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07/12/2023 | FRANCE | N°23BX00833

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 07 décembre 2023, 23BX00833


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 30 septembre 2022 par lequel le préfet de l'Indre a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra, le cas échéant, être reconduite.



Par un jugement n° 2201624 du 28 février 2023, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa

demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête enregistrée le 23 mars 2023, M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 30 septembre 2022 par lequel le préfet de l'Indre a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra, le cas échéant, être reconduite.

Par un jugement n° 2201624 du 28 février 2023, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 mars 2023, Mme A... B..., représentée par Me Gomot-Pinard, demande à la cour :

1°) de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Limoges du 28 février 2023 ;

3°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Indre du 30 septembre 2022 ;

4°) d'enjoindre au préfet de l'Indre de lui délivrer un titre de séjour ;

5°) de mettre à la charge de l'État les entiers dépens.

Elle soutient que :

- la préfecture aurait dû l'informer de l'avis émis le 26 avril 2021 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration retenant que son état de santé nécessitait une poursuite de soins dont elle bénéficiait en France pour une durée de trois mois ;

- elle justifie souffrir d'une pseudarthrose de fracture du fémur gauche nécessitant un traitement quotidien dont l'arrêt menacerait son pronostic vital ;

- l'arrêté attaqué méconnaît l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet de l'Indre qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Mme A... B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 mai 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Kolia Gallier a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... B..., ressortissante congolaise née le 29 juin 1978, indique être entré en France le 12 décembre 2018 et a présenté une demande d'asile le 3 janvier 2019. Cette demande a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides statuant en procédure accélérée le 11 mars 2019 et le recours formé contre cette décision devant la Cour nationale du droit d'asile a été rejeté comme irrecevable le 20 septembre 2019. Le préfet du Loiret a édicté à l'encontre de Mme A... B... un arrêté portant obligation de quitter le territoire français le 6 novembre 2019. Le 30 décembre 2020, l'intéressée a sollicité auprès des services de la préfecture de l'Indre son admission au séjour compte tenu de son état de santé et par un arrêté du 30 septembre 2022, le préfet de l'Indre a refusé de faire droit à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme A... B... relève appel du jugement du 28 février 2023 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire :

2. Mme A... B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 25 mai 2023. Par suite, ses conclusions tendant à obtenir l'aide juridictionnelle à titre provisoire sont devenues sans objet. Il n'y a pas lieu d'y statuer.

Sur la légalité de l'arrêté du 30 septembre 2022 :

3. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. / Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. / Si le collège de médecins estime dans son avis que les conditions précitées sont réunies, l'autorité administrative ne peut refuser la délivrance du titre de séjour que par une décision spécialement motivée. (...) ". L'article R. 425-11 du même code dispose : " Pour l'application de l'article L. 425-9, le préfet délivre la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'office et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ". Aux termes de l'article R. 425-12 du même code : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 425-11 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre (...) " L'article 3 de l'arrêté du 27 décembre 2016 de la ministre des affaires sociales et de la santé et du ministre de l'intérieur relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R.313-22, devenu R. 425-11, R. 313-23, devenu R. 425-12, et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Au vu du certificat médical et des pièces qui l'accompagnent ainsi que des éléments qu'il a recueillis au cours de son examen éventuel, le médecin de l'office établit un rapport médical, conformément au modèle figurant à l'annexe B du présent arrêté. " Enfin, l'article 6 du même arrêté dispose : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis (...) ".

4. En vertu des dispositions citées au point précédent, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dont l'avis est requis préalablement à la décision du préfet relative à la délivrance de la carte de séjour prévue à l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doit émettre son avis dans les conditions fixées par l'arrêté du 27 décembre 2016 cité au point précédent, au vu notamment du rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. S'il est saisi, à l'appui de conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus, d'un moyen relatif à l'état de santé du demandeur, aux conséquences de l'interruption de sa prise en charge médicale ou à la possibilité pour lui d'en bénéficier effectivement dans le pays dont il est originaire, il appartient au juge administratif de prendre en considération l'avis médical rendu par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Si le demandeur entend contester le sens de cet avis, il appartient à lui seul de lever le secret relatif aux informations médicales qui le concernent, afin de permettre au juge de se prononcer en prenant en considération l'ensemble des éléments pertinents, notamment l'entier dossier du rapport médical au vu duquel s'est prononcé le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, en sollicitant sa communication, ainsi que les éléments versés par le demandeur au débat contradictoire.

5. Pour rejeter la demande de Mme A... B..., le préfet de l'Indre a retenu, d'une part, que la demande de titre de séjour qu'elle a présentée pour raisons de santé n'était accompagnée d'aucun justificatif médical et d'aucune argumentation visant à démontrer une vulnérabilité particulière et, d'autre part, que le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a retenu, par un avis du 26 avril 2021, que son état de santé nécessitait une poursuite des soins médicaux qui lui étaient prodigués en France pour une durée limitée à trois mois, délai qui était largement écoulé à la date de l'arrêté litigieux qui a été édicté le 30 septembre 2022. Au soutien de sa demande, Mme A... B... produit, pour la première fois en appel, quelques éléments relatifs à sa situation médicale qui sont toutefois tous antérieurs à l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration que le préfet n'était pas tenu de lui communiquer et qui ne sauraient permettre de démontrer que son état de santé justifiait, à la date de l'arrêté attaqué, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. "

7. Si Mme A... B... se prévaut de la présence en France de sa fille, le préfet de l'Indre a indiqué devant les premiers juges que celle-ci était entrée irrégulièrement en France le 12 octobre 2019 et qu'elle se maintient en situation irrégulière sur le territoire national après avoir été déboutée du droit d'asile. Le préfet indique également, sans être contredit par la requérante qui ne produit aucun élément au soutien du moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées, que Mme A... B... est entrée en France à l'âge de 40 ans, qu'elle est veuve et que deux de ses enfants vivent au Congo. Dans ces conditions, le préfet n'a pas porté au droit de Mme A... B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport au but en vue duquel l'arrêté litigieux a été édicté et le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées ne peut qu'être écarté.

8. Il résulte de ce qui précède que Mme A... B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande. Sa requête doit, par suite, être rejetée en toutes ses conclusions.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de Mme A... B... tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A... B... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de l'Indre.

Délibéré après l'audience du 16 novembre 2023 à laquelle siégeaient :

M. Jean-Claude Pauziès, président,

Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente-assesseure,

Mme Kolia Gallier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 décembre 2023.

La rapporteure,

Kolia GallierLe président,

Jean-Claude Pauziès

La greffière,

Stéphanie Larrue

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23BX00833 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23BX00833
Date de la décision : 07/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PAUZIÈS
Rapporteur ?: Mme Kolia GALLIER
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL CERA
Avocat(s) : GOMOT-PINARD

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-07;23bx00833 ?
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