Vu les procédures suivantes :
Procédure contentieuse antérieure
M. D... A... B... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision 48 SI par laquelle le ministre de l'intérieur a constaté la perte de validité de son permis de conduire pour solde de points nuls, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux, d'annuler les décisions de retrait de points consécutives à plusieurs infractions et d'enjoindre au ministre de lui restituer son permis de conduire. Par un jugement n° 2201028 du 2 mars 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif a annulé ces décisions, enjoint au ministre de procéder à la reconstitution de douze points sur le permis de conduire de M. A... B... et d'en tirer les conséquences sur le droit à conduire de l'intéressé dans un délai d'un mois.
Par une décision n° 473822 du 2 janvier 2024, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a, sur le pourvoi du ministre de l'intérieur et des outre-mer, annulé ce jugement et rejeté la demande de M. A... B....
Recours en révision
Sous le n° 491725, par une requête, enregistrée le 12 févier 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. D... A... B... demande au Conseil d'Etat de réviser la décision du 2 janvier 2024 par laquelle il a annulé le jugement du tribunal administratif de Nancy du 2 mars 2023 et rejeté sa demande.
Il soutient qu'il n'était pas informé de l'obligation de se faire représenter par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation.
Par un courrier du 27 février 2024, notifié le même jour, le greffe de la sixième chambre a invité M. A... B... à régulariser sa requête en la faisant présenter par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation.
Recours en opposition
Sous le n° 492258, par une requête en opposition et un mémoire complémentaire, enregistrés les 29 février et 29 mai 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au Conseil d'Etat :
1°) de déclarer non avenue sa décision n° 473822 du 2 janvier 2024 ;
2°) de rejeter le pourvoi du ministre de l'intérieur et des outre-mer ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- son opposition est recevable dès lors qu'elle a été formée dans le délai de deux mois et qu'il n'a pas produit dans l'instance n° 473822 ;
- contrairement à ce qu'a jugé le Conseil d'Etat, il appartenait au ministre de rapporter la preuve de l'identité du signataire de l'avis de réception du courrier notifiant la décision de retrait de points et d'invalidation de son permis ;
- le dossier contenait des preuves suffisantes du fait qu'il n'était pas le signataire de l'accusé de réception de la décision litigieuse, et que celle-ci ne pouvait, dès lors, être regardée comme lui ayant été notifiée.
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Bruno Bachini, conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Maïlys Lange, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à Me Soltner, avocat de M A... B... ;
Considérant ce qui suit :
1. Les requêtes visées ci-dessus sont dirigées contre une même décision du Conseil d'Etat statuant au contentieux. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.
Sur le recours en révision de M. A... B... :
2. Aux termes de l'article R. 834-1 du code de justice administrative : " Le recours en révision contre une décision contradictoire du Conseil d'Etat ne peut être présenté que dans trois cas : / 1° Si elle a été rendue sur pièces fausses ; / 2° Si la partie a été condamnée faute d'avoir produit une pièce décisive qui était retenue par son adversaire ; / 3° Si la décision est intervenue sans qu'aient été observées les dispositions du présent code relatives à la composition de la formation de jugement, à la tenue des audiences ainsi qu'à la forme et au prononcé de la décision ". Selon l'article R. 834-3 du même code : " Le recours en révision est présenté par le ministère d'un avocat au Conseil d'État, même si la décision attaquée est intervenue sur un pourvoi pour la présentation duquel ce ministère n'est pas obligatoire ". Aux termes du 4° de l'article R. 122-12 du même code : " Le président de la section du contentieux et les présidents de chambre peuvent, par ordonnance : (...) 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens (...) ".
3. Le recours en révision de M. A... B... a été présenté sans le ministère d'un avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation et n'a pas été régularisé malgré l'invitation qui a été adressée au requérant par le secrétariat de la sixième chambre de la section du contentieux le 27 février 2024. Par suite, ce recours est irrecevable et doit être rejeté.
