La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/06/2025 | FRANCE | N°499763

France | France, Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 13 juin 2025, 499763


Vu la procédure suivante :



Par un mémoire, enregistré le 17 mars 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 et à l'appui de son pourvoi tendant à l'annulation de l'ordonnance du président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Douai n° 24DA01246 du 16 octobre 2024 la société FRF2 Apollo demande au Conseil d'Etat de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des d

ispositions du II de l'article 1518 ter du code général des impôts.



...

Vu la procédure suivante :

Par un mémoire, enregistré le 17 mars 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 et à l'appui de son pourvoi tendant à l'annulation de l'ordonnance du président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Douai n° 24DA01246 du 16 octobre 2024 la société FRF2 Apollo demande au Conseil d'Etat de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions du II de l'article 1518 ter du code général des impôts.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Réda Wadjinny-Green, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Gury et Maître, avocat de la société FRF2 Apollo ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ". Il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.

2. L'article 1498 du code général des impôts prévoit que la valeur locative des locaux professionnels est déterminée en fonction de l'état du marché locatif ou, à défaut, par référence aux autres critères prévus par cet article, et qu'elle tient compte de la nature, de la destination, de l'utilisation, des caractéristiques physiques, de la situation et de la consistance de la propriété ou fraction de propriété considérée. À cette fin, il est constitué des secteurs d'évaluation regroupant les communes ou parties de communes qui, dans chaque département, présentent un marché locatif homogène et les locaux professionnels sont classés par sous-groupes, définis en fonction de leur nature et de leur destination, et, à l'intérieur de ces sous-groupes, par catégorie, en fonction de leur utilisation et de leurs caractéristiques physiques. Dans chaque secteur d'évaluation, les tarifs par mètre carré sont déterminés à partir des loyers moyens constatés par catégorie de propriétés. La valeur locative de chaque propriété bâtie est obtenue par application à sa surface pondérée du tarif par mètre carré correspondant à sa catégorie, modulé, le cas échéant, par l'application d'un coefficient de localisation. Le dernier alinéa du 2 du B du II de l'article 1498 prévoit ainsi que " les tarifs par mètre carré peuvent être majorés de 1,1, 1,15, 1,2 ou 1,3 ou minorés de 0,7, 0,8, 0,85 ou 0,9, par application d'un coefficient de localisation destiné à tenir compte de la situation particulière de la parcelle d'assise de la propriété au sein du secteur d'évaluation ".

3. Aux termes du II de l'article 1518 ter du code général des impôts : " Au cours des troisième et cinquième années qui suivent celle du renouvellement général des conseils municipaux, la commission départementale des valeurs locatives mentionnée à l'article 1650 B peut se réunir afin de modifier l'application des coefficients de localisation mentionnés au 2 du B du II de l'article 1498 après avis des commissions communales ou intercommunales des impôts directs respectivement mentionnées aux articles 1650 et 1650 A. Les décisions de la commission sont publiées et notifiées dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat et sont transmises à l'administration fiscale avant le 31 décembre de l'année précédant celle de leur prise en compte pour l'établissement des bases ". Selon les dispositions du III de ce même article : " A.- L'année qui suit le renouvellement général des conseils municipaux, il est procédé à une actualisation consistant, dans les conditions prévues à l'article 1504, en la délimitation des secteurs d'évaluation mentionnés au 1 du B du II de l'article 1498, en la fixation des tarifs déterminés conformément au 2 du même B et en la définition des parcelles auxquelles s'applique un coefficient de localisation mentionné au même 2 ". Par ailleurs, l'article 1504 du même code dispose que : " I. - 1. Pour la détermination des valeurs locatives des propriétés et fractions de propriétés mentionnées au I de l'article 1498, la commission départementale des valeurs locatives prévue à l'article 1650 B dispose d'un délai de trois mois à compter de la date à laquelle lui sont remis les avant-projets élaborés par l'administration fiscale pour établir des projets de : / a) Délimitation des secteurs d'évaluation prévus au 1 du B du II de l'article 1498 ; / b) Tarifs déterminés en application du 2 du même B ; / c) Définition des parcelles auxquelles s'applique le coefficient de localisation mentionné au même 2 ". Enfin, l'article 1518 F du même code prévoit que les décisions prises en application des articles 1504 et 1518 ter ne peuvent être contestées par la voie de l'exception à l'occasion d'un litige relatif à la valeur locative d'une propriété bâtie.

4. Aux termes de l'article 16 de la Déclaration de des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 : " Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution ". Il résulte de ces dispositions qu'il ne doit pas être porté d'atteintes substantielles au droit des personnes intéressées d'exercer un recours effectif devant une juridiction.

5. Il résulte des dispositions contestées du II de l'article 1518 ter du code général des impôts citées au point 3 qu'à chacune des échéances qu'elles prévoient, la commission départementale des valeurs locatives des locaux professionnels apprécie si la situation particulière des parcelles au sein des secteurs d'évaluation justifie l'application d'un coefficient de localisation majorant ou minorant le tarif par mètre carré retenu par catégorie de propriétés bâties dans chacun de ces secteurs. A l'occasion de chacune de ces échéances, contrairement à ce que soutient la société FRF2 Apollo, la modification par la commission du coefficient de localisation appliqué à une parcelle donnée, la décision de maintenir inchangé ce coefficient ou de réitérer l'absence d'application de tout coefficient à cette parcelle constituent des décisions susceptibles de faire l'objet, dans le délai de recours contentieux, d'un recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif. Dans ces conditions, les dispositions contestées ne sauraient être regardées comme portant une atteinte au droit des personnes intéressées d'exercer un recours effectif devant une juridiction. Par suite, la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux.

6. Ainsi, sans qu'il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, le moyen tiré de ce que les dispositions contestées du II de l'article 1518 ter du code général des impôts porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution doit être écarté.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la société FRF2 Apollo.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société FRF2 Apollo et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et au Premier ministre.

Délibéré à l'issue de la séance du 4 juin 2025 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta, Mme Anne Egerszegi, présidents de chambre ; M. Nicolas Polge, M. Vincent Daumas, M. Olivier Yeznikian, Mme Rozen Noguellou, conseillers d'Etat, M. Jérôme Goldenberg, conseiller d'Etat en service extraordinaire et M. Réda Wadjinny-Green, maître des requêtes-rapporteur.

Rendu le 13 juin 2025.

Le président :

Signé : M. Rémy Schwartz

Le rapporteur :

Signé : M. Réda Wadjinny-Green

La secrétaire :

Signé : Mme Nathalie Planchette

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :


Synthèse
Formation : 9ème - 10ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 499763
Date de la décision : 13/06/2025
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 13 jui. 2025, n° 499763
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Réda Wadjinny-Green
Rapporteur public ?: Mme Céline Guibé
Avocat(s) : SARL GURY & MAITRE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:499763.20250613
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award