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01/12/2023 | FRANCE | N°23NT01622

France | France, Cour administrative d'appel, 3ème chambre, 01 décembre 2023, 23NT01622


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 21 mars 2022 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire, et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2206895 du 21 mars 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la requête de Mme B....



Procédure devant la cour :



Par une requête et un

mémoire enregistrés le 1er juin 2023 et le 3 novembre 2023,

Mme A... B..., représentée par Me Pollono, demande à la cour :
...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 21 mars 2022 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire, et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2206895 du 21 mars 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la requête de Mme B....

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 1er juin 2023 et le 3 novembre 2023,

Mme A... B..., représentée par Me Pollono, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 21 mars 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 21 mars 2022 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire, et a fixé le pays de destination;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de 15 jours à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil de la somme de 1 800 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce qu'il se fonde sur une pièce qui n'a pas été soumise au contradictoire ;

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

- elle méconnaît les articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :

- cette décision est illégale en raison de l'illégalité du titre de séjour ;

- l'obligation de quitter le territoire méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen sérieux ;

- elle est illégale en conséquence de l'illégalité du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ;

- elle est entachée d'une erreur de droit au regard de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire enregistré le 31 octobre 2023, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun moyen n'est fondé et s'en remet à ses écritures de première instance.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 mai 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Vergne,

- les conclusions de M. Berthon, rapporteur public

- et les observations de Me Pavy, représentant Mme B..., et les déclarations de celle-ci.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante nigériane née en 1996, déclare être entrée irrégulièrement en France le 23 août 2016. Sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 30 juin 2017, puis par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 20 décembre 2017. Sa demande de réexamen de sa demande d'asile a été définitivement rejetée le 29 avril 2020. Se déclarant victime de faits de traite d'êtres humains, et ayant porté plainte pour des faits de proxénétisme aggravé le 23 janvier 2018, Mme B... a bénéficié d'un titre de séjour qui lui a été délivré sur le fondement des articles

L. 425-1 et L. 425-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, valable jusqu'au 10 août 2021. Par l'arrêté attaqué du 21 mars 2022, le préfet de la

Loire-Atlantique lui a refusé le renouvellement de ce titre de séjour et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de départ volontaire de trente jours, laquelle fixe le pays de destination en cas de reconduite d'office à l'issue de ce délai. Mme B... relève appel du jugement du 21 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire. (...)". Tant le principe du caractère contradictoire de la procédure que la nécessité de mettre le juge d'appel ou le juge de cassation à même d'exercer son contrôle sur les motifs de la décision juridictionnelle attaquée impliquent que le juge administratif ne puisse statuer qu'au vu des pièces qui ont été régulièrement versées au dossier de l'instance en cause et communiquées aux parties. Toutefois, le principe du contradictoire n'est pas méconnu du seul fait de la mention dans un jugement d'une pièce qui n'a pas été communiquée aux parties si le juge, dans les motifs de son jugement, ne s'est pas fondé sur des éléments de droit ou de fait contenus dans cette pièce non communiquée ou n'a tiré aucune conséquence de cette pièce.

3. Comme le fait valoir la requérante, il ressort des mentions du jugement attaqué que, dans le cadre de l'analyse des moyens tirés de la méconnaissance des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les premiers juges ont pris en compte des données extraites d'une décision de la CNDA du 20 décembre 2017. Toutefois, il ne ressort pas des pièces au dossier, que cette décision ou les données de cette décision utilisées par les premiers juges aient été versées dans la procédure par les demandeurs ou le préfet dans le cadre de l'instruction contradictoire de l'affaire. Il n'en ressort pas davantage que de tels éléments aient été communiqués aux parties par le tribunal administratif. La circonstance que la décision a été notifiée à Mme B... le 4 janvier 2018, ainsi qu'il ressort de l'extrait de la base de données TelemOfpra la concernant, ne saurait pallier l'atteinte au principe du caractère contradictoire de la procédure contentieuse résultant de l'utilisation par le tribunal d'une pièce non versée aux débats, opposée à la requérante et dont celle-ci n'a pas été en mesure de discuter la pertinence ou la portée dans le cadre de la procédure juridictionnelle. Dans ces conditions, Mme B... est fondée à soutenir que le tribunal administratif a méconnu le principe, rappelé ci-dessus, selon lequel le juge administratif ne peut statuer qu'au vu des pièces qui ont été versées à son dossier et communiquées aux parties. Par suite, le jugement attaqué, qui a été rendu sur une procédure irrégulière, doit être annulé.

