Vu la procédure suivante :
Par un mémoire et un mémoire en réplique, enregistrés les 6 mai et 1er juillet 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 et à l'appui de sa requête tendant à l'annulation pour excès de pouvoir des décrets n° 2025-197 du 27 février 2015 relatif aux règles de rémunération de certains agents publics placés en congé de maladie ordinaire ou en congé de maladie et n° 2025-198 du 27 février 2025 relatif à la rémunération maintenue en congé de maladie pour certains agents publics, le syndicat Action et Démocratie demande au Conseil d'Etat de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions de l'article 189 de la loi n° 2025-127 du 14 février 2025 de finances pour 2025 et de l'article L. 822-3 du code général de la fonction publique, dans sa rédaction issue de cet article.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
- le code général de la fonction publique ;
- le code du travail ;
- la loi n° 2025-127 du 14 février 2025 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Benoît Chatard, auditeur,
- les conclusions de M. Bastien Lignereux, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SAS Boucard, Capron, Maman, avocat du syndicat Action et Démocratie ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ". Il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.
2. L'article 189 de la loi du 14 février 2025 de finances pour 2025 a modifié l'article L. 822-3 du code général de la fonction publique pour prévoir que le fonctionnaire en congé de maladie perçoit désormais, pendant les trois premiers mois de son congé, 90 % de son traitement au lieu de l'intégralité de ce dernier. Les II, III et IV de cet article étendent l'application de cette règle aux militaires, aux fonctionnaires des communes et des groupements de communes de la Polynésie française ainsi que de leurs établissements publics administratifs et aux agents des administrations parisiennes. Par la suite, les deux décrets du 27 février 2025 dont le syndicat requérant demande l'annulation pour excès de pouvoir ont modifié, pour différentes catégories d'agents publics, les règles de maintien de la rémunération durant les premiers mois du congé de maladie ordinaire ou du congé de maladie en retenant le même taux de remplacement.
3. En premier lieu, si le syndicat Action et Démocratie soutient que les dispositions de l'article 189 de la loi du 14 février 2025 de finances pour 2025 et de l'article L. 822-3 du code général de la fonction publique, dans sa rédaction issue de cet article, n'avaient pas leur place dans une loi de finances et ont été adoptées selon une procédure irrégulière, de tels griefs ne peuvent être invoqués à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité sur le fondement de l'article 61-1 de la Constitution.
4. En second lieu, le syndicat requérant soutient que les dispositions critiquées portent atteinte au principe d'égalité devant la loi dès lors qu'elles ne rendent pas applicables aux fonctionnaires civils qu'elles régissent, en vue de la limitation, de la compensation ou de l'indemnisation des pertes de rémunération imputables à un arrêt de travail pour maladie, certaines des règles applicables aux salariés du secteur privé. Toutefois, les fonctionnaires, qui se voient appliquer des règles différentes en matière de droits sociaux et de congés de maladie, sont à cet égard dans une situation différente de celle des salariés du secteur privé. Si le syndicat requérant soutient que les dispositions qu'il conteste portent également atteinte au principe d'égalité devant la loi en tant qu'elles réduiraient l'indemnisation des femmes placées en congé de maladie pendant tout ou partie de leur grossesse, il n'assortit pas son grief des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le sérieux. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance, par les dispositions contestées, du principe constitutionnel d'égalité devant la loi et d'un " principe de non-discrimination ", doit être écarté.
5. Il résulte de ce qui précède que la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par le syndicat requérant, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux.
6. Par suite, il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée.
D E C I D E :
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Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par le syndicat Action et Démocratie.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au syndicat Action et Démocratie, au Premier ministre et au ministre de l'action publique, de la fonction publique et de la simplification.
Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles.
Délibéré à l'issue de la séance du 8 juillet 2025 où siégeaient : Mme Anne Egerszegi, présidente de chambre, présidant ; M. Nicolas Polge, conseiller d'Etat et M. Benoît Chatard, auditeur-rapporteur.
Rendu le 28 juillet 2025.
La présidente :
Signé : Mme Anne Egerszegi
Le rapporteur :
Signé : M. Benoît Chatard
Le secrétaire :
Signé : M. Brian Bouquet
La République mande et ordonne au ministre de l'action publique, de la fonction publique et de la simplification en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :