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19/05/2025 | FRANCE | N°498975

France | France, Conseil d'État, 3ème chambre, 19 mai 2025, 498975


Vu la procédure suivante :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler la saisie administrative à tiers détenteur dont elle a fait l'objet au bénéfice de la commune d'Hermies, de la décharger de l'obligation de payer la somme en cause et d'enjoindre à cette commune de régulariser sa situation en lui remboursant la somme de 447,17 euros sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du vingtième jour suivant la notification du jugement à intervenir et, d'autre part, de condamner la commune d'Hermies à lui v

erser la somme de 500 euros en réparation des autres préjudices financie...

Vu la procédure suivante :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler la saisie administrative à tiers détenteur dont elle a fait l'objet au bénéfice de la commune d'Hermies, de la décharger de l'obligation de payer la somme en cause et d'enjoindre à cette commune de régulariser sa situation en lui remboursant la somme de 447,17 euros sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du vingtième jour suivant la notification du jugement à intervenir et, d'autre part, de condamner la commune d'Hermies à lui verser la somme de 500 euros en réparation des autres préjudices financiers et moraux qu'elle estime avoir subis du fait de cette saisie à tiers détenteur. Par un jugement n° 2105920 du 14 juin 2024, ce tribunal a rejeté ses conclusions indemnitaires comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître et a rejeté le surplus de sa demande.

Par un pourvoi et un mémoire complémentaire, enregistrés les 19 novembre 2024 et 19 février 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Hermies la somme de 4 000 euros à verser à la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme A..., au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

-

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Elodie Fourcade, maîtresse des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de Mme B... A... ;

Considérant ce qui suit :

1. D'une part, aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction alors applicable : " Toute partie présente dans une instance devant le tribunal administratif ou qui y a été régulièrement appelée (...) peut interjeter appel contre toute décision juridictionnelle rendue dans cette instance. / Toutefois, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort : / (...) 8° Sauf en matière de contrat de la commande publique sur toute action indemnitaire ne relevant pas des dispositions précédentes, lorsque le montant des indemnités demandées est inférieur au montant déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15 ; / (...) / Par dérogation aux dispositions qui précèdent, en cas de connexité avec un litige susceptible d'appel, les décisions portant sur les actions mentionnées au 8° peuvent elles-mêmes faire l'objet d'un appel (...) ". En vertu de l'article R. 222-14 de ce code, le montant des indemnités visées par le 8° de l'article R. 811-1, déterminé conformément à ce que prévoit l'article R. 222-15, est fixé à 10 000 euros.

2. D'autre part, aux termes de l'article R. 351-4 du même code : " Lorsque tout ou partie des conclusions dont est saisi un tribunal administratif, une cour administrative d'appel ou le Conseil d'Etat relève de la compétence d'une de ces juridictions administratives, le tribunal administratif, la cour administrative d'appel ou le Conseil d'Etat, selon le cas, est compétent, nonobstant les règles de répartition des compétences entre juridictions administratives, pour rejeter les conclusions entachées d'une irrecevabilité manifeste insusceptible d'être couverte en cours d'instance, pour constater qu'il n'y a pas lieu de statuer sur tout ou partie des conclusions ou pour rejeter la requête en se fondant sur l'irrecevabilité manifeste de la demande de première instance ".

3. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a, d'une part, rejeté les conclusions par lesquelles Mme A..., contestant le bien-fondé de la créance, demandait l'annulation de la saisie administrative à tiers détenteur dont elle a fait l'objet au bénéfice de la commune d'Hermies et la décharge de l'obligation de payer la somme en cause et, d'autre part, rejeté comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître sa demande de condamnation de la même commune d'Hermies à lui verser la somme de 500 euros en réparation des autres préjudices financiers et moraux qu'elle estime avoir subis du fait de cette saisie à tiers détenteur.

4. Les conclusions dirigées contre la saisie administrative à tiers détenteur ne présentent pas le caractère de conclusions indemnitaires et ne sont par suite, quel que soit le montant de la somme en litige, pas au nombre de celles sur lesquelles le tribunal administratif se prononce en dernier ressort en application du 8° de l'article R. 811-1 du code de justice administrative. Si les conclusions indemnitaires présentées par Mme A... entrent, quant à elles, dans le champ d'application de ces dispositions et portent sur un montant inférieur à celui déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15 du même code, elles sont en revanche connexes aux conclusions dirigées contre la saisie administrative, dès lors qu'elles tendent à la réparation des conséquences dommageables de son illégalité alléguée. Dans ces conditions, l'ensemble du litige soumis au tribunal administratif était susceptible d'appel et le pourvoi formé par Mme A... contre son jugement présente en réalité le caractère d'une requête devant être portée devant la cour administrative d'appel compétente.

5. Toutefois, aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales : " L'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local pour contester directement devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois à compter de la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuite ".

6. Il est constant que Mme A... a eu connaissance de la saisie administrative litigieuse, par une notification mentionnant les voies et délais de recours, au plus tard le 7 janvier 2021, date à laquelle elle a adressé à la maire d'Hermies un courriel contestant le bien-fondé de la créance. A supposer que ce courriel ait présenté le caractère d'un recours gracieux de nature à interrompre le délai du recours contentieux, la décision implicite par laquelle ce recours gracieux a été rejeté est née, au plus tard, deux mois après la transmission par Mme A... des pièces complémentaires réclamées par la commune, soit le 16 mars 2021. La demande qu'elle a présentée devant le tribunal administratif, le 24 juillet 2021, soit plus de deux mois après cette dernière date, était par suite tardive. Si Mme A... se prévaut d'un autre recours gracieux formé le 22 avril 2021, ce recours n'était susceptible ni de prolonger le délai de recours contentieux initial, qui était déjà échu, ni de prolonger le délai résultant de l'exercice d'un premier recours gracieux.

7. En conséquence et comme l'a d'ailleurs jugé le tribunal administratif de Lille, les conclusions de première instance de Mme A... dirigées contre la saisie administrative étaient manifestement irrecevables. Le Conseil d'Etat est par suite compétent, en application de l'article R. 351-4, pour statuer sur la requête de Mme A... en relevant cette irrecevabilité.

8. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu, pour le Conseil d'Etat, de renvoyer à la cour administrative d'appel de Douai le jugement des seules conclusions indemnitaires de Mme A... et de rejeter le surplus de ses conclusions.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement des conclusions indemnitaires du pourvoi de Mme A... est attribué à la cour administrative d'appel de Douai.

Article 2 : Le surplus des conclusions de Mme A... est rejeté.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme B... A... et au président de la cour administrative d'appel de Douai.

Copie en sera adressée à la commune d'Hermies.

Délibéré à l'issue de la séance du 7 mai 2025 où siégeaient : M. Stéphane Verclytte, président de chambre, présidant ; M. Philippe Ranquet, conseiller d'Etat et Mme Elodie Fourcade, maîtresse des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.

Rendu le 19 mai 2025.

Le président :

Signé : M. Stéphane Verclytte

La rapporteure :

Signé : Mme Elodie Fourcade

La secrétaire :

Signé : Mme Nathalie Martinez-Casanova


Synthèse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 498975
Date de la décision : 19/05/2025
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 19 mai. 2025, n° 498975
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Elodie Fourcade
Rapporteur public ?: Mme Marie-Gabrielle Merloz
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:498975.20250519
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