4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par

Mme B... devant le tribunal administratif de Nantes.

Sur la légalité de l'arrêté du 21 mars 2022 du préfet de la Loire-Atlantique :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

5. En premier lieu, l'arrêté attaqué comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait constituant le fondement de la décision refusant d'admettre la requérante au séjour en France, et qui révèlent que le préfet a examiné la demande de Mme B... au vu des éléments pertinents relatifs à la demande de titre qui lui était soumise et dont il est établi qu'ils avaient été portés à sa connaissance. Si la requérante, au soutien de son moyen tiré du défaut de motivation, fait valoir que le préfet a considéré à tort qu'elle n'établissait pas son insertion

socio-professionnelle et n'a pas tenu compte du fait qu'elle était victime de traite d'êtres humains, une telle argumentation est relative au bien-fondé de la décision attaquée et non à sa motivation formelle. Le moyen tiré par la requérante du défaut de motivation de la décision lui refusant un titre de séjour doit donc être écarté.

6. En deuxième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

7. D'une part, si Mme B... a bénéficié d'un titre de séjour qui lui a été délivré sur le fondement des articles L. 425-1 et L. 425-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, prévoyant la délivrance d'une carte temporaire " vie privée et familiale " à l'étranger déposant plainte contre une personne qu'il accuse d'avoir commis à son encontre des faits constitutifs des infractions de traite des êtres humains et de proxénétisme ou qui témoigne dans le cadre d'une procédure pénale concernant une personne poursuivie pour ces mêmes infractions, il est constant que la plainte déposée le 23 janvier 2018 par Mme B... a été classée sans suite et que la demande de constitution de partie civile de l'intéressée dans le cadre de poursuites pénales pour proxénétisme a été déclarée irrecevable par un jugement du tribunal correctionnel de Nantes du 16 décembre 2019. La requérante, informée dans le cadre de l'instruction de la demande de renouvellement de son titre, par un courrier du préfet de la

Loire-Atlantique du 3 janvier 2022, du classement sans suite de sa plainte et invitée à produire ses observations ou toute information utile à la bonne connaissance de sa situation personnelle, n'a pas donné suite à ce courrier. Ni les éléments versés à l'instance, soit le dépôt de plainte, l'avis de classement sans suite de celle-ci et le jugement susmentionné, ni les explications selon lesquelles le classement sans suite est intervenu au motif " code 71 " c'est-à-dire lorsque l'auteur est inconnu et le jugement d'irrecevabilité au motif, ainsi qu'il est rapporté, que " la personne poursuivie n'avait pas été directement la proxénète de l'appelante ", ni la simple invocation de démarches réitérées menées par la requérante auprès de la police et de l'autorité judiciaire au long de l'enquête et de la procédure pénales ne suffisent pour établir, en l'absence d'autres éléments, que la requérante aurait été victime de traite d'êtres humains ou, pour reprendre ses propres termes, qu'elle était, à la date de la décision litigieuse, une " victime potentielle de proxénétisme aggravé ", portant ainsi atteinte à sa dignité, et que ce statut devait nécessairement lui permettre d'obtenir une protection et d'être régularisée. La CNDA, dont le préfet, dans le cadre de l'instance d'appel, a produit l'arrêt n° 17034262 du 20 décembre 2017, a d'ailleurs estimé peu circonstanciées et précises, et, par suite, non convaincantes, les allégations de la requérante sur son recrutement forcé dans un réseau de prostitution, la personne qui l'y aurait fait rentrer, son extraction dudit réseau, et les représailles qu'elle encourrait. Il ne peut être considéré comme établi, dans ces conditions, que les stipulations invoquées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, protégeant la vie privée et familiale, faisaient obstacle à ce qu'un refus de séjour lui soit opposé.

