La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/04/2025 | FRANCE | N°495566

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 17 avril 2025, 495566


Vu la procédure suivante :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision référencée " 48 SI " du 16 mai 2023 par laquelle le ministre de l'intérieur et des outre-mer a constaté la perte de validité de son permis de conduire pour solde de points nul, ainsi que les décisions référencées " 48 " portant retrait de points sur ce permis à la suite des infractions commises les 19 février 2016, 6 octobre 2017, 14 novembre 2019, 23 juin, 15 et 30 juillet, 17 et 19 octobre 2021, 17 mai, 19 juin, 6 juillet, 6 août, 28

août et 18 septembre 2022, et d'enjoindre à ce ministre de reconstituer le...

Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision référencée " 48 SI " du 16 mai 2023 par laquelle le ministre de l'intérieur et des outre-mer a constaté la perte de validité de son permis de conduire pour solde de points nul, ainsi que les décisions référencées " 48 " portant retrait de points sur ce permis à la suite des infractions commises les 19 février 2016, 6 octobre 2017, 14 novembre 2019, 23 juin, 15 et 30 juillet, 17 et 19 octobre 2021, 17 mai, 19 juin, 6 juillet, 6 août, 28 août et 18 septembre 2022, et d'enjoindre à ce ministre de reconstituer le capital de points de ce permis. Par un jugement n° 2316509 du 29 avril 2024, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif a, d'une part, annulé les décisions portant retrait de points sur le permis de conduire de M. B... à la suite des infractions commises les 19 février 2016, 6 octobre 2017, 14 novembre 2019, 30 juillet et 17 octobre 2021, 17 mai, 6 août et 18 septembre 2022, d'autre part, enjoint à ce ministre de reconnaître à l'intéressé le bénéfice des points retirés à la suite de ces huit infractions et, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, de réexaminer la situation de M. B... pour en tirer les conséquences sur son capital de points et son droit de conduire, et enfin rejeté le surplus des conclusions dont elle était saisie.

Par un pourvoi enregistré le 28 juin 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur et des outre-mer demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de M. B....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la route ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Christophe Barthélemy, conseiller d'Etat en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Le ministre de l'intérieur et des outre-mer doit être regardé comme demandant l'annulation des articles 1er et 2 du jugement du 29 avril 2024 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé huit décisions référencées " 48 " par lesquelles il a retiré dix points du capital de points du permis de conduire de M. A... B... et lui a enjoint de reconnaître à l'intéressé le bénéfice des points retirés à la suite de ces huit infractions, ainsi que de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement pour en tirer les conséquences sur son capital de points et son droit de conduire.

2. Il résulte des dispositions du quatrième alinéa de l'article R. 223-3 du code de la route que les décisions constatant l'invalidité du permis de conduire pour solde de points nul doivent être notifiées au titulaire du permis de conduire par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. En cas de contestation sur ce point, il incombe à l'administration d'établir qu'une telle notification a été régulièrement adressée au titulaire du permis de conduire et, lorsque le pli contenant cette notification a été renvoyé par le service postal au service expéditeur, de justifier de la régularité des opérations de présentation à l'adresse du destinataire. La preuve qui incombe ainsi à l'administration peut résulter soit des mentions précises, claires et concordantes figurant sur les documents, le cas échéant électroniques, remis à l'expéditeur conformément à la réglementation postale soit, à défaut, d'une attestation de l'administration postale ou d'autres éléments de preuve établissant la délivrance par le préposé du service postal d'un avis de passage prévenant le destinataire de ce que le pli est à sa disposition au bureau de poste. Compte tenu des modalités de présentation des plis recommandés prévues par la réglementation postale, doit être regardé comme portant des mentions précises, claires et concordantes suffisant à constituer la preuve d'une notification régulière le pli recommandé retourné à l'administration auquel est rattaché un volet " avis de réception " sur lequel a été apposée la date de vaine présentation du courrier et qui porte, sur l'enveloppe ou l'avis de réception, l'indication du motif pour lequel il n'a pu être remis.

3. Il résulte des termes du jugement attaqué que, pour écarter la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'intérieur et des outre-mer, tirée de la tardiveté de la demande motif pris de ce que la notification de la décision " 48 SI " ne pouvait être regardée comme régulière, le tribunal administratif a retenu que les mentions apposées sur l'avis de réception attaché au pli recommandé contenant cette décision ne permettaient pas d'établir la date à laquelle ce pli avait été présenté au domicile de M. B.... Il ressort toutefois des pièces du dossier qui lui était soumis que, si l'autocollant " pli avisé et non réclamé ", correspondant au motif de non distribution, a été apposé sur la partie de l'avis de réception attaché au pli recommandé où figure la date de vaine présentation au domicile de l'intéressé, occultant celle-ci, le ministre avait également produit un document intitulé " Détails de l'acheminement ", émanant des services postaux, qui établit que l'avis de passage a été déposé par le préposé le 5 juin 2023. Dès lors, le tribunal administratif a dénaturé les pièces du dossier. Le ministre de l'intérieur et des outre-mer est, par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen du pourvoi, fondé à demander l'annulation des articles 1er et 2 du jugement qu'il attaque.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond dans cette mesure, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

5. D'une part, il résulte de ce qui est dit au point 3 que la décision référencée " 48 SI " du ministre de l'intérieur du 16 mai 2023 constatant la perte de validité du permis de conduire de M. B... doit être regardée comme ayant été régulièrement notifiée à l'intéressé le 5 juin 2023. Le délai de recours contentieux était ainsi expiré lorsque M. B... a, le 11 décembre 2023, introduit sa demande devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise. Cette demande tardive est ainsi irrecevable et ne peut qu'être rejetée.

6. D'autre part, des conclusions tendant à l'annulation d'une décision du ministre de l'intérieur portant retrait de points d'un permis de conduire sont dépourvues d'objet si la décision par laquelle ce ministre a constaté la perte de validité de ce permis pour solde de points nul est devenue définitive. Il résulte de ce qui est dit au point 5 que la décision référencée " 48 SI " constatant la perte de validité du permis de conduire de M. B... était devenue définitive à la date à laquelle l'intéressé a saisi le tribunal administratif. Par suite, les conclusions de cette demande tendant à l'annulation des décisions référencées " 48 " retirant un total de seize points du capital de points du permis de conduire de l'intéressé à la suite des infractions qu'il a commises les 19 février 2016, 6 octobre 2017, 14 novembre 2019, 23 juin, 15 et 30 juillet, 17 et 19 octobre 2021, 17 mai, 19 juin, 6 juillet, 6 août, 28 août et 18 septembre 2022 étaient, dès leur introduction, dépourvues d'objet et, par suite irrecevables. Elles doivent dès lors être rejetées, ainsi que les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur de rétablir les points retirés.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par M. B... soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 29 avril 2024 sont annulés.

Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à M. A... B....

Délibéré à l'issue de la séance du 20 mars 2025 où siégeaient : M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre, présidant ; Mme Laurence Helmlinger, conseillère d'Etat et M. Christophe Barthélemy, conseiller d'Etat en service extraordinaire-rapporteur.

Rendu le 17 avril 2025.

Le président :

Signé : M. Jean-Philippe Mochon

Le rapporteur :

Signé : M. Christophe Barthélemy

Le secrétaire :

Signé : M. Bernard Longieras


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 495566
Date de la décision : 17/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 17 avr. 2025, n° 495566
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Christophe Barthélemy
Rapporteur public ?: M. Florian Roussel

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:495566.20250417
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award