la décision attaquée, la commune du Tampon n'avait pas fait application des dispositions de l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984 en adoptant une délibération instaurant, pour la période au titre de laquelle M. B... a demandé l'ISS et la PSR, ce nouveau régime indemnitaire au profit de ses agents. Par ailleurs, la circonstance que la circulaire ministérielle du 3 mai 2017 indique que la mise en place du RIFSEEP est prévue, dans la fonction publique territoriale, à compter du 1er janvier 2017 n'a eu, en tout état de cause, ni pour objet ni pour effet d'abroger la délibération du 27 décembre 2010 dont les premiers juges ont ainsi fait à juste titre application. Par suite, la délibération du conseil municipal du Tampon restait applicable à la demande de versement de l'ISS et de la PSR présentée par M. A....

6. En second lieu, la délibération du 27 décembre 2010 rend l'ISS modulable en fonction des responsabilités exercées et de la manière de servir, de même que la PSR, dont la modulation est également applicable en fonction du niveau d'expertise et des sujétions spéciales liées à l'emploi occupé, ainsi que de la qualité des services rendus.

7. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., en tant que technicien du pôle matériel informatique est placé sous l'autorité du responsable du système d'information. A ce titre, il est chargé de participer à la gestion courante de l'exploitation du système informatique et de surveiller le bon fonctionnement des équipements informatiques dans le cadre des normes, méthodes d'exploitation et de sécurité, ce qui suppose des interventions sur différents sites communaux et une grande disponibilité. Il ressort des fiches et comptes rendus d'entretien professionnel produits par M. A... au titre des années 2016 à 2020 qu'il a obtenu des évaluations globalement positives, ses supérieurs hiérarchiques ayant souligné ses bonnes relations professionnelles, et ses compétences ayant été évaluées majoritairement au niveau " bon " en 2016, puis au niveau majoritairement " bon " et " très bon " pour plus de la moitié d'entre elles les années suivantes et pour les trois quart d'entre elles en 2020, son bon travail en équipe ayant également été souligné en 2018. S'il a été invité à poursuivre ses efforts dans la rédaction écrite de ses dossiers au titre de cette même année, les appréciations littérales de 2019 et 2020 relèvent respectivement son travail efficace malgré une grosse charge de travail dans les écoles et l'accomplissement des tâches qui lui sont confiées.

8. Il ressort des éléments précités que M. A... a été, dans l'ensemble, évalué favorablement entre 2016 et 2020, soit pendant cinq années consécutives. Dans ces conditions, et alors même qu'il n'exerce aucune fonction d'encadrement et que cette évaluation relève certains éléments à parfaire, le maire du Tampon, en refusant à l'intéressé toute attribution d'ISS et de PSR, alors qu'il dispose d'un pouvoir de modulation du montant de ces indemnités, a commis une erreur manifeste d'appréciation, ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la commune du Tampon n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a annulé la décision en litige.

Sur l'injonction :

10. Le tribunal administratif de La Réunion a enjoint à la commune du Tampon de réexaminer la situation de M. A... concernant son droit au bénéfice de l'ISS et de la PSR et de fixer le montant de l'ISS et de la PSR auxquelles il peut prétendre à compter du 1er janvier 2016. Il ne résulte pas de l'instruction que la commune du Tampon ait satisfait à cette injonction. Dans ces conditions, eu égard aux motifs qui fondent la confirmation par le présent arrêt de l'annulation prononcée par le jugement du tribunal, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement d'enjoindre au maire du Tampon de réexaminer les droits de M. A... au bénéfice de la PSR et de l'ISS à compter du 1er janvier 2016 jusqu'au 31 décembre 2021 dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais de l'instance :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la commune du Tampon demande à ce titre. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune du Tampon une somme de 1 500 euros à verser à M. A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune du Tampon est rejetée.

Article 2 : Il est enjoint au maire du Tampon de réexaminer les droits de M. A... au bénéfice de la PSR et de l'ISS à compter du 1er janvier 2016 jusqu'au 31 décembre 2021 dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : La commune du Tampon versera à M. A... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. A... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune du Tampon et à M. D... A....

Délibéré après l'audience du 13 novembre 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Ghislaine Markarian, présidente,

M. Frédéric Faïck, président-assesseur,

Mme Caroline Gaillard, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 décembre 2023.

La rapporteure,

Caroline C...

La présidente,

Ghislaine Markarian

La greffière,

Catherine Jussy

La République mande et ordonne au préfet de La Réunion en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22BX00030


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX00030
Date de la décision : 12/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MARKARIAN
Rapporteur ?: Mme Caroline GAILLARD
Rapporteur public ?: M. DUPLAN
Avocat(s) : BOISSY AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-12;22bx00030 ?
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