8. D'autre part, si l'intéressée a donné naissance à un enfant le 13 juin 2020 à Nantes, le père de l'enfant est un ressortissant nigérian se trouvant en situation irrégulière en France et faisant également l'objet d'une obligation de quitter le territoire français. Par ailleurs, s'il doit être fait mention du fait que Mme B... a suivi la quasi-totalité d'un cursus d'apprentissage de la langue française de quatre-cents heures organisé en 2021 par l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), l'intégration socio-professionnelle de la requérante se limitait à une inscription à la mission locale qui l'a seulement orientée vers des chantiers d'insertion, ainsi qu'à une inscription à Pôle emploi, les autres démarches d'insertion, ainsi que la naissance d'un second enfant, le 16 octobre 2022, étant postérieures à la décision attaquée. Dans ces conditions, Mme B..., même présente en France depuis 2016, soit depuis près de cinq ans et demi à la date de la décision attaquée, ne dispose pas de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus et méconnaîtrait son droit à une vie privée et familiale normale.

9. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ".

10. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 7 et 8, et alors au surplus qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la demande de titre de Mme B... était fondée sur les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'ayant pas non plus, dans sa décision, appliqué celles-ci, le moyen tiré de leur méconnaissance ne peut qu'être écarté. Il en est de même du moyen tiré de ce que la décision contestée serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de Mme B....

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :

11. En premier lieu, eu égard à ce qui a été dit ci-dessus aux points 5 à 10 du présent arrêt, le moyen tiré de ce que, en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour, la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence ne peut qu'être écarté.

12. En deuxième lieu, et eu égard aux motifs énoncés aux points 7 et 8, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Loire-Atlantique aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision attaquée sur la situation personnelle de la requérante.

13. En troisième lieu et pour les mêmes motifs, la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français méconnaîtrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

14. En premier lieu, compte tenu de ce qui précède, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français.

15. En deuxième lieu, la décision fixant le pays de destination comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. En particulier, après avoir visé notamment l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les articles L. 612-12 et L. 721-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, elle fait état de ce que Mme B... fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, qu'elle est de nationalité nigériane et qu'elle n'établit pas que sa vie ou sa liberté sont menacées dans son pays d'origine ou qu'elle y serait exposée à des traitements inhumains ou dégradants. Par suite, cette décision est régulièrement motivée.

16. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " Cet article 3 stipule : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".

17. D'une part, il ressort des pièces du dossier et notamment de la motivation de la décision litigieuse que la situation de Mme B... a été examinée au regard d'éventuels risques encourus en cas de retour au Nigéria. Le moyen tiré du défaut d'un tel examen doit être écarté.

18. D'autre part, et alors que la demande d'asile de Mme B... a été rejetée, il ne ressort pas des pièces du dossier que la vie ou la liberté de l'intéressée seraient menacées au Nigeria. Il n'en ressort pas davantage qu'elle risquerait d'être effectivement et personnellement soumise à la torture ou à des peines ou traitements inhumains ou dégradants dans ce pays, notamment qu'elle serait susceptible d'être intégrée sous la contrainte à un réseau de prostitution, ou exposée à des représailles en raison d'une dette que son séjour en France devait lui permettre d'acquitter. Il en résulte que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

19. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de Mme B... tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 mars 2022 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire et a fixé le pays de destination doivent être rejetées.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

16. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ".

17. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'implique aucune mesure d'exécution. Dès lors, les conclusions à fin d'injonction dont elles sont assorties ne sauraient être accueillies.

Sur les frais liés au litige :

18. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de Mme B... fondées sur les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes est annulé.

Article 2 : La demande de Mme B... et le surplus des conclusions de la requête devant la cour sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 16 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Brisson, présidente,

- M. Vergne, président-assesseur,

- Mme Lellouch, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er décembre 2023.

Le rapporteur,

G.-V. VERGNE

La présidente,

C. BRISSON

Le greffier,

R. MAGEAU

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous mandataires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT01622


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT01622
Date de la décision : 01/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BRISSON
Rapporteur ?: M. Georges-Vincent VERGNE
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : CABINET POLLONO

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-01;23nt01622 ?
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