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07/12/2023 | FRANCE | N°21TL00801

France | France, Cour administrative d'appel, 4ème chambre, 07 décembre 2023, 21TL00801


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 24 octobre 2018 par lequel le maire de Maraussan s'est opposé à la déclaration préalable de travaux déposée pour la création d'une clôture périphérique sur la parcelle cadastrée ..., ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux formé le 20 décembre 2018 contre cet arrêté.



Par un jugement n° 1902048 du 24 décembre 2020, le tribunal administratif de

Montpellier a annulé cet arrêté et cette décision et enjoint au maire de Maraussan de délivrer à M. B... u...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 24 octobre 2018 par lequel le maire de Maraussan s'est opposé à la déclaration préalable de travaux déposée pour la création d'une clôture périphérique sur la parcelle cadastrée ..., ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux formé le 20 décembre 2018 contre cet arrêté.

Par un jugement n° 1902048 du 24 décembre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a annulé cet arrêté et cette décision et enjoint au maire de Maraussan de délivrer à M. B... un arrêté de non-opposition à déclaration préalable dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n° 21MA00801 puis au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n°21TL00801 les 26 février 2021 et 9 janvier 2023, la commune de Maraussan, représentée par Me Broc, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge de M. B... une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les dispositions de l'article AU 3 du règlement du plan local d'urbanisme sont applicables aux décisions attaquées dès lors que le mur de clôture est incorporé à une unité foncière à bâtir au jour de la demande et bâtie au jour de la décision du tribunal et les dispositions du plan local d'urbanisme applicables à la zone AU a) sont opposables au projet de clôture en sus des dispositions générales du plan local d'urbanisme qui édictent des règles spécifiques aux clôtures conformément aux dispositions des articles L. 151-39 et L. 421-8 du code de l'urbanisme ;

- les décisions attaquées ne méconnaissent pas les dispositions de l'article AU 3 du règlement du plan local d'urbanisme dès lors que le terrain d'assiette du projet de clôture est un terrain bâti soumis aux règles du plan local d'urbanisme y compris s'agissant des voies privées existantes ouvertes à la circulation du public ;

- les décisions attaquées peuvent être fondées sur les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme dès lors que le projet porte atteinte à la sécurité publique.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 12 décembre 2022 et 23 janvier 2023, M. B..., représenté par la société civile professionnelle SVA, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Maraussan une somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- les moyens soulevés par la commune de Maraussan ne sont pas fondés ;

- les décisions attaquées sont entachées d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article AU 3 du règlement du plan local d'urbanisme ;

- les décisions attaquées sont entachées d'une erreur de droit au regard des dispositions de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme ;

- la substitution de motif fondée sur les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et demandée par la commune de Maraussan pour la première fois en appel ne peut être accueillie dès lors que son projet ne porte pas atteinte à la sécurité publique.

Par ordonnance du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de la commune de Maraussan.

Par ordonnance du 9 janvier 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 23 janvier 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'urbanisme

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lasserre, première conseillère,

- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique,

- et les observations de Me Roche, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. Par jugement du 24 décembre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 24 octobre 2018 par lequel le maire de Maraussan s'est opposé à la déclaration préalable de travaux de M. B... en vue de réaliser une clôture périphérique sur la parcelle lui appartenant cadastrée ... ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux. Par la présente requête, la commune de Maraussan relève appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. D'une part, il résulte des dispositions combinées des articles L. 421-1, L. 421-4, L. 421-5, R. 421-2, R. 421-9 et R. 421-12 du code de l'urbanisme qu'en dehors des périmètres énumérés à l'article R. 421-12, l'édification d'une clôture est dispensée de formalité au titre du code de l'urbanisme, sauf si elle prend la forme d'un mur d'une hauteur supérieure ou égale à deux mètres.

3. Il est constant qu'en application du d) de l'article R. 421-12 du code de l'urbanisme, le conseil municipal de Maraussan a décidé, dans le chapitre XII des dispositions générales du règlement de son plan local d'urbanisme adopté le 3 décembre 2013 et modifié le 2 décembre 2014, applicable à la date de la décision en litige, que l'édification des clôtures est soumise à déclaration sur le territoire communal. Par suite, l'édification de la clôture en litige se trouve soumise à déclaration préalable de travaux.

