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28/07/2025 | FRANCE | N°499919

France | France, Conseil d'État, 9ème chambre, 28 juillet 2025, 499919


Vu la procédure suivante :



La société Eglantine a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2019 à 2021 dans les rôles de la commune de La Celle Saint-Cloud (Yvelines). Par un jugement n° 2206677 du 10 octobre 2024, ce tribunal a rejeté sa demande.



Par une ordonnance n° 24VE03303 du 20 décembre 2024, la présidente de la cour administrative d'appel de Versailles a transmis au Co

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Vu la procédure suivante :

La société Eglantine a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2019 à 2021 dans les rôles de la commune de La Celle Saint-Cloud (Yvelines). Par un jugement n° 2206677 du 10 octobre 2024, ce tribunal a rejeté sa demande.

Par une ordonnance n° 24VE03303 du 20 décembre 2024, la présidente de la cour administrative d'appel de Versailles a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi, enregistré au greffe de cette cour le 16 décembre 2024, formé par la société Eglantine contre ce jugement.

Par ce pourvoi et un mémoire complémentaire, enregistré le 23 mai 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Eglantine demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) de condamner l'Etat aux dépens.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Benoît Chatard, auditeur,

- les conclusions de M. Bastien Lignereux, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Richard, avocat de la société Eglantine ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Eglantine est propriétaire d'une parcelle dans la commune de La Celle Saint-Cloud (Yvelines) sur laquelle elle a fait construire une maison d'habitation à raison de laquelle elle a été assujettie à la taxe foncière sur les propriétés bâties au titre des années 2019 à 2021, dont elle a demandé le dégrèvement en application de l'article 1389 du code général des impôts. La société Eglantine demande l'annulation du jugement du tribunal administratif de Versailles qui a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". Il ressort de l'examen de la minute du jugement attaqué que celle-ci comporte les signatures du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier d'audience. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait irrégulier, faute pour la minute d'être revêtue des signatures requises, ne peut qu'être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, aux termes du I de l'article 1389 du code général des impôts : " Les contribuables peuvent obtenir le dégrèvement de la taxe foncière en cas de vacances d'une maison normalement destinée à la location (...), à partir du premier jour du mois suivant celui du début de la vacance (...) jusqu'au dernier jour du mois au cours duquel la vacance (...) a pris fin. / Le dégrèvement est subordonné à la triple condition que la vacance (...) soit indépendante de la volonté du contribuable, qu'elle ait une durée de trois mois au moins et qu'elle affecte soit la totalité de l'immeuble, soit une partie susceptible de location (...) séparée ".

4. Ces dispositions subordonnent le dégrèvement de la taxe foncière sur les propriétés bâties à la condition, notamment, que la vacance de l'immeuble normalement destiné à la location soit indépendante de la volonté du propriétaire, le caractère involontaire de la vacance s'appréciant eu égard aux circonstances dans lesquelles cette vacance est intervenue et aux démarches accomplies par le propriétaire, selon les possibilités qui lui étaient offertes, en fait comme en droit, pour la prévenir ou y mettre fin.

5. En second lieu, aux termes de l'article L. 231-6 du code de la construction et de l'habitation, applicable à tout contrat de construction de maison individuelle : " I.- La garantie de livraison (...) couvre le maître de l'ouvrage, à compter de la date d'ouverture du chantier, contre les risques d'inexécution ou de mauvaise exécution des travaux prévus au contrat, à prix et délais convenus. / (...) / II.- Dans le cas où le garant constate que le délai de livraison n'est pas respecté ou que les travaux nécessaires à la levée des réserves formulées à la réception ne sont pas réalisés, il met en demeure sans délai le constructeur soit de livrer l'immeuble, soit d'exécuter les travaux. / (...) / III.- Dans les cas prévus au paragraphe II ci-dessus et faute pour le constructeur ou l'administrateur de procéder à l'achèvement de la construction, le garant doit désigner sous sa responsabilité la personne qui terminera les travaux (...) ". Ces dispositions ayant pour objet de protéger le maître de l'ouvrage sans créer aucune obligation à sa charge, il est loisible à celui-ci d'effectuer lui-même ou de faire effectuer les travaux nécessaires, en dispensant le garant de son obligation de rechercher un constructeur, sans perdre ses droits à obtenir du garant le financement des travaux.

6. Il ressort des énonciations du jugement attaqué que, pour rejeter les conclusions de la société Eglantine tendant à ce que lui soit accordé, en application des dispositions de l'article 1389 du code général des impôts citées au point 3, le dégrèvement des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties en litige, au motif que le local en cause, destiné à la location, était inoccupé du fait de graves malfaçons rendant nécessaires des travaux incompatibles avec une occupation locative simultanée et qui, malgré les procédures contentieuses civiles entreprises par la société, n'avaient pas encore été réalisés par le garant de livraison de cette maison individuelle, le tribunal administratif a estimé que la société Eglantine ne justifiait pas qu'elle était contrainte d'attendre l'issue des procédures engagées devant les tribunaux judiciaires pour engager elle-même les travaux destinés à réparer les désordres constatés, et que n'ayant entrepris aucune démarche pour chercher à mettre en location ce bien, fût-ce à un prix minoré, elle ne rapportait pas la preuve, qui lui incombait, que la vacance du logement ne résultât pas de son fait. En statuant ainsi, et alors que le moyen tiré de ce que le coût des travaux nécessaires excédait les capacités de financement de la société Eglantine est nouveau en cassation, et par suite inopérant, le tribunal n'a ni dénaturé les pièces du dossier ni commis, notamment au regard des dispositions du code de la construction et de l'habitation citées au point 5, d'erreur de droit.

7. Il résulte de ce qui précède que la société Eglantine n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque.

8. Les dispositions des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative font respectivement obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande la société Eglantine au titre de l'article L. 761-1 et, en tout état de cause, à ce que l'Etat soit condamné aux dépens.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la société Eglantine est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Eglantine et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré à l'issue de la séance du 8 juillet 2025 où siégeaient : Mme Anne Egerszegi, présidente de chambre, présidant ; M. Nicolas Polge, conseiller d'Etat et M. Benoît Chatard, auditeur-rapporteur.

Rendu le 28 juillet 2025.

La présidente :

Signé : Mme Anne Egerszegi

Le rapporteur :

Signé : M. Benoît Chatard

Le secrétaire :

Signé : M. Brian Bouquet

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :


Synthèse
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 499919
Date de la décision : 28/07/2025
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 28 jui. 2025, n° 499919
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Benoît Chatard
Rapporteur public ?: M. Bastien Lignereux
Avocat(s) : SCP RICHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 20/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:499919.20250728
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