La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/07/2025 | FRANCE | N°501474

France | France, Conseil d'État, 10ème chambre, 31 juillet 2025, 501474


Vu les procédures suivantes :



La société SAF Hélicoptères a demandé au tribunal administratif de la Guyane, d'une part, d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le centre hospitalier de Cayenne Andrée Rosemon sur sa demande tendant à ce qu'il lui communique les documents relatifs au marché n° 2022-CHC-144 du 30 décembre 2022 qu'il a conclu avec la société HBG France, d'autre part, d'enjoindre au centre hospitalier de lui communiquer les documents demandés dans un délai de quinze jours à compter de la notification du juge

ment à intervenir, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard.



...

Vu les procédures suivantes :

La société SAF Hélicoptères a demandé au tribunal administratif de la Guyane, d'une part, d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le centre hospitalier de Cayenne Andrée Rosemon sur sa demande tendant à ce qu'il lui communique les documents relatifs au marché n° 2022-CHC-144 du 30 décembre 2022 qu'il a conclu avec la société HBG France, d'autre part, d'enjoindre au centre hospitalier de lui communiquer les documents demandés dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 2301517 du 12 décembre 2024, le tribunal administratif de la Guyane a, d'une part, prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la société SAF Hélicoptères tendant à l'annulation de la décision implicite du centre hospitalier refusant la communication de l'acte d'engagement, de ses annexes, de la décision d'attribution du marché à la société HBG France, de sa notification et de la lettre de notification du marché à la société attributaire, d'autre part, annulé la décision par laquelle le centre hospitalier a implicitement refusé de communiquer à la société SAF Hélicoptères le document daté et signé, attestant que les aéronefs définitifs ou de transition précisément spécifiés seraient bien mis à la disposition de la société attributaire du marché, à la date que celle-ci a mentionnée, le cahier des clauses administratives particulières signé ainsi que le rapport d'analyse des offres sans occultation de la mention du prix global de l'offre de la société attributaire, enfin, enjoint au centre hospitalier de communiquer à la société SAF Hélicoptères ces documents dans un délai d'un mois.

1° Sous le n° 501474, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 12 février, 12 mars et 7 juillet 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société HBG France doit être regardée comme demandant au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a annulé la décision par laquelle le centre hospitalier de Cayenne Andrée Rosemon a implicitement refusé de communiquer à la société SAF Hélicoptères le document daté et signé, attestant que les aéronefs définitifs ou de transition précisément spécifiés seraient bien mis à sa disposition à la date qu'elle a mentionnée et a enjoint au centre hospitalier de communiquer ce document à la société SAF Hélicoptères dans un délai d'un mois à compter de la notification de son jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond dans cette mesure, de rejeter les demandes de la société SAF Hélicoptères ;

3°) de mettre à la charge de la société SAF Hélicoptères la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2° Sous le n° 502333, par une requête et un nouveau mémoire, enregistrés les 12 mars et 7 juillet 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société HBG France demande au Conseil d'Etat d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution du jugement contesté jusqu'à ce qu'il soit statué sur le pourvoi n° 501474.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 6 juin et 8 juillet 2025, la société SAF Hélicoptères conclut au rejet de la requête.

Le centre hospitalier de Cayenne Andrée Rosemon a présenté des observations, enregistrées les 14 avril et 4 juillet 2025.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Philippe Bachschmidt, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Esther de Moustier, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de la société HBG France, à la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et associés, avocat de la société SAF Hélicoptères.

Vu la note en délibéré, enregistrée le 10 juillet 2025, présentée par la société SAF Hélicoptères ;

Considérant ce qui suit :

1. Le pourvoi et la requête aux fins de sursis à exécution présentés par la société HBG France sont dirigés contre le même jugement du tribunal administratif de la Guyane. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.

2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société SAF Hélicoptères a demandé au tribunal administratif de la Guyane, d'une part, d'annuler la décision par laquelle le centre hospitalier de Cayenne Andrée Rosemon a implicitement refusé de lui communiquer les documents relatifs au marché qu'il a conclu le 30 décembre 2022 avec la société HBG France, ayant pour objet l'exécution de prestations de transports sanitaires héliportés dans le cadre des activités du SAMU 973, et, d'autre part, d'enjoindre au centre hospitalier de lui communiquer ces documents dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard. Par un jugement du 12 décembre 2024, le tribunal administratif de la Guyane a fait droit à sa demande seulement en ce qui concerne le document daté et signé, attestant que les aéronefs définitifs ou de transition précisément spécifiés seraient bien mis à la disposition de la société HBG France, attributaire du marché, à la date que celle-ci a mentionnée, le cahier des clauses administratives particulières signé et le rapport d'analyse des offres sans occultation de la mention du prix global de l'offre de la société HBG France. Cette dernière se pourvoit en cassation contre ce jugement, en tant seulement qu'il a annulé le refus du centre hospitalier de communiquer à la société SAF Hélicoptères le document daté et signé, attestant que les aéronefs définitifs ou de transition précisément spécifiés seraient bien mis à sa disposition à la date qu'elle a mentionnée. Par la voie du pourvoi incident, la société SAF Hélicoptères demande l'annulation du jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de ses demandes.

