La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/08/2025 | FRANCE | N°471556

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 19 août 2025, 471556


Vu la procédure suivante :



1° Sous le n° 471556, par une requête, un mémoire complémentaire, deux mémoires en réplique et un mémoire récapitulatif, enregistrés les 21 février, 12 avril, 6 et 15 juin 2023 et le 13 septembre 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat des hospitalo-universitaires demande au Conseil d'Etat :



1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle la Première ministre a rejeté sa demande du 18 octobre 2022 tendant à l'abrogation du 2° de l'article 34

du décret n° 2021-1645 du 13 décembre 2021 relatif au personnel enseignant et hospitalier d...

Vu la procédure suivante :

1° Sous le n° 471556, par une requête, un mémoire complémentaire, deux mémoires en réplique et un mémoire récapitulatif, enregistrés les 21 février, 12 avril, 6 et 15 juin 2023 et le 13 septembre 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat des hospitalo-universitaires demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle la Première ministre a rejeté sa demande du 18 octobre 2022 tendant à l'abrogation du 2° de l'article 34 du décret n° 2021-1645 du 13 décembre 2021 relatif au personnel enseignant et hospitalier des centres hospitaliers et universitaires en tant qu'il ne prévoit pas de cotisation au titre du régime de retraites sur les émoluments hospitaliers perçus par les maîtres de conférences des universités-praticiens hospitaliers et les professeurs des universités-praticiens hospitalier ;

2°) d'enjoindre à la Première ministre d'abroger cet article dans cette mesure ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2° Sous le n° 497696, par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 9 septembre et 9 décembre 2024 et le 28 février 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat des hospitalo-universitaires demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2024-767 du 8 juillet 2024 relatif à l'assiette et aux taux de cotisations des personnels hospitalo-universitaires titulaires affiliés à l'institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques (Ircantec) ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice.

....................................................................................

3° Sous le n° 497698, par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 9 septembre et 9 décembre 2024 et le 28 février 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat des hospitalo-universitaires demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2024-765 du 8 juillet 2024 relatif aux retenues pour pension sur les émoluments des personnels enseignants et hospitaliers titulaires ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice.

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code de l'éducation ;

- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 2023-1268 du 27 décembre 2023

- le décret n° 2010-1142 du 29 septembre 2010 ;

- le décret n° 2021-1645 du 13 décembre 2021 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Erwan Le Bras, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Fabiani, Pinatel, avocat du syndicat des hospitalo-universitaires.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes nos 471556, 497696 et 497698 présentées par le syndicat des hospitalo-universitaires sont dirigées contre des dispositions règlementaires relatives au régime de retraite du personnel enseignant et hospitalier titulaire. Elles présentent à juger des questions semblables. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.

2. Le syndicat des hospitalo-universitaires demande l'annulation pour excès de pouvoir, d'une part, de la décision implicite de rejet opposée par la Première ministre à sa demande du 18 octobre 2022 tendant à l'abrogation du 2° de l'article 34 du décret n° 2021-1645 du 13 décembre 2021 relatif au personnel enseignant et hospitalier des centres hospitaliers et universitaires, en tant que ces dispositions excluent les émoluments hospitaliers de cotisations pour la retraite, et, d'autre part, l'annulation des décrets n° 2024-765 et n° 2024-767 du 8 juillet 2024 relatifs, pour le premier, aux retenues pour pension sur les émoluments des personnels enseignants et hospitaliers titulaires et, pour le second, à l'assiette et aux taux de cotisations des personnels hospitalo-universitaires titulaires affiliés à l'institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques (Ircantec).

Sur les conclusions dirigées contre les décrets du 8 juillet 2024 :

3. Aux termes de l'article L. 921-2-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du I de l'article 33 de la loi du 27 décembre 2023 visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels : " Les membres du personnel enseignant et hospitalier titulaires et stagiaires mentionnés à l'article L. 952-21 du code de l'éducation sont affiliés, pour la partie hospitalière de leur activité, au régime de retraite complémentaire prévu à l'article L. 921-2-1 du présent code ", soit le régime de l'Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques (Ircantec). Par l'effet du décret n° 2024-765 du 8 juillet 2024, le 2° de l'article 34 du décret du 13 décembre 2021 a été modifié afin d'abroger la mention selon laquelle les émoluments hospitaliers perçus par les personnels hospitalo-universitaires n'étaient pas " soumis à d'autres retenues pour pension que celles opérées au titre du régime public de retraite additionnel institué par la loi du 21 août 2003 (...) ". Et, aux termes du décret n° 2024-767 du même jour, le décret n° 2010-1142 du 29 septembre 2010 relatif à l'assiette des cotisations de certains membres du corps médical des établissements publics de santé au régime de retraites complémentaire des assurances sociales a été complété afin de prévoir l'assiette et le taux des cotisations prélevées, à compter du 1er septembre 2024, sur les émoluments des personnels hospitalo-universitaires, au titre de leur affiliation à l'Ircantec.

4. En premier lieu, aux termes de l'article 22 de la Constitution : " Les actes du Premier ministre sont contresignés, le cas échéant, par les ministres chargés de leur exécution. " S'agissant d'un acte réglementaire, les ministres chargés de son exécution sont ceux qui ont compétence pour signer ou contresigner les mesures que comporte nécessairement l'exécution du décret. Aucun des deux décrets litigieux ne comporte l'intervention de mesures réglementaires ou individuelles que le ministre chargé de l'enseignement supérieur serait compétent pour signer ou contresigner. Dès lors, le décret attaqué n'avait pas, contrairement à ce qui est soutenu, à être revêtu du contreseing de ce ministre.

