Vu les procédures suivantes :
1° Sous le n° 502859, par une requête et quatre nouveaux mémoires, enregistrés les 27 mars, 13 et 14 mai 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle la ministre du travail, de la santé et des solidarités a refusé d'abroger les dispositions figurant à l'article R. 3353-1 du code de la santé publique.
2° Sous le n° 502994, par une requête et cinq nouveaux mémoires, enregistrés le 29 mars, 12 mai et 14 mai 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle le Premier ministre a refusé d'abroger les dispositions figurant à l'article R. 3353-1 du code de la santé publique.
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de la santé publique ;
- la décision du Conseil constitutionnel n° 2012-253 QPC du 8 juin 2012 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Pierre Boussaroque, conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Mathieu Le Coq, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Par deux requêtes qu'il y a lieu de joindre, M. A... demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir les décisions implicites par lesquelles le Premier ministre et la ministre du travail, de la santé et des solidarités ont rejeté sa demande tendant à l'abrogation des dispositions de l'article R. 3353-1 du code de la santé publique aux termes desquelles : " Le fait de se trouver en état d'ivresse manifeste dans les lieux mentionnés à l'article L. 3341-1 est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la 2ème classe ".
Sur les questions prioritaires de constitutionnalité :
2. A l'appui de chacun de ses recours pour excès de pouvoir, M. A... demande au Conseil d'Etat de transmettre au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'articles L. 3341-1 du code de la santé publique.
3. Aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ". Il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.
4. Aux termes de l'article L. 3341-1 du code de la santé publique : " Une personne trouvée en état d'ivresse dans les lieux publics est, par mesure de police, conduite à ses frais par des agents de la police nationale, des militaires de la gendarmerie nationale, des agents de police municipale ou des gardes champêtres, après avoir fait procéder à un examen médical, réalisé sur le territoire communal ou en dehors de celui-ci, attestant que son état de santé ne s'y oppose pas, dans le local de police nationale ou de gendarmerie le plus voisin ou dans une chambre de sûreté, pour y être retenue jusqu'à ce qu'elle ait recouvré la raison ".
5. Ces dispositions présentent un lien avec le litige et doivent être regardées comme lui étant applicables au sens et pour l'application des dispositions précitées de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 dans la seule mesure du renvoi opéré par l'article R. 3353-1 du code de la santé publique, cité au point 1, aux lieux mentionnés à l'article L. 3341-1 du même code. Toutefois, le membre de phrase " dans les lieux publics " a été déclaré conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel, tout comme l'article L. 3341-1 du code de la santé publique lui-même d'ailleurs dans son ensemble dans sa rédaction alors en vigueur sous la réserve qu'il a énoncée, dans les motifs et le dispositif de sa décision n° 2012-253 QPC du 8 juin 2012.
6. Ainsi, sans qu'il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, le moyen tiré de ce que les dispositions de l'article L. 3341-1 du code de la santé publique portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution doit être écarté.
Sur les autres moyens :
7. M. A... ne peut utilement faire valoir que les dispositions de l'article R. 3353-1 du code de la santé publique institueraient une mesure privative de liberté contraire aux stipulations de l'article 5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et porteraient une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie familiale protégé par les stipulations de l'article 8 de la même convention dès lors que ces dispositions se bornent à instituer une amende contraventionnelle qui ne comporte aucune incidence sur les droits protégés par ces stipulations.
8. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur leur recevabilité, les requêtes de M. A... ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
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Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel les questions prioritaires de constitutionnalité soulevées par M. A....
Article 2 : Les requêtes de M. A... sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. B... A....
Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel, au Premier ministre et à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles.
Délibéré à l'issue de la séance du 15 mai 2025 où siégeaient : Mme Gaëlle Dumortier, présidente de chambre, présidant ; M. Jean-Luc Nevache, conseiller d'Etat et M. Pierre Boussaroque, conseiller d'Etat-rapporteur.
Rendu le 22 mai 2025.
La présidente :
Signé : Mme Gaëlle Dumortier
Le rapporteur :
Signé : M. Pierre Boussaroque
La secrétaire :
Signé : Mme Paule Troly