Sur le pourvoi incident :

3. Les conclusions du pourvoi incident de la société SAF Hélicoptères dirigées contre le jugement du 12 décembre 2024 en tant qu'il statue sur ses conclusions tendant à l'annulation du refus du centre hospitalier de Cayenne Andrée Rosemon de lui communiquer la preuve d'engagement de la société HBG, le rétroplanning et l'attestation bancaire prévus au point 6.1 du règlement de la consultation, le rapport d'analyse des offres, la décision d'attribution du marché à la société HBG France et la notification soulèvent un litige distinct de celui soulevé par le pourvoi de la société HBG France. Elles sont donc irrecevables.

Sur le pourvoi principal :

4. Aux termes de l'article L. 311-6 du code des relations entre le public et l'administration : " Ne sont communicables qu'à l'intéressé les documents administratifs : / 1° Dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée, au secret médical et au secret des affaires, lequel comprend le secret des procédés, des informations économiques et financières et des stratégies commerciales ou industrielles et est apprécié en tenant compte, le cas échéant, du fait que la mission de service public de l'administration mentionnée au premier alinéa de l'article L. 300-2 est soumise à la concurrence ; / (...) ".

5. En premier lieu, il ressort de la procédure suivie devant le tribunal administratif que la question du caractère communicable, eu égard en particulier à la protection du secret des affaires résultant des dispositions de l'article L. 311-6 du code des relations entre le public et l'administration, citées au point précédent, du document daté et signé, attestant que les aéronefs définitifs ou de transition précisément spécifiés seraient bien mis à la disposition de la société HBG France à la date qu'elle a mentionnée, a été discutée devant les juges du fond. Par suite, la société SAF Hélicoptères n'est pas fondée à soutenir que les moyens du pourvoi seraient nouveaux en cassation et, par voie de conséquence, inopérants.

6. En second lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'en application des dispositions du point 6.1 du règlement de consultation du marché, dans le cas où les appareils proposés dans l'offre du candidat ne seraient pas encore inscrits dans sa flotte, il doit présenter, à l'appui de son offre, un " document sincère et véritable produit par le vendeur ou le loueur, dûment daté et signé par ce dernier, attestant que les aéronefs définitifs ou de transition précisément spécifiés seront bien mis à sa disposition à la date qu'il mentionnera ". Un tel document comprend nécessairement des éléments révélateurs de la stratégie commerciale de l'entreprise candidate, concernant notamment le choix de son fournisseur, les modèles d'aéronefs retenus et leur mode de financement.

7. Par suite, en jugeant qu'il ne ressortait pas des dispositions du point 6.1 du règlement de la consultation que le document en litige comprenait des informations couvertes par le secret des affaires, le tribunal administratif de la Guyane a commis une erreur de qualification juridique des faits et, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen du pourvoi, la société HBG France est fondée à demander l'annulation dans cette mesure du jugement qu'elle attaque.

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler dans cette mesure l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

9. Il résulte de ce qui a été dit au point 6 que le document en litige, qui est couvert par le secret des affaires, n'est pas communicable à des tiers. Par suite, la demande de la société SAF Hélicoptères tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le centre hospitalier de Cayenne Andrée Rosemon a refusé de lui communiquer ce document et à ce qu'il soit enjoint au centre hospitalier de le lui communiquer dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, doit être rejetée.

Sur la requête aux fins de sursis à exécution :

10. Il résulte de ce qui a été dit précédemment qu'il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la société HBG France tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de la Guyane.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société SAF Hélicoptères, la somme de 3 000 euros, à verser à la société HBG France, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la société HBG France, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 12 décembre 2024 du tribunal administratif de la Guyane est annulé en tant qu'il a annulé la décision implicite du centre hospitalier de Cayenne Andrée Rosemon refusant la communication à la société SAF Hélicoptères du document daté et signé, attestant que les aéronefs définitifs ou de transition précisément spécifiés seraient bien mis à la disposition de la société HBG France à la date mentionnée par celle-ci et enjoint au centre hospitalier de communiquer ce document à la société SAF Hélicoptères.

Article 2 : Les conclusions présentées devant le tribunal administratif de la Guyane par la société SAF Hélicoptères tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le centre hospitalier de Cayenne Andrée Rosemon a refusé de lui communiquer le document litigieux et à ce qu'il soit enjoint au centre hospitalier de le lui communiquer dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, sont rejetées.

Article 3 : Le pourvoi incident de la société SAF Hélicoptères est rejeté.

Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 502333 de la société HBG France.

Article 5 : La société SAF Hélicoptères versera à la société HBG France une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 7 : La présente décision sera notifiée à la société HBG France et à la société SAF Hélicoptères.

Copie en sera adressée au centre hospitalier de Cayenne Andrée Rosemon.

Délibéré à l'issue de la séance du 10 juillet 2025 où siégeaient : M. Bertrand Dacosta, président de chambre, présidant ; Mme Rozen Noguellou, conseillère d'Etat et M. Philippe Bachschmidt, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.

Rendu le 31 juillet 2025.

Le président :

Signé : M. Bertrand Dacosta

Le rapporteur :

Signé : M. Philippe Bachschmidt

La secrétaire :

Signé : Mme Marie-Léandre Monnerville


Synthèse
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 501474
Date de la décision : 31/07/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 31 jui. 2025, n° 501474
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Philippe Bachschmidt
Rapporteur public ?: Mme Esther de Moustier
Avocat(s) : SAS BOULLOCHE, COLIN, STOCLET ET ASSOCIÉS ; SCP FOUSSARD, FROGER ; SCP WAQUET, FARGE, HAZAN, FELIERS

Origine de la décision
Date de l'import : 18/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:501474.20250731
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award