Sur la requête en opposition de M. A... B... :
4. Aux termes de l'article R. 831-1 du code de justice administrative : " Toute personne qui, mise en cause par le Conseil d'Etat, n'a pas produit de défense en forme régulière est admise à former opposition à la décision rendue par défaut, sauf si celle-ci a été rendue contradictoirement avec une partie qui a le même intérêt que la partie défaillante ".
5. Il résulte des énonciations de la décision du Conseil d'Etat, statuant au contentieux, du 2 janvier 2024 que M. A... B... n'a pas produit dans l'instance à la suite de la communication qui lui a été donnée du pourvoi du ministre de l'intérieur et des outre-mer tendant à l'annulation du jugement du 2 mars 2023 du tribunal administratif de Nancy rendu à son bénéfice. La décision du Conseil d'Etat accueillant le pourvoi ayant été rendue par défaut contre lui, M. A... B... est recevable à former opposition. Par suite, il y a lieu de statuer à nouveau sur le pourvoi du ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Sur le pourvoi du ministre de l'intérieur et des outre-mer :
6. Il incombe à l'administration, lorsqu'elle oppose une fin de non-recevoir tirée de la tardiveté d'une action introduite devant une juridiction administrative, d'établir la date à laquelle la décision attaquée a été régulièrement notifiée à l'intéressé. Lorsque le destinataire d'une décision administrative soutient que l'avis de réception d'un pli recommandé portant notification de cette décision à l'adresse qu'il avait lui-même indiquée à l'administration n'a pas été signé par lui, il lui appartient d'établir que le signataire de l'avis n'avait pas qualité pour recevoir le pli en cause.
7. D'une part, dans la mesure où M. A... B... invoque le moyen qu'il avait développé devant le tribunal administratif de Nancy tiré de ce que la décision litigieuse ne peut être regardée comme lui ayant été régulièrement notifiée en raison des actes de vandalisme sur sa boîte aux lettres et de vol de courrier dont il dit être victime et qui a été examiné par le Conseil d'Etat lorsqu'il a statué sur le pourvoi du ministre de l'intérieur et des outre-mer, il y a lieu, par adoption des motifs de la décision du 2 janvier 2024, de juger que le ministre de l'intérieur et des outre-mer était fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nancy du 2 mars 2023 et le rejet de la demande de M. A... B....
8. D'autre part, si M. A... B... soutient, en outre, qu'il ne saurait lui être reproché de n'avoir pas établi qu'il n'est pas le signataire de l'accusé de réception du courrier de notification de la décision litigieuse au motif qu'il appartiendrait à l'administration, et non au destinataire, d'apporter la preuve de l'identité de la personne qui a signé l'accusé de réception, il résulte de ce qui a été dit au point 6 que, dès lors qu'il n'est pas contesté que ce courrier a bien été expédié à l'adresse de M. A... B... et que l'avis de réception a été signé, il appartenait au seul destinataire d'établir que le signataire de l'avis n'avait pas qualité pour recevoir le pli en cause.
9. Il résulte de tout ce qui précède que c'est à bon droit que la décision du 2 janvier 2024 du Conseil d'Etat a annulé le jugement du tribunal administratif de Nancy et rejeté la demande de M. A... B.... Par suite, la requête en opposition de celui-ci n'est pas susceptible d'être accueillie.
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
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Article 1er : Les requêtes n° 491725 et n° 492258 de M. A... B... sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. C... B... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Délibéré à l'issue de la séance du 3 avril 2025 où siégeaient : Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre, présidant ; M. Christophe Pourreau, conseiller d'Etat et M. Bruno Bachini, conseiller d'Etat-rapporteur.
Rendu le 12 mai 2025.
La présidente :
Signé : Mme Isabelle de Silva
Le rapporteur :
Signé : M. Bruno Bachini
La secrétaire :
Signé : Mme Magalie Café