4. D'autre part, l'article R. 151-41 du code de l'urbanisme dispose que, afin d'assurer l'insertion de la construction dans ses abords, la qualité et la diversité architecturale, urbaine et paysagère des constructions, ainsi que la mise en valeur du patrimoine, le règlement du plan local d'urbanisme peut " 2° prévoir des dispositions concernant les caractéristiques architecturales des façades et toitures des constructions ainsi que des clôtures ". Son article R. 151-43 prévoit que, afin de contribuer à la qualité du cadre de vie, assurer un équilibre entre les espaces construits et les espaces libres et répondre aux enjeux environnementaux, le règlement peut " 8° Imposer pour les clôtures des caractéristiques permettant de préserver ou remettre en état les continuités écologiques ou de faciliter l'écoulement des eaux ". Il résulte de ces dispositions que sont applicables aux clôtures, dont celles qui prennent la forme d'un mur, les seules dispositions du règlement d'un plan local d'urbanisme édictées spécifiquement pour régir leur situation, sur le fondement des articles R. 151-41 et R. 151-43 du code de l'urbanisme. En revanche, un mur qui est incorporé à une construction, alors même qu'il a la fonction de clore ou limiter l'accès à son terrain d'assiette, est soumis à l'ensemble des règles du règlement du plan local d'urbanisme applicables aux constructions.

5. Il ressort des pièces du dossier de déclaration préalable, et notamment du plan de masse, que le projet de clôture auquel le maire de Maraussan s'est opposé par la décision attaquée consiste en l'édification sur la parcelle cadastrée ... d'une clôture d'1,80 mètre de hauteur, composée de murs bahuts d'1,20 mètre de hauteur surmontés d'un grillage de 0,60 mètre. Si la commune de Maraussan soutient que le terrain d'assiette du projet en litige constitue un terrain à bâtir, elle n'établit ni même n'allègue que le projet de clôture en litige serait incorporé à une construction. Par suite, et dès lors que seules les dispositions du plan local d'urbanisme édictant des règles spécifiques aux clôtures étaient opposables au projet en litige, le maire de Maraussan ne pouvait légalement se fonder sur les dispositions de l'article AU 3 du règlement du plan local d'urbanisme relatif aux accès et à la voirie pour faire opposition à la déclaration préalable de M. B....

6. Toutefois, l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative, il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.

7. Aux termes de l'article L. 111-1 du code de l'urbanisme, " le règlement national d'urbanisme s'applique sur l'ensemble du territoire ". Et selon l'article R. 111-2 du même code : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ". Il appartient à l'autorité d'urbanisme compétente et au juge de l'excès de pouvoir, pour apprécier si les risques d'atteintes à la salubrité ou à la sécurité publique justifient un refus d'autorisation d'urbanisme sur le fondement de ces dispositions, de tenir compte tant de la probabilité de réalisation de ces risques que de la gravité de leurs conséquences, s'ils se réalisent.

8. La commune de Maraussan soutient, pour la première fois en appel, que le motif tiré de l'atteinte à la sécurité publique au sens des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme peut être substitué au motif tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article AU 3 du plan local d'urbanisme. Il ressort des pièces du dossier que le projet de clôture de M. B... réduit la voie privée ouverte à la circulation publique longeant sa propriété à une largeur d'environ 4 mètres sur une longueur d'une soixantaine de mètres. Toutefois, si elle constitue le seul accès à une dizaine d'habitations, cette voie, qui est rectiligne, mesure plus de 350 mètres ce qui permet le passage des véhicules au droit de la propriété de M. B... sans risque d'atteinte à la sécurité publique. Dans ces conditions, et alors notamment que cette largeur est également suffisante pour permettre le passage des véhicules de secours et d'incendie et des véhicules de ramassage des ordures ménagères, le projet de clôture de M. B... ne présente pas un risque d'atteinte pour la sécurité publique au sens des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme. Par suite, il n'y a pas lieu de faire droit à la substitution demandée.

9. Il résulte de ce qui précède que la commune de Maraussan n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 24 octobre 2018 par lequel le maire de Maraussan s'est opposé à la déclaration préalable de travaux déposée pour la création d'une clôture sur la parcelle cadastrée ..., ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux formé le 20 décembre 2018 contre cet arrêté.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B..., qui n'est pas la partie perdante à la présente instance, la somme que la commune de Maraussan demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Maraussan la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à verser à M. B....

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Maraussan est rejetée.

Article 2 : La commune de Maraussan versera à M. B... une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Maraussan et à M. A... B....

Délibéré après l'audience du 23 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Moutte, président,

M. Jazeron, premier conseiller,

Mme Lasserre, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 décembre 2023.

La rapporteure,

N. Lasserre

Le président,

J.-F. MoutteLa greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne au préfet de l'Hérault en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°21TL00801


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21TL00801
Date de la décision : 07/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04-045-03-01 Urbanisme et aménagement du territoire. - Autorisations d`utilisation des sols diverses. - Régimes de déclaration préalable. - Déclaration de clôture. - Opposition à édification d`une clôture.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUTTE
Rapporteur ?: Mme Nathalie LASSERRE
Rapporteur public ?: Mme MEUNIER-GARNER
Avocat(s) : CABINET JPBA

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-07;21tl00801 ?
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