5. En deuxième lieu, le principe d'une double affiliation des personnels enseignants et hospitaliers, d'une part, au service des retraites de l'Etat, d'autre part, à l'Ircantec, " pour la partie hospitalière de leur activité ", procède des dispositions législatives du code des pensions civiles et militaires de retraite et de l'article L. 921-2-2 du code de la sécurité sociale cité au point 3. Le syndicat des hospitalo-universitaires ne peut donc, en tout état de cause, utilement soutenir, pour contester la légalité des décrets attaqués, que le pouvoir réglementaire aurait commis une erreur de droit ou une erreur manifeste d'appréciation, au regard du caractère indissociable des fonctions universitaires et hospitalières qu'ils exercent, en tirant les conséquences imposées par l'article L. 921-2-2 du code de la sécurité sociale de leur affiliation à l'Ircantec, sur l'assujettissement de leurs émoluments hospitaliers au prélèvement de cotisations à ce régime.

6. En troisième lieu, le syndicat requérant ne peut, en tout état de cause, utilement soutenir que les deux décrets attaqués méconnaissent le principe d'égalité tant par rapport à la situation des médecins qui ont le statut de praticiens hospitaliers que par rapport à celle des autres universitaires n'exerçant pas de fonctions hospitalières, en tant qu'ils tirent les conséquences de l'affiliation des personnels hospitalo-universitaires, " pour la partie hospitalière de leur activité ", à l'Ircantec, dès lors que celle-ci procède, comme indiqué au point 5, des dispositions de l'article L. 921-2-2 du code de la sécurité sociale.

7. Si le syndicat requérant peut être regardé comme cherchant également à contester les modalités de calcul des cotisations à ce régime de retraite complémentaire, soit leur assiette et leur taux, fixées, ainsi qu'il a été dit au point 3, par le décret n° 2024-167 du 8 juillet 2024, en faisant valoir qu'elles leur assureront un revenu de remplacement global, en additionnant les deux pensions auxquelles ils auront droit, d'un taux moyen inférieur par rapport à l'ensemble de leur rémunération d'activité, à celui dont bénéficient soit les praticiens hospitaliers sur la base de leur seule pension servie par l'Ircantec, soit les autres universitaires sur la base de leur seule pension du régime des fonctionnaires de l'Etat, la méconnaissance du principe d'égalité, ne peut qu'être écarté, les uns et les autres relevant de statuts ou de corps différents et aucune norme ayant par nature une portée plus large que le régime de ces statuts ou de ces corps n'étant, en l'espèce, en cause.

8. Il résulte de ce qui précède que le syndicat des hospitalo-universitaires n'est pas fondé à demander l'annulation des décrets n° 2024-765 et n° 2024-767 du 8 juillet 2024.

Sur les conclusions dirigées contre le refus d'abrogation partielle du 2° de l'article 34 du décret du 13 décembre 2021 :

9. Ainsi qu'il a été dit au point 3, les dispositions du 2° de l'article 34 du décret du 13 décembre 2021 ont été abrogées par le décret n° 2024-765 du 8 juillet 2024 en tant qu'elles prévoyaient que les émoluments hospitaliers perçus par le personnel enseignant et hospitalier n'étaient pas " soumis à d'autres retenues pour pension que celles opérées au titre du régime public de retraite additionnel institué par la loi du 21 août 2003 (...) ". La requête tendant à l'annulation du décret du 8 juillet 2024 étant ainsi qu'il vient d'être dit rejetée, cette abrogation est définitive. Par suite, il n'y a pas lieu de statuer sur la requête du syndicat des hospitalo-universitaires tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet opposée par la Première ministre à sa demande du 18 octobre 2022 tendant à l'abrogation de ces dispositions.

Sur les frais des instances :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, dans les instances n° 497696 et 497698. Il n'y a pas lieu de mettre une telle somme à la charge de l'Etat, dans l'instance n° 471556.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 471556 du syndicat des hospitalo-universitaires.

Article 2 : Les requêtes n° 497696 et 497698 du syndicat des hospitalo-universitaires et le surplus des conclusions de la requête n° 471556 sont rejetés.

Article 3 : Les conclusions du syndicat des hospitalo-universitaires du titre de l'article L 761-1 du code de justice administratives, présentées dans l'instance n° 471556, sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au syndicat des hospitalo-universitaires, à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré à l'issue de la séance du 7 juillet 2025 où siégeaient : M. Alain Seban, assesseur, présidant ; Mme Laurence Helmlinger, conseillère d'Etat et M. Erwan Le Bras, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.

Rendu le 19 août 2025.

Le président :

Signé : M. Alain Seban

Le rapporteur :

Signé : M. Erwan Le Bras

Le secrétaire :

Signé : M. Bernard Longieras


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 471556
Date de la décision : 19/08/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 19 aoû. 2025, n° 471556
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Erwan Le Bras
Rapporteur public ?: M. Maxime Boutron
Avocat(s) : SCP FABIANI PINATEL

Origine de la décision
Date de l'import : 21/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:471556.20250819
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award