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21/07/2025 | FRANCE | N°500103

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 21 juillet 2025, 500103


Vu la procédure suivante :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'État à lui verser une somme de 201 750 euros en réparation des préjudices subis du fait de la privation illégale de son permis de conduire pendant plus de onze ans et des mentions erronées figurant sur le relevé intégral des informations relatives à ce permis. Par un jugement n° 2208740 du 25 octobre 2024, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif a condamné l'Etat à lui verser une somme de 20 000 euros en réparation de ces p

réjudices.



Par un pourvoi enregistré le 26 décembre 2024 au ...

Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'État à lui verser une somme de 201 750 euros en réparation des préjudices subis du fait de la privation illégale de son permis de conduire pendant plus de onze ans et des mentions erronées figurant sur le relevé intégral des informations relatives à ce permis. Par un jugement n° 2208740 du 25 octobre 2024, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif a condamné l'Etat à lui verser une somme de 20 000 euros en réparation de ces préjudices.

Par un pourvoi enregistré le 26 décembre 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur demande au Conseil d'Etat d'annuler ce jugement.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la route ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Christophe Barthélemy, conseiller d'Etat en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 223-1 du code de la route : " Le permis de conduire est affecté d'un nombre de points. Celui-ci est réduit de plein droit si le titulaire du permis a commis une infraction pour laquelle cette réduction est prévue. (...) / Lorsque le nombre de points est nul, le permis perd sa validité (...) ".

2. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que, par un jugement du 23 novembre 2010 devenu définitif, le tribunal administratif de Paris a annulé les deux décisions par lesquelles le ministre de l'intérieur avait retiré respectivement quatre et trois points du capital de points affecté au permis de conduire de M. B..., à la suite d'infractions au code de la route commises les 2 et 25 août 2006. Par un jugement du 17 décembre 2021 également devenu définitif, le tribunal administratif a annulé la décision implicite de rejet opposée à la demande de M. B... du 7 juin 2018 tendant à " l'effacement " sur le relevé intégral des informations relatives à son permis, de la mention de ces deux retraits de points ainsi que de la mention de la décision référencée " 48 S " notifiée le 10 avril 2007 et enjoint au ministre de l'intérieur, d'une part, de procéder à l'effacement de ces mentions et, d'autre part, de procéder à un nouveau calcul du solde de points affecté au permis de conduire de M. B.... Le ministre de l'intérieur se pourvoit en cassation contre le jugement du 27 octobre 2024 par lequel le tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à indemniser M. B... du préjudice qu'il a subi du fait de la privation illégale de son permis de conduire pendant une période de plus de onze ans, entre le jugement du 23 novembre 2010 et le 9 février 2022, date à laquelle le système national des permis de conduire a crédité le permis de conduire de M. B... de neuf points et à laquelle le tribunal administratif a considéré, en conséquence, que le jugement du 17 décembre 2021 a été entièrement exécuté.

3. Pour prononcer la condamnation de l'Etat, le tribunal administratif de Paris a constaté que le refus du ministre de l'intérieur de procéder, en dépit du jugement du 23 novembre 2010, à l'" effacement " sur le relevé intégral des informations relatives au permis de conduire de l'intéressé, des mentions relatives aux infractions commises les 2 et 25 août 2006 et à la décision référencée " 48 S " considérée comme notifiée le 10 avril 2007, est constitutif d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat et en a déduit que M. B... devait être indemnisé du préjudice qu'il a subi du fait de la privation illégale de son permis de conduire, sans se prononcer sur les moyens en défense, soulevés par le ministre de l'intérieur, tirés de ce que le lien de causalité entre la faute retenue et le préjudice subi par l'intéressé ne pouvait être regardé comme constitué, dès lors, d'une part, que l'annulation d'un retrait de points pour vice de procédure ne constitue pas la cause du préjudice résultant de ce retrait de points si la réalité de l'infraction commise par le titulaire du permis n'est pas contestée, d'autre part, de ce qu'eu égard aux infractions commises par l'intéressé après le jugement du 23 novembre 2010, son permis aurait, même si les décisions fautives n'étaient pas intervenues, donné lieu à une nouvelle décision constatant son invalidité pour solde de points nul ainsi qu'il lui avait été indiqué par une lettre du 18 mars 2011 et confirmée par une seconde lettre du 3 décembre 2018, et, enfin, que les condamnations pénales pour défaut de permis de conduire dont M. B... a fait l'objet lui sont exclusivement imputables dès lors qu'il a délibérément choisi de conduire en étant dépourvu de permis et que ses interpellations ont été justifiées par son comportement dangereux sur la route. Par suite et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de son pourvoi, le ministre de l'intérieur est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond, par application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

5. Il résulte de l'instruction, et notamment des relevés intégraux des informations relatives au permis de conduire de M. B... successifs versés au dossier, qu'en tenant compte de la reconstitution de sept points à son capital de points en application du jugement du 17 décembre 2021 et eu égard aux nouvelles infractions au code de la route commises après le 25 août 2006, son solde de points est redevenu nul le 19 mai 2011. Il résulte également des pièces du dossier que M. B..., qui n'a ni contesté la décision constatant l'invalidité de son permis de conduire qui lui a été notifiée le 10 avril 2007, ni demandé la restitution du titre de conduite qu'il a remis entre les mains du préfet du Calvados le 30 octobre 2008, ni passé de nouveau les épreuves du permis de conduire, a commis de nombreuses infractions au code de la route entre le 19 mai 2011 et le 9 février 2022, que les poursuites pénales auxquelles ces infractions ont donné lieu étaient pour la plupart indépendantes de l'infraction de conduite malgré l'invalidation du permis de conduire et, enfin, que M. B... a toujours été renvoyé des fins de la poursuite de ce dernier chef. Dans ces conditions, le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que l'absence d'" effacement " avant le 9 février 2022, sur le relevé intégral des informations relatives au permis de conduire de l'intéressé, des décisions de retrait de points relatifs aux infractions commises les 2 et 25 août 2006 et de la décision référencée " 48 S " considérée comme notifiée le 10 avril 2007, déclarée illégale par le jugement du tribunal administratif du 17 décembre 2021, n'est, en tout de cause, pas à l'origine du préjudice invoqué par le requérant.

6. Il suit de là que la requête de M. B... doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 25 octobre 2024 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à M. A... B....

Délibéré à l'issue de la séance du 26 juin 2025 où siégeaient : M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre, présidant ; M. Alain Seban, conseiller d'Etat et M. Christophe Barthélemy, conseiller d'Etat en service extraordinaire-rapporteur.

Rendu le 21 juillet 2025.

Le président :

Signé : M. Jean-Philippe Mochon

Le rapporteur :

Signé : M. Christophe Barthélemy

Le secrétaire :

Signé : M. Bernard Longieras


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 500103
Date de la décision : 21/07/2025
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 21 jui. 2025, n° 500103
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Christophe Barthélemy
Rapporteur public ?: M. Florian Roussel

Origine de la décision
Date de l'import : 18/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:500103.20250721
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